Courrier des statistiques N11 - 2024

Vous avez aimé découvrir l’histoire de la statistique publique dans le numéro N9 du Courrier sur le thème « Statistiques publiques et débat démocratique (1946-1987) », alors n’hésitez plus et lisez le 2e épisode. Peu à peu, la construction européenne façonne la production de statistiques publiques, une nouvelle ère d’ouverture et de gratuité s’ouvre et de nouveaux thèmes apparaissent.
Comment faciliter la navigation dans l’océan de données mis à disposition sur le site de l’Insee ? C’est le sujet de l’article suivant, qui pointe les indispensables métadonnées, l’importance d’un catalogue, et les possibilités d’accès à des « hypercubes ».
Les dessous de la quantification dans le secteur de l’énergie sont ensuite dévoilés, au moment où la transition écologique est toujours plus d’actualité.
Les quatre autres articles de ce numéro constituent un dossier, organisé autour du Répertoire statistique des individus et des logements (Résil).
Si le premier présente le projet Résil dans son ensemble, avec ses principes directeurs, le second nous révèle la démarche de concertation engagée par l’Insee, pour assurer la légitimité de ce répertoire, et répondre aux enjeux juridiques et éthiques. Deux étapes du processus Résil nécessitaient une attention particulière. Ainsi le troisième article du dossier porte-t-il sur les appariements : finalités, méthodologie, mise en pratique et évaluation de la qualité. Enfin, le dernier papier s’attelle de façon pédagogique à expliquer l’outil ARC (accueil-réception-contrôle) : appliqué dans un premier temps à la déclaration sociale nominative (DSN), il a été généralisé pour le projet Résil.

Courrier des statistiques
Paru le :Paru le08/07/2024
Ronan Le Saout, à la date de la rédaction, expert méthodes statistiques en économie de l’énergie, SDES, ronan.le-saout@ensai.fr, Nicolas Riedinger, directeur du département du développement durable et du numérique à France Stratégie, nicolas.riedinger@strategie.gouv.fr et Bérengère Mesqui, sous-directrice des statistiques de l’énergie, SDES, berengere.mesqui@developpement-durable.gouv.fr
Courrier des statistiques- Juillet 2024
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Les statistiques publiques de l’énergie Enjeux passés, présents et futurs

Ronan Le Saout, à la date de la rédaction, expert méthodes statistiques en économie de l’énergie, SDES, ronan.le-saout@ensai.fr, Nicolas Riedinger, directeur du département du développement durable et du numérique à France Stratégie, nicolas.riedinger@strategie.gouv.fr et Bérengère Mesqui, sous-directrice des statistiques de l’énergie, SDES, berengere.mesqui@developpement-durable.gouv.fr

Les statistiques de l’énergie se sont historiquement construites autour des bilans énergétiques annuels, qui décrivent les différentes étapes du cycle de vie de l’énergie : depuis son extraction de la nature jusqu’à ses différents usages en passant par sa transformation et son transport. Cette comptabilité physique s’appuie sur de nombreuses conventions, qui ont une forte incidence sur certains indicateurs tels que le taux d’indépendance énergétique ou la part de la consommation d’énergie d’origine renouvelable. Des comptes monétaires ont été introduits plus récemment en France, afin notamment d’éclairer les enjeux associés à l’énergie en matière de pouvoir d’achat des ménages et de compétitivité des entreprises.

Les statistiques de l’énergie constituent une source essentielle de la comptabilité des émissions de gaz à effet de serre (GES) et permettent d’éclairer l’évolution de ces dernières, en les croisant avec les statistiques d’autres domaines. La transition énergétique demande une adaptation continue des dispositifs d’observation, pour décrire les nouveaux usages (comme la voiture électrique), les nouvelles formes d’énergie (comme l’hydrogène) mais aussi les leviers de cette transition, comme la rénovation des bâtiments. Des données locales de plus en plus fines sont mises à disposition des acteurs. Les données issues des compteurs communicants offrent des perspectives intéressantes en matière d’évaluation des politiques publiques.

Les politiques de l’énergie ont de multiples objectifs qui se sont enrichis avec le temps. Au départ, ces politiques cherchaient à garantir la sécurité d’approvisionnement, l’indépendance énergétique, la compétitivité des entreprises et le pouvoir d’achat des ménages. Avec la préoccupation croissante liée au dérèglement climatique, la réduction des émissions de gaz à effet de serre issus de la combustion d’énergie s’est peu à peu imposée comme l’un des objectifs principaux de la politique énergétique autour du projet de « transition énergétique ». Les statistiques nationales de l’énergie ont suivi l’évolution des besoins pour aider à la décision publique et alimenter le débat public. Elles sont largement utilisées dans les débats sur l’évolution des prix, l’origine de nos importations énergétiques ou le nombre de rénovations énergétiques réalisées chaque année.

Ces statistiques présentent la particularité de porter sur un bien pouvant faire l’objet d’une mesure physique. Historiquement, elles se sont construites autour du bilan physique de l’énergie, avec des conventions définies au niveau international. Si certains indicateurs économiques, comme le poids de l’énergie dans le budget, sont suivis depuis longtemps, ce n’est qu’en 2017 qu’un bilan monétaire a été mis en place, enrichissant et présentant dans un cadre cohérent les statistiques sur les prix et les dépenses énergétiques. Les politiques publiques climatiques et environnementales et les évolutions technologiques donnent lieu à des extensions régulières du champ des statistiques de l’énergie, avec des chiffres sur les émissions associées, les énergies renouvelables, la rénovation énergétique, l’hydrogène, etc.

Relativement à d’autres domaines, leur institutionnalisation a été tardive. Le premier service labellisé « statistique publique » de l’énergie (l’Observatoire de l’énergie) a été créé en 1982, à la suite des chocs pétroliers. De nombreux autres producteurs de données, parfois créés antérieurement, diffusent toujours de l’information de nature statistique (, , , , etc.). Ceci conduit à réinterroger continuellement le périmètre de ce qui doit relever de la statistique publique, dans un contexte de besoins évolutifs et de plus en plus importants. Les transitions énergétique et climatique vont encore accroître ces besoins, créant des défis majeurs pour ce système statistique. À cet égard, l’intégration des statistiques publiques de l’énergie au sein du service statistique du ministère chargé de la transition écologique constitue un atout, permettant de bénéficier de synergies avec celles de l’environnement, des transports et du logement, ces deux derniers constituant des secteurs fortement utilisateurs d’énergie et émetteurs de gaz à effet de serre.

Après quelques définitions et conventions statistiques autour du concept d’énergie physique, les développements plus récents en matière de statistiques économiques liées à l’énergie sont présentés avant d’aborder les nouveaux enjeux d’observation dans le contexte de la transition énergétique.

De quelle « énergie » parle le statisticien public ?

Le statisticien de l’énergie emprunte parfois les unités de mesure du physicien (joule, wattheure et leurs dérivés). Cependant, il n’appréhende pas l’énergie exactement comme ce dernier. Pour preuve, les concepts de production et de consommation, centraux dans les bilans énergétiques, sont étrangers à la , voire en contradiction avec son premier principe, selon lequel il n’existe jamais que des transferts d’énergie. La principale raison en est probablement que le statisticien adopte un point de vue anthropocentré et ignore en particulier « l’énergie existant dans la nature et n’ayant aucun impact direct sur la société », suivant les « Recommandations internationales pour les statistiques énergétiques » (, 2020). Cette définition « par la négative » apparaît toutefois vague et et on peut s’étonner que le périmètre de ce qui est observé ne fasse pas l’objet de principes généraux plus clairs. Pour la France, comme pour les autres pays membres de l’Union européenne ou de l’, ce périmètre correspond de fait à la liste limitative des formes d’énergie et des flux énergétiques figurant dans le manuel sur les statistiques de l’énergie AIE/ de 2005.

Il ressort de l’examen de cette liste que les flux énergétiques considérés sont liés à une intervention humaine visant in fine à rendre des services à des consommateurs, après un éventuel processus de transformation. Le bilan énergétique, principale source statistique sur l’énergie, a pour objet de décrire ces flux, en distinguant les ressources et les emplois, dont , permettant ainsi de répondre aux deux grandes questions, sur un périmètre géographique donné : comment s’approvisionne-t-on en énergie ? et qui consomme quoi ?

Les approvisionnements sont constitués de la production primaire, c’est-à-dire de l’énergie directement extraite de ressources naturelles, des importations nettes des exportations ainsi que des variations de stocks (figure 1). Une partie de ces ressources est directement consommée par les utilisateurs finaux (par exemple, le gaz naturel directement brûlé dans les chaudières des logements), tandis que le reste est transformé en énergie secondaire (par exemple, en électricité) avant utilisation finale. Au cours de ces transformations ainsi que du transport de l’énergie, une partie de cette énergie secondaire est perdue : la consommation finale est donc toujours inférieure à la consommation primaire (cette dernière correspondant au total des approvisionnements par équilibre ressources-emplois).

Figure 1 - Le diagramme de Sankey

 

Lecture : Un diagramme de Sankey permet de visualiser les flux énergétiques, la largeur des flèches étant proportionnelle au flux physique représenté. Les ressources primaires (importations, production nationale, variations des stocks) se trouvent à gauche, la consommation finale à droite. Le milieu représente la transformation en énergie secondaire et les pertes associées (flux vers le haut).

* Calogène : réacteur nucléaire utilisé comme source de chaleur.

** La cogénération consiste à produire en même temps et dans la même installation de l’énergie thermique à flamme et de l’énergie mécanique.

Les principales conventions de comptabilisation de l’énergie

Qui dit statistiques dit agrégation, qui dit agrégation dit échelle d’équivalence, et qui dit échelle d’équivalence dit convention(s). Ainsi, tandis que le physicien « mesure » selon des lois de la nature, le statisticien « quantifie » en s’appuyant sur des conventions, pour reprendre la distinction explicitée dans l’étude sociologique de la statistique (Ouvrir dans un nouvel ongletDesrosières et Kott, 2005). Les conventions retenues dans les bilans énergétiques, tant pour l’énergie finale que l’énergie primaire, ne doivent pas être perdues de vue par l’utilisateur, au risque d’erreurs d’interprétation potentiellement importantes.

En ce qui concerne l’énergie finale, on pourrait idéalement s’attendre à ce qu’une même quantité d’énergie finale apporte un service équivalent aux consommateurs indépendamment de la forme d’énergie. Cette hypothèse n’est pas toujours vérifiée. D’une part, il existe des usages spécifiques à certaines formes d’énergie, notamment l’électricité, sans possibilité de substitution par d’autres formes d’énergie. D’autre part, en pratique, la consommation d’énergie finale correspond le plus souvent à la quantité achetée par le consommateur. Or, celui-ci peut lui-même transformer l’énergie avant de l’utiliser (par exemple, en brûlant un combustible dans une chaudière), ce qui génère des pertes de transformation, qui ne sont pas considérées comme telles dans le bilan. Il en résulte, par exemple, qu’1 kWh d’énergie finale sous forme de fioul ou de bois à usage de chaleur rend un service moins élevé qu’1 kWh d’énergie finale fournie par un réseau de chaleur. Pour éviter ce biais, dans son rapport sur les statistiques de l’énergie de 1983, l’ONU recommandait de comptabiliser non seulement l’énergie « livrée » mais aussi l’énergie « utile » (Ouvrir dans un nouvel ongletONU, 1983, p. 31). Cette recommandation n’a pas été suivie, probablement pour des raisons de complexité de mise en œuvre.

En ce qui concerne l’énergie primaire, la comptabilisation du nucléaire a historiquement fait l’objet de débats. Les organisations internationales ont retenu comme méthode officielle celle du « contenu en énergie ». Cette méthode consiste à comptabiliser la chaleur nucléaire dégagée par la réaction de fission nucléaire, estimée à trois fois la quantité d’électricité produite. Elle a été préférée à la méthode de la « substitution partielle », reposant sur l’estimation de la quantité d’énergies fossiles qui aurait été nécessaire pour produire autant d’électricité que les centrales nucléaires. Cette dernière méthode a le mérite de répondre plus directement à la question de savoir quelle quantité d’énergies fossiles permet d’économiser le recours au nucléaire, mais a l’inconvénient de nécessiter des hypothèses sur les rendements de centrales thermiques fossiles n’existant pas dans la réalité. Faire de telles hypothèses dépasse les compétences habituelles du statisticien, dont le métier est d’observer et non pas de concevoir un monde alternatif (ou un « scénario contrefactuel » comme disent les économistes).

Le développement du photovoltaïque et de l’éolien a relancé le débat sur ces conventions comptables. La convention officielle retenue est de comptabiliser l’énergie primaire éolienne et photovoltaïque à hauteur de la quantité d’électricité produite. En effet, les notions de rendements et de pertes sont jugées peu pertinentes pour ces énergies issues du vent et du soleil, seule une infime part de l’énergie disponible naturellement étant convertie en électricité. Il en résulte que la contribution « comptable » des énergies renouvelables à la baisse de la consommation d’énergies fossiles et, ce faisant, des émissions de CO₂, est sensiblement inférieure à celle qui découlerait de la mise en œuvre de la méthode de substitution partielle, qui n’apparaît cependant pas exempte de défauts non plus (Ouvrir dans un nouvel ongletMesqui et Théron, 2022).

Territorialité et indépendance énergétique : d’où provient l’énergie ?

. Cependant, l’application de ce principe de territorialité repose sur le choix normatif de ce qui est considéré ou non comme une forme d’énergie (encadré 1). Cette convention a un impact sur l’appréciation du taux d’indépendance énergétique, défini comme le ratio entre la production nationale d’énergie primaire et la consommation primaire.

Les principales formes d’énergie primaire autres que le nucléaire sont les énergies fossiles (pétrole, gaz, charbon) et les énergies renouvelables. Ces énergies peuvent être utilisées directement ou pour produire de l’électricité, et le combustible énergétique est directement comptabilisé dans la consommation primaire. Pour l’électricité nucléaire, ce n’est pas le cas. En effet, dans les conventions internationales, les combustibles nucléaires (uranium et plutonium) ne sont pas considérés comme de l’énergie. C’est la chaleur issue de la réaction, produite là où est installé le réacteur, qui est considérée comme énergie primaire. Cette convention est l’une des plus controversées des bilans énergétiques. Elle a une incidence très forte sur le taux d’indépendance énergétique de la France, qui importe en totalité l’uranium qu’elle utilise. Ce taux est estimé officiellement à 50,6 % en 2022, mais chuterait à 13 %, si l’on considérait l’uranium comme une énergie (Ouvrir dans un nouvel ongletSDES, 2023). Bien qu’il ne soit pas explicite dans la , le principal argument à l’appui de cette convention semble être que l’uranium abonderait sur Terre et en particulier dans des pays bien disposés envers les pays consommateurs. . Quoiqu’on pense de cette convention, elle souligne que les bilans énergétiques ne peuvent être lus indépendamment du contexte, notamment géopolitique.

Des contraintes en matière d’observation conduisent par ailleurs à certaines entorses au principe de territorialité. Ainsi, la consommation finale de combustibles et de carburants est en pratique attribuée au pays dans lequel ils sont achetés. C’est une difficulté pour croiser la consommation de carburants avec les statistiques de circulation, en particulier des poids lourds, dont certains peuvent traverser la France sans y acheter de carburants. Au-delà du taux d’indépendance énergétique, se pose aussi la question des pays d’origine des importations. Leur détermination est complexe et obéit aussi à des conventions, le cheminement des électrons et des molécules de gaz naturel au sein des réseaux étant en particulier difficilement traçable.

Encadré 1. Les principales sources de données

Les statistiques de l’énergie reposent principalement sur l’exploitation de données recueillies par le SDES*. D’une part, ce service conduit des enquêtes statistiques au sens de la loi de 1951** (notamment sur la production d’électricité, les réseaux de chaleur, le charbon et les prix du gaz et de l’électricité). D’autre part, il collecte des données prévues par le code de l’énergie. La collecte la plus notable porte sur des données locales de consommation d’énergie. Ses résultats sont mis à disposition du public à une maille très fine (jusqu’au niveau du bâtiment pour les consommations d’énergie résidentielles).

Ces sources propres au SDES sont complétées par des sources externes. Les principales d’entre elles sont issues de la statistique publique, comme l’enquête annuelle sur la consommation d’énergie dans l’industrie (EACEI) de l’Insee ou les statistiques de commerce extérieur du service statistique des Douanes par exemple. Les autres proviennent d’organismes tels que l’Ademe, la Commission de régulation de l’énergie ou la Direction générale de l’énergie et du climat par exemple.

Les sources annuelles utilisées pour le bilan de l’énergie sont décrites plus précisément dans la note méthodologique associée***.

* SDES : Service des données et études statistiques. Le SDES est rattaché au Commissariat général au développement durable (CGDD), au sein du ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires.

** Voir fondements juridiques.

*** Sous-direction des statistiques de l’énergie (2023), « Méthodologie du bilan énergétique de la France », note méthodologique.

Les comptes monétaires de l’énergie : un outil complémentaire du bilan physique

La définition de comptes monétaires exprimés en euros offre une autre échelle d’équivalence, reposant sur une logique économique de coûts et non plus de quantité physique d’énergie. Ce suivi monétaire est utile pour éclairer deux des objectifs de la politique énergétique : soutenir la compétitivité des entreprises et le pouvoir d’achat des ménages. De tels comptes monétaires permettent de construire des indicateurs tels que le poids de l’énergie dans le budget des ménages ou dans les charges des entreprises. Ceux-ci sont plus parlants pour le grand public que des statistiques physiques en . Ces comptes constituent en outre un outil d’aide au calibrage de modèles d’évaluation micro- ou macro-économiques.

L’intérêt pour les statistiques monétaires de l’énergie croît dans les périodes de forte hausse des prix de l’énergie, voire de crise énergétique comme celle récente liée à la guerre en Ukraine. Il est donc logique de trouver la proposition d’un « compte » de l’énergie dès le début des années 1980, après les deux chocs pétroliers, dans les archives de l’Observatoire de l’énergie. Le contre-choc pétrolier de 1985 et le maintien d’un bas prix du pétrole jusqu’à la fin du siècle dernier ont probablement contribué à la mise en sommeil de ce projet. Le retour de la question du coût et de la fiscalité de l’énergie au centre des débats a ravivé la demande de statistiques dédiées et a conduit à la mise en place d’un « bilan monétaire » de l’énergie en 2017, novateur au plan international. Ce bilan monétaire s’apparente à un compte satellite. Il est cependant construit dans un cadre un peu différent de celui des comptes nationaux, afin de privilégier la cohérence avec le bilan physique de l’énergie avec lequel il est conjointement diffusé.

Le bilan monétaire décrit les flux en euros associés aux flux énergétiques présentés dans le bilan physique pour les énergies faisant l’objet d’échanges marchands (pétrole, gaz, électricité, chaleur, charbon, biocarburants, bois). Il prend la forme, comme le bilan physique, d’un équilibre ressources-emplois. La dépense nationale en énergie en constitue le principal agrégat. Pour chaque forme d’énergie, cette dépense peut être ventilée en emplois, par secteur consommateur, et en ressources, suivant les différentes composantes des prix (importations, production nationale, gestion des réseaux, marges de commerce, taxes, etc.).

Comme c’est usuellement le cas pour les comptes satellites, les bilans physique et monétaire de l’énergie font l’objet d’une présentation et d’une discussion au sein d’une instance dédiée, formée d’experts et de représentants des parties prenantes. Cette instance, dénommée « formation énergie-climat », a été mise en place au sein de la Commission de l’économie du développement durable (CEDD), créée en 2021, aux côtés de trois autres formations ayant succédé aux commissions des comptes de l’environnement, du logement et des transports. Elle a aussi vocation à examiner des travaux réalisés par des acteurs extérieurs à la statistique publique, par exemple sur la précarité énergétique (dont un observatoire est piloté par l’Ademe) ou en matière d’évaluation des politiques publiques de l’énergie (fiscalité, chèque énergie).

Une observation des prix de l’énergie plus délicate avec la libéralisation des marchés

Le lien entre bilan physique et bilan monétaire s’établit en grande partie par la mesure des prix de l’énergie. Leur observation est source de défis propres à chaque forme d’énergie. Le gaz et l’électricité relèvent des économies de réseaux, avec des marchés historiquement intégrés verticalement (de la production à la fourniture d’énergie). La libéralisation de ces deux marchés à la fin des années 2000 a complexifié le travail d’observation des prix. Il existe une .

Les autres formes d’énergie ont chacune leurs spécificités, nécessitant des sources variées. Deux exemples peuvent être mentionnés :

  • l’enquête annuelle sur les réseaux de chaleur et de froid (EARCF) pour le prix de la chaleur ;
  • les données du Centre d’Études de l’Économie du Bois (CEEB) pour le prix du bois (mesure néanmoins complexe, le bois étant largement échangé sur le marché informel).

Mesurer les dépenses énergétiques nécessite toujours d’associer aux consommations d’énergie les prix correspondants. Pour l’électricité et le gaz, plusieurs prix existent, associés à la chaîne de valeur de ces marchés. Les producteurs, soumis à la concurrence, peuvent vendre de ou sur un marché de gros avec la définition d’un prix de marché. Dans le cas particulier de l’électricité nucléaire produite par , un tarif et des conditions de vente spécifiques existent à travers le dispositif ARENH « Accès Régulé à l’Électricité Nucléaire Historique » de la loi NOME (Nouvelle Organisation du Marché de l’Électricité) de 2011. Des discussions sont en cours sur le dispositif de remplacement qui sera mis en œuvre à la suite de l’arrêt de l’ARENH prévu fin 2025. Les gestionnaires des réseaux en situation de monopole naturel sont rémunérés par un forfait spécifique pour l’accès aux réseaux. Les fournisseurs d’énergie, soumis à la concurrence, peuvent proposer différents contrats aux consommateurs finaux, notamment : tarif réglementé (pour les fournisseurs historiques d’électricité), tarif fixe sur la durée du contrat, ou tarif indexé sur le prix des marchés de gros du gaz et de l’électricité. Des politiques publiques peuvent également fixer un prix plafond de manière provisoire (comme cela a été le cas en 2022 avec le « bouclier tarifaire ») ou mener des politiques redistributives auprès des ménages modestes (chèque énergie). Ces contrats incluent généralement un abonnement, des tarifs différenciés selon la puissance souscrite et la période Heures Pleines/Heures Creuses (ce que justifie la théorie économique, Ouvrir dans un nouvel ongletPercebois, 2001, pour une synthèse).

L’observation des prix n’est pas directe et demeure complexe quelle que soit la forme d’énergie. Mieux mesurer les conséquences des crises énergétiques sur les comptes des agents (marges des entreprises, pouvoir d’achat et revenus des ménages) est un sujet d’actualité. La statistique publique offre des produits complémentaires pour l’analyse des questions économiques : le bilan monétaire, qui a l’avantage d’être cohérent avec le bilan physique, et des enquêtes telles que l’EACEI qui relie statistiques d’entreprises et consommation d’énergie ou l’Enquête Logement pour les ménages (encadré 2).

Encadré 2. Les chiffres clés de l’énergie en 2021

 

Source : Bilan énergétique de la France pour 2021. Chiffres Clés de l’Énergie, Édition 2022, DataLab SDES.

Les statistiques de l’énergie au cœur de la transition écologique et climatique

L’Union européenne et la France se sont engagées à atteindre la neutralité carbone à l’horizon . L’énergie est responsable d’environ 70 % des émissions de gaz à effet de serre (GES) en France. Cet objectif très ambitieux implique donc une transition énergétique, reposant sur la baisse de la consommation d’énergie et le recours croissant à des sources d’énergie décarbonées.

À côté des statistiques d’émissions, dont la description dépasse le cadre de cet article (Ouvrir dans un nouvel ongletCarnot et alii, 2023), les statistiques de l’énergie constituent des données essentielles au bon pilotage de la Stratégie nationale bas-carbone (SNBC). La compréhension des dynamiques d’émissions liées à l’énergie requiert de croiser ces statistiques énergétiques avec d’autres, issues des champs économique, démographique, des transports et du logement (Ouvrir dans un nouvel ongletMesqui et Théron, 2022). Ces croisements ne sont pas toujours aisés et peuvent nécessiter certains retraitements. En effet, les dispositifs d’observation des différents champs n’ont pas été initialement conçus pour être interopérables. Les statistiques de circulation et celles de consommation de carburants présentent par exemple des différences de périmètre. Le système de comptabilité économique et environnementale, élaboré au niveau de l’ONU, présente à cet égard l’avantage d’offrir un cadre de description des émissions et des flux énergétiques cohérent avec celui des comptes nationaux. Les comptes des flux physiques d’énergie (« Physical Energy Flow Accounts », PEFA), dont la transmission à Eurostat est obligatoire depuis l’exercice 2014, s’inscrivent dans ce cadre. Ils permettent, en théorie, de rapprocher les consommations d’énergie des différents secteurs économiques avec les grandeurs usuelles des comptes nationaux (production, valeur ajoutée, etc.). Cependant, leur utilisation est encore limitée par la faible profondeur temporelle des séries.

Un autre enjeu est le besoin des acteurs publics en statistiques locales sur ces domaines, pour les aider à réaliser leurs différents exercices de planification (plans climat locaux par exemple). Des données locales de consommation d’électricité, de gaz, de chaleur et de froid, de carburants et de combustibles sont mises à disposition sur le site du service statistique du ministère chargé de la transition écologique, en vertu de l’article 179 de . Pour l’électricité et le gaz, elles incluent des données au niveau des bâtiments (hors bâtiments résidentiels de moins de dix logements pour garantir la protection des données individuelles). Le service statistique ministériel est ainsi placé dans la position relativement inhabituelle de contrôler la qualité des millions de données fournies par d’autres, en l’occurrence, les gestionnaires de réseaux. Ceci pose la délicate question de l’ampleur et de la nature de ce contrôle, nécessairement limité.

Nouveaux usages énergétiques, nouvelles méthodes statistiques

La transition énergétique demande par ailleurs une adaptation continue de l’observation statistique, du fait de l’émergence de nouveaux usages (comme l’autoconsommation électrique par exemple) ainsi que de nouvelles formes d’énergie (encadré 3). L’observation des énergies renouvelables donne lieu à une publication spécifique de chiffres clés. Au-delà d’énergies renouvelables traditionnelles comme le bois, l’hydraulique ou les déchets, ce recueil s’est enrichi au cours des vingt dernières années pour prendre en compte l’éolien, le solaire, les pompes à chaleur ou les biocarburants. Les flux de certaines de ces nouvelles formes d’énergie, souvent décentralisées, ne sont pas toujours directement observables. Leur estimation peut alors requérir de combiner des compétences statistiques et des compétences d’ingénieurs. En général, . Un nouveau défi de taille est le suivi statistique de l’hydrogène. À la différence des énergies prémentionnées et comme l’électricité, l’hydrogène n’est pas une source primaire. C’est un vecteur énergétique : il peut être produit de diverses manières et utilisé à des fins variées (production d’électricité notamment). Un tout premier bilan de l’hydrogène a été publié en décembre 2023 (Ouvrir dans un nouvel ongletAndrieux, 2023).

Encadré 3. Qu’est-ce que la correction des variations climatiques ?

La principale source des variations des consommations d’énergie à très court terme est le climat. En effet, plus il fait froid, plus on consomme et réciproquement. Même si à long terme, l’action de l’homme intervient, la variation des conditions météorologiques est largement exogène et les politiques publiques n’ont pas de prise sur cette variation de court terme. Pour identifier le rôle des facteurs socio-économiques dans l’évolution des consommations et des émissions (part des différentes énergies utilisées, efficacité énergétique, comportements des ménages et sobriété, prix des énergies), il est nécessaire de disposer de consommations d’énergie corrigées des variations climatiques. Les consommations d’énergie sont dites thermosensibles. Elles font l’objet de correction dans le cadre du bilan annuel de l’énergie ainsi que dans la conjoncture mensuelle et trimestrielle (en complétant, pour cette dernière, par les traditionnelles corrections CJO-CVS*), à partir d’un indicateur de climat, les degrés jours unifiés (DJU). Sur la période de chauffage, on comptabilise la somme des degrés chaque jour inférieurs à 17oC. Sur la période de climatisation, on comptabilise la somme des degrés chaque jour supérieurs à 21oC. Cet indicateur avait été introduit au XIXe siècle pour des études sur les rendements agricoles (Ouvrir dans un nouvel ongletRahman, 2011). L’utilisation des DJU permet également, à l’aide de méthodes économétriques adaptées, de distinguer la part relevant de l’usage de chauffage dans les consommations d’énergie.

* CJO-CVS : La correction des variations saisonnières et des effets de jours ouvrables est un traitement statistique de la série brute qui vise à en éliminer les composantes cycliques (saisonnalité, nombre de jours ouvrables, année bissextile) pour améliorer l’analyse économique (Ladiray et Quartier-La-Tente, 2018).

Consommations quotidiennes d’électricité et conditions météorologiques

 

La transition énergétique renforce aussi les besoins de données permettant d’en mesurer les effets économiques. Il est nécessaire d’approfondir le suivi statistique de l’investissement dans la production, les réseaux et l’efficacité énergétiques, dans ses dimensions à la fois physique et monétaire (Ouvrir dans un nouvel ongletCarnot et alii, 2023). Si certains domaines, comme les énergies renouvelables, font déjà l’objet d’un tel suivi, ce n’est pas encore le cas du nucléaire par exemple.

Mesurer l’amélioration de l’efficacité énergétique des logements

Dans le secteur résidentiel, un facteur explicatif de la baisse de la consommation et des émissions est la plus grande efficacité thermique des logements (figure 2). Les normes pour le logement neuf se sont progressivement durcies (). Les incitations à la rénovation énergétique du parc existant se sont renforcées. Par exemple, l’interdiction dès 2023, de mise en location de logements très énergivores a pour objectif de supprimer les logements dits « passoires énergétiques ». Un Observatoire national de la rénovation énergétique (ONRE) a été créé en 2019, afin de suivre à la fois les performances énergétiques du parc de logements, les travaux de rénovation énergétique et l’efficacité des politiques publiques afférentes. Le pilotage de cet observatoire a été confié au service statistique du ministère chargé de la transition écologique, qui a l’avantage d’être compétent à la fois sur le logement et l’énergie.

Plusieurs sources de données sont disponibles pour effectuer ce suivi. La performance énergétique du parc de logements est mesurée à travers les diagnostics de performance énergétique (DPE). La réalisation d’un DPE est obligatoire lors de la vente ou de la location d’un logement. Ce qui est observé dans les données de la base DPE de l’Ademe, qui collecte l’ensemble des DPE réalisés, n’est donc pas représentatif du parc et nécessite de redresser les données (Ouvrir dans un nouvel ongletLe Saout, 2023). De plus, ce qui est mesuré dépend évidemment de la norme de définition du DPE en vigueur. En particulier, la méthode de calcul du DPE a évolué en 2021. La classification de A à G n’est plus basée sur la seule consommation des logements, mais aussi sur leurs émissions de gaz à effet de serre.

Le suivi des travaux de rénovation énergétique des logements (Ouvrir dans un nouvel ongletKraszewski et Le Jeannic, 2023) s’effectue principalement en comptabilisant les aides à la rénovation énergétique, dont les principales sont actuellement Ouvrir dans un nouvel ongletMaPrimeRenov’ et les Ouvrir dans un nouvel ongletCertificats d’économie d’énergie (CEE). Ces aides évoluent dans le temps, concernant les gestes couverts et les ménages ciblés (modestes et aisés). Ce qui est mesuré est donc aussi associé aux modalités administratives de définition des aides.

Des enquêtes sur la rénovation énergétique des logements sont donc nécessaires à un pas de temps régulier afin de pouvoir mesurer la part « cachée » de la rénovation énergétique, c’est-à-dire non financée par des aides à la rénovation énergétique. L’ représente à cet égard une source d’information très utile. Alors que les enquêtes précédentes ne couvraient jusqu’à présent que les maisons individuelles (), cette enquête intègre aussi les appartements. Cette extension représente toutefois un défi méthodologique (Ouvrir dans un nouvel ongletLe Saout et Rathle, 2023), notamment car il s’agit d’interroger une nouvelle unité statistique pour la statistique publique, la copropriété. Au sein d’une copropriété, les travaux de rénovation peuvent en effet concerner à la fois les parties privatives et les parties communes.

L’observation statistique de la rénovation énergétique ne se limite pas au parc de logements et au secteur résidentiel. Des travaux sont engagés sur la mesure de la rénovation énergétique dans le secteur tertiaire, pour lequel la consommation énergétique est importante (immeubles de bureaux, bâtiments recevant du public (écoles, centres commerciaux, etc.)) et fait l’objet d’objectifs de réduction spécifiques ().

Figure 2 - Gains moyens de consommation d’énergie en MWh/an lors de travaux de rénovation énergétique dans une maison individuelle

 

Champ : France métropolitaine, ménages en maison individuelle ayant réalisé des travaux d’économie d’énergie en 2019.
Source : Enquête TREMI 2020, exploitation SDES.

Des données de compteurs communicants pour évaluer les politiques énergétiques

Dans le cadre du suivi des aides ou de l’estimation de la performance énergétique du parc des logements, l’approche est dite « conventionnelle » : la consommation théorique (respectivement la baisse de consommation théorique) est calculée en fonction des caractéristiques techniques (isolation, ensoleillement, équipement de chauffage, etc.) et géographique (zone climatique) du logement. Or cette consommation « conventionnelle » peut s’écarter largement des consommations réelles, du fait de comportements de restriction de consommation des ménages modestes, des potentiels effets rebonds (c’est-à-dire le changement de comportements des ménages en matière de consommation d’énergie à la suite de la mise en place de travaux – Ouvrir dans un nouvel ongletBair et alii, 2017) ou de la qualité inobservée des travaux, par exemple si la qualité des isolants thermiques utilisés est moindre qu’annoncée (Ouvrir dans un nouvel ongletGiraudet et alii, 2018). Les politiques de rénovation énergétique visent également des objectifs sociaux de réduction de la précarité énergétique. En cas de forte restriction initiale de l’usage du chauffage pour des raisons financières, lorsque des travaux sont entrepris, potentiellement cela génère un gain de confort et non une baisse de la consommation. Les études économétriques (Ouvrir dans un nouvel ongletFowlie et alii, 2018 ; Ouvrir dans un nouvel ongletPenasco et Diaz, 2023 ; Ouvrir dans un nouvel ongletWebber et alii, 2015) évaluent ces politiques dans d’autres pays que la France et donnent des résultats contrastés sur les effets de court et long terme.

Un des enjeux pour la statistique publique est de dépasser ce cadre conventionnel pour établir une évaluation réelle des politiques publiques de rénovation énergétique. Pour ce faire, des données mensuelles de consommation individuelle de gaz et d’électricité issues des compteurs communicants (Linky pour l’électricité, Gazpar pour le gaz) seront utilisées (figure 3). Cette transmission de données au service statistique du ministère chargé de la transition écologique est autorisée (), après avoir informé les ménages. Elle concerne un échantillon d’un million de ménages ainsi que les ménages répondant à des enquêtes de la statistique publique. Bien que les données mobilisées ne soient pas l’ensemble des courbes de charge individuelles heure par heure (les consommations sont mensuelles), leur utilisation présente déjà un défi pour ce qui est du volume des données et des méthodes statistiques à mobiliser.

Figure 3 - Les différentes générations de compteurs électriques

 

Des start-ups (HelloWatt, Homeys, etc.) et l’Institut Français pour la performance du bâtiment (IFPEB) développent des méthodes alternatives basées sur la modélisation prédictive des courbes de charge à partir de données individuelles à des pas de temps très fins (toutes les 30 minutes), et à partir de questionnaires sur l’usage de l’énergie. Ces approches donnent des résultats très détaillés (au niveau de chaque ménage), mais nécessitent l’accord des usagers et présentent donc des biais de sélection difficiles à corriger pour obtenir des résultats agrégés. Dans le futur, l’utilisation de données avec une granularité plus fine sera un des enjeux pour la statistique publique.

L’appariement des données locales de l’énergie avec d’autres sources (données sur le logement, données fiscales, SIRENE) nécessite de développer des méthodologies ad hoc et innovantes d’appariement, au vu de la diversité des formats d’adresse. Hors statistique publique, le a initié un tel travail d’appariement de sources à travers la Base Nationale des Bâtiments (disponible en open data) et l’usage de méthodes d’apprentissage automatique (), mais avec une qualité des appariements difficile à évaluer. La création d’un identifiant unique des logements et des bâtiments dans le futur devrait permettre de fortes avancées dans l’observation statistique.

En guise de conclusion

Lors d’une assemblée générale du en mars 2023, une communication sur les enjeux de la crise énergétique pour le système statistique publique a été présentée (Ouvrir dans un nouvel ongletTavernier, 2023). Pour améliorer le suivi des politiques nationales et européennes (notamment le plan de sobriété énergétique et le bouclier tarifaire), plusieurs sujets étaient identifiés : l’origine des approvisionnements, l’évolution des consommations et des prix, et leurs conséquences sur les comptes des agents (entreprises et ménages). Un défi majeur pour l’avenir est d’adapter le système statistique pour éclairer et évaluer les politiques publiques en lien avec la transition écologique, notamment l’évolution du parc automobile, la disparition des passoires thermiques, la production et les usages de l’hydrogène ou encore le stockage de l’électricité.

Réaliser ces objectifs ambitieux requiert un travail sur la mise à disposition de nouvelles sources de données, à la fois pour l’observation de nouvelles thématiques (hydrogène, voitures électriques, rénovation énergétique dans le tertiaire) mais également avec une granularité plus fine, tant géographique (données locales) que temporelle. Les compteurs communicants peuvent permettre de mobiliser en effet des données très précises, limitées au gaz et à l’électricité ; néanmoins, se posent des défis spécifiques en matière de conditions juridiques d’accès, de volume de données et de méthodes statistiques.

Fondements juridiques

Ceren : Centre d’études et de recherches économiques sur l’énergie.

CPDP : Comité Professionnel Du Pétrole.

Les principaux gestionnaires de réseaux sont RTE et Enedis pour l’électricité, et GRTgaz et GRDF pour le gaz.

Ademe : Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie, appelée Agence de la transition écologique depuis juin 2020.

Branche de la physique qui étudie les propriétés des systèmes où interviennent les notions de température et de chaleur.

L’Ouvrir dans un nouvel ongletOrganisation des Nations Unies coordonne la définition des recommandations internationales pour les statistiques énergétiques.

En particulier, l’objet des statistiques de l’énergie ne couvre pas du tout la comptabilisation de la quantité totale de chaleur absorbée par la Terre et son atmosphère, qui a pourtant un impact très important sur les sociétés humaines, comme c’est le cas avec le changement climatique.

L’Agence internationale de l’énergie (AIE ou IEA en anglais) est une organisation intergouvernementale autonome rattachée à l’Organisation de coopération et de développement économique (OCDE). Elle est composée de 30 pays membres, pour la plupart importateurs de pétrole.

Eurostat, l’Office statistique de l’Union européenne, est chargé de publier des statistiques et des indicateurs européens, permettant d’effectuer des comparaisons entre les pays et les régions.

À noter qu’à la différence des comptes nationaux par exemple, dont l’équilibrage repose sur des arbitrages entre les estimations des ressources et celles des emplois, le bilan de l’énergie ne cherche pas à réconcilier les deux grandeurs, faisant ainsi apparaître un « écart statistique » pour chaque forme d’énergie.

C’est une différence avec le volet PEFA (Physical Energy Flow Accounts) des comptes de l’environnement ; ce volet obéit, comme les comptes nationaux, au principe de résidence (c’est-à-dire s’intéresse aux flux énergétiques des unités résidentes). En comptabilité nationale, une unité est dite résidente lorsqu’elle a un centre d’intérêt économique sur le territoire économique de ce pays.

Le manuel AIE/Eurostat de 2005 mentionne l’existence d’un débat mais sans en poser les termes, tandis que les « Recommandations internationales pour les statistiques énergétiques » de l’ONU de 2019 l’ignorent complètement. C’est d’autant plus frappant que le rapport sur les statistiques de l’énergie de l’ONU de 1983 consacrait un long développement au cycle de l’uranium et à la comptabilité du nucléaire.

Un autre argument est que l’uranium est plus facilement stockable en grande quantité que le gaz ou le pétrole.

TWh : Symbole du térawatt-heure, unité de mesure d’énergie. 1 TWh représente l’énergie fournie en 1 heure par une puissance de 1 000 milliards de watts.

De manière générale, les comptes satellites visent à fournir des informations dans un domaine particulier, plus fines que les comptes nationaux dans un cadre cohérent avec ces derniers. La France a été pionnière dans l’élaboration de tels comptes, la première commission sectorielle des comptes, celle des transports, ayant été mise en place en 1955.

Enquête semestrielle « Transparence des prix du gaz et de l’électricité ».

Vente directe du producteur sans recourir à un marché.

Électricité de France (EDF), entreprise publique française de production et de fourniture d’électricité.

À horizon 2050, les émissions résiduelles de gaz à effet de serre de la France devront être inférieures aux capacités d’absorption par les puits de carbone (sols, forêts, océans, puits technologiques).

Par exemple, pour les pompes à chaleur, la chaleur extraite de l’air ou du sol est estimée en multipliant leur puissance électrique par le nombre estimé d’heures de fonctionnement, plus un facteur de performance.

CSTB : Centre Scientifique et Technique du Bâtiment.

L’apprentissage automatique (machine learning en anglais) est un champ d’étude de l’intelligence artificielle qui vise à donner aux machines la capacité d’« apprendre » à partir de données, via des modèles mathématiques.

Cnis : le Conseil national de l’information statistique est chargé de la concertation entre les producteurs et les utilisateurs de la statistique publique.

Pour en savoir plus

AIE/Eurostat/OCDE, 2005. Ouvrir dans un nouvel ongletManuel sur les statistiques de l’énergie. In : site de Eurostat. [Consulté le 29 janvier 2024].

ANDRIEUX, Virginie, 2023. Ouvrir dans un nouvel ongletL’hydrogène pur : première évaluation des ressources et des usages en France en 2022. In : site datalab du SDES. [en ligne]. [Consulté le 29 janvier 2024].

BAIR, Sabrine, BELAïD, Fateh et TEISSIER, Olivier, 2017. Ouvrir dans un nouvel ongletQuels enseignements tirer de l’enquête Phébus sur la question de l’effet rebond ?. In : Les ménages et la consommation d’énergie, Théma, Service de l’observation et des statistiques (SOeS), pp. 101-113. [en ligne]. Mars 2017. [Consulté le 29 janvier 2024].

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