Quatre actifs sur dix quittent chaque jour leur intercommunalité de résidence pour aller travailler

En 2016, les 149 EPCI du Grand Est comptent 5 555 000 habitants, dont 2 244 000 actifs occupés, ce qui en fait la cinquième région de France métropolitaine en volume d’actifs, pour 2 068 000 emplois.

Le Grand Est compte seulement 92 emplois pour 100 actifs occupés, contre 97 en France de province, ce qui en fait la région où le déficit d’emplois, au regard de la main-d’œuvre disponible, est le plus marqué (figure 1). Cela est à relier à la proportion importante d’actifs résidant dans la région et travaillant à l’étranger (encadré). Seule l’Île-de-France compte plus d’emplois que d’actifs occupés (105 pour 100).

Entre 2006 et 2016, le nombre d’actifs occupés et le nombre d’emplois diminuent dans la région (respectivement - 0,3 % et - 0,4 % par an), alors qu’ils augmentent tous deux de 0,2 % en France de province. Le Grand Est est le territoire où ces baisses sont les plus fortes, devant la Bourgogne-Franche-Comté, le Centre-Val de Loire, la Normandie et les Hauts-de-France.

Les emplois et les actifs se répartissent sur le territoire du Grand Est de façon plus homogène que dans l’ensemble des autres régions de province. Comme au niveau national, la répartition spatiale des actifs occupés est identique en 2006 et 2016, alors que celle des emplois est légèrement plus inégale.

Dans la région, 936 000 actifs ne travaillent pas dans l’intercommunalité où ils habitent, dont 172 000 travailleurs frontaliers. Le Grand Est présente la plus forte part de navetteurs de toutes les régions : 41,7 %, pour 34,2 % en France de province. Cette part progresse davantage dans la région qu’au niveau national (+ 4,6 points entre 2006 et 2016, contre + 3,8 points). Les frontaliers constituent 18,3 % des navetteurs et expliquent plus du quart de la hausse du nombre de navetteurs.

Les trajets domicile-travail se font surtout entre intercommunalités voisines, mais dans la région, les déplacements au-delà des EPCI limitrophes s’avèrent également fréquents. Ainsi, 13,2 % des actifs résidant dans un EPCI de la région et travaillant en France occupent un emploi au-delà des EPCI voisins, soit 2,5 points de plus qu’en moyenne en province, ce qui place le Grand Est au troisième rang des régions derrière les Hauts-de-France et le Centre-Val de Loire. Les régions où ces déplacements longue distance sont les plus fréquents sont limitrophes de l’Île-de-France, où une part importante de leurs emplois est située. Ces déplacements ont aussi progressé plus rapidement qu’en province ; en 2006, ils ne concernaient que 10,9 % des actifs occupés du Grand Est pour 9,7 % en province.

Dans 120 EPCI de la région, les actifs travaillant en dehors du territoire de l’EPCI sont plus nombreux que les navetteurs venant y travailler (EPCI émetteurs, plutôt résidentiels) : 686 000 navetteurs sortants contre 322 000 navetteurs entrants (figure 2). La communauté de communes de l’Arc Mosellan a le solde sortants-entrants le plus élevé (15 600 actifs occupés en 2016, 12 900 sortants, principalement vers l’étranger et la communauté d’agglomération Portes de France-Thionville, et 2 200 entrants). Ces EPCI regroupent 51 % de la population régionale et 52 % des actifs occupés en 2016 pour 39 % des emplois du Grand Est.

Près de la moitié des navetteurs de ces territoires (47 %) travaillent dans un des 29 EPCI du Grand Est où le nombre d’entrants dépasse celui des sortants (EPCI receveurs, comprenant souvent un pôle ou grand pôle d’emplois), soit 323 000 navetteurs ; 23 % ont un emploi hors de la région, soit 160 000 navetteurs, dont 140 000 à l’étranger. Les 30 % restants (203 000 navetteurs) travaillent dans un autre EPCI émetteur que le leur. Avec deux tiers de ses actifs occupés travaillant à l’étranger, la communauté de communes de Cattenom et environs s’avère l’EPCI français le plus concerné par l’emploi transfrontalier.

Les actifs se déplacent davantage qu’il y a dix ans : en 2016, 58,3 % des actifs occupés exercent une activité dans l’intercommunalité où ils habitent, soit 4,6 points de moins qu’en 2006. S’agissant des actifs des EPCI plutôt résidentiels, la proportion est de 42 %, et elle a perdu 5 points. Le nombre de navetteurs en provenance de ces EPCI augmente de 57 000 entre 2006 et 2016, soit + 0,9 % par an. Cette hausse est plus forte parmi les actifs qui travaillent dans une autre région ou à l’étranger (respectivement + 2,3 % et + 1,4 % par an).

Quant aux actifs habitant dans un EPCI plutôt employeur, ils se déplacent aussi de plus en plus souvent pour aller travailler : en 2016, 77 % d’entre eux occupent un emploi dans leur EPCI de résidence, en baisse de 3 points en dix ans. Cette tendance est liée à une augmentation des déplacements entre EPCI receveurs : + 11 000 navetteurs entre 2006 et 2016, soit une hausse de 1,3 % par an, pour atteindre 88 000 sortants.

La part de navetteurs sortants parmi les actifs occupés est en hausse dans la quasi-totalité des EPCI (144 sur 149), surtout dans ceux situés loin des grands pôles d’emplois. S’agissant des EPCI plutôt résidentiels, la proportion de navetteurs sortants augmente de 6,3 points dans les intercommunalités situées à plus de 40 km d’un pôle d’emplois et de 4,4 points dans les EPCI plus proches. L’écart est moins important dans les EPCI plutôt employeurs : respectivement + 3,6 et + 3,2 points.

Dans le Grand Est, 29 EPCI accueillent plus de navetteurs qu’ils n’en voient partir (438 000 entrants pour 251 000 sortants), notamment la communauté de communes des Rives de Moselle, dont sept emplois sur dix sont occupés par des navetteurs. Avec 207 habitants/km², ces territoires sont trois fois plus densément peuplés que les EPCI émetteurs. Les EPCI receveurs sont majoritairement ceux des principales villes de la région (figure 3). Ils rassemblent 61 % des emplois et 48 % des actifs occupés du Grand Est.

Le nombre de frontaliers y est nettement plus faible que dans les EPCI plutôt résidentiels (32 000 contre 140 000), mais le nombre de personnes travaillant dans une autre région y est plus important. Celui-ci s’établit à 25 000, soit 10 % des navetteurs, dont 9 000 ont un emploi dans la métropole du Grand Paris ; dans les EPCI émetteurs, 20 000 actifs ont un emploi dans une autre région et ils ne représentent que 3 % des navetteurs.

Dans les EPCI plutôt employeurs, l’emploi diminue de 0,4 % par an entre 2006 et 2016 tandis que le nombre d’actifs occupés baisse un peu plus (- 0,6 %). Le rapport emplois/ actifs occupés dans ces intercommunalités augmente donc légèrement : le nombre d’emplois pour 100 actifs occupés est passé de 115 à 117 en dix ans. La métropole du Grand Nancy, où le nombre de navetteurs sortants est resté stable, compte même 138 emplois pour 100 actifs en 2016, soit 9 de plus qu’en 2006, ce qui en fait le territoire le plus polarisant sur son voisinage en termes d’emplois. Bien qu’ayant un volume d’actifs et d’emplois moins important, la CA de Verdun est aussi particulièrement attractive en matière de marché du travail, avec 131 emplois pour 100 actifs.

Dans les EPCI plutôt résidentiels, l’emploi décroît de 0,5 % par an entre 2006 et 2016, alors que le nombre d’actifs occupés demeure stable. En conséquence, le rapport emplois/actifs occupés sur ces territoires chute : en 2016, on dénombre en moyenne 69 emplois pour 100 actifs occupés, contre 73 en 2006. La communauté de communes Haut Chemin - Pays de Pange compte seulement 31 emplois pour 100 actifs occupés, rapport le plus faible dans la région en 2016.

Entre 2006 et 2016, le nombre d’emplois augmente dans 38 EPCI (figure 4) ; ces territoires sont plus souvent situés à l’est de la région, et cinq d’entre eux sont frontaliers avec l’Allemagne.

Les 111 autres EPCI perdent des emplois, dont 73 de façon continue. Ces derniers sont situés au sud-ouest de la région (Marne, Haute-Marne, Aube et sud de la Meuse), dans le Massif des Vosges et à proximité des frontières avec la Belgique et le Luxembourg.

Les 31 EPCI frontaliers avec l’étranger rassemblent près d’un tiers des emplois et des actifs du Grand Est. L’évolution du nombre d’emplois et d’actifs y est plus forte qu’ailleurs. Le nombre d’actifs occupés y reste globalement stable entre 2006 et 2016, alors qu’il diminue dans la région. Quant à l’emploi, il baisse en moyenne de 0,3 % par an, légèrement moins que dans l’ensemble du Grand Est.

À l’exception de l’Eurométropole de Strasbourg, ce sont les EPCI les plus peuplés de la région qui présentent le plus fort recul du nombre d’actifs occupés au cours des dix dernières années (figure 5). Dans les EPCI de plus de 100 000 habitants, le nombre d’actifs occupés a diminué de 46 000 entre 2006 et 2016 (- 0,7 % par an), soit plus des deux tiers de la baisse régionale. Au contraire, l’emploi progresse dans les métropoles françaises (+ 0,5 % par an en moyenne sur cette période).

Les EPCI de moins de 100 000 habitants ont également perdu des actifs occupés (- 17 000, soit - 0,1 % par an), mais surtout des emplois : - 60 000 entre 2006 et 2016, soit 65 % de la perte du Grand Est.

En dix ans, les EPCI plutôt employeurs situés à moins de 40 km des grandes unités urbaines perdent moins d’emplois qu’en moyenne dans la région (- 0,3 %, contre - 0,4 % par an), alors que ceux situés plus loin en perdent beaucoup : - 0,8 % (figure 6). L’écart est plus marqué concernant les EPCI plutôt résidentiels : l’emploi baisse de 0,4 % dans ceux qui sont proches d’un pôle important et de 1,0 % dans ceux qui en sont éloignés. Le constat est similaire en termes d’actifs occupés : dans les intercommunalités situées à plus de 40 km des grandes unités urbaines, les effectifs reculent davantage que dans celles qui en sont plus proches (respectivement - 1,0 % et - 0,5 % pour les EPCI receveurs, - 0,4 % et + 0,1 % pour les émetteurs).