Insee
Insee Conjoncture Martinique · Juin 2024 · n° 29
Insee Conjoncture MartiniqueBilan économique 2023 - Martinique En 2023, des signes de ralentissement de l’économie martiniquaise après deux années de reprise

En 2023, l’emploi salarié augmente moins vite que les années précédentes et les créations d’entreprises reculent. Toutefois, le chômage diminue, en particulier chez les jeunes et les moins diplômés. Le recours à l’intérim s’intensifie sur un an. Les prix des produits alimentaires augmentent alors que l’inflation ralentit. Le secteur agricole souffre des conditions météorologiques peu favorables diminuant les rendements. Le tourisme confirme sa reprise, en particulier grâce aux croisiéristes et aux touristes de plaisance.

Insee Conjoncture Martinique
No 29
Paru le :Paru le13/06/2024

Ce bilan économique fait partie des 17 bilans économiques régionaux 2023 publiés par l'Insee.

Retrouvez les bilans des autres régions.

Consulter
Sommaire

Agriculture - En Martinique, la filière agricole reste en difficulté en 2023 Bilan économique 2023

Hervé Lefaix (Direction de l’Alimentation, de l’Agriculture et de la Forêt de Martinique)

L’année 2023 est à nouveau marquée par des conditions météorologiques défavorables qui affectent les rendements. La production de bananes recule tandis que la production de cannes retrouve un niveau habituel après une année 2022 difficile. Les productions de fruits et légumes et la production animale diminuent, seule la volaille continue sa progression.

Insee Conjoncture Martinique

No 29

Paru le :13/06/2024

Les calamités agricoles continuent d’affecter les rendements

Les phénomènes météorologiques défavorables se poursuivent (deux calamités agricoles en 2022 puis trois en 2023) et mettent en difficulté les principales filières de production agricole. L’année 2023 est notamment marquée par de fortes pluies localisées dévastatrices (12 et 18 octobre) et des températures hors normes en fin d’année.

Les productions de bananes, de fruits, légumes et tubercules ainsi que les productions animales sont ainsi en retrait par rapport à l’année précédente (figure 1). Les différentes filières, dont les petits producteurs de fruits et légumes en maraîchage, mais également les producteurs de banane manifestent leurs craintes après plusieurs années consécutives de mauvais rendements et de pertes au champ.

Figure 1Évolution des principales productions agricoles entre 2021 et 2023

(en tonnes)
Évolution des principales productions agricoles entre 2021 et 2023 ((en tonnes))
Type de productions 2021 2022 2023 Évolution 2022/2023 (en %)
Production commercialisée de bananes 143 392 151 166 134 690 -10,9
Cannes broyées (en tonne) 209 982 189 241 208 630 10,2
dont sucreries 37 213 28 760 32 792 14,0
Distilleries 172 769 160 481 175 838 9,6
Fruits, Légumes et Tubercules 6 889 7 652 6 547 -14,4
Production animale 3 486 3 929 3 775 -3,9
dont volailles 1 683 1 940 1 977 1,9
dont porcins 1 098 1 269 1 113 -12,3
dont bovins 705 720 685 -4,9
  • Sources : DAAF – CTCS – Abattoir BôKaïl – SAGR – Régie de l’abattoir.

La production de bananes baisse à nouveau

Avec seulement 134 700 tonnes de bananes mises sur le marché en 2023 (131 100 tonnes à l’export et 3 600 tonnes sur le marché local), la production martiniquaise commercialisée est en baisse de plus de 10 % par rapport à 2022 (figure 2). La succession de déficits pluviométriques des dernières années, la tempête Bret en juillet, avec des vents entre 100 km/h et 140 km/h et l’extension de la cercosporiose noire, champignon qui affecte les feuilles et les fruits, tirent les rendements à la baisse. La meilleure valorisation de la banane sur les marchés européens depuis 2 ans (figure 3) ne suffit pas à compenser les baisses de rendements et l’augmentation des coûts de production. Certains planteurs se trouvent en grande difficulté et la filière demande des aides conjoncturelles d’urgence.

Figure 2Évolution de la production de bananes et du prix payé au producteur entre 2021 et 2023

(en tonnes)
Évolution de la production de bananes et du prix payé au producteur entre 2021 et 2023 ((en tonnes))
Production 2021 2022 2023 Évolution 2022/2023 (en %)
Exportations 140 338 147 828 131 085 -11,3
Marché local 3 054 3 338 3 605 8,0
Production commercialisée 143 392 151 166 134 690 -10,9
Prix moyen payé au producteur (en €/Kg) 0,65 0,73 nd nd
Prix moyen local (en €/Kg) 0,45 0,50 nd nd
  • nd : non disponible.
  • Source : DAAF – Banamart.

Figure 3Évolution mensuelle du prix import de bananes Antillaises catégorie extra

(en euro)
Évolution mensuelle du prix import de bananes Antillaises catégorie extra ((en euro))
Mois 2021 2022 2023
janvier 0,74 0,77 0,94
février 0,75 0,86 0,97
mars 0,80 0,88 0,97
avril 0,81 0,89 0,97
mai 0,78 0,85 0,88
juin 0,74 0,78 0,86
juillet 0,70 0,75 0,81
août 0,68 0,75 0,81
septembre 0,70 0,85 0,81
octobre 0,73 0,89 0,88
novembre 0,73 0,89 0,91
décembre 0,73 0,89 0,88
  • Source : FAM/RNM.

Figure 3Évolution mensuelle du prix import de bananes Antillaises catégorie extra

  • Source : FAM/RNM.

La production de cannes se place légèrement au-dessus de la moyenne décennale

Après une année 2022 difficile (-10 % par rapport à 2021), le tonnage de canne broyée s’approche des valeurs hautes connues en 2021 avec 208 630 tonnes en 2023, dont 175 838 tonnes destinées aux distilleries et 32 790 tonnes à la sucrerie du Galion (figure 4). Avec un taux de sucre moyen de 12,1 %, quasi stable, la sucrerie a pu produire 1 304 tonnes de sucre. Au total 93 000 hectolitres équivalent alcool pure (hap) ont été produits (soit environ 10 800 hap de rhum de sucrerie et 82 200 hap de rhum agricole). La demande de canne par les distilleries pour la production de rhum agricole AOC est toujours aussi forte, mettant ainsi en difficulté la seule sucrerie de l’île qui a vu ses apports de canne et sa production de sucre baisser de plus de 40 % en 10 ans. Un plan de relance est à l’étude pour sauver la production de sucre martiniquais.

Figure 4Évolution des tonnages de cannes commercialisées et teneur en saccharose sur dix ans

(en tonnes)
Évolution des tonnages de cannes commercialisées et teneur en saccharose sur dix ans ((en tonnes))
Année Sucrerie Distilleries Richesse en saccharose (en %)
2013 42 872 135 050 12,28
2014 39 665 127 218 12,26
2015 46 605 160 902 12,53
2016 49 081 176 870 10,61
2017 39 123 169 126 10,71
2018 31 756 174 640 9,93
2019 23 100 137 513 13,27
2020 38 708 167 946 12,10
2021 37 213 172 769 11,17
2022 28 760 160 481 12,18
2023 32 792 175 838 12,07
  • Source : CTCS.

Figure 4Évolution des tonnages de cannes commercialisées et teneur en saccharose sur dix ans

  • Source : CTCS.

La production de fruits et légumes chute

La production de fruits, légumes et tubercules est en baisse de plus de 14 % par rapport à 2022 (figure 5). Elle s’est retrouvée quasiment à l’arrêt durant les plus fortes chaleurs du second semestre (+0,9°c par rapport aux normales en août) et de nombreux produits ont disparu des étals durant cette période. Cependant, sur le long terme, le volume (hors banane export) commercialisé par les organisations de producteurs varie assez peu. Il oscille ainsi entre 6 500 et 7 500 tonnes selon les années depuis plus de 10 ans. Dans le même temps, les prix de vente progressent moins fortement que les coûts de production, ce qui place la filière en difficulté.

Figure 5Évolution de la commercialisation de fruits, légumes et tubercules

(en tonnes)
Évolution de la commercialisation de fruits, légumes et tubercules ((en tonnes))
Production 2021 2022 2023* Évolution annuelle 2022/2023 (en %)
Fruits 3 765 4 560 3 920 -14,0
Légumes 2 990 2 750 2 350 -14,5
Tubercules 134 342 277 -19,0
Total 6 889 7 652 6 547 -14,4
  • * données provisoires.
  • Source : DAAF.

La production de volaille continue sa progression

Si les productions de viande bovine (-4,9 %) et porcine (-12,3 %) diminuent, les abattages de volailles progressent de 1,9 % par rapport à 2022 avec une production de 1 977 tonnes (figure 6). Sur les 10 dernières années les abattages de bovins baissent de plus de 35 %, les abattages de porcins restent stables et les abattages de volaille progressent légèrement. Sur la même période, les importations de viande sont stables avec en moyenne 4 200 tonnes importées pour le bovin, 4 400 tonnes pour le porcin et 10 000 tonnes pour la volaille (figure 7).

Le suivi de l’évolution des taux de couverture de la consommation locale par la production locale permet d’estimer le niveau d’autonomie alimentaire d’un territoire. Ces données de production et d’importation montrent que sur cette dernière décennie, les taux de couverture sont restés stables pour le porc autour de 20 %, en légère hausse pour la volaille vers 15 % et en baisse pour le bovin (‑4 points) pour arriver autour de 12 %.

Figure 6Évolution des productions animales entre 2021 et 2023

(en tonnes)
Évolution des productions animales entre 2021 et 2023 ((en tonnes))
Production animale 2021 2022 2023 Évolution 2022/2023 (en %)
Volailles 1 683 1 940 1 977 1,9
Porcins 1 098 1 269 1 113 -12,3
Bovins 705 720 685 -4,9
  • Sources : DAAF – Abattoir BôKaïl – SAGR – Régie de l’abattoir.

Figure 6Évolution des productions animales entre 2021 et 2023

  • Sources : DAAF – Abattoir BôKaïl – SAGR – Régie de l’abattoir.

Figure 7Évolution des importations de viande

(en tonnes)
Évolution des importations de viande ((en tonnes))
Type de viande 2021 2022 2023 Évolution 2022/2023 (en %)
Bovins 4 172 4 275 4 057 -5,1
Porcins 4 545 4 528 4 236 -6,4
Volailles 9 345 9 918 10 039 1,2
Total 18 062 18 721 18 332 -2,1
  • Source : Douanes.
Publication rédigée par :Hervé Lefaix (Direction de l’Alimentation, de l’Agriculture et de la Forêt de Martinique)

Pour comprendre

Les données relatives à la canne et à la banane sont recueillies auprès du Service Agriculture et Forêt de la DAAF qui instruit les demandes d’aides relatives à ces filières. Les chiffres concernant la canne sont en général connus dès le mois de juin de l’année en cours, la campagne « banane » se poursuivant jusqu’à la fin de l’année.

Pour les autres fruits et légumes, les données concernant le 2ᵉ semestre sont fournies en général à la mi-février N+1, et peuvent faire l’objet d’ajustements ultérieurs. Pour les productions animales, le SISEP (Information statistique, économique et prospective) recueille les données des différents abattoirs mois par mois.

L’ensemble de ces données sert par ailleurs à l’établissement de la Statistique Agricole Annuelle qui comporte une édition dite « provisoire » au début de l’année N+1 et une édition dite « définitive » au second semestre.

Le bilan économique de l’Insee est rédigé en début d’année, certaines données sont susceptibles d’évoluer par la suite.

Définitions

Taux de couverture d’un territoire : (Production locale - Exportation) / (Production locale + Importation - Exportation).