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Insee Conjoncture Guadeloupe · Juin 2023 · n° 24
Insee Conjoncture GuadeloupeBilan économique 2022 - Guadeloupe Une reprise d’activité entravée par les tensions inflationnistes

En 2022, avec l’allègement des restrictions sanitaires, l’activité économique guadeloupéenne se redresse. Toutefois, le renforcement des tensions inflationnistes entrave la reprise. La consommation des ménages repart à la hausse grâce aux mesures gouvernementales en faveur du pouvoir d’achat et aux augmentations salariales. Les entreprises guadeloupéennes continuent d’investir cette année malgré un climat national et international d’incertitude économique. Ces investissements dynamisent la création d’emplois et influent sur la demande d’emploi dans un contexte ou le taux de chômage est deux fois et demi supérieur à celui observé au niveau national. La création d’entreprise est à son plus haut niveau des 20 dernières années. Enfin, l’activité touristique se redresse nettement grâce au ralentissement de l’épidémie de Covid-19 sans pour autant retrouver son niveau de 2019.

Insee Conjoncture Guadeloupe
No 24
Paru le :Paru le01/06/2023

Ce bilan économique fait partie des 17 bilans économiques régionaux 2022 publiés par l'Insee.

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Agriculture - La production de Guadeloupe affectée par la guerre en Ukraine et la tempête Fiona Bilan économique 2022

Marie Bascou (Direction de l'alimentation, de l'agriculture et de la forêt)

Après deux années consécutives de sécheresse en 2020 et 2021, certains secteurs de l’agriculture guadeloupéenne donnent des signes de reprise en 2022. Toutefois, la guerre en Ukraine qui a débuté en février 2022, génère une hausse significative des coûts pouvant contraindre de réduire la production. La hausse des prix de vente permet cependant de compenser les surcoûts dans certains cas. À cette conjoncture économique défavorable s’ajoute la calamité agricole engendrée par la tempête Fiona en septembre 2022 qui pèse sur la production au dernier trimestre sur l’ensemble du territoire.

Insee Conjoncture Guadeloupe

No 24

Paru le :01/06/2023

La production de sucre continue de baisser, celle du rhum se maintient

Les prévisions optimistes de début de campagne 2022 annonçaient globalement une stabilisation du volume de canne à destination des deux usines sucrières du département. Au final, avec 416 500 tonnes, le volume de cannes broyées recule de 7 % par rapport à 2021, confirmant ainsi la diminution constatée depuis 2017. La production recule de 37 % en cinq ans. En 2022, une part significative (20 %) des cannes à destination de l’usine de Gardel au Moule n’ont pas été récoltées. À la Sucrerie Rhumerie de Marie-Galante (SRMG), malgré une usine opérationnelle dès le début de la campagne, les volumes broyés restent très en deçà du niveau de 2020 (75 600 tonnes). Avec 42 650 tonnes, la production de la SRMG progresse en 2022 de seulement 72 % par rapport à 2021, année particulière avec le long arrêt de l’usine suite à l’accident sur la chaudière qui avait lourdement pesé sur la récolte.

Cette baisse globale de la production en Guadeloupe s’explique d’une part, par une contraction de la sole plantée, et d’autre part par une baisse des rendements en canne (-15 %). Les effets retardés de la sécheresse 2021 et l’augmentation du coût des intrants sont autant d’éléments qui pèsent également sur les capacités de production.

La combinaison de cette baisse de production avec un taux de richesse saccharine de 8,9 %, légèrement inférieur à celui de 2021, entraîne une baisse sensible du volume de sucre produit (-14,0 %), soit 37 700 tonnes (figure 1).

Dans les distilleries, le tonnage de cannes broyées était supérieur en 2021 à celui de 2020 en raison de la réorientation vers celles-ci d’une partie des cannes destinées à la SRMG. En 2022, avec 72 700 tonnes, le tonnage se replace légèrement au-dessus du niveau de 2020 (+2,0 %). Néanmoins, la production de rhum est quasi stable (-0,3 %) par rapport à 2021 avec 86 600 hectolitres d’alcool pur.

Les ventes de rhum, tant à l’export que sur le marché local, continuent de progresser, en particulier pour le rhum agricole dont les exportations augmentent de 10,5 % entre 2021 et 2022, atteignant 20 700 hectolitres (figure 2).

Figure 1Les chiffres clés de la Canne

(en %)
Les chiffres clés de la Canne ((en %))
Utilisations de la canne 2021 2022 Evolution (en%)
Cannes broyées (tonne) 523 117 489 229 -6,5
Sucreries 448 119 416 549 -7,0
Distilleries 74 998 72 680 -3,0
Prix payés planteurs (euros/t)
Part sucrerie 32,3 33,3 3,1
Part État 29,3 30,0 2,4
Part Distilleries 56,1 56,1 0,0
Rémunération bagasse (euros/t) 14,7 14,4 -2,0
Sucre produit (tonne) 43 799 37 654 -14,0
Richesse en saccharine (%) 9,0 8,9 -1,1
Mélasse (tonne) 21 061 20 767 -1,4
  • Sources : Syndicat des producteurs de sucre et de rhum/ DAAF

Figure 2Production et exportation de rhum agricole et de sucrerie

(en %)
Production et exportation de rhum agricole et de sucrerie ((en %))
Production 2020 2021 2022 Evolution 2021 - 2022 (en %)
Agricole 40 526 43 309 39 809 -8,1
Sucrerie 46 572 43 536 46 784 7,5
Totale 87 098 86 845 86 593 -0,3
Exportations totales
Agricole 18 482 18 742 20 701 10,5
Sucrerie 34 788 33 926 34 429 1,5
Totale 53 270 52 668 55 130 4,7
Marché local
Agricole 15 988 16 761 17 652 5,3
Sucrerie 10 10 10 0,0
Totale 15 998 16 771 17 662 5,3
  • HAP : Hectolitre d’alcool pur
  • Source : Douanes

La banane à l’export peine à retrouver son potentiel de production

Sur les trois premiers trimestres de 2022, la production mensuelle de banane est légèrement en deçà de celle de 2021, en lien probablement avec les 2 années de sécheresse successives de 2020 et 2021. Au quatrième trimestre, le passage de la tempête Fiona mi-septembre, qui a ravagé une bonne partie des plantations et détruit plusieurs infrastructures, a engendré une forte baisse des volumes de production traditionnellement attendus en fin d’année. Les exportations de bananes reculent ainsi de 8 % en 2022 avec 53 800 tonnes. La production reste encore très éloignée des niveaux observés avant le passage de l’ouragan Maria en 2017 qui étaient de l’ordre de 70 000 tonnes (figure 3).

Concomitamment à cette conjoncture climatique défavorable, les difficultés de lutte contre la cercosporiose noire, et plus récemment l’augmentation des coûts de production (fret, intrants) sont autant de freins au retour aux niveaux d’exportations avant le passage du cyclone. Le marché est toutefois particulièrement rémunérateur en 2022, avec des niveaux de prix significativement supérieurs à ceux observés ces dix dernières années. Ainsi le prix de la banane-export a atteint en moyenne 0,71 €/kg, soit une augmentation de 12 % par rapport à 2021.

Figure 3Exportation de la banane de Guadeloupe dans l’Union européenne

(en tonne)
Exportation de la banane de Guadeloupe dans l’Union européenne ((en tonne))
Mois 2020 2021 2022
janvier 3 012 4 274 4 143
février 3 108 3 781 3 529
mars 3 656 4 109 3 642
avril 3 654 4 513 4 041
mai 4 646 5 603 5 128
juin 4 918 5 824 5 700
juillet 5 193 5 678 5 766
août 4 304 6 353 5 272
septembre 4 055 5 488 5 816
octobre 4 110 4 903 4 390
novembre 4 176 4 031 3 655
décembre 4 800 4 109 2 741
  • Sources : CIRAD / DAAF

Figure 3Exportation de la banane de Guadeloupe dans l’Union européenne

  • Sources : CIRAD / DAAF

La production animale est en légère augmentation

La production de viande, dont le volume avait déjà augmenté en 2021 (+2,5 %) continue de croître en 2022 (+4,3 %). Après une chute de production entre 2018 et 2020, la reprise des abattages de porcins observée en 2021 se poursuit en 2022. Le tonnage augmente de 10 %, soit 16 000 bêtes abattues. Le poids moyen des carcasses progresse également (78 kg, contre 76 kg en 2021).

Cependant, quelques élevages, touchés par la tempête Fiona, ont été privés de moyens d’accès aux bâtiments pendant quelques jours. La mobilisation de l’aide nationale d’urgence dans le cadre du plan de résilience « Ukraine » a permis de limiter les effets sur la production des surcoûts au niveau du poste « alimentation ».

La production de viande bovine, qui était globalement en déclin depuis une dizaine d’années, se stabilise (-0,5 %) en 2022, avec 1 300 tonnes d’animaux abattus. Parallèlement, des actions sont en cours dans ce secteur afin d’améliorer la structuration de la chaîne de production avec entre autres la professionnalisation des éleveurs et l’amélioration de la productivité des élevages. Néanmoins, avec les sécheresses à répétition, la question de la sécurisation de la ressource fourragère devient également une priorité.

Bien que sa production soit encore marginale en termes de volumes de bêtes abattues, la filière caprine donne des signes encourageants de reprise. Après plusieurs années de baisse, la production a doublé entre 2021 et 2022 passant de 3 à 6 tonnes (figure 4).

Figure 4Volume de viande produite par espèce

(en tonne)
Volume de viande produite par espèce ((en tonne))
Production viande Bovins Porcins Caprins
2013 1 701 1 451 8
2014 1 728 1 244 7
2015 1 628 1 200 6
2016 1 569 1 409 5
2017 1 516 1 521 5
2018 1 408 1 497 4
2019 1 356 1 320 3
2020 1 410 961 3
2021 1 301 1 128 3
2022 1 295 1 237 6
  • Source : DAAF

Figure 4Volume de viande produite par espèce

  • Source : DAAF

Le secteur des fruits et légumes résiste

Malgré la conjoncture économique et climatique difficile, la production de fruits et légumes résiste. Avec 11 000 tonnes, le volume transitant par les organisations de producteurs reste au même niveau qu’en 2021. Les exportations de melon sont en hausse de 8 %.

Afin notamment de compenser les surcoûts de production, les prix augmentent pour la plupart des fruits et légumes en 2022. Ainsi, les fruits sont en moyenne 16 % plus chers qu’en 2021. Après des prix bas en 2021, ceux des légumes et tubercules augmentent respectivement de 13 % et 5 % et retrouvent des niveaux de prix similaires à 2020. Le cours de certains produits comme le melon, le maracudja, l’aubergine, sont en hausse depuis 3 ans (figure 5).

Le volume de fruits et légumes (frais, secs ou surgelés) importés, principalement en provenance de France métropolitaine, ne faiblit pas. Avec 42 900 tonnes de fruits et légumes importés, le volume est légèrement supérieur à celui de 2021 (+5 %), sans pour autant retrouver son niveau de 2020 (44 100 tonnes).

C’est principalement le volume de légumes importés qui augmente (+9,1 %). Les importations augmentent notamment de 38,8 % pour la tomate, après la chute de 43,3 % observée en 2021. Si une baisse de 7,0 % est constatée sur les importations d’agrumes (oranges, citrons et pamplemousses), le volume des fruits importés reste globalement stable (-0,5 %) à 17 500 tonnes (figure 6).

Figure 5Prix moyens annuels des fruits, légumes et tubercules

(en euro par kilo)
Prix moyens annuels des fruits, légumes et tubercules ((en euro par kilo))
Année Légumes Fruits Tubercules
2014 1,03 1,80 1,40
2015 1,14 1,84 1,47
2016 1,09 1,75 1,39
2017 1,22 1,95 1,42
2018 1,09 1,98 1,31
2019 1,19 1,82 1,67
2020 1,37 1,91 1,70
2021 1,18 2,01 1,57
2022 1,33 2,34 1,66
  • Source : DAAF – Prix producteurs, vente en gros

Figure 5Prix moyens annuels des fruits, légumes et tubercules

  • Source : DAAF – Prix producteurs, vente en gros

Figure 6Principaux fruits et légumes importés en 2022 en Guadeloupe

(en tonne)
Principaux fruits et légumes importés en 2022 en Guadeloupe ((en tonne))
Fruits et légumes 2020 2021 2022 Evolution 2021 – 2022 (en %)
Fruits comestibles 18 284 17 540 17 460 0,5
dont
Orange 4 356 4 320 4 020 -6,9
Citrons 2 470 2 421 2 205 -8,9
Ananas frais ou secs 1 219 1 022 1 244 21,7
Avocats frais ou secs 284 225 342 52,1
Pamplemousses 452 408 413 1,1
Goyaves, mangues et mangoustans, papayes, tamarins 166 147 177 20,5
Légumes, plantes, racines et tubercules 25 824 23 305 25 429 9,1
dont
Carottes et navets 2 030 1 814 1 932 6,5
Ignames 1 494 1 310 1 392 6,2
Tomates 1 147 650 903 38,8
Piments doux ou poivrons 515 498 538 8
Choux blancs et choux rouges 263 216 301 39,1
Laitues et chicorées 382 289 225 -22,1
Salades, autres que laitues 38 17 40 129,1
Céleris 118 93 132 42,5
Racines de manioc 49 58 63 9,4
  • Sources : Douanes/ DAAF
Publication rédigée par :Marie Bascou (Direction de l'alimentation, de l'agriculture et de la forêt)

Définitions

Les légumes sont un terme générique regroupant les légumes, plantes, racines et tubercules. Il comprend donc les tomates qui en botanique sont considérées comme des fruits.