Environ 2 millions de personnes en situation de grande pauvreté en France en 2018

Julien Blasco, Sébastien Picard (Insee)

En France en 2018, 1,9 million de personnes sont en situation de grande pauvreté et 170 000 sont susceptibles de l’être. Parmi les 1,9 million de personnes vivant en logement ordinaire, en habitation mobile ou sans domicile en situation de grande pauvreté, 35 % sont des enfants, 7 % ont 65 ans ou plus. 24 % vivent dans les DOM, dont 10 % à Mayotte et 14 % dans les quatre autres DOM. De plus, 79 000 personnes vivant en Ehpad ou autre établissement sanitaire ou social et 86 000 vivant en cité universitaire ou foyer ont des revenus particulièrement faibles et sont donc susceptibles d’être en situation de grande pauvreté.

Pour les personnes vivant en logement ordinaire, la grande pauvreté est définie comme la combinaison de faibles revenus et de privations matérielles et sociales sévères. Leur niveau de vie médian est équivalent à 43 % de celui du reste de la population. Elles déclarent sept fois plus de privations matérielles et sociales que les personnes non pauvres.

Les adultes en grande pauvreté sont deux fois plus nombreux que les autres à se considérer en mauvaise santé, et un tiers d’entre eux sont limités dans leur quotidien à cause de leur santé. Plus d’un tiers des adultes en situation de grande pauvreté sont au chômage, et un sur cinq est inactif sans être retraité ou étudiant. Cependant, un tiers est en emploi, dont une grande part d’ouvriers et de personnes travaillant à temps partiel ou de manière discontinue dans l’année.

La grande pauvreté est souvent durable. Sur huit personnes en situation de grande pauvreté, seule une ne subit plus ni pauvreté monétaire, ni privation matérielle et sociale trois ans plus tard, cinq subissent l’une ou l’autre et deux demeurent en situation de grande pauvreté.

Insee Références
Paru le :Paru le27/05/2021
Julien Blasco, Sébastien Picard (Insee)
Les revenus et le patrimoine des ménages- Mai 2021

La grande pauvreté, cumul de difficultés monétaires, matérielles et sociales sévères

La pauvreté est multidimensionnelle. Les définitions de la pauvreté harmonisées au niveau européen se fondent soit sur la faiblesse des revenus, soit sur l’existence de nombreuses privations matérielles ou sociales dans la vie quotidienne. Il n’existe en revanche pas de définition partagée de la grande pauvreté, et ce en dépit de son importance dans le débat social. D’après le rapport présenté au Conseil économique et social français en 1987 [Ouvrir dans un nouvel ongletWresinski, 1987], on parle de grande pauvreté « quand elle affecte plusieurs domaines de l’existence, qu’elle devient persistante, qu’elle compromet les chances [...] de reconquérir ses droits par soi même, dans un avenir prévisible ». Il s’agit donc d’un état de très grandes difficultés matérielles et sociales, durable, ayant placé les personnes dans une situation où elles ont épuisé les ressources qu’elles pouvaient avoir pour en sortir.

La mesure de la pauvreté se pose de manière différente selon la situation des personnes au regard du logement. Les données disponibles pour mesurer les conditions de vie et les revenus diffèrent selon que la personne vit dans un logement individuel, qu’elle est hébergée dans une collectivité, comme un établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) ou un centre d’hébergement et de réinsertion sociale (CHRS), ou qu’elle est sans abri. Les enquêtes sociales de la statistique publique portent généralement sur les personnes qui vivent en . Or, si celles-ci sont très largement majoritaires (65,0 millions sur les 66,5 millions de personnes habitant en France en 2017), la grande pauvreté touche aussi les personnes qui ont des conditions de logement particulières, voire pas de logement.

Pour les personnes vivant dans un logement ordinaire, la mesure de la grande pauvreté mobilise ici les revenus mais aussi l’existence de privations dans la vie quotidienne, à partir de l’enquête Statistiques sur les ressources et les conditions de vie (sources). Ces situations très précaires sont ainsi mieux repérées que par un indicateur fondé sur les seules ressources monétaires ou sur les seules privations (encadré 4). Pour les personnes ne vivant pas en logement ordinaire, d’autres sources de données sont mobilisées pour estimer le nombre et le profil des personnes susceptibles d’être en situation de grande pauvreté, essentiellement sous l’angle des revenus (méthodes).

Entre 1,9 et 2,1 millions de personnes en situation de grande pauvreté

En France hors Mayotte, en 2018, 1,6 million de personnes vivant en logement ordinaire sont en situation de grande pauvreté selon l’approche retenue ici (figure 1). Elles cumulent deux aspects de la pauvreté. D’une part, elles subissent une forme sévère de  : leur est inférieur à 50 % du niveau de vie médian de l’ensemble de la population. D’autre part, elles sont en situation de  : elles déclarent au moins 7 privations dans leur vie quotidienne parmi une liste de 13 relatives au logement, à l’habillement, aux loisirs, etc., telles que le fait de ne pas pouvoir maintenir son logement à bonne température ou de ne pas avoir un repas contenant des protéines au moins une fois tous les deux jours (encadré 1). Ainsi, selon cette définition, 2,4 % de la population vivant en France hors Mayotte en logement ordinaire est en situation de grande pauvreté, une proportion relativement stable sur 10 ans (encadré 2).

Faute de données équivalentes disponibles, la grande pauvreté ne peut être appréciée de la même façon à Mayotte, territoire où la pauvreté est très prégnante. , soit 74 % de la population mahoraise [Merceron, 2020]. Les conditions de vie y sont beaucoup plus défavorables qu’en métropole : en 2017, 164 000 Mahorais vivent dans un logement ne disposant pas du confort sanitaire de base (accès à un point d’eau à l’intérieur du logement, présence de toilettes et d’une baignoire ou douche), alors qu’il est présent dans la quasi totalité des logements de métropole. En outre, 4 logements sur 10 sont en tôle, et non en dur [Thibault, 2019]. Même si le statut de privation matérielle et sociale ne peut pas être précisément mesuré pour les 194 000 personnes dont le revenu est inférieur à 50 % de la médiane, au vu de ces éléments, la quasi totalité d’entre elles sont très vraisemblablement en grande pauvreté.

Par ailleurs, du fait de la privation de domicile personnel, toutes les personnes peuvent être considérées en situation de grande pauvreté. en France métropolitaine. La moitié d’entre elles étaient hébergées dans un logement par une association ou vivaient dans un hôtel. Ces personnes, susceptibles d’être interrogées dans les enquêtes classiques auprès des ménages, sont a priori comprises dans les 1,6 million de personnes vivant en logement ordinaire en situation de grande pauvreté. L’autre moitié était sans abri ou hébergée en chambre ou dortoir dans des établissements pour personnes en grande difficulté sociale et n’est donc pas couverte par les enquêtes ménages.

En dehors des personnes vivant en logement ordinaire, des sans-abri et des personnes vivant dans des centres d’hébergement, 1,4 million de personnes vivent en habitations mobiles ou dans des communautés hors centres d’hébergement, c’est-à-dire dans des logements collectifs offrant des services spécifiques. , inférieur au seuil monétaire à 50 %. 70 % d’entre elles, soit environ 76 000 personnes, seraient en privation matérielle et sociale sévère et donc en situation de grande pauvreté (methodes). Parmi les personnes résidant en communauté, 842 000 vivent dans une institution parce qu’elles ont besoin d’être prises en charge pour des raisons de dépendance, de handicap, de problèmes de santé ou du fait de leur situation familiale. De ce fait, les privations que certaines d’entre elles peuvent rencontrer ne peuvent être définies comme pour la population vivant en logement ordinaire, ni de la même façon pour chaque type d’institution : elles peuvent notamment consister en un manque de soins ou un accompagnement très insuffisant. On définit donc comme étant susceptibles d’être en grande pauvreté les personnes sur le seul critère de leurs ressources. Ainsi, 79 000 personnes vivraient dans ces communautés en deçà du seuil de pauvreté monétaire à 50 % et seraient donc susceptibles d’être en grande pauvreté (méthodes). Ce critère a toutefois une portée limitée dans la mesure où les conditions de vie dans un établissement donné entre résidents sont proches et que des conditions de vie très dégradées sont peut-être moins liées au revenu que dans d’autres situations résidentielles. D’autres personnes vivent dans une communauté du fait de leur situation d’activité : 358 000 personnes sont dans des résidences universitaires, des foyers de jeunes travailleurs ou dans des gendarmeries ou casernes militaires, et leur appartenance à la grande pauvreté pourrait être appréciée avec les mêmes critères que pour les personnes vivant en logement ordinaire si les sources étaient disponibles. Parmi elles, 86 000 personnes vivraient sous le seuil monétaire à 50 % et sont susceptibles d’être en grande pauvreté (méthodes). Enfin, environ 93 000 personnes vivent dans des situations particulières et mal appréhendées par les sources statistiques. Leur appartenance à la pauvreté monétaire, et a fortiori à la grande pauvreté, est trop difficile à mesurer. Il s’agit des 67 000 détenus et des 26 000 personnes vivant au sein de communautés religieuses.

Ainsi, 1,7 million de personnes en France hors Mayotte sont en situation de grande pauvreté auxquels s’ajoutent 194 000 habitants de Mayotte pauvres monétairement (au seuil de 50 % du niveau de vie médian) dont les conditions de vie et de logement les placent très vraisemblablement en situation de grande pauvreté. Par ailleurs, 165 000 personnes résidant en communauté sont pauvres monétairement (au même seuil) et susceptibles d’être en situation de grande pauvreté. En prenant en compte l’ensemble des situations, entre 1,9 et 2,1 millions de personnes seraient en situation de grande pauvreté en France ou susceptibles de l’être (figure 1). La très grande majorité d’entre elles vivent en logement ordinaire (au moins 85 %).

Figure 1 - Estimation du nombre de personnes en grande pauvreté en 2018

en milliers
Figure 1 - Estimation du nombre de personnes en grande pauvreté en 2018 (en milliers)
Personnes en grande pauvreté
En logement ordinaire (hors Mayotte) 1 560
Personnes en habitation mobile 76
Personnes sans abri et personnes hébergées dans des établissements pour personnes en grande difficulté sociale 1 77
Mahorais 194
Personnes susceptibles d’être en grande pauvreté
Cités universitaires, internats,foyers de jeunes travailleurs,foyers de travailleurs migrants,gendarmeries, casernes, etc. 86
Ehpad, établissementsde soins, etc. 79
Autres personnes pour lesquelles les données manquent
Communautés religieuses, établissements pénitentiaires 93
  • 1 Les personnes en hébergement éclaté ne sont pas comptabilisées dans cette catégorie car elles vivent en logement ordinaire.
  • Champ : France.
  • Sources : Insee, Recensement de la population 2017 ; Insee, enquête Statistiques sur les ressources et conditions de vie (SRCV) 2018 ; Insee, enquête Budget de famille 2018 à Mayotte ; Insee, enquête nationale sur les ressources des jeunes (ENRJ) 2014 ; Drees, enquête CARE-Institutions 2016 / Traitement : Insee ; Drees, enquête sur les établissements et services en faveur des adultes et familles en difficulté sociale (ES-DS) 2016 et enquête sur les bénéficiaires de minima sociaux (BMS) 2018 ; estimations Insee.

Figure 1 - Estimation du nombre de personnes en grande pauvreté en 2018

  • 1 Les personnes en hébergement éclaté ne sont pas comptabilisées dans cette catégorie car elles vivent en logement ordinaire.
  • Champ : France.
  • Sources : Insee, Recensement de la population 2017 ; Insee, enquête Statistiques sur les ressources et conditions de vie (SRCV) 2018 ; Insee, enquête Budget de famille 2018 à Mayotte ; Insee, enquête nationale sur les ressources des jeunes (ENRJ) 2014 ; Drees, enquête CARE-Institutions 2016 / Traitement : Insee ; Drees, enquête sur les établissements et services en faveur des adultes et familles en difficulté sociale (ES-DS) 2016 et enquête sur les bénéficiaires de minima sociaux (BMS) 2018 ; estimations Insee.

La grande pauvreté : beaucoup d’enfants, peu de seniors, et un peu plus de femmes que d’hommes

 : 35 % des personnes en grande pauvreté vivant en logement ordinaire ont moins de 18 ans (soit 610 000 personnes), alors qu’elles représentent 20 % de la population (figure 2). En revanche,  : c’est le cas de 7 % d’entre elles en logement ordinaire, contre 20 % de la population totale. Les personnes en grande pauvreté en logement ordinaire (hors Mayotte) sont ainsi en moyenne plus jeunes : 33 ans, contre 42 ans pour le reste des personnes vivant en logement ordinaire. Parmi les sans-abri et les personnes vivant dans des centres d’hébergement, 27 % ont moins de 30 ans, 51 % entre 30 et 49 ans et 22 % ont 50 ans ou plus.

Dans la population hors Mayotte vivant en logement ordinaire, les femmes sont plus nombreuses : 590 000 femmes de 18 ans ou plus sont en grande pauvreté, pour 460 000 hommes du même âge. Elles sont en effet plus souvent à la tête d’une famille monoparentale, type de famille particulièrement touché par la grande pauvreté. Parmi les sans-abri et les personnes vivant dans des centres d’hébergement, 75 % des adultes sont des hommes : 64 % dans les centres d’hébergement où l’on peut rester la journée et 93 % pour les personnes sans abri.

Les personnes en grande pauvreté sont moins souvent en couple que les autres, que ce soit avec ou sans enfants. Dans les logements ordinaires (hors Mayotte), 25 % d’entre elles vivent en famille monoparentale, alors qu’elles ne représentent que 10 % de la population. Cela peut résulter du fait que les éventuelles ressources ne proviennent généralement que d’une seule personne, d’un taux de chômage plus important pour les familles monoparentales, et de la charge financière supplémentaire liée aux enfants. Par ailleurs, 14 % des personnes en grande pauvreté sont des personnes seules de moins de 65 ans, contre 9 % de l’ensemble de la population. À l’inverse, les couples sans enfant sont largement sous-représentés parmi les personnes en situation de grande pauvreté : seulement 9 %, contre 24 % de l’ensemble de la population. Parmi les personnes sans abri et celles vivant dans des centres d’hébergement, les couples et les familles avec enfants sont aussi sous représentés : 86 % vivent seules et 6 % avec leur(s) enfant(s).

14 % des personnes en grande pauvreté en logement ordinaire vivent en Martinique, à la Guadeloupe, en Guyane ou à La Réunion, soit 260 000 personnes. Cette proportion est beaucoup plus élevée que leur part dans la population en France (3 %). En incluant les 194 000 habitants de Mayotte dont le niveau de vie est inférieur au seuil de pauvreté à 50 %, 24 % des personnes en grande pauvreté vivent dans les DOM.

Parmi les ménages de métropole, la grande pauvreté est plus fréquente en Île-de-France, dans le , sur le ainsi que dans le Nord et le Pas-de-Calais. Plus précisément, elle se concentre dans l’agglomération parisienne, dans les du Bassin parisien et du pourtour méditerranéen, ainsi que dans les unités urbaines de taille moyenne du Nord et du Pas-de-Calais. Au total, ces territoires concentrent plus de la moitié des personnes en grande pauvreté vivant en ménage métropolitain, contre un tiers de la population totale. La grande pauvreté est en revanche moins fréquente dans les unités urbaines de moins de 10 000 habitants : elles représentent 41 % de la population des ménages métropolitains, mais seulement 26 % des personnes en grande pauvreté.

Au sein des pays de l’Union européenne (UE), la France se situe dans une position médiane pour son taux de personnes en situation de grande pauvreté. Cela contraste avec son taux de pauvreté monétaire parmi les plus faibles de l’UE, mais est cohérent avec sa position médiane en matière de privation matérielle et sociale (encadré 3).

Figure 2 - Répartition des personnes en grande pauvreté en logement ordinaire, selon l’âge et le sexe

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Figure 2 - Répartition des personnes en grande pauvreté en logement ordinaire, selon l’âge et le sexe (en %) - Lecture : en 2018, les enfants de moins de 18 ans représentent 33 % de la population en grande pauvreté alors qu’ils représentent 21 % du reste de la population.
Moins de 18 ans 18 à 29 ans 30 à 39 ans 40 à 49 ans 50 à 64 ans 65 à 74 ans 75 ans ou plus Ensemble
Part de la tranche d’âge dans la population en grande pauvreté 33 14 12 14 20 4 3 100
Part de la tranche d’âge dans le reste de la population 21 14 12 13 20 11 9 100
  • Lecture : en 2018, les enfants de moins de 18 ans représentent 33 % de la population en grande pauvreté alors qu’ils représentent 21 % du reste de la population.
  • Champ : France hors Mayotte, individus vivant en logement ordinaire.
  • Source : enquête Statistiques sur les ressources et conditions de vie (SRCV) 2018.

Figure 2 - Répartition des personnes en grande pauvreté en logement ordinaire, selon l’âge et le sexe

  • Lecture : en 2018, les enfants de moins de 18 ans représentent 33 % de la population en grande pauvreté alors qu’ils représentent 21 % du reste de la population.
  • Champ : France hors Mayotte, individus vivant en logement ordinaire.
  • Source : enquête Statistiques sur les ressources et conditions de vie (SRCV) 2018.

Neuf personnes en grande pauvreté sur dix n’ont pas d’épargne ou seulement un livret d’épargne exonéré

Les personnes en situation de grande pauvreté vivant en logement ordinaire ont, par définition, un niveau de vie inférieur à 930 euros par mois, correspondant à un revenu disponible de 1 209 euros par mois pour une famille monoparentale avec un enfant de moins de 14 ans et de 1 953 euros pour un couple avec deux enfants de moins de 14 ans. En France métropolitaine, la moitié d’entre elles ont même un niveau de vie inférieur à 800 euros par mois, ce qui correspond à 43 % du niveau de vie médian du reste de la population.

Les personnes sans abri et celles vivant dans des centres d’hébergement sont dans une situation financière encore plus défavorable que celles en grande pauvreté vivant en logement ordinaire : en 2012, leur revenu mensuel médian par unité de consommation était de . 91 % d’entre elles vivaient en 2012 avec moins de 1 000 euros par mois, 20 % avaient moins de 300 euros et 25 % déclaraient ne disposer d’aucune ressource [Insee, 2016].

Les personnes en situation de grande pauvreté ont non seulement un revenu, mais également un patrimoine bien plus faible que le reste de la population. Cette absence de patrimoine les empêche de pallier la faiblesse de leurs revenus et explique en partie les nombreuses privations matérielles qu’elles rencontrent. Parmi les ménages de France métropolitaine, 21 % des personnes en grande pauvreté sont propriétaires d’un bien immobilier (qui est dans la très grande majorité une résidence principale de qualité médiocre), contre 70 % du reste de la population. Côté épargne, 48 % des personnes ne possèdent aucune épargne et 40 % ne possèdent qu’un livret d’épargne exonéré (type livret A). Dans le reste de la population, seuls 14 % n’ont aucune épargne et 26 % détiennent uniquement un livret exonéré. Par ailleurs, les personnes en grande pauvreté peuvent moins souvent compter sur une aide privée en cas de problèmes financiers : moins de 60 % des adultes en grande pauvreté déclarent avoir des proches auxquels ils pourraient demander de l’aide financière ou matérielle, contre 80 % parmi le reste de la population.

Huit personnes en grande pauvreté sur dix n’ont pas les moyens d’acheter des vêtements neufs

Parmi les 13 privations qui permettent de définir la situation de privation matérielle et sociale, les personnes en grande pauvreté vivant en logement ordinaire (hors Mayotte) en déclarent en moyenne 8,8, soit plus de deux fois plus que les autres personnes pauvres au sens monétaire (3,4 privations) et plus de sept fois plus que les personnes non pauvres (1,2 privation).

Ces 13 privations recouvrent quatre domaines différents qui déterminent les conditions de vie : logement et biens durables, difficultés financières, vie sociale et loisirs, habillement et alimentation. De manière générale, les personnes en grande pauvreté subissent tous les types de privations plus fréquemment que le reste de la population (figure 3). Ainsi, la quasi-totalité des personnes en grande pauvreté subissent au moins une privation relative au logement, aux difficultés financières, ainsi qu’aux loisirs ou à la vie sociale, et plus de 9 sur 10 en subissent au moins une relative à l’habillement ou à l’alimentation.

Les privations relatives à l’habillement et à l’alimentation sont particulièrement caractéristiques d’une situation de grande pauvreté. Ainsi, 81 % des personnes en grande pauvreté déclarent ne pas pouvoir s’acheter de vêtements neufs, contre seulement 6 % des non-pauvres. De même, 53 % des personnes en grande pauvreté ne peuvent s’acheter deux paires de bonnes chaussures, contre moins de 4 % des non-pauvres.

Les privations relatives aux loisirs et à la vie sociale sont également nombreuses : le fait de ne pas pouvoir se payer une semaine de vacances hors du domicile, ainsi que de ne pas pouvoir financer une activité de loisirs régulière concernent plus de 9 personnes en grande pauvreté sur 10. Ne pas pouvoir retrouver des amis ou de la famille au moins une fois par mois pour boire un verre ou pour un repas concerne aussi plus de 7 personnes en grande pauvreté sur 10. Les personnes en situation de grande pauvreté sont ainsi plus exposées à l’.

Les difficultés financières sont également nombreuses pour les personnes en situation de grande pauvreté, même si l’écart est moins important avec les personnes non pauvres, pour lesquelles ce type de privation est le plus fréquent. Ces privations sont de nature différente : dans près d’un cas sur quatre, les arriérés de paiements des personnes non pauvres concernent des remboursements de crédits tandis qu’ils sont dus à des loyers ou des factures dans la quasi-totalité des cas pour les personnes en grande pauvreté.

Parmi les (cité universitaire, internat, foyer de jeunes travailleurs, etc.) sous le seuil à 50 % de la médiane, environ la moitié déclare des privations liées aux loisirs : en 2014, 50 % des 18-24 ans devaient souvent se priver de vacances ou de voyages, et 41 % souvent de sorties. 14 % subissaient également des privations matérielles plus sévères comme devoir se priver souvent de nourriture chez eux et la même proportion de jeunes en communauté déclarait devoir se priver d’achats d’équipement de leur logement. Les jeunes vivant en logement ordinaire et sous le seuil à 50 % de la médiane déclarent des privations dans des proportions semblables, quoique légèrement supérieures : 56 % d’entre eux devaient souvent se priver de vacances ou de voyages, et 44 % souvent de sorties. 13 % subissaient également des privations matérielles plus sévères comme devoir se priver souvent de nourriture chez eux.

Figure 3 - Fréquence des privations selon les situations de pauvreté

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Figure 3 - Fréquence des privations selon les situations de pauvreté (en %) - Lecture : en 2018, 81,1 % des personnes en situation de grande pauvreté déclarent ne pas pouvoir s’acheter de vêtements neufs, contre 21,2 % des personnes pauvres monétairement et 6,0 % des non-pauvres.
Grande pauvreté Pauvreté monétaire Non-pauvreté
Ne pas avoir de voiture personnelle 39,7 10,7 1,6
Ne pas pouvoir maintenir son logement à bonne température 42,3 12,7 3,7
Ne pas pouvoir remplacer des meubles hors d’usage 96,7 47,5 18,0
Avoir des impayés de mensualités d’emprunts, de loyer ou de factures d’électricité, d’eau ou de gaz 60,6 23,1 6,7
Ne pas pouvoir dépenser une petite somme d’argent pour soi sans avoir à consulter quiconque 76,3 24,4 9,9
Ne pas pouvoir faire face à des dépenses inattendues 99,3 68,3 25,6
Ne pas avoir accès à internet 17,7 4,5 1,3
Ne pas pouvoir retrouver des amis ou de la famille au moins une fois par mois pour boire un verre ou pour un repas 72,6 19,8 5,7
Ne pas avoir une activité de loisirs régulière 91,1 31,5 11,1
Ne pas pouvoir s’offrir une semaine de vacances hors de son domicile 93,8 50,5 18,0
Ne pas avoir deux paires de bonnes chaussures 52,5 13,0 3,5
Ne pas pouvoir avoir un repas contenant des protéines au moins tous les deux jours 54,8 13,4 5,0
Ne pas pouvoir acheter des vêtements neufs 81,1 21,2 6,0
  • Lecture : en 2018, 81,1 % des personnes en situation de grande pauvreté déclarent ne pas pouvoir s’acheter de vêtements neufs, contre 21,2 % des personnes pauvres monétairement et 6,0 % des non-pauvres.
  • Champ : France hors Mayotte, individus vivant en logement ordinaire.
  • Source : Insee, enquête Statistiques sur les ressources et conditions de vie (SRCV) 2018.

Figure 3 - Fréquence des privations selon les situations de pauvreté

  • Lecture : en 2018, 81,1 % des personnes en situation de grande pauvreté déclarent ne pas pouvoir s’acheter de vêtements neufs, contre 21,2 % des personnes pauvres monétairement et 6,0 % des non-pauvres.
  • Champ : France hors Mayotte, individus vivant en logement ordinaire.
  • Source : Insee, enquête Statistiques sur les ressources et conditions de vie (SRCV) 2018.

Seule une personne en grande pauvreté sur huit est sortie de toute situation de pauvreté trois ans plus tard

Si la grande pauvreté se caractérise par l’intensité de la pauvreté du point de vue des revenus et des conditions de vie, elle revêt également un caractère durable. Parmi les personnes en grande pauvreté vivant dans un logement ordinaire de entre 2013 et 2015, plus d’un quart étaient encore en situation de grande pauvreté trois ans plus tard (figure 4). Celles qui en sortent ne sont pas pour autant libérées de la pauvreté : les trois quarts sont encore pauvres au sens monétaire, et 72 % sont encore en privation matérielle et sociale. Au total, parmi les personnes en grande pauvreté, seules 13 % sont sorties de la pauvreté monétaire et de la privation matérielle et sociale trois ans plus tard.

Le risque de pauvreté monétaire durable est important pour les personnes en grande pauvreté : plus de 6 personnes en grande pauvreté sur 10 restent sous le seuil de pauvreté monétaire à 60 % pendant au moins quatre années d’affilée. C’est plus que l’ensemble des personnes pauvres, pour lesquelles cette proportion est de 4 sur 10 [Albouy et Delmas, 2020].

Comme les états de pauvreté sont très persistants dans le temps, les personnes ayant déjà connu un épisode de pauvreté par le passé ont beaucoup plus de risque d’être pauvres que les autres. Entre 2016 et 2018, le risque d’être en situation de pauvreté monétaire était 25 fois plus élevé pour les personnes ayant connu au moins une année de pauvreté monétaire dans les trois années précédentes que pour les personnes n’ayant jamais été pauvres, et 34 fois plus élevé pour les personnes ayant connu au moins une année de grande pauvreté. Le risque d’être en situation de grande pauvreté était, lui, 42 fois plus élevé pour les personnes ayant connu au moins une année de grande pauvreté dans les trois années précédentes que pour les personnes n’en ayant pas connu.

Les personnes sans abri et celles vivant dans des centres d’hébergement restent également souvent dans cette situation durablement. Parmi elles, , c’est-à-dire un logement dont la personne, ou son conjoint, était locataire ou propriétaire. Par ailleurs, la moitié des sans-abri et des personnes vivant dans des centres d’hébergement avaient quitté leur dernier logement personnel plus de deux ans auparavant [Duée et Yaouancq, 2014].

Figure 4 – Situation des personnes les années ultérieures à la grande pauvreté

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Figure 4 – Situation des personnes les années ultérieures à la grande pauvreté (en %) - Lecture : parmi les personnes en grande pauvreté en 2013, 2014 ou 2015, 41 % le restent un an plus tard, 29 % deux ans plus tard et 27 % trois ans plus tard.
Première année Deuxième année Troisième année Quatrième année
Grande pauvreté 100 40,6 29,1 26,6
Cumul pauvreté monétaire et privation matérielle et sociale 29,3 24,8 31,4
Pauvreté monétaire uniquement 18,7 24,6 15,6
Privation matérielle et sociale uniquement 5,8 8,2 13,8
Non-pauvre 5,6 13,3 12,6
  • Note : pour des raisons de significativité, les données de cette figure sont des moyennes issues des trajectoires des individus sur les périodes 2013-2016, 2014-2017 et 2015-2018.
  • Lecture : parmi les personnes en grande pauvreté en 2013, 2014 ou 2015, 41 % le restent un an plus tard, 29 % deux ans plus tard et 27 % trois ans plus tard.
  • Champ : France métropolitaine, individus vivant en logement ordinaire pendant au moins quatre années consécutives et ayant été en situation de grande pauvreté en 2013, 2014 ou 2015.
  • Source : Insee, enquêtes Statistiques sur les ressources et conditions de vie (SRCV) 2013 à 2018.

Figure 4 – Situation des personnes les années ultérieures à la grande pauvreté

  • Note : pour des raisons de significativité, les données de cette figure sont des moyennes issues des trajectoires des individus sur les périodes 2013-2016, 2014-2017 et 2015-2018.
  • Lecture : parmi les personnes en grande pauvreté en 2013, 2014 ou 2015, 41 % le restent un an plus tard, 29 % deux ans plus tard et 27 % trois ans plus tard.
  • Champ : France métropolitaine, individus vivant en logement ordinaire pendant au moins quatre années consécutives et ayant été en situation de grande pauvreté en 2013, 2014 ou 2015.
  • Source : Insee, enquêtes Statistiques sur les ressources et conditions de vie (SRCV) 2013 à 2018.

Près de la moitié des personnes en grande pauvreté ayant eu une activité professionnelle sont ouvriers

La grande pauvreté s’explique en partie par les difficultés d’insertion sur le marché du travail et l’insuffisance de ressources qu’elles impliquent. Les personnes pauvres au sens monétaire sont plus souvent au chômage ou inactives que les autres [Sicsic, 2021]. C’est encore plus le cas pour la grande pauvreté : parmi les personnes de 16 ans ou plus en situation de grande pauvreté en logement ordinaire (hors Mayotte), 35 % sont au chômage, 20 % sont inactives (autres qu’étudiantes et retraitées) (figure 5). Cette proportion de chômeurs est deux fois plus importante que parmi les personnes pauvres au sens monétaire (17 %) et six fois plus importante que dans l’ensemble de la population (6 %). Le fait d’être peu ou pas diplômé explique en partie ces difficultés accrues d’insertion sur le marché du travail : 44 % des personnes de 16 ans ou plus en situation de grande pauvreté n’ont aucun diplôme ou seulement le certificat d’études primaires, contre 38 % des personnes pauvres au sens monétaire et 22 % de l’ensemble de la population.

Avoir un emploi ne protège pas pour autant de la grande pauvreté : près d’un tiers des 16 ans ou plus en grande pauvreté et en logement ordinaire (hors Mayotte), soit plus de 310 000 personnes, exercent une activité salariée ou non salariée. Leur situation sur le marché du travail est cependant relativement défavorable : , dont un tiers à temps plein, alors que c’est le cas de 90 % du reste de la population, pour 75 % à temps plein.

Parmi les personnes d’âge actif ayant déjà eu une activité professionnelle, qui représentent 38 % des personnes en grande pauvreté, le profil de celles en grande pauvreté est proche de celui des personnes pauvres au sens monétaire, mais avec une proportion encore plus importante d’ouvriers et d’artisans, commerçants et chefs d’entreprise. 43 % des personnes en grande pauvreté sont des ouvriers, alors qu’ils représentent 34 % des personnes pauvres au sens monétaire et 22 % de l’ensemble de la population. La part des artisans, commerçants et chefs d’entreprise, quant à elle, est deux fois plus élevée dans la grande pauvreté que dans l’ensemble de la population.

Concernant les personnes francophones âgées de 18 à 64 ans vivant dans des centres d’hébergement ou sans abri, en 2012, 47 % sont au chômage, 30 % sont inactifs ou n’ont pas le droit de travailler si bien que 23 % sont en emploi, avec un travail régulier ou un « petit boulot ». Lorsqu’elles travaillent, elles occupent presque exclusivement des postes d’employé ou d’ouvrier : 93 % sont dans ce cas contre une personne sur deux dans la population française en emploi [Duée et Yaouancq, 2014].

Les retraités, dans les logements ordinaires (hors Mayotte), représentent quant à eux moins d’une personne en grande pauvreté sur dix : le montant du minimum vieillesse (803 euros pour une personne seule au 1ᵉʳ avril 2017), qui peut être associé aux allocations logement, permet dans la plupart des cas d’avoir un niveau de vie supérieur au seuil de 50 %.

Les personnes en situation de grande pauvreté déclarent un état de santé plus dégradé que les autres. Ainsi, parmi les 16 ans ou plus, 18 % des personnes en grande pauvreté considèrent leur état de santé comme « mauvais » ou « très mauvais », contre 8 % du reste de la population des 16 ans ou plus (hors Mayotte). Par ailleurs, 35 % des 16 ans ou plus en grande pauvreté s’estiment limités dans leur quotidien à cause de leur état de santé, dont la moitié « fortement limités ». Pour le reste des 16 ans ou plus, 24 % s’estiment limités dans leur quotidien, dont un tiers « fortement ». Ces écarts d’état de santé sont d’autant plus prégnants que les personnes en grande pauvreté sont en moyenne plus jeunes que le reste de la population. Ils peuvent expliquer en partie la forte proportion d’inactifs (autres qu’étudiants et retraités) parmi les personnes en grande pauvreté : qu’ils soient pauvres ou non, 22 % des 16 ans ou plus ni étudiants ni retraités qui déclarent une limitation dans le quotidien sont inactifs, contre moins de 7 % de ceux qui n’en déclarent pas.

Figure 5a - Répartition de la population selon le statut d’activité et les situations de pauvreté

en %
Figure 5a - Répartition de la population selon le statut d’activité et les situations de pauvreté (en %)
Grande pauvreté Pauvreté monétaire Non-pauvreté Ensemble
Ensemble 100 100 100 100
Salariés 22,4 25,6 47,7 45,0
Non-salariés 6,8 8,0 5,6 5,9
Chômeurs 34,6 17,3 4,5 6,1
Retraités 9,2 18,4 31,3 29,7
Étudiants 6,7 13,4 6,6 7,4
Inactifs 20,3 17,3 4,4 6,0
  • Champ : France hors Mayotte, individus de 16 ans ou plus vivant en logement ordinaire.
  • Source : Insee, enquête Statistiques sur les ressources et conditions de vie (SRCV) 2018.

Figure 5a - Répartition de la population selon le statut d’activité et les situations de pauvreté

  • Champ : France hors Mayotte, individus de 16 ans ou plus vivant en logement ordinaire.
  • Source : Insee, enquête Statistiques sur les ressources et conditions de vie (SRCV) 2018.

Les prestations sociales représentent plus de la moitié du revenu des personnes en grande pauvreté

En , les personnes vivant en logement ordinaire en situation de grande pauvreté reçoivent quasiment toutes une aide des pouvoirs publics, que ce soit sous forme monétaire ou d’un accès à un logement social. Près des trois quarts d’entre elles perçoivent des minima sociaux ou la prime d’activité, et autant perçoivent des allocations logement. 16 % des personnes en grande pauvreté bénéficient d’aides locales, qui complètent les dispositifs nationaux. Au total, 94 % des personnes en situation de grande pauvreté perçoivent des prestations sociales. Parmi elles, 22 % ne perçoivent aucun revenu d’activité (y compris allocations chômage) ou pension de retraite. Pour ces 270 000 personnes, les prestations sociales représentent la totalité de leurs revenus.

Les prestations sociales représentent la majeure partie du revenu des personnes en grande pauvreté vivant dans un ménage métropolitain (figure 6) : en moyenne, elles représentent 56 % de leur revenu disponible, dont 21 % de minima sociaux (revenu de solidarité active – RSA, allocation aux adultes handicapés – AAH, minimum vieillesse). Les revenus d’activité représentent quant à eux 38 % de leur revenu disponible, dont 25 % de salaires et 9 % d’allocations chômage.

À Mayotte, les prestations sociales réduisent peu la pauvreté : elles ne représentent que 17 % du revenu disponible moyen des personnes sous le seuil de pauvreté monétaire à 60 % [Merceron, 2020]. Cela s’explique par le fait que la majorité de la population pauvre de Mayotte, de nationalité étrangère, provenant d’un pays non européen et arrivée récemment sur le territoire, n’est pas éligible aux prestations sociales : le RSA, en particulier, n’est accessible qu’aux étrangers titulaires d’un titre de séjour depuis au moins 15 ans, contre 5 ans dans les autres départements français.

Les prestations sociales et en particulier les minima sociaux comptent pour une grande part dans les revenus des personnes sans abri et de celles vivant dans des centres d’hébergement, même si 21 % d’entre eux tirent des revenus d’une activité professionnelle. En 2012, le revenu de solidarité active (RSA) représente ainsi leur principale source de revenu (30 %), suivi par les revenus d’activité (22 %). Viennent ensuite les allocations chômage (8 %) et l’allocation aux adultes handicapés (8 %). 14 % d’entre eux ne perçoivent aucun revenu, allocation ou aide venant d’un organisme public ou d’une association [Insee, 2016].

Les personnes en situation de grande pauvreté bénéficient aussi plus souvent d’un logement social : lorsqu’elles vivent en logement ordinaire (hors Mayotte), près de la moitié d’entre elles (47 %) sont logées par un organisme HLM ou assimilé, contre 15 % du reste de la population en logement ordinaire. Cet écart tient partiellement au fait que les personnes en situation de grande pauvreté sont beaucoup moins souvent propriétaires de leur résidence principale que les autres : c’est le cas de moins d’un quart d’entre elles (23 %), contre les deux tiers du reste de la population. En se restreignant aux ménages ordinaires qui ne sont pas propriétaires de leur résidence principale, 61 % des personnes en grande pauvreté sont logées par un organisme HLM ou assimilé, contre 45 % du reste de la population.

Les personnes en situation de grande pauvreté vivant en communauté résident au sein d’établissements financés en tout ou partie par les pouvoirs publics, qu’il s’agisse d’Ehpad, de cités universitaires ou de foyers de jeunes travailleurs. Ils y vivent le plus souvent dans une chambre, avec la possibilité d’utiliser des espaces de vie partagés.

Figure 6Composition du revenu selon selon les situations de pauvreté

Composition du revenu selon selon les situations de pauvreté - Lecture : en 2018, la part des revenus d’activité dans le revenu des personnes en grande pauvreté est de 29,5 %, celle de l’ensemble des prestations sociales de 56,4 %.
groupe Revenus d’activité Allocations de chômage Minima sociaux Autres prestations sociales Revenus du patrimoine Pensions et retraites Impôts directs
Grande pauvreté 29,5 8,8 20,9 35,5 0,4 5,6 -0,8
Pauvreté monétaire 38,7 7,3 12,7 28,8 2,1 11,9 -1,6
Non pauvreté 71,7 2,9 0,9 4,6 7,9 19,1 -7
Ensemble 69,7 3,2 1,6 6 7,5 18,6 -6,6
  • Lecture : en 2018, la part des revenus d’activité dans le revenu des personnes en grande pauvreté est de 29,5 %, celle de l’ensemble des prestations sociales de 56,4 %.
  • Champ : France hors Mayotte, individus vivant en logement ordinaire dont le revenu disponible est positif ou nul.
  • Source : enquête Statistiques sur les ressources et conditions de vie (SRCV) 2018.

Figure 6Composition du revenu selon selon les situations de pauvreté

  • Lecture : en 2018, la part des revenus d’activité dans le revenu des personnes en grande pauvreté est de 29,5 %, celle de l’ensemble des prestations sociales de 56,4 %.
  • Champ : France hors Mayotte, individus vivant en logement ordinaire dont le revenu disponible est positif ou nul.
  • Source : enquête Statistiques sur les ressources et conditions de vie (SRCV) 2018.

Encadré 1 - Au-delà de la pauvreté monétaire, la grande pauvreté est définie ici comme le cumul de deux indicateurs

Dans les logements ordinaires, les personnes en situation de grande pauvreté sont définies comme celles qui cumulent pauvreté monétaire au seuil de 50 % du niveau de vie médian et privation matérielle et sociale sévère. Ce cumul témoigne de difficultés plus intenses, que celles-ci soient mesurées seulement par des critères de revenu et de patrimoine, ou par des critères fondés sur les privations matérielles. Ces personnes restent également plus durablement dans cette situation et ont peu de chances d’en sortir à court terme. En 2018, 2,4 % des personnes vivant en logement ordinaire en France hors Mayotte sont ainsi en grande pauvreté (figure).

Les personnes en situation de pauvreté monétaire ont un niveau de vie inférieur au seuil de pauvreté à 60 % du niveau de vie médian ou, dans sa version plus sévère, à 50 % du niveau de vie médian. 14,1 % de la population a un niveau de vie inférieur au premier seuil. Un peu plus de la moitié d’entre elles (7,3 %) a un niveau de vie inférieur au deuxième seuil, correspondant à 930 euros par mois pour une personne seule, 1 953 euros pour un couple avec deux enfants de moins de 14 ans, et à 1 209 euros par mois pour une famille monoparentale avec un enfant de moins de 14 ans. Ces personnes disposant de faibles revenus n’ont toutefois pas toutes les mêmes conditions de vie : un tiers de celles vivant sous le seuil de pauvreté à 50 % sont en situation de privation matérielle et sociale sévère, et donc en grande pauvreté. En effet, des personnes pauvres au sens monétaire peuvent bénéficier de ressources non prises en compte dans la mesure des revenus (résidence principale, épargne financière, aide de proches, autoconsommation).

D’autre part, une personne est considérée en situation de privation matérielle et sociale si elle déclare au moins 5 privations parmi une liste de 13 relatives à l’alimentation, l’habillement, le logement, les loisirs ou la vie sociale. C’est le cas de 13,5 % de la population, dont un peu plus de la moitié (7,4 %) est en situation de privation matérielle et sociale sévère, c’est-à-dire qu’elle déclare au moins 7 privations sur 13. Ces personnes subissant des privations matérielles n’ont pas forcément un niveau de vie inférieur aux seuils de pauvreté : un tiers des personnes en privation sévère vit sous le seuil de pauvreté à 50 % et est donc en grande pauvreté. En effet, des personnes non pauvres monétairement peuvent faire face à des privations matérielles si elles n’ont pas accès à des ressources autres que monétaires ou ont des besoins plus importants, du fait de leur état de santé par exemple.

Taux de pauvreté selon la situation de pauvreté

Taux de pauvreté selon la situation de pauvreté
Type de pauvreté Taux (en %)
Grande pauvreté monétaire à 50 % 7,3
Grande pauvreté 2,4
Privation matérielle et sociale sévère 7,4
  • Champ : France hors Mayotte, individus vivant en logement ordinaire.
  • Source : Insee, enquête Statistiques sur les ressources et conditions de vie (SRCV) 2018.

Taux de pauvreté selon la situation de pauvreté

  • Champ : France hors Mayotte, individus vivant en logement ordinaire.
  • Source : Insee, enquête Statistiques sur les ressources et conditions de vie (SRCV) 2018.

Encadré 2 - La grande pauvreté des personnes en logement ordinaire est relativement stable depuis 2010

La privation matérielle et sociale est mesurée dans l’enquête SRCV depuis le millésime 2013. Elle succède à l’indicateur de privation matérielle, dont la définition est proche. Ce dernier reposait sur un ensemble de neuf privations élémentaires, dont six sont communes avec l’indicateur de privation matérielle et sociale actuel. L’indicateur de privation matérielle et sociale actuel tient mieux compte des éléments de conditions de vie relatifs à la vie sociale, et supprime des éléments qui n’étaient plus pertinents pour juger de conditions de vie décentes [Ouvrir dans un nouvel ongletGordon et al., 2017]. Pour autant, ces deux définitions se recoupent largement : en 2016, plus des trois quarts des personnes vivant en logement ordinaire en situation de privation matérielle selon l’ancien indicateur étaient aussi en privation matérielle et sociale [Blasco et Gleizes, 2019].

Ici, contrairement au reste du dossier, l’indicateur de grande pauvreté correspond au cumul de la pauvreté monétaire au seuil de 50 % et de la privation matérielle sévère selon l’ancienne définition. Le champ est restreint à la France métropolitaine. Avec cette ancienne définition, seule disponible avant 2013, le taux de grande pauvreté est de 1,5 % en 2018 (contre 2,1 % avec l’indicateur actuel).

Dans les deux premières années suivant la crise économique de 2008, le taux de grande pauvreté passe de 1,6 % à 1,9 %, à la suite de l’augmentation à la fois de la privation matérielle sévère et de la forte augmentation de la pauvreté monétaire (figure). Le taux de grande pauvreté diminue ensuite continûment de 2010 à 2016, pour atteindre 1,1 % en 2016. Durant cette période, la privation matérielle sévère décroît, en particulier chez les moins de 55 ans, qui déclarent moins souvent ne pas pouvoir changer leurs meubles ou partir en vacances, privations dont la fréquence passe de près d’un tiers à moins d’un quart. Le taux de pauvreté monétaire à 50 % recule lui aussi après 2010 jusqu’en 2015, principalement du fait d’une diminution de la pauvreté monétaire des jeunes adultes et des seniors.

Après une hausse en 2017 due à l’augmentation du taux de privation matérielle sévère des personnes pauvres au seuil de 50 %, le taux de grande pauvreté atteint 1,5 % en 2018, un niveau proche de celui observé dix ans plus tôt.

À partir de 2013, la grande pauvreté définie avec le nouvel indicateur de privation matérielle et sociale a eu une évolution similaire, avec un point bas en 2016.

Taux de grande pauvreté depuis 2008

en %
Taux de grande pauvreté depuis 2008 (en %) - Lecture : en 2018, le taux de grande pauvreté est de 2,1 % en France métropolitaine. Il était de 1,9 % en 2013.
Privation matérielle et sociale sévère Pauvreté monétaire au seuil de 50 % Privation matérielle sévère (ancienne définition) Grande pauvreté Grande pauvreté (ancienne définition)
2008 /// 5,6 5,4 /// 1,6
2009 /// 6,7 5,6 /// 1,7
2010 /// 7,2 5,8 /// 1,9
2011 /// 7,0 5,2 /// 1,6
2012 /// 6,8 5,3 /// 1,7
2013 6,9 6,7 4,9 1,9 1,5
2014 7,6 6,5 4,8 2,1 1,5
2015 6,9 6,4 4,5 1,8 1,3
2016 6,7 6,7 4,4 1,7 1,1
2017 6,4 6,6 4,1 1,9 1,6
2018 6,9 6,7 4,7 2,1 1,5
  • /// : absence de résultat due à la nature des choses.
  • Lecture : en 2018, le taux de grande pauvreté est de 2,1 % en France métropolitaine. Il était de 1,9 % en 2013.
  • Champ : France métropolitaine, individus vivant en logement ordinaire.
  • Sources : Insee, enquêtes Statistiques sur les ressources et conditions de vie (SRCV) 2008 à 2018.

Taux de grande pauvreté depuis 2008

  • Lecture : en 2018, le taux de grande pauvreté est de 2,1 % en France métropolitaine. Il était de 1,9 % en 2013.
  • Champ : France métropolitaine, individus vivant en logement ordinaire.
  • Sources : Insee, enquêtes Statistiques sur les ressources et conditions de vie (SRCV) 2008 à 2018.

Encadré 3 - La grande pauvreté en France la situe dans une position médiane au sein de l'UE

Les données internationales du dispositif européen EU SILC (sources) permettent de mesurer la prévalence de la grande pauvreté en logement ordinaire dans les différents pays de l’Union européenne (UE) en appliquant la même définition que dans le reste de ce dossier. Si la liste des privations matérielles et sociales est la même pour tous les pays, le seuil de pauvreté monétaire dépend en revanche du niveau de vie médian de la population nationale, et est donc différent d’un pays à l’autre. Ainsi, en tenant compte des différences de prix entre les pays, le seuil de niveau de vie pour être considéré comme pauvre au sens monétaire en France est par exemple quatre fois supérieur à celui de la Roumanie et inférieur d’un quart à celui du Luxembourg.

Les taux de pauvreté monétaire ainsi que de privation matérielle et sociale varient grandement d’un pays à l’autre de l’UE, tout comme la part de la population cumulant les deux situations (figure). Le taux de privation matérielle et sociale sévère varie fortement : de moins de 2 % de la population pour certains pays (Pays-Bas, Suède, Luxembourg) à 22 % pour la Bulgarie et 28 % pour la Roumanie. Le taux de pauvreté monétaire au seuil de 50 % de la médiane varie sur une plage moins étendue : entre environ 4 % pour la République tchèque et 17 % pour la Roumanie.

La part de la population en situation de grande pauvreté, c’est-à-dire cumulant ces deux situations de pauvreté, varie de 11 % pour la Roumanie à moins de 1 % pour le Danemark, la Finlande, les Pays Bas et la Suède.  : sur les 28 pays de l’UE, 15 ont un taux de grande pauvreté plus faible. Cela s’explique par le fait que, bien que le taux de pauvreté monétaire de la France soit parmi les plus faibles de l’UE, son taux de privation matérielle et sociale est plutôt médian. Par ailleurs, comme l’étendue des taux de privation matérielle et sociale est plus élevée que celle des taux de pauvreté monétaire, les pays pour lesquels la part de la population cumulant les deux situations de pauvreté est la plus faible sont également ceux dont le taux de privation matérielle et sociale est le plus faible.

Part de personnes en situation de pauvreté monétaire et de privation matérielle et sociale en 2018

en %
Part de personnes en situation de pauvreté monétaire et de privation matérielle et sociale en 2018 (en %) - Lecture : en 2018, 11,5 % des personnes vivant en France métropolitaine sont en situation de pauvreté monétaire à 50 % ou de privation matérielle et sociale sévère, dont 4,8 % en situation de privation matérielle et sociale sévère seule, 4,6 % en situation de pauvreté monétaire seule (au seuil de 50 %) et 2,1 % en grande pauvreté, c’est-à-dire cumulant les deux.
Privation matérielle et sociale sévère uniquement Grande pauvreté Pauvreté monétaire au seuil de 50 % uniquement
Pays-Bas 0,7 0,2 6,1
Finlande 1,8 0,3 4,9
Suède 0,8 0,6 7,5
Danemark 2,8 0,6 5,9
Luxembourg 0,6 1,0 9,5
Rép. tchèque 1,4 1,0 3,4
Irlande 4,6 1,0 6,0
Slovénie 2,0 1,2 5,8
Autriche 1,4 1,4 7,4
Estonie 1,6 1,4 12,5
Royaume-Uni 3,0 1,5 9,4
Pologne 3,1 1,6 7,3
Allemagne 1,6 1,8 7,8
Chypre 2,0 1,8 6,7
Malte 2,7 2,0 6,7
France¹ 4,8 2,1 4,6
Slovaquie 2,9 2,5 3,8
Portugal 4,1 2,5 8,3
UE28 (e) 4,1 2,7 7,7
Italie 3,8 2,8 10,8
Belgique 3,4 3,0 6,0
Hongrie 8,5 3,4 4,6
Croatie 2,4 3,6 9,9
Espagne 4,5 4,3 10,3
Lettonie 5,5 4,8 11,5
Lituanie 6,5 5,4 10,4
Grèce 10,4 5,7 7,2
Bulgarie 12,7 9,6 5,5
Roumanie 17,7 10,7 6,4
  • e : estimation.
  • 1 France métropolitaine car les données comparables au niveau européen pour la France ne comprennent pas les DOM.
  • Note : les pays sont classés par taux de grande pauvreté croissant. Les personnes dont le statut de privation matérielle et sociale n’est pas connu sont retirées de l’échantillon. Cela sous-estime légèrement les parts des différentes situations de pauvreté dans les pays où le taux de non-réponse est significativement plus important pour les plus bas revenus, comme aux Pays-Bas ou en Suède.
  • Lecture : en 2018, 11,5 % des personnes vivant en France métropolitaine sont en situation de pauvreté monétaire à 50 % ou de privation matérielle et sociale sévère, dont 4,8 % en situation de privation matérielle et sociale sévère seule, 4,6 % en situation de pauvreté monétaire seule (au seuil de 50 %) et 2,1 % en grande pauvreté, c’est-à-dire cumulant les deux.
  • Champ : Union européenne à 28 pays, individus vivant en logement ordinaire.
  • Source : Eurostat, EU-SILC 2018.

Part de personnes en situation de pauvreté monétaire et de privation matérielle et sociale en 2018

  • e : estimation.
  • 1 France métropolitaine car les données comparables au niveau européen pour la France ne comprennent pas les DOM.
  • Note : les pays sont classés par taux de grande pauvreté croissant. Les personnes dont le statut de privation matérielle et sociale n’est pas connu sont retirées de l’échantillon. Cela sous-estime légèrement les parts des différentes situations de pauvreté dans les pays où le taux de non-réponse est significativement plus important pour les plus bas revenus, comme aux Pays-Bas ou en Suède.
  • Lecture : en 2018, 11,5 % des personnes vivant en France métropolitaine sont en situation de pauvreté monétaire à 50 % ou de privation matérielle et sociale sévère, dont 4,8 % en situation de privation matérielle et sociale sévère seule, 4,6 % en situation de pauvreté monétaire seule (au seuil de 50 %) et 2,1 % en grande pauvreté, c’est-à-dire cumulant les deux.
  • Champ : Union européenne à 28 pays, individus vivant en logement ordinaire.
  • Source : Eurostat, EU-SILC 2018.

Encadré 4 - Un indicateur de pauvreté qui cumule des critères monétaire et matériel mesure mieux la grande pauvreté qu’un seuil de niveau de vie à 40 % de la médiane

La manière la plus commune de définir la pauvreté étant de fixer un seuil de pauvreté à 60 % du niveau de vie médian, la tentation serait de définir la grande pauvreté à un seuil encore plus bas, tel que 50 %, voire 40 %, du niveau de vie médian. En France hors Mayotte, en 2018, 2,9 % des personnes vivant en logement ordinaire sont en dessous du seuil à 40 %. En pratique, ce seuil ne permet pas de cibler une pauvreté plus intense, affectant plusieurs dimensions, et plus persistante que la pauvreté monétaire au seuil de 60 % [Blasco et Picard, à paraître].

Ainsi, en moyenne, les personnes dont le niveau de vie est inférieur à 40 % de la médiane ne subissent pas des privations matérielles plus importantes que celles sous le seuil à 50 % ou 60 % de la médiane. En moyenne, elles subissent 4,4 privations sur les 13 étudiées, contre 4,5 pour les personnes en dessous de 50 % de la médiane et 4,3 pour les personnes en dessous de 60 % de la médiane. Leur satisfaction concernant leur situation financière ou leur vie en général n’est pas non plus inférieure aux autres : elles évaluent leur satisfaction concernant leur situation financière à 5,3 sur 10 en moyenne, contre 5,1 pour les personnes sous le seuil à 50 % et 5,2 pour celles sous le seuil à 60 %. Concernant leur vie en général, elles évaluent leur satisfaction à 6,7 sur 10 en moyenne, contre 6,4 pour les personnes sous le seuil à 50 % et 6,5 pour celles sous le seuil à 60 %. En comparaison, les personnes en situation de grande pauvreté (encadré 1) subissent en moyenne 8,8 privations et déclarent une satisfaction moyenne de 3,4 sur 10 concernant leur situation financière et de 5,2 sur 10 concernant leur vie en général.

Les personnes dont le niveau de vie est inférieur à 40 % de la médiane restent plus longtemps pauvres au sens monétaire que les personnes se situant entre les seuils de 40 % et de 60 %, mais moins longtemps que celles en grande pauvreté. En moyenne, parmi les personnes en dessous du seuil à 40 % de la médiane une année donnée, 64 % des personnes sont encore pauvres au sens monétaire trois ans plus tard, contre 57 % des personnes sous le seuil à 60 % mais 74 % des personnes en grande pauvreté.

Par ailleurs, un indicateur fondé uniquement sur le revenu des ménages et pas sur leurs privations matérielles ne permet pas de prendre en compte certaines ressources qui peuvent pallier le manque de revenus, telles qu’une épargne dans laquelle on peut puiser ou la propriété de son logement. Les personnes possédant un patrimoine financier ou propriétaires de leur résidence principale sont moins fréquemment sous le seuil à 40 % de la médiane que l’ensemble de la population, mais elles sont encore moins souvent en grande pauvreté : en France métropolitaine, 17 % des personnes sous le seuil à 40 % de la médiane déclarent un patrimoine financier supérieur à la médiane, contre 3 % des personnes en grande pauvreté (figure).

De plus, pour les indépendants ou les étudiants, la mesure du niveau de vie par les sources fiscales peut être incomplète (en raison de revenus non déclarés ou de transferts venant d’autres ménages). Pour ces situations, le niveau de vie ne traduit pas toujours leur capacité à consommer, en raison de la variabilité de leurs revenus, la prise en charge de certaines dépenses par d’autres ménages ou l’autoconsommation. Ainsi, les personnes vivant dans un ménage dont la personne de référence exerce une activité indépendante représentent 22 % des personnes sous le seuil à 40 % de la médiane, contre 8 % de la population générale et 7 % des personnes en grande pauvreté. De même, les personnes vivant dans un ménage étudiant représentent 8 % des personnes sous le seuil à 40 % de la médiane, contre 1 % de la population et 2 % des personnes en grande pauvreté.

Fréquence de certains profils selon les situations de pauvreté

en %
Fréquence de certains profils selon les situations de pauvreté (en %) - Lecture : parmi les personnes en grande pauvreté, 7,4 % vivent dans un ménage dont la personne de référence exerce une activité indépendante, 1,6 % vivent dans un ménage dont la personne de référence est étudiante, 3,2 % possèdent un patrimoine financier supérieur à la médiane, et 23,4 % sont propriétaires de leur résidence principale.
Personne de référence du ménage indépendante Personne de référence du ménage étudiante Patrimoine financier supérieur à la médiane Propriétaire de leur résidence principale
Grande pauvreté 7,4 1,6 3,2 23,4
Pauvreté monétaire à 40 % 21,8 7,7 17,0 38,4
Pauvreté monétaire à 60 % 11,6 3,4 15,3 32,0
Ensemble de la population 8,3 0,7 50,3 64,9
  • Note : pour être considéré comme détenant un patrimoine financier supérieur à la médiane, un ménage doit détenir au moins un des produits dans les montants suivants : au moins 15 000 euros d’assurance-vie, 4 500 euros de livrets exonérés, de livrets fiscalisés ou d’épargne logement, 7 500 euros de valeurs mobilières ou 3 000 euros d’autres placements.
  • Lecture : parmi les personnes en grande pauvreté, 7,4 % vivent dans un ménage dont la personne de référence exerce une activité indépendante, 1,6 % vivent dans un ménage dont la personne de référence est étudiante, 3,2 % possèdent un patrimoine financier supérieur à la médiane, et 23,4 % sont propriétaires de leur résidence principale.
  • Champ : France hors Mayotte, individus vivant en logement ordinaire ; variable patrimoine : France métropolitaine.
  • Sources : Insee, enquête Statistiques sur les ressources et conditions de vie (SRCV) 2018.

Fréquence de certains profils selon les situations de pauvreté

  • Note : pour être considéré comme détenant un patrimoine financier supérieur à la médiane, un ménage doit détenir au moins un des produits dans les montants suivants : au moins 15 000 euros d’assurance-vie, 4 500 euros de livrets exonérés, de livrets fiscalisés ou d’épargne logement, 7 500 euros de valeurs mobilières ou 3 000 euros d’autres placements.
  • Lecture : parmi les personnes en grande pauvreté, 7,4 % vivent dans un ménage dont la personne de référence exerce une activité indépendante, 1,6 % vivent dans un ménage dont la personne de référence est étudiante, 3,2 % possèdent un patrimoine financier supérieur à la médiane, et 23,4 % sont propriétaires de leur résidence principale.
  • Champ : France hors Mayotte, individus vivant en logement ordinaire ; variable patrimoine : France métropolitaine.
  • Sources : Insee, enquête Statistiques sur les ressources et conditions de vie (SRCV) 2018.

Sources

L’ enquête Statistique sur les ressources et conditions de vie (dispositif SRCV) est la partie française du système communautaire EU SILC (European union Statistics on income and living conditions). Il a pris la suite en 2004 de l’ancien Panel européen, european Community Households Panel (ECHP), interrompu en 2001. Elle sert de référence pour les comparaisons de distributions des revenus, de conditions de vie et de taux de pauvreté entre États membres de l’Union européenne et pour les actions communautaires de lutte contre l’exclusion. Les données sont collectées annuellement au moyen d’une enquête en panel.

Les enquêtes Ouvrir dans un nouvel onglet CARE (Capacités, Aides et REssources des seniors) , réalisées par la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees) avec le soutien de la Caisse Nationale de Solidarité pour l’Autonomie (CNSA), ont pour objectif de mieux connaître les conditions de vie des seniors, leurs relations avec leur entourage, leurs difficultés à réaliser certaines activités de la vie quotidienne et les aides financières et humaines qu’ils reçoivent pour surmonter ces éventuelles difficultés. L’enquête CARE-Institutions porte sur les seniors vivant en établissements pour personnes âgées.

L’ enquête Revenus fiscaux et sociaux  (ERFS) vise à reconstituer et à analyser suivant des critères socio-démographiques usuels (catégorie socioprofessionnelle et âge des personnes composant le ménage, taille du ménage, activité de chaque individu, etc.) et à mesurer le niveau de vie et la pauvreté monétaire des personnes.

L’ enquête Budget de famille  (BDF) vise à analyser et à reconstituer toute la comptabilité des ménages : dépenses et ressources des ménages résidant en France (métropole et DOM). L’étude des dépenses constitue l’objectif traditionnel et central de l’enquête : toutes les dépenses des ménages sont enregistrées, leur montant et leur nature, ventilés. Elle est aussi la seule source permettant de mesurer les inégalités de revenus et la pauvreté monétaire dans l’ensemble des DOM.

L’Ouvrir dans un nouvel onglet enquête sur les « Établissements et services en faveur des adultes et familles en difficulté sociale  » (ES-DS), réalisée par la Drees, s’intéresse à l’activité des établissements et services pour adultes et familles en difficulté sociale, au personnel en fonction et au profil des personnes accueillies dans ces structures. Ces établissements et services peuvent être notamment des centres d’hébergement et de réinsertion sociale, des centres d’accueil pour demandeurs d’asile ou des résidences sociales. Le champ des structures enquêtées s’enrichit au fur et à mesure des millésimes.

L’Ouvrir dans un nouvel onglet enquête sur les bénéficiaires de minima sociaux  (BMS), réalisée par la Drees, s’inscrit dans le cadre du dispositif d’observation statistique des situations des populations en difficulté. Elle a pour principal objectif de mieux connaître les conditions de vie des bénéficiaires de minima sociaux.

L’Ouvrir dans un nouvel onglet enquête nationale sur les ressources des jeunes  (ENRJ) a été menée par la Drees et l’Insee du 1ᵉʳ octobre au 31 décembre 2014. Elle permet de décrire les ressources et les conditions de vie des jeunes adultes de 18 à 24 ans en France, quelle que soit leur situation : étudiants, en emploi ou en recherche d’emploi, vivant seuls, en couple ou chez leurs parents, en collectivité ou en logement individuel. Leurs parents sont également interrogés afin de décrire les différentes formes de solidarités familiales.

Les principaux objectifs de l’ enquête Sans-Domicile 2012 consistent à décrire les caractéristiques des sans-abri et des sans-domicile : il s’agit de comparer les personnes sans domicile avec la population vivant en logement ordinaire sur des thématiques comme la santé, l’emploi ou encore le niveau de vie ; décrire les difficultés d’accès au logement, ainsi que les trajectoires ayant amené les personnes à être sans domicile, afin d’identifier les processus d’exclusion ; estimer le nombre de personnes sans domicile.

Méthodes

Estimer la grande pauvreté pour les personnes hors logement ordinaire : un exercice délicat

Selon les données du recensement de la population, 65,0 millions de personnes vivent au 1ᵉʳ janvier 2017 dans un logement dit « ordinaire », soit 97,8 % de la population française. Pour cette population, il est possible d’élaborer un indicateur de grande pauvreté à partir des données de l’enquête SRCV. En revanche, le champ de l’enquête SRCV exclut les personnes vivant en habitation mobile, dans une chambre ou un dortoir au sein d’une communauté ainsi que les personnes sans abri. Pour celles ci, d’autres sources doivent être mobilisées pour estimer le nombre de personnes en situation de grande pauvreté.

Les personnes en habitation mobile

Le recensement des et des personnes sans-abri (HMSA) estime au 1ᵉʳ janvier 2017 à 108 000 le nombre de personnes résidant en habitation mobile. Selon l’enquête sur les bénéficiaires de minima sociaux (BMS) de 2018, la totalité des personnes résidant en habitation mobile vivrait dans un ménage bénéficiaire du revenu de solidarité active (RSA) dont le montant est inférieur au seuil monétaire à 50 %. 70 % d’entre elles, soit environ 76 000 personnes sont en outre en privation matérielle et sociale sévère et donc en situation de grande pauvreté. Néanmoins ces résultats sont fragiles car ils portent sur des effectifs faibles de personnes vivant en habitation mobile dans l’enquête BMS.

Les personnes hébergées en communauté

1,3 million de personnes (soit 2 % de la population française) vivent au sein d’une communauté au sens du recensement, hors centres d’hébergement.

Pour certaines personnes vivant en communauté, les indicateurs usuels de privation matérielle et sociale ne peuvent s’appliquer, en raison de leur mode de prise en charge par les institutions ou de leurs besoins spécifiques. Par ailleurs, il n’existe pas de source unique et récente permettant de connaître leurs ressources et de déterminer leur niveau de vie. Estimer précisément la population vivant en communauté et en situation de grande pauvreté selon l’indicateur utilisé pour les personnes vivant en logement ordinaire s’avère donc peu pertinent et irréalisable. On peut néanmoins s’en approcher en ne conservant que le critère monétaire et ainsi estimer le nombre de personnes vivant en dessous du seuil de pauvreté à 50 % du niveau de vie médian. Pour ce faire, des sources statistiques complémentaires sont mobilisées.

Parmi les 842 000 personnes vivant dans une institution parce qu’elles ont besoin d’être prises en charge pour des raisons de dépendance, de handicap, de problèmes de santé ou du fait de leur situation familiale :

  • 574 000 personnes âgées résident en Ehpad ou en maisons de retraite. Elles représentent 43 % de la population vivant en communauté. Leur taux de pauvreté au seuil de 50 % est estimé à 9,4 %, en mobilisant l’enquête CARE-Institutions, volet Seniors, de 2016. Il est calculé à partir de leur revenu disponible (hors revenus financiers et prestations sociales imputés), divisé par un nombre d’unités de consommation (UC) spécifique : 1 UC si la personne est seule, 2 UC si elle est en couple, en faisant l’hypothèse que les économies d’échelle prises en compte dans l’échelle dite de l’« OCDE modifiée » sont moins pertinentes dans le cas des seniors en institution. Ce taux de pauvreté estimé n’est donc pas directement comparable avec celui issu des enquêtes Revenus fiscaux et sociaux (ERFS) ;
  • 268 000 personnes résident dans des structures pour personnes nécessitant des soins médicaux, pour personnes handicapées ou pour enfants relevant de l’aide sociale à l’enfance (ASE). Leurs taux de pauvreté au seuil de 50 % sont estimés :
    • pour les personnes mineures et celles âgées de 25 ans ou plus : à partir des taux de pauvreté selon le sexe et l’âge calculés dans l’ERFS de 2017 et appliqués à la structure par sexe et par âge de chaque communauté. À structure équivalente, les populations vivant dans ces communautés n’ont toutefois pas le même profil socio-économique que la population vivant en logement ordinaire, en particulier au regard de la situation familiale. Mais ces données sont trop souvent partielles, voire non disponibles. Pour certaines de ces communautés, le nombre de personnes pauvres au seuil de 50 % est probablement sous-estimé, les personnes accueillies ayant généralement des situations plus défavorables que le reste de la population. Cependant, l’impact sur le taux de grande pauvreté est a priori minime compte tenu de la part relative de ces sous-populations dans l’ensemble de la population vivant en communauté ;
    • pour les jeunes de 18 à 24 ans, les taux de pauvreté au seuil de 50 % sont estimés à partir de l’enquête nationale sur les ressources des jeunes (ENRJ) de 2014. Le taux de pauvreté des jeunes «  » résidant en établissement de soins ou à l’hôpital a été appliqué à la population des personnes de 18 à 24 ans vivant dans ces communautés. Dans cette enquête, le revenu disponible des jeunes n’habitant plus avec leurs parents est calculé à partir des déclarations de l’enquêté et comprend les éventuelles aides monétaires des parents. Ce taux de pauvreté estimé n’est donc pas directement comparable avec celui issu des enquêtes Revenus fiscaux et sociaux (ERFS).

Parmi les 358 000 personnes résidant en communauté du fait de leur situation d’activité :

  • 101 000 personnes résident en foyers de jeunes travailleurs (FJT), en foyers de travailleurs migrants (FTM) ou en résidences sociales. L’enquête sur les « Établissements et services en faveur des adultes et familles en difficulté sociale » (ES DS) de 2016 permet de connaître leur structure par statut d’activité. Leur taux de pauvreté au seuil de 50 % est estimé à 8,9 %, en appliquant les taux de pauvreté selon le statut d’activité issus de l’ERFS de 2017 à la structure selon le même critère de la population résidant dans ces établissements ;
  • 257 000 personnes résident en gendarmerie ou casernes, en cité universitaire ou en établissement hébergeant des élèves ou des étudiants. Leurs taux de pauvreté au seuil de 50 % sont estimés :
    • pour les personnes mineures et celles âgées de 25 ans ou plus : à partir des taux de pauvreté selon le sexe et l’âge calculés dans l’ERFS de 2017 et appliqués à la structure par sexe et par âge de chaque communauté. Comme expliqué plus haut, à structure équivalente, les populations vivant dans ces communautés n’ont toutefois pas le même profil socio-économique que la population vivant en logement ordinaire, en particulier au regard de l’emploi ;
    • pour les jeunes de 18 à 24 ans, qui représentent 85 % de ceux vivant en cité universitaire et dans les autres établissements hébergeant des élèves ou des étudiants, les taux de pauvreté au seuil de 50 % sont également estimés à partir de l’enquête nationale sur les ressources des jeunes (ENRJ). Les taux de pauvreté des jeunes « non cohabitants » par catégorie de communauté fréquentée (gendarmerie et autre établissement militaire, cité universitaire, internat scolaire ou foyer d’étudiants) ont été appliqués à la population des personnes de 18 à 24 ans vivant dans les communautés équivalentes, selon les catégories du recensement de la population. Comme précédemment, le revenu disponible des jeunes n’habitant plus avec leurs parents est calculé à partir des déclarations de l’enquêté et comprend les éventuelles aides monétaires des parents. Ces taux de pauvreté ne sont donc pas directement comparables avec ceux issus des enquêtes Revenus fiscaux et sociaux (ERFS).

Enfin, environ 93 000 personnes vivent dans des situations particulières (détenus, personnes vivant au sein de communautés religieuses), pour lesquelles les données disponibles ne permettent pas d’estimer la proportion de celles qui seraient en grande pauvreté.

Les personnes sans domicile

Du fait de la privation de domicile personnel, toutes les personnes sans domicile peuvent être considérées en situation de grande pauvreté. En 2012, 143 000 personnes étaient sans domicile en France métropolitaine, d’après l’enquête auprès des sans-domicile de 2012.

38 % des personnes sans domicile dormaient dans des centres d’hébergement où elles pouvaient rester en journée (29 %) ou qu’elles devaient quitter le matin (9 %). 33 % étaient hébergées dans un logement procuré par une association ou un organisme d’aide, 20 % étaient hébergées en hôtels et 9 % étaient sans abri (c’est-à-dire dormaient dans un lieu non prévu pour l’habitation) [Ouvrir dans un nouvel ongletMordier, 2016].

Les personnes hébergées dans un logement ou vivant dans un hôtel sont considérées comme vivant en logement ordinaire et sont donc susceptibles d’être interrogées dans l’enquête SRCV. Les autres en revanche en sont exclues.

Il n’existe actuellement pas d’estimation plus récente du nombre de personnes sans domicile. Mais le recensement de la population permet d’estimer la part de cette population qui ne vit pas en logement ordinaire : au 1ᵉʳ janvier 2017, 77 000 personnes sont sans-abri ou vivent dans des établissements pour personnes en grande difficulté sociale.

Définitions

Les habitations mobiles sont les caravanes, les roulottes et de façon générale, tous les abris mobiles utilisés comme résidence principale. Par exemple, les « gens du voyage » et les forains sont recensés de cette façon s’ils ne sont pas sédentarisés. Par convention, les péniches immobilisées à quai et les autres bateaux (de plaisance ou yachts) installés à quai et transformés par leurs occupants en logement dans lequel ils résident de façon habituelle sont assimilés à des habitations mobiles.

Un jeune adulte est considéré comme non cohabitant s’il vit en permanence dans un logement autre que celui de ses parents ou de l’un deux.

Une personne est en situation de pauvreté monétaire si son niveau de vie est inférieur au seuil de pauvreté, fixé à 60 % du niveau de vie médian de l’ensemble de la population. On utilise également une définition plus restrictive, où le seuil de pauvreté est égal à 50 % du niveau de vie médian.

Le niveau de vie d’une personne est le revenu disponible de son ménage rapporté à son nombre d’unités de consommation. Il est donc le même pour tous les membres d’un même ménage. Le revenu disponible est la somme des revenus de tous les membres du ménage, nets des impôts directs et cotisations sociales, et comprenant les prestations sociales perçues. Les unités de consommation (UC) sont les poids attribués à chaque individu selon une échelle d’équivalence : le premier adulte compte pour 1 UC, les autres personnes de 14 ans ou plus comptent pour 0,5 UC chacune, et chaque enfant de moins de 14 ans compte pour 0,3 UC. Le niveau de vie médian est le montant qui partage la population en deux parties égales : la moitié a un niveau de vie inférieur, l’autre moitié a un niveau de vie supérieur.

Une personne est en situation de privation matérielle et sociale si elle cumule au moins 5 privations parmi une liste de 13 éléments concernant entre autres les dépenses de logement, d’habillement ou de loisirs (figure 3). Quand elle en cumule au moins 7, on parle de privation matérielle et sociale sévère.

Une personne vivant en logement ordinaire est en situation de grande pauvreté si elle est à la fois en situation de pauvreté monétaire au seuil de 50 % et en privation matérielle et sociale sévère.

Un logement ordinaire au sens du recensement, est un local :

- utilisé pour l’habitation ;

- séparé, c’est-à-dire complètement fermé par des murs et cloisons, sans communication avec un autre local si ce n’est par les parties communes de l’immeuble (couloir, escalier, vestibule, etc.) ;

- indépendant, à savoir ayant une entrée d’où l’on a directement accès sur l’extérieur ou les parties communes de l’immeuble, sans devoir traverser un autre local. Ne sont pas considérés comme logements ordinaires les locaux utilisés pour l’habitation par les personnes qui résident au sein d’une communauté ou dans une habitation mobile. Toutefois, les logements de fonction situés dans l’enceinte des communautés sont des logements ordinaires.

Une communauté est un ensemble de locaux d’habitation relevant d’une même autorité gestionnaire et dont les habitants partagent à titre habituel un mode de vie commun. La population de la communauté comprend les personnes qui résident dans la communauté, à l’exception de celles qui résident dans des logements de fonction. Les catégories de communauté sont les suivantes :

- les services de moyen ou de long séjour des établissements publics ou privés de santé, les établissements sociaux de moyen et long séjour, les maisons de retraite, les foyers et résidences sociales ou assimilés ;

- les communautés religieuses ;

- les casernes, quartiers, bases ou camps militaires ou assimilés ;

- les établissements hébergeant des élèves ou des étudiants, y compris les établissements militaires d’enseignement ;

- les établissements pénitentiaires ;

les établissements sociaux de court séjour ;

- les autres communautés.

Dans le cadre de l’enquête Sans Domicile de 2012 auprès des personnes fréquentant les lieux d’hébergement ou de restauration gratuite, une personne est qualifiée de « sans-domicile » un jour donné si la nuit précédente elle a eu recours à un service d’hébergement (hôtel ou logement payé par une association, chambre ou dortoir dans un hébergement collectif, lieu ouvert exceptionnellement en cas de grand froid) ou si elle a dormi dans un lieu non prévu pour l’habitation (rue, abri de fortune).

Pour en savoir plus

Albouy V., Delmas F., « 70 % des personnes pauvres en 2016 le restent l’année suivante, une persistance en hausse depuis 2008 », Insee Focus n° 208, octobre 2020.

Audoux L., Mallemanche C., Prévot P., « Une pauvreté marquée dans les DOM, notamment en Guyane et à Mayotte », Insee Première n° 1804, juillet 2020.

Arnold C., « Ouvrir dans un nouvel ongletQuelles sont les personnes vivant avec moins de 660 euros par mois ? », in Minima sociaux et prestations sociales. Ménages aux revenus modestes et redistribution, coll. « Études et statistiques », Drees, édition 2015.

Blasco J., Gleizes F., « Qui est pauvre en europe ? Deux figures différentes de la pauvreté, par l’approche monétaire ou par la privation matérielle et sociale », in La France dans l’Union européenne, coll. « Insee Références », édition 2019.

Blasco J., Picard S., « Mesurer la grande pauvreté sur l’ensemble des ménages français », Documents de travail, Insee, à paraître .

Cnis, 2011, « Ouvrir dans un nouvel ongletLa déclinaison française des indicateurs de suivi des objectifs de développement durable », Rapport d’un groupe de travail n° 160, 2018.

Duée M., Yaouancq F., « Les sans-domicile en 2012 : une grande diversité de situations », in France, portrait social, coll. « Insee Références », édition 2014.

Gleizes F., Grobon S., Legleye S., « 3 % des individus isolés de leur famille et de leur entourage : un cumul de difficultés socioéconomiques et de mal-être », Insee Première n° 1770, septembre 2019.

Gordon D., Guio A.-C., Najera H., Pomati M., « Ouvrir dans un nouvel ongletRevising the EU material deprivation variables », in Statistical Working Papers, eurostat, édition 2017.

Insee, « Revenus des sans-domicile », in Les revenus et le patrimoine des ménages, coll. « Insee Références », édition 2016.

Merceron S., « Revenus et pauvreté à Mayotte en 2018 », Insee analyses Mayotte n° 25, juillet 2020.

Mordier B., « Ouvrir dans un nouvel ongletLes sans-domicile en France : caractéristiques et principales évolutions entre 2001 et 2012 », Économie et statistiques n° 488-489, 2016.

Rougerie C., « Difficultés de logement : les situations de logement appréciées selon les dimensions proposées par le Conseil national de l'information statistique », Document de travail n° F2020-02, novembre 2020,

Sicsic M., « Inégalités de niveau de vie et pauvreté entre 2008 et 2018 », in Revenus et le patrimoine des ménages, coll. « Insee Références », édition 2021.

Thibault, P., « Quatre logements sur dix sont en tôle en 2017 », Insee analyses Mayotte n° 18, août 2019.

Wresinski J., « Ouvrir dans un nouvel ongletGrande pauvreté et précarité économique et sociale », Avis et rapports du Conseil économique et social, février 1987.

1. Il est calculé à partir des revenus perçus en année N‑1, soit en 2017 pour l’enquête SRCV de 2018.

2. Les privations sont celles déclarées en 2018, année de l’enquête.

On se réfère ici à un seuil de pauvreté national. Dans d’autres publications, un seuil de pauvreté local a également été défini à partir de la distribution des niveaux de vie de Mayotte [Merceron, 2020 et Audoux et al., 2020].

Toutes les caractéristiques décrivant les personnes sans domicile dans la suite de ce dossier proviennent de l’enquête Sans Domicile de 2012 (sources). De même que leur nombre, leurs caractéristiques (sexe, âge, nationalité, langue parlée, mode d’hébergement, etc.) ont probablement évolué depuis, toutefois on ne dispose pas d’information détaillée plus récente.

Selon l’enquête sur les bénéficiaires de minima sociaux (BMS) de 2018 (sources).

Cette surreprésentation des enfants se retrouve aussi selon l’indicateur usuel de pauvreté monétaire : 32 % des personnes pauvres (au seuil de 60 % du niveau de vie médian) vivant en logement ordinaire en France sont mineures.

Elles représentent 11 % des personnes pauvres (au seuil de 60 % du niveau de vie médian) vivant en logement ordinaire en France.

La zone « bassin parisien » correspond au Centre‑Val de Loire et à la Normandie, ainsi qu’aux anciennes régions de Bourgogne, Champagne‑Ardenne et Picardie.

Regroupe la région Provence‑Alpes‑Côte d’Azur, la Corse et l’ancienne région du Languedoc‑Roussillon.

Respectivement au moins 200 000 habitants, et entre 10 000 et moins de 200 000 habitants.

Selon l’enquête Sans Domicile, soit l’équivalent de 440 euros en 2017.

Pour des données sur l’isolement social en population générale, voir Gleizes et al., [2019].

Pour les jeunes en communauté, le questionnement est différent de celui pour les ménages ordinaires : en particulier, les privations déclarées par les jeunes ne le sont pas nécessairement pour des raisons financières.

Les données concernant les DOM ne permettent pas d’étudier la persistance dans le temps de la pauvreté.

Cette information n’est disponible que pour les francophones de France métropolitaine.

Données France métropolitaine : celles des DOM ne comportent pas d’information sur l’activité des douze mois précédents.

Données France métropolitaine car les informations sur la composition du revenu pour les DOM ne sont pas disponibles.

Les données comparables au niveau européen pour la France ne comprennent pas les DOM ; d’où l’écart avec les 2,4 % de personnes en situation de grande pauvreté vivant en logement ordinaire en France hors Mayotte.