Insee Analyses Normandie · Octobre 2024 · n° 130

Le Parc naturel régional des Boucles de la Seine Normande : un territoire résidentiel à la lisière de deux grands pôles

Drapé autour des méandres de la Seine qui lient Le Havre et Rouen, le Parc naturel régional des Boucles de la Seine Normande s’étend sur 91 000 hectares, à cheval entre les départements de l’Eure et de la Seine-Maritime. Il se distingue par ses forêts et ses zones humides, dont la forêt de Brotonne ou la Réserve Naturelle Nationale du Marais Vernier, qui recouvrent plus de la moitié de son territoire. La Seine étant affectée par les marées, 57 des 88 communes du Parc sont soumises au risque de submersion marine et à l’élévation du niveau de la mer. Ce risque affecte peu les habitations et les entreprises du territoire, mais les communes serpentant le long de la Seine entre Duclair et Rives-en-Seine sont dès aujourd’hui plus concernées [Brendler, Comte, 2022 ; pour en savoir plus (1)].

En 2021, 122 000 habitants vivent au sein du Parc, soit 3,7 % de la population régionale. Ce territoire compte ainsi 117 habitants par km², une densité très légèrement supérieure à celle de la région (111). Il est largement composé d’espaces naturels, plus de neuf communes sur dix sont rurales, de faible densité, celles-ci hébergeant sept habitants sur dix (figure 1). À l’inverse, les trois plus grandes communes, Canteleu, Yvetot et Pont-Audemer, localisées sur le pourtour du territoire, sont densément peuplées.

Situé à proximité des deux grands pôles de Rouen et du Havre, le Parc présente également un profil périurbain. Sur la partie est du territoire, 57 000 habitants du Parc résident dans l’aire d’attraction de Rouen, tandis qu’à l’ouest celle du Havre englobe 13 000 habitants.

L’influence de ces deux pôles se traduit aussi dans les mouvements de population. Entre 2020 et 2021, 5 600 personnes ont emménagé dans le Parc et 5 510 l’ont quitté. Plus de la moitié de ces échanges se font avec les aires d’attraction des villes de Rouen et du Havre. Le Parc attire les familles, plus nombreuses à venir s’y installer qu’à en partir (+250 ménages en 2021), vraisemblablement en quête d’un cadre de vie verdoyant et à la recherche de logements plus grands. En revanche, les personnes seules quittent davantage le territoire qu’elles ne s’y installent (-430 ménages) et notamment celles âgées de 18 à 24 ans, nombreuses à partir suivre leurs études hors du territoire.

Depuis 1975, la population du Parc a augmenté de 25 %, une croissance deux fois plus soutenue qu’au niveau régional, mais qui s’essouffle nettement depuis 2015 (figure 2). Entre 2010 et 2015, le nombre d’habitants progresse encore de 730 par an (soit +0,60 % par an). Puis, entre 2015 et 2021, la population du territoire diminue de 340 habitants chaque année (plus rapidement que dans la région, -0,27 % par an contre -0,06 % en Normandie). Sur cette période, les départs du territoire sont plus nombreux que les arrivées et, à l’instar de la Normandie, le vieillissement de la population entraîne une forte augmentation du nombre de décès réduisant l’excédent naturel. Sur l’ensemble de la période 2010-2021, la population des 65 ans ou plus progresse de 35 % tandis qu’elle baisse pour le reste de la population.

Localement, la population diminue entre 2010 et 2021 dans les sept communes de plus de 4 000 habitants, à l’exception de Bourg-Achard (+2,6 % par an). Elle progresse dans la plupart des petites communes et notamment au sud du Parc, dans le Roumois autour de Bourg-Achard, et à l’ouest.

Avec un indice de vieillissement plus faible, le Parc présente un profil relativement plus jeune que celui de l’ensemble de la région. Les couples avec enfant(s) sont proportionnellement plus nombreux et par conséquent les jeunes de moins de 18 ans le sont aussi puisqu’ils représentent 22,3 % de la population du Parc contre 21,2 % au niveau régional. Pour accueillir ces familles, les maisons constituent près des trois quarts des habitations. Les logements sont, compte tenu du caractère rural du territoire, plus spacieux que dans l’ensemble de la région : 55 % d’entre eux ont une surface supérieure à 80 m² contre 46 % en Normandie. Ils sont aussi moins souvent occupés à titre de résidence secondaire (2,6 % contre 9,1 % en Normandie). Le niveau de vie des habitants, majoritairement propriétaires, est légèrement supérieur à celui de la population régionale et le taux de pauvreté y est inférieur (12,3 % contre 13,7 %).

La croissance de la population, bien que modérée sur le territoire, s’est accompagnée d’une forte consommation d’espace entre 2009 et 2020, période durant laquelle 940 hectares ont été artificialisés, dont 75 % dédiés à l’habitat. Cette tendance s’atténuant sur la période 2015-2020, le nombre d’hectares consommés baissant quasiment de moitié par rapport aux cinq années précédentes.

Au-delà du cadre de vie, l’accès relativement aisé aux services de proximité tels que les médecins ou les boulangeries constitue un facteur d’attractivité pour la population résidente. Même si sa géographie spécifique (espaces naturels et sinuosités de la Seine notamment) place le territoire un peu en retrait de la moyenne normande de ce point de vue et plus spécifiquement dans la boucle d’Anneville-Ambourville.

En 2021, le Parc compte 55 700 actifs âgés de 15 à 64 ans (figure 3) soit 75,5 % des habitants de cette tranche d’âge, un taux légèrement supérieur au niveau régional (74,2 %). Parmi ces actifs, 49 600 occupent un emploi et 6 100 sont en recherche d’emploi.

Parmi les actifs en emploi, 28,2 % sont ouvriers, une part plus importante qu’en Normandie (24,7 %). De manière concomitante, les actifs résidents du Parc sont moins diplômés que dans l’ensemble de la région. Les cadres, professions intermédiaires et employés de la fonction publique ainsi que les professions libérales sont en revanche moins représentés.

Les résidents du Parc bénéficient par ailleurs de conditions d’emplois stables : 76,5 % des actifs en emploi sont en CDI ou titulaires de la fonction publique, contre 73,3 % en Normandie.

Entre 2010 et 2021, la population en âge de travailler (15-64 ans) baisse de 5,1 %, mais le taux d’activité progresse. Par conséquent, le nombre d’actifs ne diminue que légèrement : -1,5 %, soit -830 actifs, une évolution proche de celle observée au niveau régional (-1,2 %). Parallèlement, le taux de chômage recule sur les dernières années et s’établit en 2021 à un niveau plus bas que dans la région.

En regard de ses 55 700 actifs résidents, le territoire offre 38 800 emplois, concentrés pour les trois quarts dans les intercommunalités de Rouen, Pont-Audemer ou Yvetot.

Tout comme au niveau régional, un tiers de ces emplois relève du secteur de l’administration, l’enseignement, la santé et l’action sociale, avec notamment l’Institut Départemental de l’Enfance, de la Famille et du Handicap pour l’Insertion de Canteleu, plus gros employeur du Parc. Les services, le seul secteur d’activité en hausse sur la période 2010-2021 (+6,1 % contre -0,9 % pour l’emploi total), concentrent 18 % des emplois, un niveau qui reste inférieur à celui observé dans la région. À l’inverse, l’industrie est davantage présente sur le territoire (17,3 % contre 15,7 % en Normandie). Les trois premiers employeurs du secteur privé du Parc sont d’ailleurs tous industriels : Sanofi Winthrop industrie et Flexi France au Trait et Revima à Rives-en-Seine emploient au total plus de 2 600 personnes.

L’appareil productif du Parc se compose, hors secteur agricole, de 6 850 établissements en 2021 dont 2 100 sont employeurs. Parmi ces derniers, 70,4 % sont issus de la sphère présentielle et visent à la satisfaction des besoins des personnes présentes dans la zone, un chiffre légèrement supérieur à celui de la région dans sa totalité (68,8 %).

Comme au niveau régional, depuis 2011, le nombre d’établissements progresse, largement porté par les microentrepreneurs dont le nombre a été multiplié par 2,7 et qui représentent en 2021 un établissement sur trois. Les établissements sous ce statut sont particulièrement présents dans les activités de services, du commerce, des transports, de l’hébergement-restauration ou encore de la construction. Ils sont peu ou pas employeurs et ne contribuent donc que faiblement à la création d’emplois locaux.

En lien avec la présence en périphérie du Parc de grands pôles d’emplois, six actifs en emploi sur dix, soit 30 100 personnes, travaillent en dehors du territoire, dont près de sept sur dix au sein de la Métropole Rouen Normandie (43 % d’entre eux), de la Communauté Urbaine du Havre (14 %) ou de la Communauté d’Agglomération Caux Seine agglo (11 % ; figure 4).

En parallèle, 18 500 personnes entrent dans le Parc pour y travailler, pourvoyant près de la moitié des emplois du territoire. Un entrant sur cinq réside au sein de la Métropole Rouen Normandie, et autant habitent au sein des trois EPCI situés au sud du Parc avec lesquels le solde de navetteurs est positif : Pont-Audemer / Val de Risle, Lieuvin Pays d’Auge et Roumois Seine.

Les « navetteurs », qu’ils soient entrants ou sortants, ont un profil comparable, avec une proportion plus élevée de cadres, de professions intermédiaires et d’ouvriers que dans la population résidant et travaillant dans le Parc. Ils travaillent majoritairement dans l’industrie, le commerce et la santé.

Pour rejoindre leur lieu de travail, les résidents parcourent en moyenne 19 km, distance supérieure à la moyenne normande (15 km) mais comparable à celle que l’on observe dans des territoires de géographie similaire, au profil périurbain. La voiture est utilisée pour 88 % des déplacements et reste le moyen de transport privilégié quelle que soit la distance parcourue.