Insee Flash Auvergne-Rhône-AlpesUne surmortalité plus forte lors de la deuxième vague

Bertrand Kauffmann (Insee)

La première vague de décès liés à la crise sanitaire (mars-avril) avait plutôt épargné Auvergne-Rhône-Alpes. La deuxième vague, au contraire, a été particulièrement intense dans la région. Elle a entraîné une forte hausse du nombre de décès, notamment chez les plus âgés. Le pic de surmortalité a été atteint début novembre pour décroître ensuite mais très doucement. La Haute-Loire et la Savoie ont été particulièrement affectées. Depuis le 1er mars, la région a connu 10 900 décès supplémentaires en 2020 par rapport à 2019, dont 8 500 depuis septembre.

Insee Flash Auvergne-Rhône-Alpes
No 85
Paru le :Paru le20/01/2021
Bertrand Kauffmann (Insee)
Insee Flash Auvergne-Rhône-Alpes No 85- Janvier 2021

Les actes de décès enregistrés à l’Insee (sources) peuvent éclairer l’impact de la crise sanitaire, mais pas entièrement. En effet, les causes de décès ne sont pas remontées dans le répertoire des personnes physiques géré par l’Insee. Les statistiques permettent donc de compter le nombre de décès toutes causes confondues, mais pas d’isoler le nombre de décès lié à la seule Covid-19.

À travers d’autres sources, on peut observer durant les périodes de confinement une évolution de la mortalité liée à certains facteurs. Elle peut être à la baisse (les accidents de la route par exemple, moins nombreux en période de confinement) ou à la hausse (accidents domestiques par exemple).

Une première vague moins forte dans la région

Lors de la première vague épidémique, le nombre de décès avait fortement crû dans la région par rapport à la même période de 2019. Entre le 1er mars et le 30 avril, Auvergne-Rhône-Alpes a enregistré 14 300 décès en 2020 contre « seulement » 12 000 en 2019. Cet écart de 2 300 décès correspond à une hausse de 19 % entre les deux années (figure 1). À titre de comparaison, la surmortalité a été de 27 % au niveau national. Les régions les plus touchées par cette première vague restent l’Île-de-France (+ 91 %) et le Grand Est (+ 55 %).

Figure 1Une deuxième vague particulièrement forteÉvolution du nombre de décès entre 2020 et 2019 (en %)

Une deuxième vague particulièrement forte
Mars – Avril Mai – Août Septembre – 27 décembre
2020 2019 Évolution (en %) 2020 2019 Évolution (en %) 2020 2019 Évolution (en %)
Auvergne-Rhône-Alpes 14 340 12 042 19,1 21 885 21 810 0,3 30 869 22 349 38,1
France 130 088 102 796 26,5 191 897 190 798 0,6 228 387 196 378 16,3
  • Source : Insee, État civil

Figure 1Une deuxième vague particulièrement forteÉvolution du nombre de décès entre 2020 et 2019 (en %)

  • Source : Insee, État civil

Dans la région, les départements densément peuplés ont été particulièrement concernés. Le Rhône (+ 38 %) et la Haute-Savoie (+ 30 %) font partie du quart des départements français les plus touchés. A contrario, la Haute-Loire (– 4 %) et le Cantal (– 7 %) ont été épargnés, comme une dizaine d’autres départements en France.

Sur la période intermédiaire, du 1er mai au 31 août, le nombre de décès comptabilisés dans la région en 2020 est identique à celui de 2019, soit un peu plus de 21 800 décès. Il n’y a donc pas eu d’accélération du calendrier des décès lors de la première crise sanitaire qui se serait traduit par un creux durant ces quatre mois.

Une seconde vague plus longue et plus intense

Dès début septembre, la région connaît un nouvel épisode de surmortalité (figure 2) plus long que le premier. La surmortalité a été supérieure à 10 % durant cinq semaines (du 23 mars au 26 avril) au cours de la première vague ; elle l’est déjà de 11 semaines (du 12 octobre au 27 décembre) lors de la deuxième vague, et cela pourrait se poursuivre en 2021.

Figure 2Une seconde vague plus forte et plus longueÉvolution hebdomadaire du nombre de décès 2020-2019 (en %)

Une seconde vague plus forte et plus longue
Auvergne-Rhône-Alpes France
2020 2019 Évolution (en %) 2020 2019 Évolution (en %)
2 au 8 mars 1 459 1 530 -4,6 12 410 12 937 -4,1
9 au 15 mars 1 444 1 420 1,7 12 822 12 069 6,2
16 au 22 mars 1 494 1 381 8,2 14 217 11 847 20,0
23 au 29 mars 1 781 1 373 29,7 16 448 11 657 41,1
30 mars au 5 avril 2 011 1 370 46,8 19 087 11 663 63,7
6 au 12 avril 1 869 1 353 38,1 17 809 11 507 54,8
13 au 19 avril 1 809 1 321 36,9 15 677 11 386 37,7
20 au 26 avril 1 503 1 353 11,1 13 050 11 595 12,5
27 avril au 3 mai 1 327 1 261 5,2 11 533 11 158 3,4
4 au 10 mai 1 287 1 310 -1,8 11 309 11 275 0,3
11 au 17 mai 1 281 1 247 2,7 11 010 11 095 -0,8
18 au 24 mai 1 300 1 251 3,9 11 371 11 291 0,7
25 au 31 mai 1 203 1 182 1,8 10 696 10 550 1,4
1 au 7 juin 1 209 1 267 -4,6 10 643 10 797 -1,4
8 au 14 juin 1 191 1 116 6,7 10 650 10 428 2,1
15 au 21 juin 1 204 1 202 0,2 10 705 10 889 -1,7
22 au 28 juin 1 333 1 288 3,5 11 382 11 042 3,1
29 juin au 5 juillet 1 230 1 331 -7,6 10 279 11 151 -7,8
6 au 12 juillet 1 225 1 257 -2,5 10 588 10 777 -1,8
13 au 19 juillet 1 153 1 170 -1,5 10 391 10 508 -1,1
20 au 26 juillet 1 236 1 293 -4,4 10 821 11 680 -7,4
27 juillet au 2 août 1 311 1 229 6,7 11 142 10 388 7,3
3 au 9 août 1 277 1 263 1,1 11 010 10 716 2,7
10 au 16 août 1 239 1 178 5,2 12 078 10 154 18,9
17 au 23 août 1 211 1 199 1,0 10 764 10 456 2,9
24 au 30 août 1 275 1 304 -2,2 10 798 11 231 -3,9
31 août au 6 septembre 1 165 1 163 0,2 10 912 10 364 5,3
7 au 13 septembre 1 301 1 185 9,8 11 492 10 721 7,2
14 au 20 septembre 1 415 1 210 16,9 12 119 10 974 10,4
21 au 27 septembre 1 377 1 311 5,0 11 155 10 929 2,1
28 sept. au 4 octobre 1 347 1 226 9,9 12 150 11 111 9,4
5 au 11 octobre 1 377 1 325 3,9 12 122 11 279 7,5
12 au 18 octobre 1 552 1 369 13,4 12 443 11 464 8,5
19 au 25 octobre 1 912 1 275 50,0 13 952 11 478 21,6
26 octobre au 1 novembre 2 286 1 324 72,7 14 866 11 484 29,4
2 au 8 novembre 2 580 1 307 97,4 15 858 11 788 34,5
9 au 15 novembre 2 540 1 338 89,8 15 717 11 971 31,3
16 au 22 novembre 2 509 1 483 69,2 15 231 12 333 23,5
23 au 29 novembre 2 329 1 324 75,9 14 897 12 427 19,9
30 novembre au 6 décembre 2 085 1 380 51,1 14 685 12 058 21,8
7 au 13 décembre 1 936 1 402 38,1 14 633 12 414 17,9
14 au 20 décembre 1 735 1 466 18,3 14 126 12 557 12,5
21 au 27 décembre 1 591 1 429 11,3 13 542 12 501 8,3
  • Source : Insee, État civil

Figure 2Une seconde vague plus forte et plus longueÉvolution hebdomadaire du nombre de décès 2020-2019 (en %)

  • Source : Insee, État civil

Entre le 1er septembre et fin décembre 2020, 8 500 décès supplémentaires sont enregistrés par rapport à 2019. Auvergne-Rhône-Alpes est la région la plus touchée (+ 38 %) devant la Bourgogne-Franche-Comté (+ 25 %) et la Guadeloupe (+ 23 %).

Alors que fin août 1 200 personnes décédaient dans la région chaque semaine, ce nombre a dépassé 1 300 en septembre et 1 700 en octobre. La surmortalité a été la plus forte durant les semaines couvrant la période allant du 2 au 22 novembre (plus de 2 500 décès hebdomadaires, soit près du double de 2019). Au niveau national, cette surmortalité a été trois fois moins forte qu’en Auvergne-Rhône-Alpes durant ces trois semaines. Au cours du mois de décembre, la mortalité hebdomadaire dans la région est redescendue à environ 1 800 décès. Enfin, dans la dernière semaine d’observation, du 21 au 27 décembre, les chiffres provisoires montrent un nombre de décès encore en retrait (environ 1 600).

Le Cantal épargné, les autres départements très touchés

Depuis le 1er septembre, la surmortalité cantalienne est la plus faible de tous les départements de la région (+ 7 %). À l’exception du Rhône et de l’Ardèche, tous les départements de la région sont plus fortement touchés lors de cette deuxième vague.

L’Allier, l’Ardèche, la Drôme, le Puy-de-Dôme et le Rhône, avec une trajectoire proche du niveau régional, connaissent une surmortalité modérée. L’Ain et l’Isère sont très touchés au cours du mois de novembre et enregistrent ensuite une rapide décrue. Dans la Loire et en Haute-Savoie, la mortalité est plus forte que celle de la région. Depuis septembre, elle est supérieure de près de 50 % dans ces deux départements. La Haute-Loire et la Savoie enregistrent une surmortalité plus précoce (dès la première quinzaine d’octobre) et plus forte que les autres départements. Lors de la semaine du 2 au 8 novembre 2020, le nombre de décès a été 2,5 fois plus important dans ces départements que lors de la même semaine de 2019.

Forte surmortalité chez les plus âgés

La surmortalité touche très fortement les personnes âgées de 65 ans ou plus : + 22 % en mars-avril et + 44 % depuis le 1er septembre (figure 3). Plus de 8 400 décès supplémentaires sont enregistrés dans cette tranche d’âge depuis le 1er septembre 2020 par rapport à la même période de 2019. Elle est d’autant plus forte que les personnes sont âgées. Ainsi, les 65-74 ans connaissent une surmortalité de + 24 %. Elle est de + 41 % pour les 75-84 ans et de + 51 % pour les 85 ans ou plus.

Figure 3Une hausse du nombre de décès particulièrement élevée en Haute-Loire et en SavoieNombre et évolution des décès entre le 1ᵉʳ septembre et le 27 décembre

Une hausse du nombre de décès particulièrement élevée en Haute-Loire et en Savoie
Nombre des décès entre le 1ᵉʳ septembre et le 27 décembre Évolution (en %)
2019 2020
Ain 1 406 1 984 41,1
Allier 1 396 1 834 31,4
Ardèche 1 163 1 514 30,2
Cantal 660 705 6,8
Drôme 1 508 1 848 22,5
Isère 3 011 4 398 46,1
Loire 2 543 3 795 49,2
Haute-Loire 682 1 086 59,2
Puy-de-Dôme 2 156 2 741 27,1
Rhône 4 675 6 174 32,1
Savoie 1 248 1 973 58,1
Haute-Savoie 1 901 2 817 48,2
Auvergne-Rhône-Alpes 22 349 30 869 38,1
moins de 65 ans 3 287 3 365 2,4
65 ans ou plus 19 062 27 504 44,3
France 196 372 228 387 16,3
  • Source : Insee, État civil

Comme lors de la première vague, la surmortalité ne concerne quasiment pas les personnes de moins de 65 ans. Lors de cette deuxième vague, la région enregistre 3 350 décès pour des personnes âgées de moins de 65 ans. On en comptabilisait 3 300 en 2019.

Elle est un peu plus importante pour les hommes que pour les femmes. Ainsi, sur la tranche d’âge des 65 ans ou plus, elle est de + 41 % pour les femmes et de + 47 % pour les hommes.

Sources

L’Insee gère le Répertoire national d’identification des personnes physiques (RNIPP) conformément au décret n° 82-103 du 22 janvier 1982. D’après ce décret, les communes doivent transmettre les informations à l’Insee dès qu’un acte d’état civil est dressé sur le territoire français.

L’Insee a décidé de diffuser temporairement à un rythme hebdomadaire le nombre de décès enregistrés dans chaque département, afin de contribuer en toute transparence à la mise à disposition de données pendant la pandémie de Covid-19. Ces données couvrent toutes les causes de décès et sont donc largement supérieures aux décès strictement liés à la pandémie.

Ces séries dénombrent les décès selon leurs dates de survenue. Ils sont comptabilisés dans le département où a eu lieu l’évènement et non dans le département de résidence de la personne. Il est important de noter que ces données sont très provisoires (surtout pour les plus récentes d’entre elles) et seront révisées à chaque nouvelle publication. Elles sont extraites à la date du 12 janvier 2021.