Sécurité et société Édition 2021

L’Insee et le Service statistique ministériel de la sécurité intérieure (SSMSI) du ministère de l’Intérieur, en collaboration avec le Service statistique ministériel de la Justice (SDSE), présentent dans cette édition inédite de la collection « Insee Références » intitulée Sécurité et société un panorama synthétique des connaissances sur les phénomènes de délinquance et leur traitement par la justice.

Insee Références
Paru le :Paru le09/12/2021
Sécurité et société- Décembre 2021
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Sommaire

Personnes morales auteures d’infractions pénales

Insee Références

Paru le :09/12/2021

En 2019, les parquets ont traité 86 100 affaires dont un auteur présumé est une , soit 4,3 % de l’ensemble des affaires dont au moins un auteur est identifié.

Dans les affaires impliquant des personnes morales, les parquets sont essentiellement saisis par les services de police et de gendarmerie (45 %), une autre administration (29 %) ou directement par la victime ou une autre personne (23 %) (figure 1). Les services de police et de gendarmerie sont à l’origine de la majorité des affaires relatives à la santé publique (composées à 55 % d’infractions en matière de sécurité alimentaire) et des contentieux en matière de circulation routière et de transport (formées à 42 % d’infractions liées à la vitesse et à 36 % d’infractions à la réglementation des professions de transport). En revanche, ils sont moins fréquemment à l’origine des affaires liées à l’environnement et à la législation sur le travail (moins de 40 %) et rarement à l’origine des affaires économiques et financières (19 %), ces dernières étant majoritairement signalées par les tribunaux de commerce.

Figure 1 - Origine des affaires impliquant des personnes morales traitées au parquet selon le type d'infraction, en 2019

en %
Figure 1 - Origine des affaires impliquant des personnes morales traitées au parquet selon le type d'infraction, en 2019 (en %) - Lecture : en 2019, 19 % des affaires traitées par les parquets relatives à des personnes morales mises en cause pour infractions économiques et financières proviennent des services de police ou de gendarmerie.
Police / gendarmerie Justice Autres administrations Autres1 Ensemble
Infractions économiques et financières 19 2 63 16 100
Infractions à la législation du travail 37 1 47 15 100
Atteintes à l'environnement 36 0 48 16 100
Atteintes à la personne 44 1 8 48 100
Atteintes à l'autorité de l'État 45 2 13 41 100
Atteintes aux biens 51 1 2 46 100
Infractions à la circulation et aux transports 64 10 25 2 100
Infractions en matière de santé publique 70 1 17 13 100
Ensemble 45 3 29 23 100
  • 1. Saisines directes du parquet par la victime ou une autre personne.
  • Note : catégories construites à partir de la nomenclature du ministère de la Justice.
  • Lecture : en 2019, 19 % des affaires traitées par les parquets relatives à des personnes morales mises en cause pour infractions économiques et financières proviennent des services de police ou de gendarmerie.
  • Champ : France.
  • Source : ministère de la Justice, SDSE, fichier statistique Cassiopée.

Près de la moitié des auteurs personnes morales ne sont , le parquet estimant, après examen, que l’infraction reprochée est insuffisamment caractérisée ou non avérée (6 fois sur 10). La proportion des personnes morales non poursuivables est inférieure à 30 % pour les infractions économiques et financières et pour les atteintes à l’environnement, mais d’environ 70 % pour les atteintes aux biens (vols et escroqueries, abus de confiance, etc.) et les atteintes à la personne (accidents de travail, mises en danger d’autrui et blessures involontaires, mais aussi atteintes à la vie privée, discriminations et exploitations de personne vulnérable, etc.) (figure 2).

Figure 2 - Traitement des personnes morales par les parquets, en 2019

Figure 2 - Traitement des personnes morales par les parquets, en 2019 - Lecture : en 2019, les parquets ont considéré que 48,7 % des personnes morales mises en cause n'étaient pas poursuivables.
Personnes morales dans les affaires traitées (1+2) Personnes morales non poursuivables (1) (en %) Personnes morales poursuivables (2=3+4) (en %) Taux de réponse pénale (4/2)
(en %)
Classement sans suite pour inopportunité des poursuites (3) Réponse pénale (4)
Infractions à la circulation et aux transports 21 762 54,5 7,1 38,4 84,5
Infractions économiques et financières 18 588 22,3 5,6 72,0 92,7
Atteintes aux biens 18 569 71,6 12,1 16,3 57,4
Atteintes à la personne 7 758 69,5 6,9 23,7 77,5
Atteintes à l'environnement 7 041 27,2 9,8 63,0 86,5
Infractions à la législation du travail 6 320 40,0 10,2 49,8 83,0
Atteintes à l'autorité de l'État 3 698 57,8 7,8 34,4 81,5
Infractions en matière de santé publique 2 371 29,0 4,4 66,6 93,8
Ensemble 86 107 48,7 8,2 43,0 83,9
  • Note : catégories construites à partir de la nomenclature du ministère de la Justice.
  • Lecture : en 2019, les parquets ont considéré que 48,7 % des personnes morales mises en cause n'étaient pas poursuivables.
  • Champ : France, personnes morales traitées par les parquets.
  • Source : ministère de la Justice, SDSE, fichier statistique Cassiopée.

Sur les 44 100 personnes morales , 16 % ont fait l’objet d’un classement pour inopportunité des poursuites en raison de la faiblesse du préjudice causé ou d’une régularisation spontanée par l’auteur.

Lorsque la personne morale fait l’objet d’une (84 % des personnes poursuivables), il s’agit d’une dans 7 cas sur 10. Cette sanction est privilégiée lorsqu’elle permet de réparer le dommage, de mettre fin au trouble causé par l’infraction ou de régulariser la situation au regard de la loi et des règlements. Par ailleurs, dans 28 % des situations, le parquet décide de poursuivre l’affaire vers une juridiction de jugement (tribunal correctionnel pour les affaires délictuelles, tribunal de police pour les affaires contraventionnelles) ou vers le juge d’instruction pour les affaires criminelles ou complexes. La réponse pénale du parquet dépend du contentieux. Les auteurs d’infractions économiques, financières et sociales, d’atteintes à l’environnement ou d’infractions en matière de santé publique font l’objet, dans 9 cas sur 10, d’une mesure alternative aux poursuites. En matière d’atteinte à la personne, 57 % des auteurs sont poursuivis, principalement devant un tribunal correctionnel (figure 3).

Figure 3 - Personnes morales ayant fait l'objet d'une réponse pénale par les parquets, en 2019

Figure 3 - Personnes morales ayant fait l'objet d'une réponse pénale par les parquets, en 2019 - Lecture : en 2019, 27,8 % des personnes morales ayant reçu une réponse pénale ont été poursuivies, dont 54,8 % devant un tribunal correctionnel.
Personnes morales ayant fait l'objet d'une réponse pénale Nature de la réponse pénale (en %) Juridiction de poursuites (pour 100 personnes morales poursuivies)
Mesure alternative réussie Composition pénale réussie Poursuites Tribunal de police Tribunal correctionnel Juge d'instruction
Infractions économiques, financières et à la législation sur le travail 16 537 87,0 3,5 9,5 32,9 54,5 12,6
Infractions à la circulation et aux transports 8 364 33,8 0,4 65,8 50,6 49,4 0,0
Atteintes à l'environnement 4 437 87,4 2,4 10,2 20,0 77,8 2,2
Atteintes aux biens 3 027 67,7 0,5 31,8 0,4 38,4 61,2
Atteintes à la personne 1 836 42,2 1,1 56,8 3,7 67,2 29,1
Infractions en matière de santé publique 1 579 86,4 2,6 11,0 50,3 44,5 5,2
Atteintes à l'autorité de l'État 1 271 51,7 2,7 45,6 3,6 50,0 46,4
Ensemble 37 051 70,0 2,2 27,8 32,5 54,8 12,8
  • Note : catégories construites à partir de la nomenclature du ministère de la Justice.
  • Lecture : en 2019, 27,8 % des personnes morales ayant reçu une réponse pénale ont été poursuivies, dont 54,8 % devant un tribunal correctionnel.
  • Champ : France, personnes morales ayant fait l'objet d'une réponse pénale.
  • Source : ministère de la Justice, SDSE, fichier statistique Cassiopée.

En 2019, les personnes morales représentent moins de 1 % des auteurs des affaires jugées par les tribunaux correctionnels. Sur les 4 200 personnes morales jugées devant le tribunal correctionnel, 14 % ont été relaxées, c’est‑à‑dire déclarées non coupables, soit une part nettement supérieure à celle des personnes physiques (4 %). Dans la mesure où elles ne peuvent pas être emprisonnées, les 3 655 personnes morales jugées coupables ont été, quasi exclusivement, condamnées à une amende (98 %) (figure 4). Alors que le montant médian des amendes prononcées à titre principal est de 2 969 euros, il s’élève à 10 000 euros dans les cas d’une atteinte à la personne humaine, d’une atteinte aux biens ou d’une infraction économique et financière.

Figure 4 - Peines et mesures prononcées par les tribunaux correctionnels à l'encontre des personnes morales, en 2019

Figure 4 - Peines et mesures prononcées par les tribunaux correctionnels à l'encontre des personnes morales, en 2019 - Lecture : en 2019, 98 % des condamnations prononcées, à titre principal, par les tribunaux correctionnels à l'encontre des personnes morales sont des amendes.
Condamnations dont amendes (peine principale)
Effectif Répartition (en %) Part (en %) Montant moyen
(en euros)
Montant médian
(en euros)
Infractions à la réglementation de la circulation et des moyens de transports 1 890 51,7 100 2 451 2 219
Infractions à la législation du travail 631 17,3 98 10 807 4 000
Atteintes à la personne 402 11,0 99 22 445 10 000
Atteintes à l’environnement 262 7,2 87 14 700 5 000
Infractions économiques et financières 245 6,7 97 112 479 10 000
Atteintes à l’autorité de l’État 100 2,7 93 19 163 3 000
Atteintes aux biens 81 2,2 89 23 106 10 000
Infractions en matière de santé publique 44 1,2 98 10 185 5 000
Ensemble 3 655 100,0 98 15 107 2 969
  • Note : catégories construites à partir de la nomenclature du ministère de la Justice.
  • Lecture : en 2019, 98 % des condamnations prononcées, à titre principal, par les tribunaux correctionnels à l'encontre des personnes morales sont des amendes.
  • Champ : France, condamnations prononcées, à titre principal, à l'encontre des personnes morales.
  • Source : ministère de la Justice, SDSE, fichier statistique Cassiopée.

Définitions

En droit français, une personne morale est un groupement doté de la personnalité juridique. Généralement une personne morale se compose d’un groupe de personnes physiques réunies pour accomplir quelque chose en commun. Ce groupe peut aussi réunir des personnes physiques et des personnes morales. Il peut aussi n’être constitué que d’un seul élément. La personnalité juridique donne à la personne morale des droits et des devoirs. Le droit français distingue : les personnes morales de droit public : l’État, les collectivités territoriales, les établissements publics, etc. ; les personnes morales de droit privé : les plus courantes étant les sociétés privées, les sociétés civiles, les groupements d’intérêt économique, les associations. Certaines personnes morales de droit privé sont chargées de la gestion d’un service public.

Une affaire est dite non poursuivable en cas de défaut d’élucidation, d’infraction mal caractérisée, d’absence d’infraction, d’extinction de l’action publique, d’irresponsabilité, d’irrégularité de la procédure ou d’immunité. Aucun élément juridique ne permettant de poursuivre l’affaire, celle‑ci fait l’objet d’un classement sans suite.

Une affaire est considérée poursuivable par le parquet, lorsqu’il n’existe aucun motif de fait ou de droit rendant impossible la poursuite devant une juridiction pénale. Une affaire poursuivable peut donner lieu soit à un classement sans suite pour inopportunité de la poursuite, soit à une réponse pénale : alternative à la poursuite, composition pénale, ou poursuite.

La réponse pénale est définie par la justice comme le fait pour le procureur de la République, dans une affaire poursuivable, soit de mettre en œuvre une alternative aux poursuites ou une composition pénale, soit de poursuivre l’auteur présumé devant une juridiction d’instruction ou de jugement.
Le taux de réponse pénale, calculé par la justice, correspond au rapport entre le nombre d'affaires pour lesquelles le procureur de la république a mis en œuvre une alternative aux poursuites, une composition pénale ou a poursuivi l'auteur présumé sur le nombre d'affaires poursuivables.

Une alternative aux poursuites est une mesure décidée par le procureur de la République à l’égard de l’auteur de l’infraction, susceptible d’assurer la réparation du dommage causé à la victime, de mettre fin au trouble résultant de l’infraction ou de contribuer au reclassement de l’auteur des faits sans engager de poursuites contre lui. Il peut s’agir d’un rappel à la loi, d’un stage par exemple de sensibilisation à la lutte contre l’achat de services sexuels, d’une orientation vers une structure sanitaire, sociale ou professionnelle, d’une interdiction de séjour ou de paraître, de réparer le dommage causé à la victime par exemple en l’indemnisant ou en remettant en l’état un bien dégradé, etc. En cas d’exécution de la mesure (mesure réussie), la procédure est classée sans suite. Elle n’est pas inscrite au casier judiciaire national. En cas de non‑exécution, le procureur de la République met en œuvre une composition pénale ou engage des poursuites.

Pour en savoir plus

« Ouvrir dans un nouvel ongletLe traitement judiciaire des infractions commises par les personnes morales », Infostat Justice n° 154, ministère de la Justice, août 2017.