Insee Conjoncture Réunion ·
Juin 2024 · n° 32Bilan économique 2023 - La Réunion L'activité économique continue de résister en 2023, mais montre des signes d'essoufflement
En 2023 encore, l’économie réunionnaise résiste malgré un contexte géopolitique tendu et une économie nationale au ralenti. Si l’inflation reste élevée (+3,1 %), elle ralentit légèrement et demeure inférieure au niveau national (+4,9 %). L’emploi salarié et les créations d’entreprises continuent d’augmenter mais leur croissance s’infléchit nettement. Ils restent toutefois plus dynamiques qu’au niveau national. Le chômage quant à lui se stabilise. L’activité bancaire ralentit nettement : les encours de crédits aux ménages croissent toujours, mais bien moins qu’en 2022, et l’épargne des ménages réunionnais progresse encore moins vite que l’année précédente. La fréquentation hôtelière recule légèrement en 2023 (-2 %), malgré une clientèle étrangère plus nombreuse et la forte reprise du trafic aérien. Les créations d’emplois dans le secteur de l’hébergement et la restauration sont atones. Pour l’agriculture, le bilan de l’année est mitigé avec une production agricole quasiment stable en valeur (+0,3 %) : la baisse de la valeur de la production végétale est compensée par une production animale en nette hausse. Par ailleurs, la hausse du prix des intrants fait baisser la valeur ajoutée brute agricole de 3,9 % par rapport à 2022.
En outre, les défaillances d’entreprises augmentent. Les importations, en particulier de biens de consommation, baissent (-3,6 % en valeur), de même que les exportations (-6 %). Dans la construction, secteur traditionnellement moteur, l’activité recule : les autorisations de construire et les mises en chantier baissent, mais moins qu’au niveau national. De fait, l’emploi baisse dans le secteur, après les hausses des deux années précédentes.
Ce bilan économique fait partie des 17 bilans économiques régionaux 2023 publiés par l'Insee.
Système bancaire - L’activité bancaire ralentit Bilan économique 2023
Nicolas Gobalraja (Institut d'émission des départements d'outre-mer, agence de La Réunion)
En 2023, l’activité bancaire opérée par l’ensemble des banques (nationales et locales) à La Réunion ralentit nettement. Les crédits aux ménages fléchissent, particulièrement les crédits immobiliers. L’endettement des entreprises augmente modestement. Du côté des actifs financiers, la collecte décélère également. L’épargne des ménages réunionnais progresse encore moins vite que l’année précédente. Le risque bancaire reste contenu.
Les encours de crédits ralentissent sensiblement
À fin décembre 2023, l’encours sain de crédits à l’économie réunionnaise s’établit à 28,7 milliards d’euros, en hausse de 2,2 % sur un an. Le financement bancaire ralentit ainsi sensiblement, après une année 2022 encore dynamique (+3,5 %). Ce ralentissement s’explique principalement par le fléchissement des encours de crédits aux ménages (+2,8 % après +8,5 % en 2022), qui concerne surtout les crédits à l’habitat (+1,9 %) et dans une moindre mesure les crédits à la consommation (+5,7 %). En effet, les hausses de taux d’intérêt appliquées en 2022 et en 2023 dans le sillage de la normalisation de la politique monétaire (+450 points pour les taux directeurs de base de juillet 2022 à septembre 2023) produisent leur plein effet tant sur l’offre que sur la demande de crédits immobiliers. Les transactions immobilières sur le marché de l’ancien baissent ainsi de 15,6 % sur un an à fin décembre 2023.
L’endettement bancaire des entreprises non financières augmente modestement quant à lui en 2023 (+0,9 % sur un an), après avoir stagné en 2022. Cette hausse tient toutefois en partie à la modération de la baisse des encours de crédits d’exploitation (-1,6 % après -9,4 % en 2022), des crédits à court terme utilisés en trésorerie. Celle-ci s’explique par le fait que les prêts garantis par l’État dont le remboursement ne s’est pas réalisé en une fois en 2021 ou 2022 ont été amortis graduellement sur plusieurs années. Les crédits à l’équipement des entreprises baissent de leur côté de 6,7 %, reflétant le renchérissement du financement mais aussi le pessimisme des entreprises au regard de la demande qu’elles anticipent. Toutefois, les crédits immobiliers des entreprises augmentent en 2023 (+7,7 %).
Moindre progression des actifs financiers
À fin décembre 2023, les actifs financiers détenus par les agents économiques réunionnais (principalement les ménages et les entreprises) progressent de 1,4 %, après +1,9 % en 2022 et +4,6 % en 2021.
S’agissant des ménages, l’épargne bancaire des Réunionnais augmente de 2,5 % en 2023, soit une hausse inférieure à celle de l’année précédente (+4,7 % en 2022) et à celle de la période 2015‑2019 (+3,8 % en moyenne par an) (figure 1). Les dépôts à vue diminuent sensiblement (‑3,2 % après +4,2 % en 2022) du fait de la détérioration de la situation financière des ménages, mais également de la réallocation de leur épargne vers des dépôts rémunérés. Ainsi, les placements à long terme se redressent (+1,4 %, après +0,4 %), alors que les placements liquides (dont les livrets d’épargne réglementés) restent dynamiques (+9,3 % après +10,2 % en 2022). S’agissant des entreprises, la collecte ralentit également à 1,5 %, en lien principalement avec la contraction de 10,8 % des dépôts à vue. Par ailleurs, les placements sur comptes à terme sont particulièrement dynamiques : leurs montants ont plus que doublé en 2023 dans une logique de recherche de rendements.
tableauFigure 1 – Évolution des principaux placements des ménages à La Réunion
Mois | Dépôts à vue | Comptes d'épargne à régime spécial | Assurance-vie |
---|---|---|---|
mars-16 | 2 263,5 | 2 794,4 | 2 559,6 |
juin-16 | 2 347,1 | 2 876,7 | 2 554,9 |
sept.-16 | 2 390,2 | 2 811,0 | 2 580,7 |
déc.-16 | 2 475,3 | 2 825,3 | 2 538,5 |
mars-17 | 2 493,3 | 2 846,4 | 2 632,6 |
juin-17 | 2 608,2 | 2 893,0 | 2 667,3 |
sept.-17 | 2 667,3 | 2 904,2 | 2 698,2 |
déc.-17 | 2 785,7 | 2 933,9 | 2 717,5 |
mars-18 | 2 719,1 | 2 977,9 | 2 750,8 |
juin-18 | 2 843,0 | 3 004,1 | 2 781,5 |
sept.-18 | 2 872,9 | 3 010,1 | 2 791,2 |
déc.-18 | 2 974,4 | 3 052,9 | 2 783,2 |
mars-19 | 2 962,2 | 3 112,0 | 2 848,8 |
juin-19 | 3 052,9 | 3 147,4 | 2 914,8 |
sept.-19 | 3 095,9 | 3 167,5 | 2 929,2 |
déc.-19 | 3 157,0 | 3 213,7 | 2 955,7 |
mars-20 | 3 243,5 | 3 280,6 | 2 915,1 |
juin-20 | 3 532,2 | 3 448,0 | 2 944,4 |
sept.-20 | 3 614,7 | 3 520,4 | 2 958,4 |
déc.-20 | 3 677,3 | 3 580,6 | 3 001,5 |
mars-21 | 3 773,9 | 3 657,3 | 3 033,4 |
juin-21 | 3 906,7 | 3 741,0 | 3 082,8 |
sept.-21 | 4 078,7 | 3 781,3 | 3 104,8 |
déc.-21 | 4 033,7 | 3 813,8 | 3 176,2 |
mars-22 | 4 109,3 | 3 959,1 | 3 149,5 |
juin-22 | 4 183,5 | 3 997,1 | 3 116,9 |
sept.-22 | 4 260,4 | 4 063,3 | 3 140,9 |
déc.-22 | 4 202,9 | 4 195,5 | 3 205,0 |
mars-23 | 4 158,4 | 4 239,9 | 3 267,5 |
juin-23 | 4 166,5 | 4 268,5 | 3 299,5 |
sept.-23 | 4 171,9 | 4 295,9 | 3 305,6 |
déc.-23 | 4 070,5 | 4 355,5 | 3 340,8 |
- Source : Iedom, Ruba.
graphiqueFigure 1 – Évolution des principaux placements des ménages à La Réunion
Baisse du provisionnement et des créances douteuses
Les risques bancaires restent maîtrisés en 2023. Les créances douteuses, liées à un risque identifié de non-remboursement de la créance, se maintiennent à des niveaux bas par rapport aux 20 dernières années (3,1 % du total des encours fin 2023 contre 3,3 % en 2022). Le taux de provisionnement, c’est-à-dire le ratio des montants provisionnés sur les montants des crédits douteux (en retards significatifs ou en défaut), est stable quant à lui à 35,8 % des encours après 35,9 % l’année précédente.
Définitions
L’encours sain de crédits correspond à l’encours de crédits n’ayant pas fait l’objet de défauts de remboursement.