Courrier des statistiques N1 - 2018

Le premier numéro est paru. Il comporte un article du directeur général de l’Insee sur l’organisation administrative du système statistique public en France, qui reprend son intervention au World Statistics Congress de l’International Statistical Institute en 2017.
Un dossier de quatre articles éclaire ensuite la problématique de l’utilisation des sources administratives en statistique, avec en particulier une présentation de la DSN par la directrice du GIP - Modernisation des Déclarations Sociales. Puis on change de registre avec la mise en place du dispositif mondial d’identifiant unique des intervenants sur les marchés financiers (Legal Entity Identifier, LEI), et le rôle qu’y joue l’Insee. Enfin, le dernier article présente de façon pédagogique la notion de statistique publique sous ses différentes facettes, tant au niveau français qu’européen.

Courrier des statistiques
Paru le :Paru le06/12/2018
Christine Chambaz, Cheffe de la sous-direction de la statistique et des études, ministère de la Justice
Courrier des statistiques- Décembre 2018
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De l’activité de la justice au suivi du justiciable Faire parler les données de gestion

Christine Chambaz, Cheffe de la sous-direction de la statistique et des études, ministère de la Justice

La statistique sur la justice est une statistique bâtie essentiellement sur l’exploitation des données administratives issues des applicatifs de gestion des juridictions et des services. Elle ne s’appuie que très rarement sur des enquêtes auprès des personnes, ne serait-ce que parce qu’elle ne dispose pas de façon naturelle d’une base de sondage qui permettrait de les organiser. Il n’existe en effet pas de fichier général des justiciables, et la plupart des sources mobilisables sont expurgées des éléments nominatifs avant d’être transmises au service statistique. Le positionnement de cette statistique par rapport à la production de données décisionnelles est ambigu, quand bien même les deux portent des objectifs différents. La diversité des processus de collecte reflète la diversité des sources à exploiter. Au-delà des questions techniques, les difficultés sont liées au passage de données de gestion vivantes, à travers des concepts métiers également vivants, à des données statistiques datées, adossées à des concepts et des référentiels plus stables. Mais le véritable défi pour les années à venir reste de passer d’un système rendant compte de l’activité de la justice à un système d’observation du parcours des justiciables. L’évolution des systèmes d’information et l’extension des possibilités d’appariement ouvrent de nouvelles perspectives, mais des évolutions législatives seront également indispensables.

Le justiciable : l’invention d’une unité statistique

La statistique sur la justice a longtemps été centrée sur le suivi du volume d’activité des juridictions, civiles ou pénales, dans une approche uniquement quantitative. Elle s’attache désormais de plus en plus à décrire les contentieux qu’elle traite, voire les justiciables qui les portent, dans une approche plus explicative des comportements humains. Ce glissement a été permis par l’évolution des sources mobilisables, elle-même sous-tendue par un intérêt accru pour la connaissance économique et sociologique de la justice, et un souci d’évaluation des politiques publiques. Il s’accompagne d’un changement d’unités statistiques qui peut être porteur d’ambiguïté pour qui s‘intéresse à des séries historiques. Il s’inscrit aussi dans le développement simultané, aux côtés d’indicateurs de statistique publique, d’indicateurs décisionnels, tournés vers le suivi de la performance et dont les propriétés peuvent être différentes, en termes de fraîcheur mais aussi de complétude.

S’intéresser aux justiciables suppose de pouvoir faire le lien entre les affaires et les parties prenantes à ces affaires. Et cela est plus ou moins aisé. Contentieux par contentieux, et affaire par affaire, cela semble évident : un divorce se prononce généralement à l’encontre de deux ex-conjoints, un contentieux locatif oppose un bailleur et un locataire, une agression compte un (des) auteurs(s) et une (des) victime(s), etc. La réalité peut cependant être plus compliquée, notamment en matière pénale : supposons ainsi une affaire qui arrive au parquet avec plusieurs personnes (ou « auteurs ») impliquées. Le traitement du dossier par le parquet peut conduire la justice à poursuivre certaines de ces personnes, tandis que d’autres seront mises hors de cause ou verront l’affaire classée, pour ce qui les concerne ; a contrario, l’instruction du dossier peut conduire à identifier d’autres « auteurs » qui viendront grossir les parties prenantes de l’affaire, en cours de traitement. On voit ici que le nombre d’auteurs de cette affaire, selon les étapes considérées de la procédure judiciaire, pourra fluctuer. Compter les justiciables, ou les « auteurs » impliqués dans les affaires suppose donc non pas tant de pondérer les affaires par le nombre de leurs auteurs que de suivre ces auteurs eux-mêmes tout au long de leur aventure judiciaire. Ce qui implique la construction d’un système d’information statistique structuré selon ces étapes, au plus près de la pratique des juridictions, qui permette de rendre compte des « parcours judiciaires ». Produire une statistique sur les parcours judiciaires nécessite de comprendre la procédure judiciaire et ses pratiques. C’est une statistique fortement imprégnée du « métier », des processus de production de la justice.

Par ailleurs, l’intérêt porté aux justiciables fait naître rapidement une problématique de suivi de ces justiciables au cours du temps, au-delà d’une affaire bien définie qui les a fait rencontrer la justice, à un moment donné. Sont-ce les mêmes qui reviennent pour régler des différends ou des actes successifs ? Les auteurs d’infractions récidivent-ils au sens commun - qui suggère simplement un retour vers la justice rendant une réponse pénale - plutôt qu’au plus restrictif ?

En l’état du système d’information, le suivi des personnes est encore impossible, faute d’identifiant commun dans les différents applicatifs de gestion, et faute de disposer de coordonnées nominatives qui permettraient la construction d’un tel identifiant dans les fichiers statistiques. En matière civile, la statistique reste jusqu’à présent une statistique relative aux affaires. En matière pénale, la volonté de produire des statistiques sur les justiciables force à imaginer une unité statistique originale, intermédiaire entre l’affaire et l’auteur : « l’auteur-affaire ». Ne pouvant repérer le retour d’un auteur dans des affaires successives, le statisticien estime des volumes de fréquentation de la justice selon différents critères, de l’orientation par les parquets à la filière de jugement en passant par les infractions commises et les peines prononcées. De la même façon, il approche le nombre des victimes ou des parties civiles par des « victimes-affaires ».

Une production en tension entre décisionnel et statistique

L’introduction du justiciable comme unité de compte était censée lever l‘ambiguïté entre indicateurs décisionnels pour le pilotage opérationnel et indicateurs statistiques de plus long terme pour l’évaluation des politiques de justice, dans une approche plus sociologique de la justice. Pourtant, même si le point peut sembler anodin, l’acrobatie consistant à produire des statistiques sur les justiciables via des unités ad hoc contribue à entretenir cette ambiguïté. Le suivi des auteurs peut en effet être compris, même si ce n’est pas son but premier, comme la possibilité de pondérer les affaires par le nombre de personnes qu’elles impliquent, et indirectement renseigner sur la charge de travail associée ; une affaire avec trois auteurs devrait selon toute logique donner plus de travail de gestion qu’une affaire avec un seul auteur. À partir de là, l’indicateur construit pour un usage de suivi de parcours est récupéré pour un usage d’évaluation de l’activité.

Le ministère a souhaité assurer une cohérence entre décisionnel et statistique, à travers une qualification partagée de la donnée utilisée. Ce souhait sous-tend le lancement du projet de Système d’Information Décisionnel et statistique (SID) inscrit au schéma directeur du ministère pour les années 2009 à 2013, et dont le développement est encore en cours. Économiquement raisonnable, la construction de cette donnée « unique » en termes de sources et de concept renforce la perméabilité entre décisionnel et statistique. Elle fait ainsi naître une difficulté nouvelle : celle d’expliquer les différences entre les deux, voire de justifier leur coexistence. L’argument le plus fort devient alors celui de la qualité de la donnée, dans les processus de production et de diffusion statistique, et dans la permanence du chiffre qui n’est rendu public qu’une fois corrigé d’un certain nombre d’erreurs de mesure et au moment où l’alimentation des applicatifs de gestion est supposée suffisante.

Une collecte en silos, miroir de l’organisation de la justice

L’organisation de la justice repose sur un partage de compétences complexe entre ordres, juridictions et instance (encadré). L’exercice de la justice, organisée en silos métiers, est adossé à un système d’information également en silos. La gestion de chaque type de contentieux est en effet enregistrée dans un applicatif de gestion ad hoc, non conçu initialement pour communiquer avec les autres. La « statistique justice » produite par le Service Statistique du Ministère (SSM) de la justice exploite les données des juridictions judiciaires, en termes de décisions et d’accès au droit (à travers l’accès à l’aide juridictionnelle). Depuis peu, elle utilise également les données des services chargés de l’application des peines, de l’insertion et de la probation et prochainement les données des établissements pénitentiaires. Enregistrées pour des fins de gestion en silos, ces données sont collectées également en silos pour la statistique, concourant à produire une statistique morcelée.

Au-delà même du morcellement lié à la multiplicité des contentieux et à l’organisation judiciaire et ses outils, les données de gestion de la justice présentent une complexité qui reflète la variété des conditions de réception des différentes affaires et l’évolution dans le temps des affaires. Au civil, la justice est souvent directement saisie par le justiciable ou ses représentants. Au pénal, les affaires arrivent au parquet soit à partir d’un procès-verbal établi par la police, la gendarmerie ou une autre administration, soit d’une plainte ou d’une dénonciation directe. De plus en plus souvent, les affaires transmises par la police ou la gendarmerie le sont par échanges interapplicatifs, le parquet ayant possibilité d’importer directement certains attributs des affaires, renseignés par les services de sécurité intérieure. Peut ainsi être récupérée une indication de la nature d’infraction telle que définie par ces services avant même la qualification de l’affaire par le parquet (qui seule a valeur légale, sur le champ restreint des affaires poursuivies). L’information est ainsi plus riche, mais avec une qualité hétérogène sur une variable clé : à un stade précoce, la nature d’infraction attachée à une affaire pourra en effet être certifiée par la justice, notamment dans les cas de traitement en temps réel où l’officier de police judiciaire décide de cette variable en lien direct avec le parquet, mais aussi n’être qu’une indication provisoire. Autrement dit, ce qui à un stade avancé d’une affaire poursuivie constitue une variable d’intérêt statistique majeur pour l’analyse du traitement par la justice de la délinquance n’est à un stade plus précoce qu’une variable de transition entre le traitement d’une affaire par les forces de sécurité et le traitement de la même affaire par la justice. La remontée plus fréquente de cette variable devrait toutefois permettre, à terme, de faciliter les comparaisons entre les statistiques de la délinquance enregistrée et les statistiques de la justice pénale... du moins sur le champ des affaires arrivées via les services de police et de gendarmerie.

La construction des données administratives de la justice, dont se nourrit la statistique justice, repose donc sur des dispositifs multiples, où la généalogie des affaires et des données est variable. Elle s’appuie néanmoins de plus en plus sur des flux applicatifs organisant la remontée d’extractions depuis les bases de gestion des juridictions vers le système d’information statistique.

Pour le civil, une statistique corsetée par les logiciels de gestion

Le système de flux applicatifs est particulièrement développé en matière de statistique sur la justice civile. Il couvre les affaires enregistrées dans le Répertoire Général Civil (RGC) des tribunaux d’instance, des tribunaux de grande instance, des cours d’appel, des CPH, mais aussi l’information sur les affaires relatives à la protection des majeurs et des mineurs, aux injonctions de payer, à l’acquisition de la nationalité française, à l’octroi de l’aide juridictionnelle... La justice des mineurs est également concernée. Jusqu’en octobre 2017, l’enregistrement des PACS (pactes civils de solidarité) par les greffes remontait par cette voie vers le service statistique. Au total, ce système de flux applicatifs collecte les données de 11 logiciels, en miroir de l’organisation judiciaire.

La cartographie des flux se trouve par ailleurs compliquée par la composante locale des bases interrogées. Au-delà du millier de points de collecte impliqués dans les extractions statistiques mensuelles du RGC (avec plus de 5 000 fichiers réceptionnés et traités par mois, dont 85 % au cours de la première quinzaine du mois), la complexité du dispositif tient aussi à l’existence de référentiels parfois ouverts (locaux) et à des pratiques de greffes hétérogènes pour l’enregistrement et la codification des affaires et des procédures.

Seules des informations codées sont extraites, et stockées dans des tables primaires ; les documents numérisés relatifs aux différentes procédures ne sont pas exploités par la statistique. Du fait des adaptations locales qui ont pu être faites, les données en provenance des différentes juridictions n’ont pas forcément la même qualité. La première étape de la production statistique consiste alors en une normalisation des données, pour transformer les données brutes de gestion en des données qualifiées pour la statistique. Cette transformation suppose de nombreux contrôles et redressements, notamment par confrontation avec les nomenclatures de gestion en vigueur. Contrairement à ce qu’on peut observer dans des enquêtes, où le respect des référentiels est un a priori de la collecte, la normalisation des données intervient ici a posteriori et suppose donc une intervention spécifique du statisticien.

Au final, dans le champ du civil, si le système de flux applicatifs permet de disposer de données de détail sur les affaires enregistrées par les juridictions, leur champ reste cependant limité, prédéfini, si bien que la statistique est difficilement évolutive. L’évolution des flux statistiques suppose en effet une évolution des logiciels de gestion eux-mêmes et doit être arbitrée et programmée en concurrence avec les maintenances exigées par le métier. L’automatisation des remontées de flux envisagée dans le cadre de la refonte à l’horizon 2022 des applicatifs civils du ministère (projet Portalis) devrait toutefois s’accompagner d’une plus grande souplesse dans la définition du périmètre des extractions.

Pour le pénal, les ressources d’un entrepôt de données centralisé

Les progrès ainsi enclenchés dans le domaine de la statistique civile sont déjà partiellement opérants dans celui de la statistique pénale. Pendant de nombreuses années, la statistique pénale s’appuyait sur deux types de données : les compteurs d’activité renseignés par les juridictions à partir de leurs infocentres métiers dans des questionnaires ad hoc, et l’exploitation des données de détail du casier judiciaire national. La possibilité d’exploiter directement les données du logiciel Cassiopée, en substitution de la collecte par questionnaire, a changé en profondeur le travail du statisticien pénal. En lui donnant accès à un champ élargi de données de détail, collectées de façon centralisée selon des normes communes, elle a permis l’arrivée d’une nouvelle unité de compte (l’auteur-affaire, voir plus haut) et favorisé les études sur la filière pénale : Cassiopée couvre en effet la procédure depuis l’enregistrement de la plainte jusqu’au service de l’exécution des peines. D’abord expérimentale, l’exploitation de Cassiopée s’est rapidement inscrite dans le cadre plus général du projet de système d’information décisionnel et statistique (SID) du ministère. L’architecture visée pour le SID est celle d’un entrepôt de données central alimenté par l’ensemble des applications de gestion et proposant des magasins de données qui répondent aux différents besoins : pilotage stratégique, statistique, pilotage opérationnel, analyses par métier. Le SID n’est aujourd’hui que très partiellement en place : aux côtés de Cassiopée, présente dès 2015 dans l’entrepôt, ont été chargées en 2018 les données du logiciel de gestion Application des Peines, Probation et Insertion (APPI), et la réflexion sur le chargement prochain des données du logiciel de suivi des détenus (Genesis) ou d’autres sources relatives au pénal n’est pas terminée.

L’alimentation du SID repose sur une extraction de données brutes des applicatifs de gestion. Cette extraction se fait soit sur le périmètre global de l’applicatif concerné (c’est le cas pour APPI), soit sur une sélection de tables, dérivant d’une sélection opérée en amont (c’est le cas pour Cassiopée où seules les tables alimentant aussi l’infocentre décisionnel du même nom ont été reprises). Le volume des données chargées et manipulées se chiffre en millions d’enregistrements, les données étant historisées. Le processus de traitement prévoit l’existence de plusieurs couches de données de qualité variable pour la statistique : les données brutes sont d’abord complétées avec les informations issues du système de référence de la justice, des nomenclatures propres au SID et des tables de paramétrage du SID, puis corrigées, transformées et historisées dans des tables dites de « données qualifiées ». Ce sont ces tables qualifiées qui servent à la fois pour le décisionnel et pour la statistique ; la qualification des données est complexe, devant répondre aux besoins, en partie contradictoires, du décisionnel (indicateurs prédéfinis calculés sur des données vivantes) et de la statistique (données de référence mais dont l’exploitation doit rester souple). Des couches de publication, sans historisation et contenant des clés fonctionnelles, sont ensuite créées pour les besoins de la statistique. Ce nouveau mode de collecte des données administratives devrait donner le cadre de référence pour l’évolution à venir de la statistique de la justice, permettant de limiter voire de supprimer certaines collectes par questionnaire, dans un horizon de cinq ans.

Des enquêtes pour compléter les données de gestion

Les données codées enregistrées dans les logiciels de gestion restent toutefois insuffisantes pour la connaissance et la compréhension d’un certain nombre de sujets. Seules les variables nécessaires à la gestion des affaires sont en effet enregistrées ; les variables « périphériques », quand elles sont prévues, sont généralement assez mal saisies dans la mesure où la qualité de l’information n’engage pas le devenir du dossier. Pour pallier les limites des données applicatives, la statistique s’appuie sur un autre type de dispositif : les « enquêtes décisions », dont la collecte permet de disposer d’informations détaillées présentes dans les jugements ou décisions mais pas dans les logiciels de gestion. Les thèmes abordés sont variés, depuis l’organisation de la résidence des enfants en cas de divorce jusqu’aux condamnations pour des infractions à caractère raciste ou la motivation des décisions d’emprisonnement. Ces enquêtes consistent à collecter auprès des juridictions un échantillon de décisions, sous format papier ; une grille d’analyse est définie à partir d’un sous-échantillon de ces décisions, en lien avec les services métiers à l’origine de la demande ; elle est utilisée pour la saisie des principales informations en une base structurée permettant l’exploitation statistique. Les échantillons sont généralement définis comme l’ensemble des décisions prises pendant une période donnée relativement au contentieux étudié ; la période est fixée de sorte à pouvoir disposer d’un échantillon suffisant, au minimum de 3 000 dossiers.

D’une donnée de gestion vivante à une donnée statistique millésimée

Les données de nature administrative mobilisées pour la construction de la statistique justice ont été organisées primitivement pour servir des besoins de gestion des affaires, pas ceux de la production statistique. Leur transformation en données statistiques impose la définition de concepts « juridico-statistiques », puis l’interprétation d’évènements administratifs dans ces concepts afin de pouvoir décrire les procédures et les parcours de justiciables.

La première difficulté du statisticien est de poser des dates de référence pour l’observation et le dénombrement des données conjoncturelles. L’enregistrement des affaires est en effet réalisé en continu par les services des greffes (ou du casier judiciaire pour ce qui concerne ses données), à mesure de l’avancée du traitement des dossiers, mais aussi sous la double contrainte des urgences et des moyens disponibles. Les estimations de flux comme de stocks pour un trimestre ou une année donnée peuvent donc être affectées par une variation du rythme de saisie des dossiers en juridiction. S’agissant par exemple des données relatives aux affaires pénales traitées par les tribunaux correctionnels, on constate ainsi un écart de 3 % à 5 % entre les nombres d’auteurs poursuivables un trimestre donné selon qu’on regarde les indicateurs publiés en M+4 (provisoires) et ceux publiés en M+8 (« définitifs », même si les bases peuvent encore évoluer marginalement) ; les . Dans le cas des statistiques relatives aux condamnations, le choix est en revanche fait de corriger de la sous-estimation anticipée : ainsi, on estime qu’environ 14 % des condamnations de 2016 n’ont pas encore été prises en compte en août 2017 au Casier judiciaire national, et les estimations provisoires publiées à l’automne 2017 sur les condamnations de 2016 inscrites au casier judiciaire national sont recalées pour tenir compte de ce sous-enregistrement. En 2016, la correction était moindre, de l’ordre de 12 %. Ces écarts devraient toutefois se réduire avec le développement des procédures d’échanges inter-applicatifs, qui favorisent une entrée en continu des nouveaux dossiers dans les applicatifs de gestion.

Les écarts de dénombrement correspondant à des délais de saisie des dossiers peuvent par ailleurs porter soit sur l’enregistrement des affaires nouvelles, soit sur celui d’évènements particuliers, dont la fin du traitement des dossiers. Les estimations de nombre d’affaires nouvelles, terminées, et a fortiori des stocks, mais aussi les estimations de délais de procédures peuvent ainsi être entachées d’erreurs de mesure qu’il convient de réduire au maximum. Le service statistique est de ce fait attentif au rythme de remontée des affaires. Les variations de volume inattendues donnent lieu à des échanges avec la direction des services judiciaires, voire les juridictions elles-mêmes, pour déterminer si la variation correspond à une variation d’activité ou à une variation du rythme de saisie (éventuellement du fait d’un simple changement dans le processus d’enregistrement des affaires...) qu’il sera difficile voire impossible de corriger. Dans le domaine pénal, on a ainsi constaté une croissance des transmissions inter-applicatives des affaires des services de police et de gendarmerie vers la justice ; celle-ci pourrait, au moins partiellement, expliquer la baisse constatée par ailleurs de la proportion des affaires non enregistrées, c’est-à-dire arrivées au parquet sous format papier et qui n’ont pas fait l’objet d’un enregistrement, car les infractions sont de faible gravité et l’auteur inconnu ou non identifiable.

De l’enregistrement des faits à l’observation des comportements

L’exemple précédent illustre aussi que, hors échanges inter-applicatifs, l’enregistrement même des faits n’est pas forcément automatique, et n’est réalisé que s’il est porteur de conséquences pour l’administration de la justice. L’analyse des séries historiques des condamnations, portées au casier judiciaire national, montre ainsi l’impact des amnisties présidentielles de 1988, 1995 et de 2002.

D’une part, ces dernières ont entraîné une baisse importante des condamnations prononcées au cours de ces années. Compte tenu des délais de transmission, une partie des condamnations prononcées l’année qui précède est d’autre part arrivée au Casier judiciaire après la promulgation de cette loi, et n’a pas été inscrite. Les données des années ultérieures sont enfin également touchées pour des faits commis avant la loi et sanctionnés l’année qui la suit. La méconnaissance de cette pratique peut conduire à une interprétation erronée des évolutions constatées statistiquement.

Une autre difficulté vient du fait que les applicatifs enregistrent des éléments d’un processus de gestion, qu’il faut réorganiser pour les besoins de la statistique. Une affaire est constituée d’une chaîne d’événements. En fonction du type de l’affaire, les événements ne seront pas les mêmes. En matière pénale, des concepts de filière, de phase et d’étape ont été créés dans le SID pour mieux suivre les différents déroulements possibles d’une affaire au Parquet. Une filière est constituée d’une succession de phases (saisine, orientation, décision...), elles-mêmes rassemblant une ou plusieurs étapes, propres ou non à la filière considérée. La notion d’étape est proche de la notion d’événement, mais sans en être synonyme, seuls les évènements « marquants » signalent une étape. Il s’agit alors de bien associer les différentes étapes possibles aux filières sur lesquelles on produit des statistiques, ce qui suppose un dialogue régulier avec les professionnels de la justice. Jusqu’en avril 2017, les premières orientations en Comparution sur Reconnaissance Préalable de Culpabilité (CRPC) n’étaient ainsi comptabilisées qu’à partir d’une seule étape, celle de requête en homologation de peine sur CRPC. Un travail méthodologique a conduit à élargir le champ des étapes associées à la CRPC et à réviser de façon très significative (+ 27 000, soit + 46 %) le nombre de premières orientations en CRPC ; la révision a été documentée lors de la publication des résultats. En matière civile, de la même façon, la statistique s’appuie sur une nomenclature des activités civiles dont il s’agit de bien accompagner les évolutions pour conserver une statistique pertinente.

Des nomenclatures de gestion aux nomenclatures statistiques

Comme dans tout système d’information, les nomenclatures et référentiels fournissent l’ancrage du système d’information de la justice, auquel est adossée la statistique de la justice. Ces référentiels présentent toutefois des catégories potentiellement en mouvement du fait de leur double dépendance aux codes juridiques et à l’organisation judiciaire. Les évolutions législatives successives peuvent en effet créer de nouvelles catégories d’affaires en matière civile, de nouvelles infractions pénales, ou en altérer la qualification. Car les nomenclatures de gestion de la justice peuvent être complexes, fortement adhérentes aux codes et donc au moment de l’observation (le contenu des codes pouvant changer), et surtout incomplètement structurées. La nomenclature des affaires civiles (NAC) épouse une structure en trois niveaux pour identifier les demandes dont sont saisies les juridictions civiles à titre principal, dans les différents secteurs des relations juridiques. En revanche, en matière pénale, les codes associés aux différentes natures d’infractions (NATINF) ne sont pas signifiants. La base de ces codes, qui recense la plupart des infractions pénales, évolue au gré des modifications législatives et réglementaires. Son usage pour la statistique nécessite de ce fait une analyse préalable, par un professionnel de la justice pénale, pour opérer les regroupements les plus opérants en fonction de la problématique traitée.

Les statistiques fondées sur les catégories juridiques des nomenclatures de gestion, dont les contours évoluent avec les textes, en sont nécessairement affectées. Tant qu’il s’agit de mesurer l’activité de la justice, cela conserve un sens ; à partir du moment où l’objet d’intérêt devient le comportement des justiciables, il importe de pouvoir tracer l’évolution des catégories, afin de ne pas imputer une variation statistique à un changement de comportement alors qu’elle ne traduirait qu’un glissement d’une catégorie vers une autre... voire l’apparition ou la disparition d’une nouvelle catégorie. En matière pénale, on relève ainsi une augmentation de 17 % entre 2004 et 2016 du nombre de condamnations prononcées en matière délictuelle à l’encontre des personnes majeures. Cette progression résulte principalement de la transformation, en 2004, de plusieurs contraventions en .

Le fait de dépendre de nomenclatures de gestion, vivantes, ne dédouane pas de disposer de nomenclatures statistiques plus stables. L’enjeu est de construire et maintenir le lien entre les deux types de nomenclatures. Afin d’assurer une continuité dans les regroupements – qui doivent néanmoins être mis à jour en continu, du fait de la production en continu des textes de loi –, des nomenclatures de diffusion statistique ont été construites au fil du temps. Dans les années 1980, le service statistique ministériel a ainsi élaboré la « NOMINF » pour l’exploitation des seules condamnations inscrites au casier judiciaire ; il s’agit d’une nomenclature en quatre positions, organisée selon la notion juridique de l’intérêt protégé qui est celle du code pénal, facilitant l’affectation des NATINF. En 1988, une nomenclature spécifique de diffusion a été créée, la DIFINF, avec un nombre de postes restreint (environ 200). Construite sur 5 caractères, elle fait apparaître en premier lieu la grande catégorie d’infraction (crime/délit/contravention) ; puis elle reprend la présentation par intérêts protégés, le domaine d’infraction et en dernier lieu les infractions les plus fréquentes auxquelles sont agrégées, dans un même poste, des infractions plus rares. Cette nomenclature est utilisée dans toutes les publications du service statistique ministériel.

L’usage de ces nomenclatures de diffusion reste cependant limité aux publications du service statistique ministériel. Or, une nouvelle nomenclature internationale, la Classification inter- nationale des infractions à des fins statistiques (ICCS), est amenée à être de plus en plus mobilisée pour produire et comparer les données statistiques des différentes institutions de justice pénale des différents pays. L’ICCS peut être appliquée à toutes les formes de données pénales recueillies aux différents stades de la procédure (police, parquet, tribunaux et administration pénitentiaire) ou au cours des enquêtes de victimation. L’objectif aujourd’hui est d’adapter l’ICCS à la situation française dans une Nomenclature Française des Infractions (NFI), puis de mettre celle-ci en œuvre dans le système statistique public français. Un groupe de travail se penche sur le sujet depuis fin 2016 ; il est piloté par l’Insee et associe les services statistiques de la justice et de la sécurité intérieure, l’observatoire national de la délinquance et des réponses pénales (ONDRP) et le pôle d’évaluation des politiques pénales de la direction des affaires criminelles et des grâces.

Une démarche qualité indispensable

La statistique de la justice présente un certain nombre de particularités qui, au final, sont sûrement partagées avec nombre de systèmes adossés à une remontée de données administratives : diversité des dispositifs de collecte et, avec elle, variété des unités statistiques, de la granularité des données, de leur périodicité ; adhérence des données collectées au cadre légal et réglementaire en vigueur et, avec elle, difficulté à produire des séries homogènes – à moins de rester sur une description de l’activité des services – voire de suivre des phénomènes qui, à un moment donné, peuvent sortir du champ du ministère de rattachement du service statistique. En définitive, leur exploitation nécessite une bonne connaissance des pratiques sociales et professionnelles dont elle entend rendre compte, pour reconstruire des concepts propres à être compris par l’ensemble des acteurs de la justice, justiciable compris. Elle nécessite aussi de disposer d’une documentation précise des processus de collecte et de production statistique, qui permet de tracer les évolutions de contexte et les changements méthodologiques opérés et permet in fine les analyses intertemporelles de séries fortement heurtées dans leur construction. L’élaboration de cette documentation et sa mise à disposition font partie intégrante du travail du statisticien. Le service statistique du ministère de la Justice investit fortement dans cet aspect et s’inscrit ainsi dans une démarche qualité d’amélioration des processus qui contribue aussi à distinguer la statistique du décisionnel.

Bâtir un système d’observation du parcours des justiciables...

Autant sinon plus que sur la connaissance de l’activité de la justice, la demande exprimée – tant par les décideurs que par les citoyens – porte aujourd’hui sur la compréhension des processus à l’œuvre. Les besoins de connaissance et d’évaluation se multiplient, par exemple en matière pénale sur la durée de mise à exécution des peines, l’impact des alternatives aux poursuites sur les retours devant la justice, en amont même de condam- nations qualifiant la récidive ou la réitération en matière pénale ; ou en matière civile sur la médiation familiale ou les mesures de protection juridique des majeurs. Progresser sur ces sujets suppose de pouvoir suivre les justiciables à travers le temps ; les suivre à travers le temps suppose souvent d’approcher des informations collectées dans des applicatifs disjoints.

Or, ce rapprochement est aujourd’hui impossible sur le plan statistique, faute de disposer, à une étape ou une autre de la construction des fichiers statistiques, de données identifiantes communes à chacune des sources. Le service statistique n’a accès qu’à des sources expurgées des données nominatives : dans le domaine pénal, du fait de l’article 48-1 du code de procédure pénale qui réduit l’accès aux données par les statisticiens aux seules données non nominatives ; dans le domaine civil, du fait d’une habitude et des travaux à engager pour faire évoluer les extractions pour la statistique (voir supra). Une expérimentation conduite en 2016-2017 d’appariement de sources pénales (Cassiopée, APPI) à partir d’un identifiant anonyme, construit par les services informatiques du ministère de la Justice, en amont de la livraison au service statistique a été réalisée. Cet identifiant anonyme dérive des noms des personnes phonétisés et cryptés, la même clé ayant été utilisée dans les deux sources. L’expérimentation a mis en évidence la possibilité de réaliser l’appariement entre Cassiopée et APPI certes sans recours aux noms et prénoms phonétisés et cryptés, mais aussi que la présence de ces variables a un effet positif sur le taux et la qualité de cet appariement. Cette possibilité ne s’applique cependant qu’aux sources Cassiopée et APPI, qui contiennent l’une et l’autre des données relatives aux jugements. Les noms et prénoms demeurent ainsi indispensables pour apparier les données d’individus présentes dans plusieurs affaires, comme c’est le cas au sein de la source Cassiopée. Il serait par ailleurs indispensable qu’ils figurent en clair dans les fichiers transmis à la statistique, afin de pouvoir vérifier et contrôler la qualité des appariements réalisés, en confrontant les données appariées aux données primaires. Cela suppose toutefois un travail législatif pour modifier le code de procédure pénale.

... Mieux connaître les usagers de la justice...

Un second enjeu pour une meilleure compréhension des processus judiciaires serait de développer la connaissance des usagers de la justice, utile à la définition des politiques de prévention et/ou d’accès au droit (une meilleure connaissance des niveaux de revenu du public permettant par exemple d’évaluer l’impact tant social que budgétaire d’une réforme de l’aide juridictionnelle). Or, les fichiers statistiques tirés des applicatifs de gestion sont relativement pauvres en descripteurs socio-économiques (niveau de diplôme, niveau de revenu...). Le progrès passerait ici par le rapprochement avec des sources externes au ministère de la Justice. Mais ce rapprochement suppose également de disposer d’informations communes avec ces dernières donc, en l’absence notamment du NIR, de données nominatives permettant la création d’un « pseudo-NIR ».

... Et accompagner la déjudiciarisation

Un troisième enjeu sera d’être en capacité de produire une statistique sur le règlement des contentieux, voire sur la réponse au besoin de justice exprimé par les citoyens, qui dépasse le cadre des activités prises en charge par les juridictions.

La loi de modernisation de la Justice du XXIe siècle « J21 » publiée au Journal officiel du 19 novembre 2016 visait à « permettre aux juges de se recentrer sur leur mission essentielle : trancher des litiges », en favorisant notamment les modes alternatifs de règlement des conflits, en réservant le passage devant le juge aux affaires familiales, lors des divorces, aux seuls divorces contentieux et, pour les divorces par consentement mutuel, à ceux où un enfant a demandé à être entendu. Le projet de loi de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice (L’étude d’impact est disponible sur le site Ouvrir dans un nouvel ongletwww.justice.gouv.fr/art_pix/20180420_pjljustice_pjl_etude_impact.pdf, débattu au Parlement à l’automne 2018, porte également l’objectif « de développer les modes alternatifs de résolution des différends afin que ne soient portées devant le juge que les affaires les plus contentieuses, pour lesquelles les parties n’ont pu trouver ensemble de solution amiable (...) ». Le mouvement ainsi amorcé de déjudiciarisation du règlement des contentieux va ainsi faire sortir du champ de l’administration des activités dont la connaissance ne repose aujourd’hui que sur des sources de données administratives.

Cette évolution pose la question de la capacité du système statistique public, dépendant aujourd’hui des données produites par l’administration, à accompagner ce mouvement de déjudiciarisation. On relève en 2017 une forte baisse du nombre de divorces par consentement mutuel dans l’activité des tribunaux de grande instance ; cette baisse correspond à la déjudiciarisation du divorce par consentement mutuel, mentionnée plus haut. Pour autant, les comportements des Français en termes de divorce ont-ils évolué ? Un peu plus d’un an après la mise en œuvre de J21, et en l’absence d’un système de remontée d’information sur les divorces enregistrés par les notaires, il est devenu impossible d’estimer simplement le nombre total de divorces prononcés en France, et a fortiori d’en décrire les populations concernées et les modalités d’organisation.

De plus en plus, l’intérêt du public se porte sur le service rendu quels qu’en soient ses acteurs, davantage que sur les acteurs qui rendent le service. Ce besoin s’exprime aussi bien au niveau national qu’international. Citons, par exemple, le suivi des objectifs de développement du millénaire de l’ONU, qui nécessite de produire des indicateurs sur l’accès de tous à la justice, et les travaux de l’OCDE qui considère l’accès à la justice comme un facteur d’inclusion sociale. L’émergence de ces besoins nouveaux, couplée à l’évolution du champ de compétence de l’administration, pose une limite à la statistique élaborée à partir de données administratives, alors que le champ de production du service par l’administration ne recouvre plus que partiellement le champ du service étudié.

L’organisation du système judiciaire

 

La récidive légale est la réitération d’une infraction similaire ou proche d’une infraction précédemment et définitivement condamnée. Les règles de la récidive varient selon que l’infraction est contraventionnelle, délictuelle ou criminelle.

On sait toutefois que la donnée provisoire sera nécessairement réévaluée à la hausse.

Défaut de permis de conduire, défaut d’assurance automobile ou encore blessures involontaires par le conducteur avec incapacité totale de travail (ITT) inférieure à huit jours.

Pour en savoir plus

Belmokhtar Z., « Tuteurs et curateurs des majeurs : des mandataires aux profils différents », Infostat justice, n° 162, juin 2018.

Camus B., « La statistique pénale, une statistique gestionnaire et une statistique criminelle : esquisse d’histoire  », communication pour le colloque Insee du 29 juin 2016.

Godin G., « Première application du Plan de rénovation des statistiques de la Justice : la statistique judiciaire », Courrier des statistiques, n° 1, pp.13-14, 1977.

Houllé R. et Vaney G., « La mise à exécution des peines d’emprisonnement ferme aménageables avant toute incarcération », Infostat justice, n° 166, septembre 2018.

Munoz-Perez B., « Les statistiques judiciaires civiles, sous-produit du répertoire général des affaires civiles », Droit et société, n° 25, pp.351-360, 1993.

Saglio A., « La statistique Justice : vue d’ensemble », Courrier des statistiques, n° 97, 2001. SDSE, « Références Statistiques Justice - Année 2016 », janvier 2018.

SDSE, « Références Statistiques Justice - Année 2016 », janvier 2018.

SDSE et SSM-SI, « Pour une méthodologie d’analyse comparée des statistiques Sécurité et Justice : l’exemple des infractions liées aux stupéfiants », Document d’études, décembre 2016.