Bilan économique 2014 de Lorraine

La conjoncture économique reste morose en 2014 en Lorraine, dans un contexte peu porteur. L'emploi salarié diminue encore. Cette détérioration se ressent dans la quasi-totalité des secteurs d'activité. Le taux de chômage, en hausse en Lorraine comme en France, s'établit à 10,7% dans la région au dernier trimestre.

Insee Conjoncture Lorraine
Paru le :Paru le29/05/2015
Pierre Bruyas, Sandrine Zorn, Draaf Lorraine
Insee Conjoncture Lorraine- Mai 2015
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Une campagne agricole proche de la normale

Pierre Bruyas, Sandrine Zorn, Draaf Lorraine

La campagne agricole 2013-2014 présente des résultats paradoxaux. Sans être exceptionnelle, la météorologie a permis de réaliser des récoltes,de bon niveau en Lorraine, tant en qualité qu’en quantité. Les productions animales, la production laitière en particulier, ont suivi la même trajectoire. Cependant, malgré ces bons résultats, l’évolution du revenu s’avère moins favorable. En effet, les prix des céréales et des oléagineux enregistrent des baisses de 4 % à 6 %. Il en va de même pour le prix de la viande. Seul le prix du lait, qui atteint un record, permet de limiter la baisse du revenu moyen des exploitations laitières lorraines.

Insee Conjoncture Lorraine

No 5

Paru le :29/05/2015

En Lorraine, même si les pluies d’automne ont perturbé les semis de blé tendre d’hiver, la campagne agricole 2013-2014 a moins subi les aléas climatiques que les deux précédentes. Les superficies en blé tendre, qui avaient atteint un niveau historique (258 000 hectares) en 2013, ont reculé de 12 % par rapport à la moyenne décennale. Avec un rendement de 68 quintaux par hectare, proche de la moyenne décennale, la récolte est en recul de 21 % par rapport à 2013. Cette récolte, moyenne en quantité, présente un excellent niveau qualitatif et meilleur qu’au niveau national permettant ainsi une commercialisation d’une grande partie de la récolte en blé meunier.

Deuxième céréale emblématique de la Lorraine, l’orge a connu des destins différents selon qu’il est d’hiver ou de printemps. L’orge d’hiver a retrouvé son niveau proche de la moyenne décennale tant en superficie qu’en rendement. Ainsi, la production retrouve un niveau moyen de 670 000 tonnes, avec une qualité correcte, permettant ainsi une commercialisation importante en orge de brasserie. La météorologie a été moins favorable aux orges de printemps. Récoltés tardivement après un cycle de végétation perturbé, la qualité n’a pas été au rendez-vous. Les tonnages récoltés sont à 40 % au-dessus de la moyenne décennale grâce à une forte progression des assolements.

Autre culture emblématique de la Lorraine, la production de colza retrouve le niveau de ses bonnes années. En termes de rendements pour le colza, l’année 2014 figurera dans le top 3 de la décennie 2004-2014.

Le rebond de la production laitière

Au cours de l’année 2014, les livraisons laitières ont fortement progressé (+ 8,5 %). Dans la perspective de l’abandon des quotas laitiers, qui règlementent la production laitière depuis trente ans, les éleveurs lorrains avaient augmenté leurs effectifs de vaches laitières en 2013.

Ce mouvement a été moins important au cours de l’année 2014. La production d’animaux finis est toujours en recul, en raison d’une moindre décapitalisation.

Les prix des productions en 2014

En 2014, la conjoncture a été marquée par une baisse sensible des prix des productions agricoles. L’abondance des récoltes au niveau mondial a renfloué les stocks et par conséquent, a pesé sur les marchés des céréales et des oléagineux. La campagne de commercialisation 2014-2015 se révèle être la plus mauvaise depuis celle catastrophique de 2009-2010. Au plus fort de sa valeur, en novembre 2012, le blé se vendait 275 euros la tonne. En fin d’année 2014, il cotait 191 euros.

Cette volatilité rend déterminants les choix de commercialisation que fait l’exploitant, selon qu’il va vendre sa production, immédiatement ou en différé, sur les marchés physiques ou à terme. De l’optimisation de la vente de sa production dépend le résultat de son exploitation et par conséquent son revenu.

De janvier à décembre 2014, le blé a chuté de 4 % (après - 26 % sur la même période 2013), le colza de 6 % (- 20 % en 2013), le maïs de 17 % (- 23 % en 2013).

Globalement en baisse sur l’année 2014, les cours des céréales et des oléagineux sont repartis à la hausse au quatrième trimestre. Le contexte international et la baisse de l’euro par rapport au dollar permettent de soutenir le marché européen et favorisent les exportations.

Le prix moyen du lait a atteint un record, à 380 euros pour 1 000 litres (+ 6 % par rapport à l’année précédente. Cependant, la tendance est marquée à la baisse durant le quatrième trimestre.

Malgré des abattages de bovins en retrait, les cours de la viande baissent, pour toutes les catégories de gros bovins. Les prix moyens annuels sont inférieurs à leurs niveaux de 2013 : - 8 % pour les vaches de race à viande, - 10 % pour les vaches de race laitière.

Les prix des moyens de production en 2014

L’indice général des moyens de production, qui mesure l’évolution du prix des intrants nécessaires à la production agricole, est de 111,1 en Lorraine (base 100 en 2010), en recul de 1,7 % par rapport à l’année précédente. De la fin 2009 à début 2013, cet indice a suivi une tendance ascendante plus ou moins marquée, en gagnant presque 20 %. Depuis février 2013, la progression a été enrayée et l’indice a régressé (- 5,5 %), essentiellement sous l’effet combiné du moindre poids de l’alimentation animale d’une part, conséquence de la baisse des cours des productions végétales, et du prix de l’énergie d’autre part. De janvier à décembre, le prix de l’énergie a baissé de 16 %, avec une chute très accentuée au deuxième semestre, mouvement qui se poursuit début 2015. L’indice de l’alimentation animale a poursuivi sa diminution, en perdant 7 %, à l’inverse de l’indice engrais qui progresse de 4 %. Ces charges d’intrants équivaudraient à 45 % de la valeur de la production 2014, selon le compte simplifié prévisionnel lorrain. Durant les années où la conjoncture est plus favorable, leur impact est plus modéré, comme par exemple en 2011, où elles ne représentaient que 38% de la valeur de la production.

1Indices des Prix d’achat des moyens de production agricole (IPAMPA)

%
Indices des Prix d’achat des moyens de production agricole (IPAMPA) (%)
Évolution entre janvier et décembre 2014
Engrais 3,6
Produits et services vétérinaires 1,1
Produits de protection des cultures 0,1
Semences -1,0
Aliments des animaux -7,0
Énergie -15,8
  • Source : Insee, Service de la statistique et de la prospective (SSP) du ministère de l'agriculture

1Indices des Prix d’achat des moyens de production agricole (IPAMPA) Évolution entre janvier et décembre 2014

  • Source : Insee, Service de la statistique et de la prospective (SSP) du ministère de l'agriculture

Les tendances du revenu en 2014

Dans ce contexte, le compte prévisionnel prévoit, au niveau national, un résultat courant avant impôt de 24 400 euros toutes exploitations confondues, soit une baisse de 5 % par rapport à 2013. La tendance observée au niveau national devrait être plus accentuée au niveau lorrain. En effet, les céréales et les oléagineux pouvant représenter 30 % à 40 % de la valeur de sa production selon les années, la ferme lorraine est fortement impactée.

Ainsi, les exploitations de grandes cultures voient pour la deuxième année consécutive leur revenu se replier. Si le recul des prix de l’énergie a permis de contenir la hausse des coûts de production, les cours des céréales entraînent le revenu à la baisse, revenu dépendant pour l’essentiel de la valeur de la production.

Les exploitations polyculture-élevage suivent également cette tendance. Cependant, l’atelier d’élevage permet de soutenir la valeur de la production, donc de limiter la perte de revenu.

Seules les exploitations spécialisées en élevage bovin, laitier ou allaitant, devraient voir leur revenu progresser, bénéficiant du moindre coût de l’alimentation animale et des cours favorables du lait et de la viande.

2Cours du blé et revenu des exploitations de grandes cultures

Cours du blé et revenu des exploitations de grandes cultures
Cours du blé Résultat courant avant impôt
2002 118,5 24,7
2003 127,7 23,4
2004 132,1 35,6
2005 109,8 28,1
2006 130,3 35,2
2007 198,9 57,4
2008 203,9 47,1
2009 136,1 11,5
2010 172,4 49,0
2011 224,4 57,2
2012 240,1 54,4
2013 220,2 22,3
2014 177,9
  • Source : Le Petit Meunier

2Cours du blé et revenu des exploitations de grandes cultures

  • Source : Le Petit Meunier

Les aides et la réforme

Toutes aides confondues, une exploitation lorraine a perçu en moyenne 47 000 euros en 2014. Les subventions pourraient représenter 143 % du résultat courant avant impôt, contre 74 % en 2011, variation essentiellement due à la variabilité de la production.

2014 a été une année de transition avant pleine application de la réforme de la PAC. Néanmoins, l’aide à l’hectare, découplée de toute production et basée sur le droit à paiement unique (DPU), a subi une baisse de 8 %.

En 2015 se mettent en place le principe de convergence, qui vise à atténuer les inégalités de l’aide directe à l’hectare, et la surprime dévolue aux 52 premiers hectares de l’exploitation, destinée à favoriser les petites structures. Ces grands principes de la réforme se traduiront par une perte de 37 % de l’aide découplée pour la région. Cette perte sera globalement compensée, puisque d’autres mesures lui seront favorables : des aides ciblées sur les productions bovines et des crédits supplémentaires orientés vers le maintien de la production dans les zones de handicap naturel. À terme, c’est une enveloppe de 311 millions qui participera au soutien des revenus en 2019 dans la région. Ce rééquilibrage se traduira finalement par une diminution de 1,4 % des crédits de la PAC par rapport à 2013.

La diversité des structures et des productions au sein de la région font que l’impact de la réforme est contrasté au niveau des quatre départements lorrains. La Meuse et la Meurthe-et-Moselle sont contributeurs nets de cette redistribution des crédits, alors que les Vosges, dont les structures plus modestes répondent bien aux objectifs de la réforme, sont bénéficiaires. Pour la Moselle, l’enveloppe est relativement stable.

Retour sur les résultats définitifs de 2013

En 2013, le résultat courant avant impôt par unité de travail non salarié, indicateur communément utilisé pour traduire le revenu des exploitants agricoles, s’est établi à 21 900 euros en Lorraine, toutes orientations confondues. La moyenne des trois bonnes années précédentes (2010 à 2012) étant de 37 100 euros, ce résultat accuse donc une baisse de 41%, beaucoup plus marquée qu’au niveau national (– 24%).

Ce sont les exploitations de grandes cultures qui ont vu leur revenu chuter le plus drastiquement (- 58%), après avoir connu trois campagnes d’embellie sur les marchés des céréales et des oléagineux. La baisse est également marquée, mais moins accentuée dans les exploitations de polyculture-élevage, la diversification des productions permettant d’atténuer l’amplitude des variations. Enfin, les exploitations d’élevage, malgré un prix du lait particulièrement élevé, et des cours de la viande de bonne tenue, accusent également un repli, faisant face à une progression marquée des charges consacrées aux intrants.

La dispersion des revenus observée depuis quelques années, est limitée en 2013. La conjoncture moins favorable des marchés des productions végétales entraîne un resserrement des revenus autour de la moyenne.

3Un résultat par unité de travail non salarié en baisse

milliers d'euros courants
Un résultat par unité de travail non salarié en baisse (milliers d'euros courants)
2010 2011 2012 2013 Évolution 2013 / moyenne triennale 2012 (%)
Grandes cultures 49,0 57,2 54,4 22,3 - 58
Exploitations laitières 29,2 33,3 25,2 20,1 - 31
Exploitations de polyculture-élevage 35,7 46,1 39,5 21,0 - 48
Ensemble des exploitations lorraines 33,9 40,5 36,9 21,9 - 41
Ensemble des exploitations françaises 30,9 34,5 35,5 25,5 - 24
  • Source : Agreste, Réseau d’information comptable agricole (Rica)