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Insee Conjoncture Corse · Juin 2024 · n° 49
Insee Conjoncture CorseBilan économique 2023 - Corse L’activité économique ralentit sans entrer en récession

Fruit d’une collaboration entre l’Insee, la Banque de France, la Draaf, la Dreal, la Dreets, et la DRfip, ce bilan dresse un panorama de la situation économique de la Corse en 2023.

Sur l’île, l’année est marquée par une activité économique en légère croissance, mais celle-ci est en retrait par rapport aux années précédentes. Le ralentissement de l’économie est en partie lié à des chocs exogènes. Si l’inflation redescend suite au pic de 2022, elle induit des arbitrages budgétaires pour les habitants et les touristes.

Ainsi, la baisse de la fréquentation touristique conjuguée à une activité en berne dans la construction font de 2023 une année en demi-teinte. L’industrie tire son épingle du jeu et l’agriculture profite de la bonne tenue de la viticulture et de l’agrumiculture.

L’emploi se stabilise après douze années de croissance ininterrompue dans l’île. Le taux de chômage remonte un peu, tout en restant bien en deçà du niveau national.

Insee Conjoncture Corse
No 49
Paru le :Paru le13/06/2024

Ce bilan économique fait partie des 17 bilans économiques régionaux 2023 publiés par l'Insee.

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Agriculture - Une agriculture à deux vitesses Bilan économique 2023

Vincent Delor et Philippe Pailler (Direction régionale de l'alimentation, de l'agriculture et de la forêt)

Si le réchauffement climatique et le contexte économique offrent un peu de répit en 2023, les problématiques de l’agriculture corse demeurent. Les cultures phares de l’île, viticulture et agrumiculture, assument toujours leur rôle de locomotive, tandis que la castanéiculture achève son redressement. L’oléiculture connaît une nouvelle campagne difficile et de nouvelles productions, comme celle des avocats, pointent le bout de leur nez. Dans les filières animales, le bilan est beaucoup plus contrasté.

Le pastoralisme, notamment, continue d’éprouver des difficultés.

Insee Conjoncture Corse

No 49

Paru le :13/06/2024

Un environnement moins anxiogène mais toujours tendu

À rebours de ces dernières années, le climat se montre plus favorable à l’agriculture en 2023. Si les températures sont conformes aux normales saisonnières tout au long de l’année (figure 1), la pluviométrie est généreuse, notamment au printemps, période clé dans la conduite des cultures (figure 2). L’environnement international pèse également moins sur les prix des moyens de production, qui se stabilisent (énergie, semences) voire baissent sensiblement (engrais, aliments des animaux). Ils demeurent cependant à un niveau élevé, après deux années de fortes hausses.

Figure 1Météorologie : Températures moyennes en 2023

(en °C)
Météorologie : Températures moyennes en 2023 ((en °C))
Mois 2023 Normales saisonnières
Janvier 10,7 10,4
Février 10,2 10,2
Mars 13,1 12,0
Avril 14,2 14,2
Mai 17,9 17,8
Juin 23,1 21,6
Juillet 26,1 24,3
Août 24,9 24,8
Septembre 23,2 21,7
Octobre 21,0 18,5
Novembre 15,4 14,5
Décembre 12,5 11,5
  • Source : Météo France.

Figure 1Météorologie : Températures moyennes en 2023

  • Source : Météo France.

Figure 2Météorologie : Précipitations moyennes en 2023

(en millimètres)
Météorologie : Précipitations moyennes en 2023 ((en millimètres))
Précipitations Normales saisonnières 2023
Janvier 47 68
Février 44 53
Mars 46 21
Avril 48 31
Mai 38 50
Juin 24 25
Juillet 9 1
Août 14 36
Septembre 54 34
Octobre 74 57
Novembre 98 98
Décembre 65 44
  • Source : Météo France.

Figure 2Météorologie : Précipitations moyennes en 2023

  • Source : Météo France.

Une production historique pour le vignoble corse

À contre-courant d’un contexte hexagonal et international morose, la viticulture corse continue à tirer son épingle du jeu. Le millésime 2023 vient conforter une profession en perpétuelle adaptation aux changements climatiques, la quantité venant s’ajouter à la qualité : pour la première fois, les volumes dépassent 400 000 hectolitres. Ils vont permettre de reconstituer les stocks en baisse ces dernières années (figure 3).

Figure 3Production viticole

(en hectolitres)
Production viticole ((en hectolitres))
Année Vins AOP Vins IGP Vins sans IG Total vins
2019 111 218 188 067 14 344 313 629
2020 121 178 237 862 30 104 389 144
2021 115 288 215 722 14 524 345 534
2022 120 324 215 958 24 098 360 380
2023 125 940 258 793 23 940 408 673
  • Note : données 2023 provisoires.
  • Source : Agreste - Statistique Agricole Annuelle (SAA).

Figure 3Production viticole

  • Note : données 2023 provisoires.
  • Source : Agreste - Statistique Agricole Annuelle (SAA).

La clémentine élargit ses quartiers

Après la production record de l’an passé, les volumes de clémentines récoltés sont en baisse sur un an, en raison du phénomène d’alternance dans les vergers. Ils s’établissent néanmoins pour 2023/2024 à 34 900 tonnes, une production proche de la moyenne quinquennale (figure 4). Les superficies occupées par les clémentiniers continuent de croître, particulièrement dans la filière biologique. Les cours du produit sont restés fermes tout au long de la campagne, avec une embellie à l’horizon des fêtes de fin d’année. Deux projets, portés par la profession, sont sortis de terre en 2023 et permettent dorénavant de diversifier les débouchés des agrumiculteurs. Les usines de transformation (jus, pâtes pour préparation alimentaire, huiles essentielles, etc.) de Moriani et Linguizzeta donnent ainsi une seconde vie aux fruits non commercialisables pour calibre insuffisant ou aspect détérioré.

Figure 4Production d’agrumes

(en tonnes)
Production d’agrumes ((en tonnes))
Agrumes Moyenne 2018/2022 2023
Clémentines 36 067 34 900
Pomelos 6 712 7 260
  • Note : données 2023 provisoires.
  • Source : Agreste - Statistique Agricole Annuelle (SAA).

Figure 4Production d’agrumes

  • Note : données 2023 provisoires.
  • Source : Agreste - Statistique Agricole Annuelle (SAA).

Naissance de l’avocat, renaissance de la châtaigne

Une autre culture emblématique insulaire retrouve des couleurs : la châtaigne corse. Le cataclysme dû au cynips, parasite du fruit, qui a fortement affecté les cultures dans les années 2010, commence à s’estomper. Les récoltes retrouvent un niveau important (figure 5), et par là même, la production de farine repart à la hausse. L’objectif est maintenant de regagner les parts de marché perdues, notamment au niveau local, en reconstituant les circuits courts antérieurs à la crise. Pour cela, la profession mise sur l’AOP vieille de seulement une dizaine d’années. L’oléiculture, en revanche, connaît une troisième année consécutive difficile, avec moins de mille tonnes récoltées. Enfin, à signaler, l’implantation réussie d’un verger jusqu’alors quasiment absent du paysage insulaire : l’essor de la production d’avocats est significatif, en doublant ses volumes en trois ans, pour atteindre presque 200 tonnes.

Figure 5Production des autres vergers

(en tonnes)
Production des autres vergers ((en tonnes))
Vergers Moyenne 2018/2022 2023
Amandes 198 166
Châtaignes 186 265
Avocats* 96 192
  • Note : * moyenne 2020/2022 car nouvelle culture.
  • Source : Agreste - Statistique Agricole Annuelle (SAA).

Figure 5Production des autres vergers

  • Note : * moyenne 2020/2022 car nouvelle culture.
  • Source : Agreste - Statistique Agricole Annuelle (SAA).

Les filières animales toujours en proie aux difficultés

Fortement dépendantes des aides de la politique agricole commune (Pac), les exploitations agricoles spécialisées dans les filières animales sont éprouvées par les retards de paiements de leurs aides liées à la première année de mise en œuvre de la réforme de la Pac 2023-2027.

Le pastoralisme corse traverse une période perturbée. Entre réchauffement climatique, inflation des intrants, accès complexe au foncier et manque de structuration de la filière, les éleveurs d’ovins/caprins éprouvent de plus en plus de difficultés. En témoignent la baisse des cheptels et des productions laitières, et ce dans un contexte de crise sanitaire liée à l’apparition de nouveaux foyers de fièvre catarrhale ovine (figure 6) et (figure 7). Les enjeux dépassent strictement le domaine de l’agriculture. Ils concernent plus généralement la recherche d’une cohérence spatiale dans l’île, à travers une revitalisation de ses territoires intérieurs.

Les effectifs porcins ont quant à eux tendance à se stabiliser, après une forte décennie de croissance. Filière économiquement rentable, la charcuterie corse traditionnelle bénéficie notamment d’une appellation d’origine protégée (AOP) depuis une dizaine d’années. Les artisans-transformateurs, en AOP ou non, s’appuient en outre sur un fort réseau de circuit court. Ce réseau leur permet de supporter la concurrence industrielle qui représente l’essentiel des volumes du marché.

Le cheptel bovin poursuit sa décrue. L’année 2023 voit la mise en place d’un système innovant d’identification du bétail, financée par l’État : le « bolus ». Cette petite capsule en céramique contient une puce électronique qui est déposée dans l’estomac de l’animal et qui renforce sa traçabilité.

Figure 6Bétail en nombre de têtes

(en têtes)
Bétail en nombre de têtes ((en têtes))
Effectif au 31 décembre Moyenne 2018/2022 2023
Brebis-mères 79 712 75 900
Chèvres mères 34 733 33 620
Vaches nourrices 28 294 20 800
Truies mères 6 072 6840
  • Note : données 2023 provisoires.
  • Source : Agreste - Statistique Agricole Annuelle (SAA).

Figure 6Bétail en nombre de têtes

  • Note : données 2023 provisoires.
  • Source : Agreste - Statistique Agricole Annuelle (SAA).

Figure 7Production laitière

(en hectolitres)
Production laitière ((en hectolitres))
type de production Millésime livré à l’industrie transformé à la ferme
Lait de chèvre Moyenne 2018/2022 19 536 32 185
2023 18 844 31 686
Lait de brebis Moyenne 2018/2022 56 820 27 814
2023 50 552 28 458
  • Note : données 2023 provisoires.
  • Source : Agreste - Statistique Agricole Annuelle (SAA).

Figure 7Production laitière

  • Note : données 2023 provisoires.
  • Source : Agreste - Statistique Agricole Annuelle (SAA).
Publication rédigée par :Vincent Delor et Philippe Pailler (Direction régionale de l'alimentation, de l'agriculture et de la forêt)