Notes et points de conjoncture de l'année 2020 Des analyses régulières pour éclairer les conséquences de la crise sanitaire

 

Note de conjoncture
Paru le :Paru le15/12/2020
Note de conjoncture- Décembre 2020
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Point de conjoncture du 23 avril – Synthèse Insee

Note de conjoncture

Paru le :15/12/2020

De plus en plus de données sont maintenant disponibles pour analyser le fonctionnement de l'économie française pendant le confinement. Aux données haute fréquence (comme par exemple les montants agrégés des transactions par carte bancaire) et aux remontées directes d'entreprises et de fédérations professionnelles, s'ajoutent désormais les premières données administratives et d'enquêtes.

Ces nouvelles informations, plus « conventionnelles », viennent confirmer et préciser nos premières estimations instantanées de perte d'activité, parues le 26 mars puis le 9 avril. Au 23 avril 2020, nous estimons ainsi que l'économie française fonctionne 35 % en-dessous de la « normale » [1] . Sur le seul champ marchand, la perte est estimée à - 41 %, et même à - 49 % en excluant les loyers, composante peu sensible à court terme aux évolutions de l'activité. La consommation des ménages serait quant à elle inférieure de 33 % à sa normale.

Ces estimations suggèrent un très léger regain d'activité ces dernières semaines, en particulier dans l'industrie et le bâtiment, où certaines entreprises auparavant à l'arrêt ont sans doute pu reprendre une partie de leur activité après avoir mis en place une organisation garantissant la sécurité sanitaire de leurs salariés.

Néanmoins, la situation a très peu évolué depuis le début du confinement. Et par construction, il ne faut pas s'attendre à ce qu'elle évolue beaucoup tant qu'il durera sous sa forme stricte. Cette estimation d'un tiers de l'économie à l'arrêt (et même de la moitié, sur le champ marchand hors loyers), est, du reste, globalement compatible avec les résultats récents de l'enquête ad hoc sur l'activité et les conditions d'emploi de la main-d’œuvre, menée par la Dares dans les entreprises de 10 salariés ou plus : selon cette enquête, la moitié des salariés se trouvaient, fin mars, dans une entreprise dont l'activité s'est arrêtée ou a diminué de plus de moitié.

Elle est également compatible avec les premières remontées administratives concernant les demandes de mise en activité partielle, qui concernent désormais plus de 10 millions de salariés, soit environ la moitié des salariés du privé. Par ailleurs, les premières données de l'Acoss signalent pour mars une baisse mensuelle de 22,6 % du nombre de déclarations d'embauches de plus d'un mois.

Les résultats des enquêtes de conjoncture de l'Insee du mois d'avril, publiés ce jour, reflètent aussi cette perte d'activité. Le climat des affaires connaît une chute mensuelle historique et atteint son point le plus bas depuis que la série existe (1980). Dans certains secteurs, les soldes d'opinion sur les perspectives générales d'activité approchent voire atteignent leur plancher théorique (- 100), c'est-à-dire que les entreprises y sont unanimement pessimistes : c'est le cas, en particulier, de l'hébergement-restauration.

Certains indicateurs sont moins précis qu'à l'accoutumée. De fait, les statistiques sont, elles aussi, mises à l'épreuve en temps de crise sanitaire : les méthodes de collecte des enquêtes, les méthodes de calcul des indicateurs et les méthodes économétriques de prévision peuvent être affectées par les conséquences du confinement. Comment calculer un climat des affaires, quand, dans certains secteurs, il n'y a – provisoirement – quasiment plus d'affaires ?

Quand on le compare aux épisodes de récession des dernières décennies, ce choc se distingue en effet par sa soudaineté et par son ampleur, qui découlent directement de sa nature très singulière : la mise à l'arrêt « volontaire » – faute de mieux pour lutter contre l'épidémie – d'une large partie de l'économie. En ce sens, si les chiffres issus des enquêtes d'avril peuvent paraître spectaculaires par rapport aux séries chronologiques, ils ne doivent néanmoins pas surprendre.

Comme un organisme placé sous anesthésie, l'économie française n'assure plus que ses fonctions vitales. Les mesures de soutien budgétaire aux entreprises et aux ménages visent notamment à favoriser les conditions du réveil – dont on sait qu'il ne sera que très progressif – puis de la convalescence.

Car pendant la période de confinement, la perte de revenu national aura été considérable : la majorité sera absorbée par la hausse du déficit public, mais une part non négligeable restera au compte des entreprises [2] . Les ménages seront également affectés, même si leur taux d'épargne devrait grimper ponctuellement du fait de la baisse de la consommation pendant le confinement. À l'incertitude sur le scénario sanitaire, qui n'augure pas d'un rebond économique rapide, s'ajoute donc l'incertitude sur le comportement des ménages et des entreprises dans ce contexte inédit.

 

1. Nous remercions l'ensemble des partenaires qui continuent de nous apporter leur concours pour réaliser cet exercice, en particulier le Groupement Cartes bancaires CB, la Direction générale des entreprises, SNCF Réseau, RTE, la direction de la stratégie, des études et des statistiques de la CNAM, France Industrie, Rexecode, les services du Medef, la Fédération des industries mécaniques. Les estimations figurant dans ce document n'engagent bien sûr que l'Insee.

2. À ce stade, notre analyse rejoint, qualitativement, celle présentée récemment par l'OFCE (Policy Brief n° 66 , 20 avril 2020), même si nous ne pensons pas avoir des prévisions assez fiables de comptes d'agents pour les publier.