France, portrait social Édition 2023
Cet ouvrage dresse un panorama des inégalités sociales dans plusieurs domaines. La satisfaction dans la vie et le bien-être, l’état de santé des jeunes et leur consommation de substances psychoactives, la proximité sociale des personnes en couple, les inégalités de niveau de vie et de patrimoine, les inégalités d’orientation à la fin du collège et les inégalités en matière de santé, en France et en Europe sont ainsi abordés en mobilisant les nomenclatures socioéconomiques ou socioprofessionnelles, dont la nouvelle PCS Ménage ou encore les classes d’emploi.
Par ailleurs, deux dossiers analysent le niveau de vie des ménages en 2022, année marquée par une forte inflation.
Les inégalités sociales en matière de santé sont un peu plus marquées en France qu’en Europe
Théodore Bérut (Drees), Vianney Costemalle (Drees), Jean‑Baptiste Hazo (Drees), Lisa Troy (Drees), Annick Vilain (Drees)
L’état de santé des Européens en emploi varie selon leur catégorie socioéconomique. En France, à structure par âge et sexe comparable, les salariés les moins qualifiés et les ouvriers qualifiés sont en moins bonne santé que le reste de la population : ils sont plus nombreux à déclarer un état de santé dégradé et sont plus fréquemment concernés par des syndromes dépressifs, par un handicap, par le surpoids ou par l’obésité. Ils fument également davantage que les autres personnes en emploi plus qualifiées. Ce constat d’inégalités sociales en matière de santé au sein de la population active n’est pas spécifique à la France ; néanmoins, les écarts entre catégories socioéconomiques y sont souvent plus larges que dans les autres pays européens.
Ces inégalités sociales en matière de santé sont de fait parfois plus marquées en Europe du Nord et de l’Ouest qu'en Europe du Sud et de l'Est. C'est notamment le cas des syndromes dépressifs, pour lesquels les ouvriers et les salariés peu qualifiés sont beaucoup plus affectés que les cadres et professions intellectuelles. Dans tous les pays d’Europe considérés, le tabagisme décroît avec la qualification de l’emploi occupé. Les pays d’Europe du Nord présentent la proportion de fumeurs quotidiens la plus faible. Par ailleurs, dans presque tous les pays européens, les cadres dirigeants et les personnes exerçant une profession intellectuelle et scientifique déclarent plus fréquemment consommer de l’alcool chaque semaine que les autres catégories socioéconomiques.
Insee Références
Paru le :23/11/2023
- L’état de santé des Européens dépend en partie de leur catégorie socioéconomique
- En France, une moins bonne santé et davantage de syndromes dépressifs parmi les professions les moins qualifiées
- Plus de fumeurs et moins de consommateurs d’alcool parmi les moins qualifiés
- Le surpoids et l’obésité affectent tout particulièrement les catégories les plus défavorisées
- Davantage d’inégalités sociales de santé en Europe du Nord et de l’Ouest
- Les ouvriers qualifiés et les salariés peu qualifiés d’Europe du Nord et de l’Ouest ont les taux les plus élevés de syndromes dépressifs
- Les pays d’Europe du Nord ont les taux de tabagisme les plus faibles
- En moyenne en Europe, le tabagisme décroit avec la qualification de l’emploi occupé
- Une consommation d’alcool plus élevée parmi les cadres dirigeants et les professions intellectuelles et scientifiques, sauf en Europe de l’Est
L’état de santé des Européens dépend en partie de leur catégorie socioéconomique
L’enquête européenne de santé (EHIS) permet d’apprécier l’état de santé des Européens et de mesurer l’ampleur des inégalités sociales de santé au sein de chaque pays et de comparer cette ampleur entre pays européens. Cette étude se focalise sur les inégalités de santé au sein de la population en emploi, en fonction des catégories socioéconomiques au sens de la nomenclature ESeG (source), et en neutralisant systématiquement l’effet imputable aux seules différences d’âge ou de sexe entre ces groupes (méthode). La nomenclature stratifie la population en emploi en sept catégories, qui peuvent être regroupées en trois groupes socioéconomiques partiellement ordonnés, des salariés peu qualifiés et ouvriers qualifiés, aux cadres dirigeants et personnes exerçant une profession intellectuelle et scientifique, en passant par les employés qualifiés, les petits entrepreneurs et les salariés exerçant une profession intermédiaire.
En France, une moins bonne santé et davantage de syndromes dépressifs parmi les professions les moins qualifiées
En France métropolitaine, les principaux indicateurs de santé des personnes en emploi sont marqués par un gradient social : ils tendent à s’améliorer à mesure que le niveau de qualification des personnes s’élève.
Parmi les personnes en emploi, 3,5 % se perçoivent en mauvais ou très mauvais état de santé (figure 1). En neutralisant ce qui est imputable à la structure par âge et sexe de chaque catégorie socioéconomique, l’état de santé ressenti continue de différer fortement selon ces catégories : les employés qualifiés et les personnes exerçant une profession intellectuelle et scientifique se déclarent le moins souvent en mauvaise santé (respectivement 2,2 % et 1,9 %). Au contraire, les salariés peu qualifiés sont ceux qui se déclarent le plus fréquemment en mauvaise santé (5,5 %).
Par ailleurs, 4,2 % des personnes en emploi présentent un handicap selon l’indicateur « GALI » de fortes limitations d’activités (méthode). Cette part varie de 2,4 % parmi les professions intellectuelles et scientifiques, à 7,3 % parmi les ouvriers qualifiés. Elle est aussi plus élevée pour les salariés peu qualifiés (5,2 %) qu’en moyenne pour l’ensemble des personnes en emploi.
Enfin, 7,9 % de la population en emploi fait état d’un syndrome dépressif, qui est majeur pour 2,4 % d’entre elles. Là aussi, les inégalités entre catégories socioéconomiques sont fortes : 11,4 % des salariés peu qualifiés souffrent d’un syndrome dépressif (majeur dans 3,8 % des cas), contre 5,8 % des personnes exerçant une profession intellectuelle et scientifique.
tableauFigure 1 - Indicateurs généraux sur la santé perçue, selon la catégorie socioéconomique en France en 2019
Catégories socioéconomiques | Handicap au sens du GALI | Santé perçue mauvaise ou très mauvaise | Syndrome dépressif |
Dont syndrome dépressif majeur |
---|---|---|---|---|
Salariés peu qualifiés | 5,2 | 5,5 | 11,4 | 3,8 |
Ouvriers qualifiés | 7,3 | 2,8 | 9,1 | 3,2 |
Employés qualifiés | 3,8 | 2,2 | 7,8 | 2,6 |
Petits entrepreneurs | 3,8 | 3,2 | 7,1 | 2,0 |
Salariés exerçant une profession intermédiaire | 3,4 | 3,2 | 6,4 | 2,1 |
Cadres dirigeants | 3,0 | 3,0 | 6,1 | 2,4 |
Personnes exerçant une PIS1 | 2,4 | 1,9 | 5,8 | 1,6 |
Ensemble | 4,2 | 3,5 | 7,9 | 2,4 |
- 1. Profession intellectuelle et scientifique.
- Lecture : En France, à structure d’âge et de sexe comparable, 11,4 % des salariés peu qualifiés souffrent de syndrome dépressif, dont 3,8 % de syndrome dépressif majeur ; 5,2 % présentent un handicap au sens du GALI et 5,5 % déclarent un mauvais ou très mauvais état de santé.
- Champ : France métropolitaine, personnes en emploi âgées de 15 ans ou plus, taux standardisés par sexe et âge (avec la structure moyenne de la population en emploi en France métropolitaine).
- Source : Eurostat, EHIS 2019.
graphiqueFigure 1 - Indicateurs généraux sur la santé perçue, selon la catégorie socioéconomique en France en 2019
Plus de fumeurs et moins de consommateurs d’alcool parmi les moins qualifiés
La consommation quotidienne de tabac, premier facteur de mortalité évitable en France, est élevée : 24,2 % des personnes en emploi déclarent fumer du tabac (hors cigarette électronique) tous les jours en 2019 (figure 2). À structure par âge et sexe comparable, les ouvriers qualifiés sont 35,0 % à fumer du tabac tous les jours, contre 15,0 % des personnes exerçant une profession intellectuelle et scientifique. En outre, 5,5 % des personnes en emploi fument au moins 20 cigarettes par jour : la part de grands fumeurs est élevée parmi les ouvriers qualifiés (7,7 %), mais encore davantage parmi les petits entrepreneurs (8,6 %).
tableauFigure 2 - Consommation de tabac selon la catégorie socioéconomique en France en 2019
Catégories socioéconomiques | Fumeurs quotidiens | |||
---|---|---|---|---|
Femmes | Hommes | Ensemble des fumeurs | Dont grands fumeurs | |
Ouvriers qualifiés | 34,6 | 35,3 | 35,0 | 7,7 |
Salariés peu qualifiés | 26,1 | 30,0 | 28,1 | 8,2 |
Petits entrepreneurs | 25,3 | 22,9 | 24,1 | 8,6 |
Employés qualifiés | 21,5 | 25,9 | 23,7 | 3,0 |
Salariés exerçant une profession intermédiaire | 18,5 | 25,3 | 21,9 | 3,9 |
Cadres dirigeants | 23,3 | 19,7 | 21,5 | 3,9 |
Personnes exerçant une PIS1 | 12,6 | 17,5 | 15,0 | 2,1 |
Ensemble | 21,5 | 26,7 | 24,2 | 5,5 |
- 1. Profession intellectuelle et scientifique.
- Note : Un grand fumeur est un consommateur quotidien de 20 cigarettes ou plus par jour.
- Lecture : En France, à structure d’âge et de sexe comparable, 28,1 % des salariés peu qualifiés consomment du tabac quotidiennement, dont 8,2 % à raison de vingt cigarettes ou plus par jour.
- Champ : France métropolitaine, personnes en emploi âgées de 15 ans ou plus, taux standardisés par sexe et âge (avec la structure moyenne de la population en emploi en France métropolitaine).
- Source : Eurostat, EHIS 2019.
graphiqueFigure 2 - Consommation de tabac selon la catégorie socioéconomique en France en 2019
Parmi les personnes en emploi, 49,1 % déclarent boire de l’alcool au moins une fois par semaine, et 7,0 % quotidiennement (figure 3). Cette part est plus élevée parmi les personnes les plus qualifiées : à structure par âge et sexe comparable, 63,8 % des cadres dirigeants et 56,1 % des personnes exerçant une profession intellectuelle et scientifique consomment de l’alcool chaque semaine, contre 39,4 % des salariés peu qualifiés. Les cadres dirigeants sont aussi les plus concernés par les alcoolisations ponctuelles importantes (API) survenant au moins une fois par mois. Cela concerne 30,4 % d’entre eux, contre 23,5 % pour les salariés peu qualifiés. Toutefois, les API survenant au moins une fois par semaine, qui sont moins fréquentes, sont plus ou moins répandues dans toutes les catégories : elles concernent 6,1 % des ouvriers qualifiés et 6,0 % des petits entrepreneurs, contre 4,8 % des salariés peu qualifiés et 3,1 % des cadres dirigeants.
tableauFigure 3 - Consommation d’alcool selon la catégorie socioéconomique en France en 2019
Catégories socioéconomiques | API2 hebdomadaire | API2 mensuelle | Consommation d'alcool hebdomadaire | Dont consommation d'alcool quotidienne |
---|---|---|---|---|
Cadres dirigeants | 3,1 | 30,4 | 63,8 | 6,6 |
Personnes exerçant une PIS1 | 3,5 | 25,0 | 56,1 | 5,8 |
Salariés exerçant une profession intermédiaire | 5,3 | 25,6 | 51,1 | 6,4 |
Petits entrepreneurs | 6,0 | 27,7 | 47,2 | 9,9 |
Employés qualifiés | 4,5 | 25,6 | 46,5 | 5,9 |
Ouvriers qualifiés | 6,1 | 27,7 | 45,7 | 7,6 |
Salariés peu qualifiés | 4,8 | 23,5 | 39,4 | 6,8 |
Ensemble | 4,9 | 26,1 | 49,1 | 7,0 |
- 1. Profession intellectuelle et scientifique.
- 2. Alcoolisation Ponctuelle Importante (au moins 6 verres standard en une occasion).
- Lecture : En France, à structure d’âge et de sexe comparable, 39,4 % des salariés peu qualifiés consomment de l’alcool chaque semaine, dont 6,8 % de manière quotidienne.
- Champ : France métropolitaine, personnes en emploi âgées de 15 ans ou plus, taux standardisés par sexe et âge (avec la structure moyenne de la population en emploi en France métropolitaine).
- Source : Eurostat, EHIS 2019.
graphiqueFigure 3 - Consommation d’alcool selon la catégorie socioéconomique en France en 2019
Le surpoids et l’obésité affectent tout particulièrement les catégories les plus défavorisées
En France, 31,6 % des personnes en emploi sont en surpoids (indice de masse corporelle compris entre 25 et 30) et 13,7 % en situation d’obésité (indice supérieur ou égal à 30) (figure 4). Dans chaque catégorie socioéconomique, la part des personnes en surpoids dépasse 30 %, sauf parmi les professions intellectuelles et scientifiques. Surpoids et obésité concernent respectivement 25,1 % et 8,5 % de ces dernières, contre respectivement 31,5 % et 15,4 % des ouvriers qualifiés. Les cadres dirigeants sont moins affectés par l’obésité (11,9 %) que les ouvriers qualifiés, mais ils sont en revanche aussi souvent qu’eux en surpoids (30,8 %).
tableauFigure 4 - Prévalence de l'obésité et du surpoids, selon la catégorie socioéconomique en France en 2019
Catégories socioéconomiques | Surpoids | Obésité | Consommation quotidienne de soda | Consommation de légumes ou salade moins d'une fois par semaine | Aucun trajet de 10 minutes ou plus en vélo ou à pied |
---|---|---|---|---|---|
Salariés peu qualifiés | 32,2 | 15,8 | 15,2 | 3,4 | 19,0 |
Ouvriers qualifiés | 31,5 | 15,4 | 16,9 | 4,6 | 26,4 |
Employés qualifiés | 30,2 | 15,7 | 9,2 | 3,2 | 20,0 |
Petits entrepreneurs | 30,9 | 13,6 | 8,2 | 3,3 | 21,9 |
Salariés exerçant une profession intermédiaire | 31,7 | 12,6 | 9,9 | 2,0 | 17,9 |
Cadres dirigeants | 30,8 | 11,9 | 8,7 | 1,6 | 14,5 |
Personnes exerçant une PIS1 | 25,1 | 8,5 | 4,1 | 1,1 | 11,4 |
Ensemble | 31,6 | 13,7 | 10,6 | 2,4 | 18,4 |
- 1.Profession intellectuelle et scientifique.
- Lecture : En France, à structure d’âge et de sexe comparable, 32,2 % des salariés peu qualifiés souffrent de surpoids et 15,8 % d’obésité. 3,4 % d’entre eux ne mangent aucun légume dans la semaine, 15,2 % boivent du soda tous les jours et 19,0 % ne réalisent aucun trajet à vélo ou à pied au cours d'une semaine habituelle.
- Champ : France métropolitaine, personnes en emploi âgées de 15 ans ou plus, taux standardisés par sexe et âge (avec la structure moyenne de la population en emploi en France métropolitaine).
- Source : Eurostat, EHIS 2019.
graphiqueFigure 4 - Prévalence de l'obésité et du surpoids, selon la catégorie socioéconomique en France en 2019
L’excès de poids est de plus en plus fréquent en France et dans certains pays européens, tout particulièrement dans les catégories socioéconomiques les plus défavorisées [Ouvrir dans un nouvel ongletHoebel et al., 2019 ; Ouvrir dans un nouvel ongletFontbonne et al., 2023]. Ces inégalités sociales face au surpoids et à l’obésité ont plusieurs causes : les personnes les moins qualifiées consomment moins de nourriture peu sucrée ou peu transformée, notamment pour des raisons financières, et elles ont une moindre pratique d’activités physiques. Il existe également des effets de sélection : les personnes obèses ont moins accès aux emplois les mieux rémunérés [Ouvrir dans un nouvel ongletde Saint Pol, 2013 ; Ouvrir dans un nouvel ongletHojatt, Hojatt, 2021]. En France, 16,9 % des ouvriers qualifiés et 15,2 % des salariés peu qualifiés consomment des sodas tous les jours, contre seulement 4,1 % des personnes exerçant une profession intellectuelle et scientifique. Les ouvriers qualifiés consomment également moins souvent des légumes ou de la salade au moins une fois par semaine. De même, la pratique d’un exercice physique est inégale : par exemple, au cours de la semaine, 26,4 % des ouvriers qualifiés n’effectuent pas un seul trajet d’au moins 10 minutes à pied ou à vélo, contre 11,4 % des personnes exerçant une profession intellectuelle et scientifique.
Davantage d’inégalités sociales de santé en Europe du Nord et de l’Ouest
Dans l’ensemble des pays européens comme en France, les ouvriers qualifiés et les salariés peu qualifiés déclarent plus souvent un état de santé dégradé que les cadres dirigeants et les personnes exerçant une profession intellectuelle et scientifique (3,2 % contre 1,4 %) (figure 5). Néanmoins, ces inégalités sociales varient nettement d’un pays à l’autre. À structure par âge et sexe comparable entre pays et catégories socioprofessionnelles (méthode), la part de personnes se déclarant en mauvaise santé est voisine en Europe de l’Est et en Europe de l’Ouest (respectivement 2,3 % et 2,7 %), mais l’écart entre les deux groupes socioéconomiques extrêmes est faible en Europe de l’Est (1,3 point), tandis qu’il atteint 2,5 points en Europe de l’Ouest. Pour la France, cet écart s’établit à 3,1 points, parmi les plus élevés d’Europe.
tableauFigure 5 - Personnes déclarant un mauvais état de santé perçu dans la population en Europe en 2019, par groupe socioéconomique
Pays | Mauvais état de santé perçu | |||
---|---|---|---|---|
Ouvriers qualifiés et salariés peu qualifiés | Employés qualifiés, petits entrepreneurs et salariés exerçant une profession intermédiaire | Cadres dirigeants et personnes exerçant une PIS1 | Ensemble des personnes en emploi | |
Estonie | 6,7 | 5,5 | 2,6 | 4,7 |
Portugal | 4,7 | 3,8 | 1,8 | 3,6 |
Suède | 5,3 | 3,4 | 2,0 | 3,5 |
France | 5,0 | 3,0 | 1,9 | 3,5 |
Hongrie | 5,1 | 2,5 | 1,5 | 3,5 |
Lettonie | 4,3 | 3,9 | 2,8 | 3,4 |
Lituanie | 4,9 | 3,0 | 2,0 | 3,2 |
Slovaquie | 3,9 | 3,1 | 1,0 | 3,1 |
Luxembourg | 6,8 | 3,3 | 1,5 | 3,0 |
Norvège | 3,6 | 3,4 | 1,5 | 2,7 |
Serbie | 3,8 | 1,8 | 1,2 | 2,6 |
Espagne | 3,5 | 2,5 | 1,3 | 2,6 |
Slovénie | 3,6 | 2,2 | 1,6 | 2,6 |
Pologne | 2,4 | 2,5 | 1,5 | 2,5 |
Islande | 2,9 | 4,0 | 0,8 | 2,3 |
Tchéquie | 3,1 | 2,0 | 1,0 | 2,2 |
Autriche | 2,8 | 1,8 | 0,9 | 2,0 |
Croatie | 3,1 | 1,2 | 2,1 | 2,0 |
Italie | 2,5 | 2,0 | 1,3 | 1,9 |
Pays-Bas | 2,8 | 2,1 | 1,0 | 1,8 |
Finlande | 2,6 | 1,1 | 2,0 | 1,8 |
Danemark | 2,7 | 2,4 | 1,3 | 1,8 |
Bulgarie | 1,6 | 1,3 | 1,4 | 1,5 |
Belgique | 1,5 | 1,3 | 1,4 | 1,4 |
Grèce | 1,5 | 1,0 | 0,9 | 1,0 |
Irlande | 0,4 | 1,1 | 0,7 | 0,8 |
Chypre | 0,5 | 0,8 | 0,7 | 0,7 |
Malte | 0,6 | 0,4 | 0,6 | 0,6 |
Roumanie | 0,4 | 0,7 | 0,3 | 0,5 |
Europe de l'Ouest | 4,0 | 2,5 | 1,5 | 2,7 |
Europe du Nord | 3,9 | 2,8 | 1,6 | 2,6 |
Europe du Sud | 3,1 | 2,2 | 1,3 | 2,3 |
Europe de l'Est | 2,6 | 2,1 | 1,3 | 2,3 |
Ensemble | 3,2 | 2,3 | 1,4 | 2,4 |
- 1. Profession intellectuelle et scientifique.
- Note : Pour les statistiques par groupe socioéconomique, la standardisation s'effectue avec la structure moyenne de la population en emploi de chaque zone géographique concernée (pays ou région d'Europe) ; pour les statistiques « Ensemble des personnes en emploi », la standardisation est faite sur la structure moyenne de la population européenne en emploi. Les pays présentés dans ce graphique ont été sélectionnés pour leurs situations particulièrement contrastées.
- Lecture : En France, à structure d’âge et de sexe comparable, 5,0 % du groupe des ouvriers qualifiés et des salariés peu qualifiés déclarent souffrir d'un mauvais état de santé, contre 1,9 % du groupe des cadres dirigeants et des personnes exerçant une profession intellectuelle et scientifique.
- Champ : Union européenne, personnes en emploi âgées de 15 ans ou plus.
- Source : Eurostat, EHIS 2019.
graphiqueFigure 5 - Personnes déclarant un mauvais état de santé perçu dans la population en Europe en 2019, par groupe socioéconomique
Dans l’ensemble des pays européens, la proportion de personnes considérées comme porteuses d’un handicap s’établit en‑dessous de 5 % (de 0,3 % en Roumanie à 4,9 % en Estonie). Comme pour l’état de santé, les ouvriers qualifiés et les salariés peu qualifiés déclarent plus fréquemment un handicap que les cadres dirigeants et les personnes exerçant une profession intellectuelle et scientifique : l’écart est particulièrement élevé dans les pays d’Europe de l’Ouest (3,0 points) et d’Europe du Nord (1,7 point). Il est inférieur à 1,0 point dans les pays d’Europe du Sud et de l’Est. Ces différences d’inégalités entre les grandes zones géographiques sont partiellement dues à la plus faible proportion de personnes déclarant un handicap parmi l’ensemble des personnes en emploi en Europe du Sud par rapport à l’Europe du Nord ou de l’Ouest.
Les ouvriers qualifiés et les salariés peu qualifiés d’Europe du Nord et de l’Ouest ont les taux les plus élevés de syndromes dépressifs
Les écarts de prévalence des syndromes dépressifs entre les deux extrémités de l’échelle sociale sont particulièrement élevés au Luxembourg (12,1 % pour le groupe le moins qualifié, contre 4,3 % pour le plus qualifié), en Suède (11,4 % contre 6,2 %), en France (10,3 % contre 5,6 %), et globalement dans les pays d’Europe de l’Ouest et du Nord (respectivement 3,6 points et 2,7 points de différence) (figure 6). Ils sont en revanche moindres, voire inexistants, dans les pays d’Europe du Sud et de l’Est (respectivement 0,3 point et ‑0,1 point), où la prévalence des syndromes dépressifs en population générale et au sein de la population en emploi est plus faible en moyenne que dans les pays d’Europe de l’Ouest et du Nord [Ouvrir dans un nouvel ongletPisarik et al., 2017 ; Ouvrir dans un nouvel ongletArias‑de la Torre et al., 2021]. Ces différences entre pays s’expliquent principalement par des facteurs culturels et sociétaux qui jouent sur les déterminants individuels de la dépression (solitude, structure familiale, religion) et sur la verbalisation autour de la santé mentale, ce qui modifie la façon de répondre aux questionnaires [Ouvrir dans un nouvel ongletRai et al., 2013, Ouvrir dans un nouvel ongletLim et al. 2018].
tableauFigure 6 - Prévalence des syndromes dépressifs dans la population en Europe en 2019, par groupe socioéconomique
Pays | Syndromes dépressifs | ||||
---|---|---|---|---|---|
Ouvriers qualifiés et salariés peu qualifiés | Employés qualifiés, petits entrepreneurs et salariés exerçant une profession intermédiaire | Cadres dirigeants et personnes exerçant une PIS1 | Ensemble des personnes avec syndromes dépressifs | Dont syndromes dépressifs majeurs | |
Suède | 11,4 | 8,8 | 6,2 | 8,5 | 4,4 |
France | 10,3 | 7,3 | 5,6 | 7,9 | 2,4 |
Malte | 9,5 | 6,6 | 5,3 | 6,8 | 0,9 |
Luxembourg | 12,1 | 7,2 | 4,3 | 6,4 | 2,8 |
Belgique | 4,9 | 5,2 | 5,5 | 5,3 | 2,1 |
Pays-Bas | 7,4 | 4,4 | 4,9 | 5,2 | 1,7 |
Islande | 6,0 | 7,5 | 3,5 | 5,1 | 1,9 |
Estonie | 6,7 | 4,4 | 4,4 | 5,0 | 2,1 |
Danemark | 6,6 | 4,4 | 3,7 | 4,9 | 2,1 |
Portugal | 5,3 | 4,1 | 4,2 | 4,6 | 1,7 |
Slovénie | 4,8 | 3,9 | 3,7 | 4,2 | 2,0 |
Norvège | 4,5 | 4,0 | 2,9 | 3,7 | 1,0 |
Autriche | 4,3 | 3,6 | 2,4 | 3,5 | 1,1 |
Hongrie | 4,1 | 3,1 | 2,9 | 3,5 | 1,0 |
Finlande | 3,8 | 2,7 | 3,7 | 3,4 | 1,3 |
Lettonie | 3,9 | 3,7 | 2,6 | 3,3 | 1,1 |
Irlande | 3,0 | 3,3 | 2,5 | 2,8 | 1,4 |
Lituanie | 3,2 | 3,6 | 2,5 | 2,7 | 1,1 |
Croatie | 3,1 | 2,7 | 3,3 | 2,7 | 1,6 |
Italie | 2,5 | 2,5 | 2,0 | 2,4 | 0,9 |
Tchéquie | 2,3 | 2,4 | 1,4 | 2,2 | 0,4 |
Pologne | 1,3 | 1,5 | 2,8 | 1,9 | 0,6 |
Bulgarie | 2,0 | 1,7 | 1,0 | 1,6 | 0,5 |
Slovaquie | 1,9 | 1,1 | 0,4 | 1,3 | 0,3 |
Roumanie | 1,1 | 1,3 | 0,7 | 1,1 | 0,2 |
Grèce | 1,1 | 0,7 | 0,7 | 0,7 | 0,2 |
Serbie | 1,0 | 0,6 | 0,3 | 0,7 | 0,2 |
Chypre | 0,7 | 0,8 | 0,8 | 0,7 | 0,3 |
Europe de l'Ouest | 8,6 | 6,1 | 5,0 | 6,6 | 2,1 |
Europe du Nord | 7,2 | 5,6 | 4,5 | 5,7 | 2,6 |
Europe de l'Est | 1,9 | 1,9 | 2,0 | 2,0 | 0,6 |
Europe du Sud | 1,7 | 1,6 | 1,4 | 1,5 | 0,6 |
Ensemble | 3,9 | 3,4 | 3,1 | 3,5 | 1,2 |
- 1. Profession intellectuelle et scientifique.
- Note : Pour les statistiques par groupe socioéconomique, la standardisation s'effectue avec la structure moyenne de la population en emploi de chaque zone géographique concernée (pays ou région d'Europe) ; pour les statistiques « Ensemble des personnes en emploi », la standardisation est faite sur la structure moyenne de la population européenne en emploi. Les pays présentés dans ce graphique ont été sélectionnés pour leurs situations particulièrement contrastées.
- Lecture : En France, à structure d’âge et de sexe comparable, 7,9 % de la population est concernée par un syndrome dépressif, dont 2,4 % par un syndrome majeur. Ces taux varient de 10,3 % pour le groupe des ouvriers qualifiés et des salariés peu qualifiés, à 5,6 % pour le groupe des cadres dirigeants et des personnes exerçant une PIS.
- Champ : Union européenne, personnes en emploi âgées de 15 ans ou plus.
- Source : Eurostat, EHIS 2019.
graphiqueFigure 6 - Prévalence des syndromes dépressifs dans la population en Europe en 2019, par groupe socioéconomique
Ce constat par grande zone géographique masque toutefois des disparités nationales importantes : par exemple, en Estonie, l’écart entre les plus qualifiés et les moins qualifiés s’établit à plus de 2 points en défaveur des moins qualifiés, mais les écarts sont à l’inverse en défaveur des plus qualifiés en Belgique et en Pologne (respectivement ‑0,6 point et ‑1,5 point), ainsi qu’à Chypre et en Croatie (respectivement ‑0,1 et ‑0,2 point).
Parmi les ouvriers et les salariés peu qualifiés, le stress économique, un manque d’autonomie, une plus faible reconnaissance au travail ainsi qu’une exposition plus forte à des facteurs de risques (conditions de vie, insécurité) peuvent expliquer leur niveau plus élevé de syndromes dépressifs [Ouvrir dans un nouvel ongletSiegrist, 2008]. Il est donc étonnant de retrouver dans certains pays une inégalité sociale relative à la prévalence des syndromes dépressifs en faveur des catégories socioprofessionnelles les moins qualifiées dans la population en emploi. D’autant que, s’agissant de la population dans son ensemble, en emploi ou non, la littérature scientifique fait état d’importantes inégalités sociales en défaveur des classes sociales les moins qualifiées concernant la dépression dans les pays concernés [Ouvrir dans un nouvel ongletChlapecka et al., 2020 ; Ouvrir dans un nouvel ongletNicholson et al., 2008]. Ces différences entre population générale et population en emploi selon les pays d’Europe pourraient être liées à des différences nationales dans l’accès et le maintien en emploi des personnes présentant un syndrome dépressif.
Les pays d’Europe du Nord ont les taux de tabagisme les plus faibles
La part de fumeurs quotidiens de tabac parmi les personnes en emploi est assez proche dans les pays d’Europe de l’Est (26,0 %), du Sud (23,5 %) et de l’Ouest (21,7 %), et nettement plus faible dans les pays d’Europe du Nord (9,5 %) (figure 7). Les pays européens ont mis en place des politiques comparables pour lutter contre le tabagisme : interdiction de vente aux mineurs, messages sanitaires sur les paquets de cigarettes, interdiction de fumer dans les lieux publics. Cependant, ces stratégies ont été appliquées plus tôt dans les pays d’Europe du Nord, pour certaines dès la fin des années 1990. Le comportement des fumeurs quotidiens diffère également selon les pays. Dans la population en emploi, la part de grands fumeurs (au moins 20 cigarettes par jour) est plus élevée en Europe de l’Est (9,8 %) qu’en Europe de l’Ouest (5,3 %) ou du Nord (1,8 %). En Europe de l’Ouest, la plus grande part de grands fumeurs parmi les personnes en emploi est atteinte en Autriche (10,1 %). La France arrive en deuxième position avec 5,5 % de grands fumeurs malgré l’introduction du paquet neutre, encore peu répandu en Europe, et l’instauration d’un prix moyen élevé du paquet de cigarettes [Ouvrir dans un nouvel ongletSpilka et al., 2021].
tableauFigure 7 - Part des fumeurs quotidiens dans la population en Europe en 2019, par groupe socioéconomique
Pays | Fumeurs quotidiens | ||||
---|---|---|---|---|---|
Ouvriers qualifiés et salariés peu qualifiés | Employés qualifiés, petits entrepreneurs et salariés exerçant une profession intermédiaire | Cadres dirigeants et personnes exerçant une PIS1 | Ensemble des fumeurs quotidiens | Dont grands fumeurs | |
Bulgarie | 47,4 | 35,7 | 29,8 | 40,7 | 19,1 |
Serbie2 | 37,7 | 30,0 | 22,5 | 32,0 | 19,2 |
Grèce | 38,8 | 33,9 | 22,1 | 31,2 | 13,7 |
Hongrie | 42,6 | 23,7 | 13,9 | 29,6 | 8,0 |
Lettonie | 38,8 | 22,1 | 14,4 | 28,8 | 9,7 |
Croatie | 32,5 | 29,3 | 19,8 | 28,4 | 14,9 |
Chypre | 32,4 | 27,6 | 20,0 | 27,7 | 12,5 |
Roumanie | 30,2 | 28,8 | 23,1 | 27,0 | 8,2 |
Autriche | 34,3 | 24,2 | 14,8 | 24,9 | 10,1 |
Slovaquie | 33,6 | 23,8 | 10,7 | 24,5 | 6,7 |
Tchéquie | 35,6 | 19,8 | 9,5 | 24,5 | 6,9 |
Espagne | 30,3 | 23,0 | 13,3 | 24,3 | 6,0 |
France | 30,3 | 23,0 | 16,0 | 24,2 | 5,5 |
Malte | 33,4 | 26,3 | 15,5 | 24,1 | 7,3 |
Lituanie | 32,7 | 20,6 | 11,7 | 23,2 | 6,2 |
Estonie | 33,9 | 17,7 | 12,6 | 22,7 | 6,6 |
Italie | 27,2 | 20,2 | 13,4 | 22,2 | 5,7 |
Pologne | 31,2 | 17,5 | 10,5 | 21,9 | 10,1 |
Slovénie | 29,4 | 19,0 | 10,0 | 20,3 | 6,4 |
Portugal | 22,0 | 18,4 | 15,2 | 19,7 | 6,1 |
Belgique2 | 24,9 | 16,5 | 10,4 | 16,8 | 5,2 |
Pays-Bas | 25,2 | 16,3 | 8,2 | 15,9 | 2,7 |
Irlande | 21,9 | 12,2 | 6,6 | 13,9 | 3,9 |
Finlande | 21,0 | 10,0 | 5,1 | 13,2 | 2,8 |
Luxembourg | 23,2 | 13,7 | 8,8 | 12,8 | 3,6 |
Danemark | 21,0 | 11,3 | 8,2 | 11,7 | 2,7 |
Norvège | 15,7 | 8,1 | 5,0 | 9,0 | 1,6 |
Islande | 12,4 | 8,2 | 4,8 | 8,2 | 2,1 |
Suède | 11,7 | 6,7 | 3,4 | 6,9 | 0,8 |
Europe de l'Est | 34,2 | 22,6 | 14,7 | 26,0 | 9,8 |
Europe du Sud | 28,5 | 22,4 | 14,6 | 23,5 | 6,5 |
Europe de l'Ouest | 29,2 | 21,0 | 13,1 | 21,7 | 5,3 |
Europe du Nord | 16,1 | 8,5 | 5,4 | 9,5 | 1,8 |
Ensemble | 29,9 | 21,1 | 13,1 | 22,7 | 6,9 |
- 1. Profession intellectuelle et scientifique.
- 2. Pays dont le taux de non-réponse est supérieur à 15 %.
- Note : Un grand fumeur est un consommateur quotidien de 20 cigarettes ou plus par jour. Pour les statistiques par groupe socioéconomique, la standardisation s'effectue avec la structure moyenne de la population en emploi de chaque zone géographique concernée (pays ou région d'Europe) ; pour les statistiques « Ensemble des personnes en emploi », la standardisation est faite sur la structure moyenne de la population européenne en emploi. Les pays présentés dans ce graphique ont été sélectionnés pour leurs situations particulièrement contrastées.
- Lecture : En France, à structure d’âge et de sexe comparable, 24,2 % des personnes en emploi consomment du tabac quotidiennement, et 5,5 % consomment plus de 20 cigarettes par jour.
- Champ : Union européenne, personnes en emploi âgées de 15 ans ou plus.
- Source : Eurostat, EHIS 2019.
graphiqueFigure 7 - Part des fumeurs quotidiens dans la population en Europe en 2019, par groupe socioéconomique
En moyenne en Europe, le tabagisme décroit avec la qualification de l’emploi occupé
Dans tous les pays européens, à structure par âge et sexe comparable, la consommation de tabac est différenciée selon les catégories socioprofessionnelles. Dans le reste de l’Europe comme en France, les ouvriers qualifiés et les salariés peu qualifiés déclarent davantage fumer tous les jours ; à l’inverse, les cadres dirigeants et les personnes exerçant une profession intellectuelle et scientifique sont les moins concernés. Les inégalités sociales sont néanmoins d’ampleur différente selon les pays : en Roumanie, la proportion de fumeurs parmi les ouvriers qualifiés et salariés peu qualifiés est 1,3 fois plus élevée que celle des cadres dirigeants et des personnes exerçant une profession intellectuelle et scientifique ; en Finlande, c’est 4,1 fois plus. En France, où ce même rapport est de 1,9, les inégalités sociales dans le tabagisme sont moins marquées qu’en Europe (2,3). En dehors des pays d’Europe du Nord, les proportions de fumeurs quotidiens sont assez similaires entre les pays : parmi les cadres dirigeants et les personnes exerçant une profession intellectuelle et scientifique, environ 14 % fument tous les jours, tandis que, parmi les ouvriers qualifiés et les salariés peu qualifiés, ils sont près de 30 %.
Le tabagisme est nettement moins fréquent en Europe du Nord, mais les inégalités sociales y sont très marquées : 16,1 % des ouvriers qualifiés et des salariés peu qualifiés déclarent une consommation journalière de tabac, contre 5,4 % des cadres dirigeants et des personnes exerçant une profession intellectuelle et scientifique (soit un rapport de 1 à 3).
Le tabagisme quotidien des cadres dirigeants et des professions intellectuelles et scientifiques est relativement élevé en France (16,0 %) par rapport au reste de l’Europe, la plaçant en septième position des pays européens pour ce groupe socioéconomique, alors qu’elle est en treizième position tous groupes socioéconomiques confondus. En considérant uniquement les ouvriers qualifiés et les salariés peu qualifiés, la France se situe à la seizième place en Europe (30,3 %). Dans ce groupe socioéconomique, le tabagisme relativement bas peut s’expliquer par la politique des prix appliquée en France, où le prix moyen du paquet de cigarettes est parmi les plus élevés d’Europe.
Une consommation d’alcool plus élevée parmi les cadres dirigeants et les professions intellectuelles et scientifiques, sauf en Europe de l’Est
En moyenne en Europe, à structure par âge et sexe comparable, les cadres dirigeants et les personnes exerçant une profession intellectuelle et scientifique sont ceux qui consomment le plus souvent de l’alcool chaque semaine (47,9 %). C’est le cas dans tous les pays de l’Europe de l’Ouest (60,1 %), du Nord (50,7 %) et du Sud (50,3 %) (figure 8). Aux Pays‑Bas notamment, où 60,4 % de la population en emploi consomme de l’alcool chaque semaine, plus des deux‑tiers des personnes de ce groupe socioéconomique sont concernées. La France se classe au quatrième rang des pays les plus exposés en Europe, ex æquo avec la Tchéquie. Les inégalités sociales face à l’alcool y sont du même ordre qu’en moyenne dans le reste de l’Europe. La proportion de consommateurs hebdomadaires parmi les cadres dirigeants et les personnes exerçant une profession intellectuelle et scientifique y est 1,4 fois plus élevée que celle des ouvriers qualifiés et salariés peu qualifiés, au‑dessus de la moyenne européenne (1,3). L’écart de consommation entre ces deux catégories socioéconomiques est le plus élevé en Norvège (1,8).
tableauFigure 8 - Part de la population consommant de l’alcool chaque semaine en Europe en 2019, par groupe socioéconomique
Pays | Consommateurs hebdomadaires d'alcool | ||||
---|---|---|---|---|---|
Ouvriers qualifiés et salariés peu qualifiés | Employés qualifiés, petits entrepreneurs et salariés exerçant une profession intermédiaire | Cadres dirigeants et personnes exerçant une PIS1 | Ensemble des personnes en emploi | Dont consommateurs quotidiens d'alcool | |
Pays-Bas | 52,7 | 60,1 | 69,1 | 60,4 | 5,4 |
Luxembourg | 41,5 | 57,5 | 59,1 | 56,1 | 7,1 |
Belgique | 44,1 | 55,8 | 65,0 | 55,7 | 8,2 |
Tchéquie | 47,9 | 51,4 | 51,6 | 49,1 | 7,5 |
France | 41,4 | 49,5 | 57,7 | 49,1 | 7,0 |
Portugal | 46,8 | 44,7 | 54,7 | 48,7 | 19,4 |
Danemark | 41,3 | 48,7 | 55,2 | 48,3 | 6,1 |
Irlande | 42,4 | 44,9 | 51,6 | 46,8 | 1,6 |
Autriche | 37,0 | 43,8 | 53,6 | 44,0 | 3,8 |
Suède | 32,2 | 42,7 | 50,2 | 42,7 | 1,0 |
Espagne | 38,0 | 44,0 | 51,5 | 42,3 | 11,4 |
Bulgarie | 43,9 | 42,2 | 36,0 | 41,9 | 12,2 |
Malte | 35,7 | 41,3 | 46,3 | 40,9 | 7,6 |
Norvège | 26,7 | 41,8 | 47,9 | 39,3 | 0,7 |
Grèce | 36,2 | 38,9 | 44,0 | 38,3 | 6,1 |
Slovénie | 26,6 | 35,8 | 42,0 | 33,7 | 4,7 |
Croatie | 25,4 | 30,4 | 29,2 | 29,4 | 6,1 |
Estonie | 25,0 | 29,3 | 31,2 | 29,1 | 1,5 |
Hongrie | 23,2 | 26,8 | 39,4 | 28,7 | 6,1 |
Slovaquie | 30,3 | 29,0 | 24,8 | 28,4 | 3,9 |
Roumanie | 30,3 | 33,6 | 24,3 | 28,3 | 3,4 |
Islande | 20,2 | 25,8 | 29,2 | 25,6 | 0,8 |
Chypre | 22,4 | 25,6 | 25,4 | 24,9 | 4,1 |
Pologne | 22,7 | 23,3 | 26,2 | 24,4 | 1,6 |
Lettonie | 15,2 | 21,6 | 19,8 | 18,7 | 1,4 |
Serbie | 16,0 | 18,8 | 20,8 | 18,1 | 2,2 |
Lituanie | 13,4 | 16,0 | 18,0 | 16,9 | 0,7 |
Europe de l'Ouest | 42,8 | 51,1 | 60,1 | 51,0 | 6,3 |
Europe du Nord | 32,3 | 43,5 | 50,7 | 43,0 | 2,3 |
Europe du Sud | 39,3 | 43,0 | 50,3 | 42,4 | 11,8 |
Europe de l'Est | 28,8 | 31,0 | 30,5 | 29,9 | 4,3 |
Ensemble | 36,0 | 42,6 | 47,9 | 41,5 | 6,7 |
- 1. Profession intellectuelle et scientifique.
- Note : Pour les statistiques par groupe socioéconomique, la standardisation s'effectue avec la structure moyenne de la population en emploi de chaque zone géographique concernée (pays ou région d'Europe) ; pour les statistiques « Ensemble des personnes en emploi », la standardisation est faite sur la structure moyenne de la population européenne en emploi. Les pays présentés dans ce graphique ont été sélectionnés pour leurs situations particulièrement contrastées.
- Lecture : En France, à structure d’âge et de sexe comparable, 49,1 % des personnes en emploi consomment de l’alcool chaque semaine, et 7,0 % en consomment tous les jours.
- Champ : Union européenne, personnes en emploi âgées de 15 ans ou plus.
- Source : Eurostat, EHIS 2019.
graphiqueFigure 8 - Part de la population consommant de l’alcool chaque semaine en Europe en 2019, par groupe socioéconomique
L’Europe de l’Est fait figure d’exception, puisque la consommation d’alcool parmi les groupes socioéconomiques y est plus homogène que dans les autres pays d’Europe. Si, en moyenne, la part de consommateurs hebdomadaires d’alcool est plus élevée dans les catégories intermédiaires (31,0 %) que dans les autres groupes socioéconomiques, les ouvriers qualifiés et les salariés peu qualifiés (28,8 %) ainsi que la catégorie des cadres dirigeants et des personnes exerçant une profession intellectuelle et scientifique (30,5 %) ont des pratiques similaires. Dans certains pays d’Europe de l’Est, l’écart de consommation entre les deux catégories socioéconomiques extrêmes peut néanmoins être élevé, comme en Hongrie (1,7).
Méthode
La nomenclature socioéconomique européenne ESeG
En s’appuyant sur la nomenclature ISCO (International standard classification of occupations), la nomenclature socioéconomique européenne ESeG (European Socio economic Groups) permet de répartir les actifs en sept catégories à partir des caractéristiques de l’emploi exercé, du statut dans l’emploi (travailleur indépendant avec ou sans employés, ou salarié) et de leur niveau d’éducation : salariés peu qualifiés, ouvriers qualifiés, employés qualifiés, petits entrepreneurs, salariés exerçant une profession intermédiaire, cadres dirigeants et personnes exerçant une profession intellectuelle et scientifique [Meron et al., 2016]. Dans le cadre de cette étude, les catégories sont aussi regroupées en trois groupes socioéconomiques : les salariés peu qualifiés et les ouvriers qualifiés, les employés qualifiés, les petits entrepreneurs et les salariés exerçant une profession intermédiaire, et enfin les cadres dirigeants et les personnes exerçant une profession intellectuelle et scientifique. Les militaires sont exclus de l’analyse, car le niveau de détail de la nomenclature ISCO présente dans l’enquête EHIS ne permet pas de les répartir dans la nomenclature ESeG. Les personnes sans emploi et les retraités sont également exclus du champ de l’étude.
Des indicateurs de santé standardisés
L’état de santé d’une population dépend fortement de l’âge des personnes qui la composent et, dans une moindre mesure, de leur sexe. Par ailleurs, la répartition des âges et des sexes au sein des catégories socioéconomiques peut varier substantiellement d’un pays à l’autre : par exemple, le pourcentage de femmes chez les cadres dirigeants varie d’un pays à l’autre.
Afin de comparer les inégalités sociales de santé au sein de chaque pays européen étudié, les résultats présentés dans cette étude, lorsqu’ils concernent une catégorie socioéconomique donnée dans un pays donné, sont standardisés en lui appliquant la structure d’âge et de sexe moyenne de la population en emploi du pays considéré (ou de la zone géographique quand la statistique porte sur cette dernière). La structure d’âge repose sur la répartition selon trois groupes : 15 à 29 ans, 30 à 49 ans et 50 ans ou plus.
Les différences de proportions « toutes catégories socioéconomiques confondues » entre les pays peuvent également être le fait de différences de structures d’âge et de sexe de la population en emploi, propres à chaque pays : par exemple, dans la majorité des pays, les hommes sont surreprésentés dans la population en emploi.
L’état de santé ressenti se mesure à partir de la question « “Comment est votre état de santé en général ?” : très bon, bon, assez bon, mauvais, très mauvais ».
La mesure du handicap
Le Global Activity Limitation Indicator (GALI) permet d’estimer, en une seule question (« Êtes‑vous limité(e), depuis au moins six mois, à cause d’un problème de santé, dans les activités que les gens font habituellement ? »), quatre éléments constitutifs du handicap : sa dimension chronique, un état de santé fonctionnel dégradé, une restriction d’activités, évaluée par rapport à l’environnement social des personnes. Sont considérées comme étant handicapées ou en perte d’autonomie au sens de l’indicateur GALI les personnes répondant « Oui, fortement limité » à cette question [Ouvrir dans un nouvel ongletDauphin, Eideliman, 2021].
La mesure de la santé mentale
L’auto‑questionnaire PHQ‑8 (Patient Health Questionnaire‑8) interroge sur la fréquence à laquelle le répondant a été gêné lors des deux dernières semaines par différents problèmes, renvoyant aux symptômes cliniques de la dépression. Le fait d’avoir présenté, plus de la moitié des jours, au moins deux des huit symptômes mesurés par le PHQ‑8, et qu’au moins un des deux symptômes concernés soit ou bien l’humeur dépressive ou bien la diminution marquée de l’intérêt ou du plaisir, indique que la personne présente un syndrome dépressif. Le syndrome dépressif est considéré comme majeur dans le cas où cinq symptômes ou plus sont concernés, dont l’un des deux symptômes marqueurs [Ouvrir dans un nouvel ongletHazo, Boulch, 2022].
Source
L’enquête européenne de santé EHIS (European Health Interview Survey) permet d’apprécier tous les 6 ans l’état de santé des européens et de mesurer l’ampleur des inégalités sociales de santé. La troisième édition de l’enquête a été menée en 2019 dans les 27 pays de l’Union européenne, ainsi qu’en Norvège, en Islande et en Serbie.
Définitions
Alcoolisation ponctuelle importante (API) : consommation de 6 verres standard ou plus d’alcool en une même occasion.
La corpulence est mesurée par l’indice de masse corporelle (IMC), qui correspond au rapport du poids sur la taille au carré (exprimé en kg/m2). Chez l’adulte, un IMC compris entre 25 et 30 correspond à un surpoids et un IMC supérieur ou égal à 30 à de l’obésité.
Les pays d’Europe dont les données sont disponibles sont répartis en quatre zones géographiques :
- Europe de l’Est : Bulgarie, Croatie, Estonie, Hongrie, Lettonie, Lituanie, Pologne, Roumanie, Serbie, Slovaquie, Slovénie et Tchéquie ;
- Europe du Nord : Danemark, Finlande, Islande, Norvège et Suède ;
- Europe de l’Ouest : Autriche, Belgique, France métropolitaine, Irlande, Luxembourg et Pays‑Bas ;
- Europe du Sud : Chypre, Espagne, Grèce, Italie, Malte et Portugal.
Les données pour l’Allemagne ne sont pas disponibles.
Pour en savoir plus
Arias‑de la Torre J., Vilagut G., Ronaldson A., Serrano‑Blanco A., Martín V., Peters M., et al., “Ouvrir dans un nouvel ongletPrevalence and variability of current depressive disorder in 27 European countries: a population‑based study”, The Lancet Public Health, 6(10), e729‑e738, mai 2021.
Chlapecka A., Kagstrom A., Cermakova P., “Ouvrir dans un nouvel ongletEducational attainment inequalities in depressive symptoms in more than 100,000 individuals in Europe”, European Psychiatry. Volume 63, Issue 1, novembre 2020.
Dauphin L., Eideliman J.‑S., « Ouvrir dans un nouvel ongletÉlargir les sources d’étude quantitative de la population handicapée : Que vaut l’indicateur « GALI » ? », Les dossiers de la DREES n° 74, février 2021.
de Saint Pol T., « Ouvrir dans un nouvel ongletObésité, normes et inégalités sociales », Le journal des psychologies n° 311, octobre 2013.
Fontbonne A., Currie A., Tounian P., Picot M.‑C., Foulatier O., Nedelcu M., Nocca D., “Ouvrir dans un nouvel ongletPrevalence of Overweight and Obesity in France: The 2020 Obepi‑Roche Study by the “Ligue Contre l’Obésité””, J. Clin. Med. 2023, 12‑925, janvier 2023.
Hazo J.‑B., Boulch A., « Ouvrir dans un nouvel ongletSanté mentale : une amélioration chez les jeunes en juillet 2021 par rapport à 2020 mais des inégalités sociales persistantes », Études et Résultats n° 1233, Drees, juin 2022.
Hoebel J., Kuntz B., Kroll L.E., Schienkiewitz A., Finger J.D., Lange C., Lampert T., “Ouvrir dans un nouvel ongletSocioeconomic Inequalities in the Rise of Adult Obesity: A Time‑Trend Analysis of National Examination Data from Germany, 1990‑2011”, 1990‑2011. Obes Facts 12(3), juin 2019.
Hojatt T. A., Hojatt R., “Ouvrir dans un nouvel ongletThe Economics of Obesity : Poverty, Income Inequality, and Health”, Springer International Publishing, 2021.
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Les réponses « mauvais » et « très mauvais » état de santé sont systématiquement agrégées par la suite.
Les réponses « mauvais » et « très mauvais » état de santé sont systématiquement agrégées par la suite.