Insee Conjoncture GuyaneBilan économique 2017 - Guyane

Le blocage de l’économie guyanaise au mois de mars et d’avril a eu un impact immédiat sur plusieurs indicateurs économiques. L’économie semble cependant s’être rapidement remise en marche et termine l’année 2017 de manière dynamique. Après une période compliquée jusqu’en 2016, le niveau de la commande publique redonne des couleurs aux Bâtiments et Travaux Publics (BTP). Le secteur spatial reste dynamique. La consommation des ménages et l’investissement des entreprises sont bien orientés comme le montrent l’activité bancaire et les ventes d’automobiles. Pour finir, l’emploi salarié et l’intérim sont en hausse en 2017, notamment en fin d’année.

Insee Conjoncture Guyane
No 4
Paru le :Paru le31/05/2018
Jean-Christophe Lambert
Insee Conjoncture Guyane No 4- Mai 2018
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Agriculture - En 2017, la culture d’agrumes poursuit sa croissance Bilan économique 2017

Jean-Christophe Lambert

Malgré une faible structuration, la filière agrumes se développe en Guyane, portée par l’accroissement démographique, la hausse des prix et le développement récent de la grande distribution. La surface agricole utile de culture d’agrumes atteint près de 1 650 ha, dont près de la moitié pour le seul citron vert.Depuis 2013, de nouvelles terres ont été attribuées pour la culture d’agrumes. Les aides publiques participent à leur mise en valeur en soutenant la mécanisation. La majeure partie de la production est écoulée en direct sur les marchés forains soit par les producteurs, soit via des revendeurs et grossistes.

Insee Conjoncture Guyane

No 4

Paru le :31/05/2018

En Guyane, les principaux agrumes cultivés sont les citrons verts, les chadecks, les mandarines, les oranges, les pamplemousses et les tongolos. La production a subi des variations au fil des décennies avec notamment l’arrêt progressif d’une filière d’exportation de citrons verts en 2005. Aujourd’hui l’essentiel de la production agrumière guyanaise se caractérise par une production de proximité visant à satisfaire un marché local en croissance. Parmi l’ensemble des agrumes locaux, le citron vert revêt un caractère très symbolique et constitue un produit emblématique du panier du consommateur guyanais, si bien que la volatilité des prix de ce produit sur les marchés a un fort impact psychologique sur le consommateur.

Le prix des agrumes a augmenté de 70 % en 12 ans

Depuis 2005, le cours des agrumes sur les marchés a augmenté de 70 % (figure 1). Comparativement, la moyenne de progression des prix des autres productions fruitières (+ 37 %) et légumières (+ 33 %) montre une différence très significative d’évolution des prix. L’augmentation la plus forte depuis 2005 a été subie par le citron (+ 103 %), les oranges (+ 85 %), les mandarines (+ 56 %) et les chadecks (+ 37 %). L’augmentation annuelle des prix est due à plusieurs facteurs : la saisonnalité, le vieillissement et l’entretien des vergers et aussi une demande plus forte liée à la croissance démographique.

Par ailleurs, au-delà de ces évolutions de tendance, le cours mensuel du citron vert est soumis à de fortes variations saisonnières. Il varie en fonction de l’offre de production : à un niveau bas d’avril à juin et à un niveau élevé en saison sèche. Les cours moyens mensuels évoluent entre 1 euro et 7 euros.

Des cultures fruitières en expansion

Ces cours élevés interrogent, car, depuis dix ans, les agriculteurs se sont massivement diversifiés en production fruitière, du fait de l’obtention de foncier et de la moindre pénibilité des cultures fruitières. Depuis 2013, les attributions foncières représentent 1 606 ha pour des surfaces entre 5 et 20 ha, correspondant majoritairement à la production fruitière (dont 71 % d’installations). Toutefois, la moitié de ces surfaces plantées récemment n’est pas encore productive laissant présager, à moyen terme, un regain de production.

Cependant, plusieurs facteurs limitent le développement de la filière agrumicole guyanaise : des conditions pédologiques et climatiques défavorables, des maladies et des ravageurs, le manque de technicité et d’encadrement technique des agriculteurs. En effet, la majorité des producteurs d’agrumes développent un itinéraire technique simplifié sur leurs vergers. Cette faible technicité entraîne une productivité réduite. Alors que les rendements du citron vert, estimés en 2012, avaient été établis à 14,6 tonnes/ha, les rendements moyens en pleine production sont de 7,30 tonnes/ha.

750 hectares sont consacrés au citron

En 2017, la surface agricole utile (SAU) guyanaise est de 32 774 ha, dont 5 500 de cultures fruitières. Les surfaces plantées en agrumes représentent 1 645 ha (figure 2), soit 30 % des cultures permanentes et 5 % de la SAU totale. La production principale est celle du citron vert : les plantations dédiées représentent 750 ha, soit 46 % de la SAU Agrumes et 2,3 % de la SAU totale. Par rapport à 2010, cela représente une augmentation de 38 % des surfaces déclarées en vergers dédiés aux agrumes.

La majorité des 264 exploitations d’agrumes se situent dans l’un des quatre principaux bassins de production (figure 3). Les deux plus grands bassins sont Javouhey (38,3 % des exploitations et 43,9 % de la SAU) et Cacao (20,5 % des exploitations et 18,3 % de la SAU). Deux autres bassins sont de moindre taille : Regina (8 % des exploitations et 7,8 % de la SAU) et Iracoubo (9,8 % des exploitations et 18,4 % de la SAU).

Les marchés restent le principal circuit de distribution

Les marchés forains restent le circuit de vente majeur et le marché central de Cayenne le plus important. Ils permettent à l’exploitant d’avoir une trésorerie rapide malgré les invendus (de l’ordre de 30 %). La grande distribution et les grossistes, compensent avec les importations pour faire face aux manques d’approvisionnement. Les volumes destinés à l’industrie agro-alimentaire varient entre 1 400 tonnes et 180 tonnes.

La production locale d’agrumes est sou-mise à la concurrence des importations, souvent illégales, des pays frontaliers (Surinam, Brésil) : elles sont estimées (Cabinet Guyane Consult) à 1 500 tonnes, soit 12,3 % des 12 194 tonnes de l’en-semble des importations déclarées de fruits et légumes en 2016.

Figure 1 Près de 50 % de la SAU fruitière est consacrée à la culture des agrumesSuperficie des cultures fruitières en production en Guyane (ha)

Près de 50 % de la SAU fruitière est consacrée à la culture des agrumes
2000 2007 2010 2012 2014 2016
Fruits tropicaux 687 992 1 292 1 530 1 750 1 765
dont Ananas 150 270 375 500 600 600
dont Bananes 347 538 744 800 870 870
Agrumes 1 080 1 119 1 152 1 425 1 540 1 600
dont Citrons, limes, combavas 460 468 478 650 710 750
dont Clémentines, mandarines 150 190 220 255 290 300
dont Oranges, tangor 415 396 360 400 410 430
dont Pamplemousses 55 65 94 120 130 120
  • Source : DAAF Guyane.

Figure 2 Les cours des citrons et des oranges ont doublé de prix en douze ansIndices des prix moyens annuels des agrumes en Guyane (Base 100 en 2005)

Les cours des citrons et des oranges ont doublé de prix en douze ans
2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017
Chadecks 100,0 99,9 98,8 100,0 102,0 98,5 105,1 109,6 110,2 116,7 118,7 131,8 136,9
Citrons verts 100,0 89,2 100,0 121,7 129,2 162,5 151,1 162,9 162,5 207,7 230,9 216,8 203,5
Mandarines 100,0 102,2 97,1 101,9 106,3 103,6 106,7 112,2 114,3 128,9 129,9 135,9 155,7
Oranges 100,0 105,0 102,1 122,4 128,8 118,5 134,3 136,9 139,3 149,2 155,2 161,0 185,0
Pamplemousses 100,0 101,2 100,0 114,1 109,1 98,3 102,9 101,2 107,8 111,0 122,4 124,0 135,8
Tongolos* // // // 100,0 106,0 96,0 99,6 111,0 103,3 109,7 105,1 108,1 112,1
Ensemble agrumes 100,0 98,6 99,8 118,6 121,1 121,5 125,0 131,1 132,8 151,0 158,6 161,4 169,9
Prix moyen agrumes 1,41 € 1,39 € 1,41 € 1,67 € 1,71 € 1,71 € 1,76 € 1,85 € 1,87 € 2,13 € 2,24 € 2,27 € 2,39 €
  • *base 100 en 2008 pour les tongolos
  • Source : DAAF Guyane.

Figure 3La production d’agrumes en Guyane, en 2017

  • Source : DAAF Guyane.

Les aides publiques soutiennent la production

Les aides publiques du domaine agricole comme le Programme de Développement Rural Guyanais (PDRG) pour l’aide au financement des installations et de la modernisation agricole et le Programme d’Options Spécifiques à l’Éloignement et à l’Insularité (POSEI) pour la valorisation de la production jouent un rôle important dans la dynamique de production. La difficulté de montage des dossiers et des retards de versement des aides ont poussé les agriculteurs à se tourner vers des dispositifs plus généralistes comme la défiscalisation. Les exploitants agrumiers, aidés par des cabinets spécialisés, utilisent massivement ces mesures de défiscalisation pour investir dans la mécanisation et la plantation. La défiscalisation a vraisemblablement joué un rôle ces dernières années dans l’augmentation massive des surfaces d’agrumes plantées (+ 38 %). Cette mesure est très attractive mais est déconnectée de la production, car sans obligation réelle de récolte et de rendement. Certains producteurs indiquent ainsi ne plus ramasser les produits lorsque les cours sont trop bas. À ce jour, ce dispositif ne semble pas permettre une régulation de l’offre sur l’année et contribue paradoxalement au maintien de prix élevés du fait de la possibilité de non récolte permise par cet apport financier.