Comptes nationaux Espace thématique
Cet espace recense les publications de la comptabilité nationale, représentation globale
détaillée et chiffrée de l’activité économique de la France. Son principal agrégat
est le produit intérieur brut (PIB). Elle se décline en comptes annuels, trimestriels
et thématiques, ainsi qu’en comptes « augmentés » qui visent à produire des analyses
« au-delà du PIB », dans les dimensions environnementale (comptes carbone)
et sociale (inégalités et redistribution avec les comptes par catégories de ménages).
Émissions de gaz à effet de serre et empreinte carbone de la France en 2023 Les émissions de gaz à effet de serre et l’empreinte carbone de la France diminuent significativement
Manuel Baude (SDES), Sylvain Larrieu (Insee)
En 2023, les émissions de gaz à effet de serre des unités résidentes françaises (qui comprennent certaines émissions à l’étranger pour le transport maritime et aérien notamment) s’élèvent à 403 millions de tonnes équivalent CO2 (Mt CO2 éq), soit 5,9 tonnes par personne, alors que l’empreinte carbone de la France s’élève à 644 Mt CO2 éq soit 9,4 tonnes par personne. La différence s’explique par des émissions importées pour satisfaire la demande finale française, qui sont nettement supérieures aux émissions exportées par la France. Les émissions françaises se replient de 5,6 % par rapport à 2022, sous l’effet notamment de la baisse de la production d’électricité carbonée. Ce repli traduit essentiellement un recul des émissions exportées par la France (-12,6 %), alors que celles destinées à la demande finale intérieure sont moins affectées (-1,4 %). Au total, l’empreinte carbone diminue pour sa part de 4,1 %, principalement du fait du recul des émissions importées. Depuis 1990, les émissions françaises ont diminué plus rapidement que l’empreinte carbone, dans laquelle la part des importations augmente.
- En 2023, les émissions françaises de gaz à effet de serre (GES) s’élèvent à 403 Mt CO2 éq et l’empreinte à 644 Mt CO2 éq
- En 2023, la baisse des émissions se confirme avec une diminution de 5,6 %
- L’empreinte carbone diminue de 4,1 % sous l’effet de la baisse des émissions importées
- Encadré - Des décompositions complémentaires de l’empreinte carbone en 2021
- L’empreinte carbone baisse sur longue période malgré la hausse de la part des émissions importées
- Bien que cinq fois plus intenses en GES par euro, les importations se décarbonent au même rythme que le PIB
En 2023, les émissions françaises de gaz à effet de serre (GES) s’élèvent à 403 Mt CO2 éq et l’empreinte à 644 Mt CO2 éq
Les émissions de gaz à effet de serre (GES) des unités résidentes françaises s’élèvent à 403 millions de tonnes équivalent CO2 (Mt CO2 éq) en 2023, dont 101 Mt émises directement par les ménages, via l’usage de combustibles fossiles pour le chauffage de leur logement et l’utilisation de leurs véhicules (figure 1). Les autres émissions, soit 302 Mt, sont émises par les activités économiques. 180 Mt servent à satisfaire la demande finale intérieure française, et 122 Mt sont intégrées à des biens et services qui sont exportés pour servir la demande finale d’autres pays (sources et méthodes).
tableauFigure 1 – Émissions et empreinte carbone de la France en 2023
Type d'émissions | 2023 (en millions de tonnes CO2 eq) |
Évolutions 2022/2023 (en %) |
---|---|---|
Émissions importées réexportées | 151 | -7,4 |
Émissions importées destinées à la demande finale | 362 | -5,5 |
Émissions de la production intérieure exportée | 122 | -12,6 |
Émissions de la production intérieure destinée à la demande finale | 180 | -1,4 |
Émissions de la production intérieure totale | 302 | -6,2 |
Émissions directes des ménages | 101 | -3,6 |
- Notes : Les émissions de la France correspondent aux émissions des résidents Français (inventaire au format AEA) ; les flux internationaux de gaz à effet de serre (GES) représentent les émissions associées aux exportations et importations françaises ; les émissions associées aux exportations peuvent être « brutes » (y compris les importations réexportées) ou « nettes » (hors importations réexportées) ; l'empreinte carbone est une estimation des émissions de GES associées à la demande finale française hors exportations.
- Lecture : En 2023, l'empreinte carbone de la France est de 644 Mt CO2 eq. Elle se décompose en 362 Mt CO2 eq d'émissions importées, 180 Mt CO2 eq d'émissions intérieures et 101 Mt CO2 eq d'émissions directes des ménages.
- Champ : France et Saint-Martin ; GES (CO2 + CH4 + N2O + gaz fluorés).
- Sources : Insee, Eurostat, Citepa, Douanes, OCDE ; traitements Insee-SDES 2024.
graphiqueFigure 1 – Émissions et empreinte carbone de la France en 2023
La France importe également des biens et services, dont la production a nécessité
l’émission de GES à l’étranger. L’ensemble des émissions des importations est de 513 Mt CO2 éq, dont la majorité (362 Mt) est destinée à servir la demande finale française (émissions
« importées »). Le reste est intégré à des biens et services qui sont fabriqués en
France mais sont ensuite réexportés vers le reste du monde.
Ainsi, l’empreinte carbone de la France, qui correspond aux émissions destinées à satisfaire la demande finale
française, est estimée à 644 Mt en 2023. 101 Mt proviennent directement des ménages
(16 %), 180 Mt des activités économiques françaises (28 %) et 362 Mt sont importées
(56 %). Parmi les émissions importées, 146 Mt sont associées à des importations pour
usage final (23 % de l’empreinte) et 216 Mt à des importations pour les besoins des
activités économiques intérieures (34 %).
En 2023, la baisse des émissions se confirme avec une diminution de 5,6 %
Après une chute inédite liée à la crise sanitaire (-10,4 % entre 2019 et 2020), les émissions de la France ont rebondi partiellement en 2021 (+5,8 %), puis diminué en 2022 (-2,9 %). La baisse s’accentue en 2023 (-5,6 % soit -23,9 Mt CO2 éq), alors que le PIB augmente de 0,9 %. Les émissions s’établissent à 403 Mt CO2 éq soit 5,9 tonnes de CO2 éq par personne, contre 6,9 tonnes en 2019.
Les émissions directes des ménages diminuent de 3,6 % en 2023, soit -3,8 Mt, traduisant une moindre consommation de combustibles fossiles pour leurs logements (-6,6 %, soit -2,3 Mt) et leurs véhicules (‑2,3 %, soit -1,5 Mt). Des comportements plus sobres, une météo hivernale plus clémente et l’amélioration de l’efficacité énergétique des parcs de véhicules et de logements expliquent ces baisses.
La nette diminution des émissions des branches d’activités économiques (-6,2 %, soit -20,1 Mt) résulte à la fois de circonstances conjoncturelles (meilleure disponibilité des infrastructures de production d’électricité d’origine nucléaire, composition de la croissance économique compte tenu notamment du manque de dynamisme des industries intenses en énergie, météo, etc.) et de facteurs structurels (efficacité énergétique des moyens de production, décarbonation tendancielle du bouquet énergétique, etc.) (figure 2).
tableauFigure 2 – Évolution des émissions françaises de GES et de la valeur ajoutée par branches d’activité entre 2022 et 2023
Indicateurs | Agriculture, sylviculture et pêche | Industrie | Dont : | Construction | Services principalement marchands | Dont : | Services principalement non marchands | Ensemble des branches | ||
---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|
Extraction, énergie et déchets | Fabrication de produits industriels1 | Hébergement et restauration | ||||||||
A | B à E | BDE | C5 | F | G à M et R à U | I55-56 | O à Q | |||
Émissions de gaz à effet de serre (GES) | ||||||||||
2019 | en kt CO2 éq | 80 911 | 142 737 | 52 598 | 65 369 | 8 949 | 99 840 | 2 566 | 15 245 | 347 681 |
2020 | 80 338 | 128 490 | 49 384 | 57 499 | 7 967 | 81 826 | 2 263 | 13 849 | 312 470 | |
2021 | 78 750 | 136 257 | 50 622 | 64 351 | 8 894 | 90 103 | 2 414 | 15 474 | 329 479 | |
2022 | 76 432 | 130 902 | 51 411 | 59 261 | 8 888 | 92 585 | 2 076 | 13 426 | 322 233 | |
2023 | 75 123 | 117 071 | 43 724 | 54 197 | 8 514 | 88 313 | 1 958 | 13 096 | 302 116 | |
2019/2020 | en % | -0,7 | -10,0 | -6,1 | -12,0 | -11,0 | -18,0 | -11,8 | -9,2 | -10,1 |
2020/2021 | -2,0 | 6,0 | 2,5 | 11,9 | 11,6 | 10,1 | 6,7 | 11,7 | 5,4 | |
2021/2022 | -2,9 | -3,9 | 1,6 | -7,9 | -0,1 | 2,8 | -14,0 | -13,2 | -2,2 | |
2022/2023 | -1,7 | -10,6 | -15,0 | -8,5 | -4,2 | -4,6 | -5,7 | -2,5 | -6,2 | |
2019/2023 | -7,2 | -18,0 | -16,9 | -17,1 | -4,9 | -11,5 | -23,7 | -14,1 | -13,1 | |
Valeur ajoutée, prix chaînés base 2020 | ||||||||||
2019 | en milliards d'euros constants | 36,4 | 286,2 | 50,9 | 128,8 | 126,1 | 1 272,9 | 52,1 | 496,2 | 2 218,4 |
2020 | 33,9 | 261,2 | 46,9 | 117,7 | 116,0 | 1 173,9 | 28,8 | 471,6 | 2 056,5 | |
2021 | 32,2 | 278,5 | 45,7 | 125,0 | 122,6 | 1 256,7 | 32,5 | 501,0 | 2 191,1 | |
2022 | 34,6 | 263,1 | 34,2 | 123,2 | 118,8 | 1 326,9 | 46,9 | 509,4 | 2 253,3 | |
2023 | 36,2 | 277,6 | 42,2 | 123,4 | 121,1 | 1 343,2 | 52,9 | 505,3 | 2 285,5 | |
2019/2020 | en % | -7,0 | -8,7 | -7,9 | -8,6 | -8,0 | -7,8 | -44,7 | -5,0 | -7,3 |
2020/2021 | -4,8 | 6,6 | -2,6 | 6,2 | 5,7 | 7,1 | 12,9 | 6,2 | 6,5 | |
2021/2022 | 7,2 | -5,5 | -25,1 | -1,4 | -3,1 | 5,6 | 44,2 | 1,7 | 2,8 | |
2022/2023 | 4,9 | 5,5 | 23,3 | 0,2 | 1,9 | 1,2 | 12,8 | -0,8 | 1,4 | |
2019/2023 | -0,5 | -3,0 | -17,1 | -4,2 | -4,0 | 5,5 | 1,5 | 1,8 | 3,0 |
- 1. Hors agroalimentaire, automobile, équipements électriques et électroniques.
- Note : La somme des valeurs monétaires des branches ne correspond pas nécessairement à la valeur de l'ensemble des branches en raison de la nature des prix (valeur ajoutée en prix chaînés, base 2020).
- Lecture : Entre 2022 et 2023, les émissions françaises de gaz à effet de serre (GES) diminuent de 6,2 %, et la valeur ajoutée augmente de 1,4 % en euros constants.
- Champ : France et Saint-Martin ; GES (CO2 + CH4 + N2O + gaz fluorés).
- Sources : Insee, Citepa ; traitements Insee-SDES 2024.
graphiqueFigure 2 – Évolution des émissions françaises de GES et de la valeur ajoutée par branches d’activité entre 2022 et 2023
En 2023, à l’exception du transport aérien, toutes les branches d’activité contribuent à la réduction des émissions. Dans l'agriculture, la réduction des émissions (-1,3 Mt) s’explique essentiellement par la diminution du cheptel bovin et la réduction des engrais alors que la production augmente légèrement en volume. En 2022, l’indisponibilité exceptionnelle de nombreux réacteurs nucléaires avait induit un recours accru à des centrales thermiques pour produire de d’électricité. En 2023, la disponibilité du parc nucléaire s’améliore et les productions d’électricité d’origine renouvelable s’accroissent ce qui engendre une baisse de 7,7 Mt des émissions de GES. La baisse de l'activité industrielle engendre des réductions d’émissions dans la métallurgie (-2,2 Mt), la production de ciment et autres minéraux non métalliques (-1,3 Mt), la chimie (‑1,0 Mt) et l’industrie agroalimentaire (-0,8 Mt). Le secteur de l'hôtellerie-restauration connait une croissance de son activité tout en atténuant ses émissions, notamment en raison d'une moindre consommation d'énergie. Les émissions du transport maritime international se réduisent (-3,5 Mt), alors que celles du transport aérien augmentent pour la troisième année consécutive (+1,8 Mt), en lien avec la reprise du trafic après la crise sanitaire.
Sur le moyen-long terme, dans la plupart des branches et pour l’économie en général, une tendance au découplage entre évolution de la production et évolution des émissions de GES est à l’œuvre : les émissions diminuent alors que l’activité économique (production et valeur ajoutée) mesurée en euros constants augmente. Ce découplage peut résulter de différents facteurs : l'externalisation de procédés de fabrication intensifs en carbone, la consommation d’intrants moins carbonés (en particulier en produits énergétiques), la modification de la nature des produits fabriqués ou l’adoption de technologies, procédés ou comportements moins émissifs.
Entre 2022 et 2023, les baisses d’émissions s’observent majoritairement dans des branches qui répondent plutôt à la demande internationale qu’à la demande intérieure (industrie manufacturière et transport maritime notamment). Cela explique que les émissions exportées diminuent de 12,6 % soit ‑17,6 Mt CO2 éq et captent 85 % de la baisse des émissions liées à l’activité économique française (alors que les exportations augmentent de 2,1 % en euros constants en 2023). Dans le même temps, les émissions françaises contenues dans les biens et services destinés à la demande finale intérieure française n’ont diminué que de 1,4 % (-2,5 Mt), dans un contexte de quasi-stabilité de la demande finale intérieure (+0,3 % en euros constants).
Sur une plus longue période, les émissions de la France ont baissé de 31 % depuis 1990, principalement en raison de la réduction des émissions dans l’industrie.
L’empreinte carbone diminue de 4,1 % sous l’effet de la baisse des émissions importées
En 2023, l’empreinte carbone de la France est estimée à 644 Mt CO2 éq, en baisse de 4,1 % par rapport à 2022 (-27 Mt CO2 éq). Entre 2019 et 2020, l’empreinte carbone avait connu une chute historique de 10,3 %, en lien avec la crise sanitaire. En 2021, avec la fin des restrictions des déplacements et la reprise de l’activité économique et du commerce international, l’empreinte carbone avait sensiblement rebondi de +7,4 %, puis était restée globalement stable en 2022 (+0,8 %). En 2023, l’empreinte carbone baisse à nouveau et atteint 9,4 tonnes par personne, contre 10,3 tonnes en 2019 avant la crise sanitaire.
Les émissions des activités économiques françaises et étrangères permettant de satisfaire la demande finale intérieure, soit 84 % de l’empreinte carbone, représentent 542 Mt CO2 éq, en recul de 4,2 % par rapport à 2022 (figure 3). Alors que les émissions intérieures (hors ménages) sont restées quasi stables (-1,4 % soit -2,5 Mt CO2 éq), celles importées ont diminué de 5,5 % (-21,0 Mt CO2 éq), expliquant ainsi les trois quarts de la baisse totale de l’empreinte carbone. Cette diminution des émissions importées provient notamment de la baisse des importations de produits minéraux (dont le ciment) et de produits d’habillement, mais aussi d’un recul des importations d’hydrocarbures et d’électricité qui avaient beaucoup augmenté en 2022 en raison du contexte géopolitique (reconstitution des stocks de gaz) et de la moindre disponibilité du parc nucléaire. Les émissions directes des ménages, 101 Mt CO2 éq soit 16 % de l’empreinte carbone, diminuent quant à elles de 3,6 % (-3,8 Mt), comme indiqué précédemment.
tableauFigure 3 – L’empreinte carbone et ses composantes de 1990 à 2023
Années | Ménages | Émissions intérieures | Émissions importées | Empreinte totale |
---|---|---|---|---|
1990 | 126 | 296 | 321 | 743 |
1991 | 134 | 303 | 308 | 745 |
1992 | 136 | 297 | 302 | 735 |
1993 | 134 | 284 | 259 | 678 |
1994 | 130 | 275 | 270 | 675 |
1995 | 131 | 272 | 296 | 699 |
1996 | 139 | 271 | 296 | 706 |
1997 | 135 | 250 | 287 | 672 |
1998 | 140 | 289 | 310 | 739 |
1999 | 141 | 288 | 303 | 733 |
2000 | 139 | 278 | 316 | 734 |
2001 | 146 | 280 | 316 | 742 |
2002 | 144 | 281 | 322 | 747 |
2003 | 147 | 283 | 354 | 784 |
2004 | 150 | 277 | 391 | 818 |
2005 | 148 | 277 | 411 | 835 |
2006 | 145 | 271 | 432 | 847 |
2007 | 137 | 275 | 457 | 869 |
2008 | 139 | 263 | 474 | 876 |
2009 | 139 | 259 | 399 | 797 |
2010 | 138 | 253 | 409 | 800 |
2011 | 130 | 235 | 443 | 808 |
2012 | 134 | 235 | 392 | 762 |
2013 | 135 | 232 | 387 | 754 |
2014 | 123 | 216 | 382 | 721 |
2015 | 126 | 216 | 354 | 696 |
2016 | 127 | 219 | 341 | 688 |
2017 | 125 | 223 | 358 | 706 |
2018 | 119 | 214 | 372 | 704 |
2019 | 116 | 208 | 367 | 691 |
2020 | 103 | 189 | 327 | 620 |
2021 | 111 | 192 | 363 | 666 |
2022 | 105 | 183 | 383 | 671 |
2023 | 101 | 180 | 362 | 644 |
- Notes : Chaque barre représente l'empreinte carbone d'une année. Les données de 1990 à 2009 sont rétropolées à partir du calcul de l'année 2010, et les données 2022 et 2023 sont provisoires.
- Lecture : En 2023, l'empreinte carbone de la demande finale est de 644 Mt CO2 eq.
- Champ : France et Saint-Martin ; GES (CO2 + CH4 + N2O + gaz fluorés).
- Sources : Insee, Eurostat, Citepa, Douanes, OCDE ; traitements Insee-SDES 2024.
graphiqueFigure 3 – L’empreinte carbone et ses composantes de 1990 à 2023
La consommation finale des ménages induit 64 % de l’empreinte (hors émissions directes des ménages), la consommation finale des administrations et des organismes à but non lucratif 13 % et, les investissements et variations de stocks 23 %. Alors que la consommation finale des ménages s’accroît (+0,8 % en euros constants), l’empreinte associée se réduit de 1,5 %, soit -5 Mt CO2 éq. Ce découplage entre évolution de la consommation des ménages et émissions associées s’observe également pour les investissements (+0,4 % en euros constants et -5,1 % d’empreinte soit -7 Mt CO2 éq). Les variations de stocks induisent quant à elles une empreinte de seulement 2 Mt en 2023 contre 12 Mt en 2022. La réduction des émissions associées aux stocks (-10 Mt) représente ainsi plus d’un tiers de la baisse de l’empreinte entre les deux années.
Le gaz et l’électricité (-8,7 Mt), les produits de la construction (-5,6 Mt) et les produits d’habillement (-3,0 Mt) sont les principaux produits contribuant à la baisse de l’empreinte. À l’inverse, l’empreinte associée à la demande de transport aérien (+3,2 Mt) augmente, ainsi que celle liée aux véhicules automobiles (+2,6 Mt), en lien avec le rebond du nombre d’immatriculations. La demande finale de services marchands et publics augmente de 1,7 % en euros constants sans engendrer de hausse significative d’émissions (encadré).
Encadré - Des décompositions complémentaires de l’empreinte carbone en 2021
L’empreinte carbone peut être décomposée selon plusieurs approches complémentaires. Les chiffres présentés ici portent sur 2021, dernière année fondée sur un jeu de données économiques exhaustives.
L’empreinte carbone de la France peut être ventilée selon l’origine géographique des émissions : 45 % des GES sont émis en France, 13 % proviennent de l’Union Européenne hors France, 9 % de Chine, 6 % de Russie et 2 % des États-Unis. Cette structure est différente de celle des importations françaises de biens et services. En effet, un produit fini importé d’un pays donné résulte d’un processus de production souvent complexe et mondialisé qui a pu entraîner des émissions dans différents pays du monde, en remontant la chaîne de valeur.
Les émissions importées peuvent elles-mêmes se distinguer selon leur destination dans l’économie française : 42 % sont destinées directement à la consommation finale des ménages (notamment en biens manufacturés ou en combustibles), les 58 % autres sont utilisées comme intrants par les branches d’activités intérieures pour produire des biens et services destinés à la demande finale française (produits agricoles, énergétiques, métalliques ou chimiques, etc.).
L’empreinte carbone peut aussi être ventilée selon les branches d’activités à l’origine des émissions de GES dans le monde : hors émissions directes des ménages, les émissions proviennent principalement de l’industrie manufacturière (26 %), de l’agriculture (21 %), de la production d’électricité (18 %), des industries extractives et des services de transport (10 % chacun) et seuls 6 % des services marchands et non marchands.
Si l’on s’intéresse aux biens et services finaux dans lesquels sont contenus les GES, la structure est différente : 42 % des GES de l’empreinte carbone sont incorporés dans les produits de l’industrie manufacturière et 24 % dans les services marchands et non marchands, ceux-ci intégrant notamment une partie des émissions provenant de l’agriculture et de l’énergie.
Enfin, l’empreinte carbone peut être ventilée par grands « postes » de consommation : les déplacements, l’habitat et l’alimentation représentent 68 % des émissions de l’empreinte, alors qu'1,2 tonne de CO2 éq par an et par personne est attribuable aux services principalement publics.
L’empreinte carbone baisse sur longue période malgré la hausse de la part des émissions importées
Les émissions des résidents français ont diminué de 31 % depuis 1990 (et de 41 % par habitant, en tenant compte de la hausse de la population) : les émissions directes des ménages ont baissé de 20 %, les émissions des activités économiques destinées à la demande finale étrangère (émissions exportées) ont diminué de 26 %, alors que celles destinées à la demande finale française ont baissé de 39 %. L’empreinte carbone de la France a, pour sa part, diminué moins rapidement, de seulement 13 % depuis 1990 (et de 26 % par habitant), traduisant une double tendance : une diminution des émissions de la production intérieure (-39 %) et des émissions directes des ménages (-20 %), modérées par une hausse des émissions importées (+13 %).
Les émissions importées représentaient ainsi 56 % de l'empreinte carbone en 2023 contre 43 % en 1990. Plusieurs facteurs contribuent à la hausse des émissions importées : délocalisation de certaines productions (la production textile a par exemple été divisée par deux en euros constants en France sur la période, alors que la consommation est restée relativement stable), augmentation de la demande finale française pour des produits principalement produits à l’étranger (smartphones par exemple).
En 2023, les émissions brutes associées aux importations (513 Mt) sont bien supérieures à celles dues aux exportations brutes (273 Mt). En particulier, les échanges de produits énergétiques et de biens industriels se soldent par une importation nette d’environ 207 Mt de GES. Seuls les échanges de matériels aéronautiques font exception, avec un solde exportateur de +7 Mt. Pour les services, la balance commerciale est largement excédentaire (+40 Md€), mais le solde en GES est quasi nul (‑3 Mt). Les activités de services étrangères ont en effet, en moyenne, un contenu en GES par euro plus élevé que les activités de services nationales.
Bien que cinq fois plus intenses en GES par euro, les importations se décarbonent au même rythme que le PIB
En 2023, l’intensité en GES du PIB est de 118 grammes de CO2 éq par euro alors que le contenu en GES par euro des importations est de 618 grammes de CO2 éq par euro (figure 4). La composition de ces deux agrégats est en effet très différente : les importations concernent principalement des produits au fort contenu carbone (produits énergétiques, métaux, biens manufacturés fabriqués dans des pays au mix énergétique très carboné), qui sont indispensables au fonctionnement de l’économie nationale, alors que le PIB français recouvre principalement des activités de transformation industrielle moins intenses en GES ou des services. Le contenu unitaire des exportations françaises (335 grammes de CO2 éq par euro) est également principalement porté par les biens manufacturés. Enfin, l’empreinte carbone hors émissions directes des ménages, qui intègre les émissions intérieures et importées, atteint un contenu en GES de 210 grammes de CO2 éq par euro de demande finale.
tableauFigure 4 – Contenu en GES par euro du PIB, des importations, de la demande finale intérieure et des exportations
Année | PIB | Importations | Exportations | Demande finale intérieure |
---|---|---|---|---|
2010 | 182,0 | 981,5 | 538,3 | 298,8 |
2011 | 170,1 | 1 011,4 | 535,8 | 299,1 |
2012 | 168,8 | 896,7 | 489,8 | 278,2 |
2013 | 165,5 | 854,0 | 465,3 | 272,0 |
2014 | 154,4 | 809,2 | 440,9 | 259,2 |
2015 | 152,6 | 701,9 | 399,7 | 243,1 |
2016 | 150,9 | 649,5 | 376,2 | 235,8 |
2017 | 152,0 | 660,1 | 385,0 | 239,4 |
2018 | 145,1 | 666,3 | 377,5 | 237,9 |
2019 | 138,8 | 648,1 | 366,6 | 229,1 |
2020 | 134,8 | 633,4 | 363,3 | 219,1 |
2021 | 133,0 | 672,6 | 387,3 | 222,0 |
2022 | 126,8 | 660,1 | 378,9 | 220,1 |
2023 | 117,8 | 618,1 | 334,8 | 210,3 |
- Note : Chaque série représente la quantité de gaz à effet de serre (GES) pour un euro de différents agrégats économiques.
- Lecture : En 2023, le PIB émet 117,8 grammes de CO2 par euros.
- Champ : France et Saint-Martin ; GES (CO2 + CH4 + N2O + gaz fluorés) ; données économiques en euros constants base 2020.
- Sources : Insee, Eurostat, Citepa, Douanes, OCDE ; traitements Insee-SDES 2024.
graphiqueFigure 4 – Contenu en GES par euro du PIB, des importations, de la demande finale intérieure et des exportations
Entre 2010 et 2023, les émissions des activités économiques résidentes (hors émissions directes des ménages) diminuent de 25 % et celles de l’empreinte totale de 18 %. Sur cette même période, le produit intérieur brut et la demande finale ont augmenté respectivement de 15 % et 16 % en euros constants. Cela signifie que l’intensité d’émission GES du PIB a diminué (-35 % sur la même période), tout comme le contenu en GES par euro de demande finale (-30 %). Le PIB (-3,3 % par an en moyenne), les importations (-3,5 % par an) se décarbonent à des rythmes relativement comparables tandis que le contenu par euro de demande finale intérieure décroît moins rapidement (-2,7 % par an), du fait de la part croissante des émissions importées.
Sources et méthodes
Les comptes d’émissions dans l’air ou AEA (Air Emissions Accounts) sont des inventaires d’émissions de substances gazeuses, réalisés selon une nomenclature identique à celle utilisée pour les comptes nationaux. Il s’agit des émissions directes des branches d’activités et des ménages ; par exemple les émissions issues de la production d’électricité sont allouées à la branche d’activité « production d’électricité » et non au consommateur final. Les AEA répertorient les émissions des unités résidentes nationales : pour les transports, les émissions des résidents français à l’étranger sont incluses alors que les émissions des étrangers en France sont exclues. Pour cette raison, le total des émissions (403 Mt CO2 éq en 2023) diffère légèrement des inventaires diffusés par le Citepa aux formats CCNUCC et SECTEN, qui comptabilisent les émissions ayant lieu sur le territoire français (373 Mt CO2 éq).
L’estimation de l’empreinte carbone est fondée sur une modélisation macroéconomique, qui vise à affecter les émissions
annuelles mondiales de GES aux biens et services faisant l’objet d’une demande finale
dans chaque pays. Les informations économiques proviennent des tableaux internationaux
des entrées sorties (TIES) « Figaro », développés par Eurostat, et des comptes nationaux
français. Les TIES décrivent l’origine des productions, les relations entre les branches
d’activités économiques et la nationalité des consommateurs de chaque bien et service.
L’estimation de l’empreinte carbone résulte de la combinaison du TIES (harmonisé au
préalable sur les résultats des comptes nationaux français) et des AEA de l’ensemble
des pays du monde. Faute de données détaillées complètes, les résultats antérieurs
à 2010 sont issus d’une rétropolation et ceux postérieurs à l’année 2021 sont des
estimations provisoires. Dans ces estimations provisoires, les données françaises
d’émissions de GES et de demande finale monétaire sont connues, mais le contenu en
GES par euro de biens importés est projeté, en tenant compte des tendances passées
et des variations de prix.
Les figures de cette publication sont accompagnées de tableaux complémentaires portant
sur les années 1990 à 2023, qui présentent les différentes décompositions des comptes
d’émissions dans l’air et de l’empreinte carbone : par type de gaz à effet de serre,
par origine géographique et activité des émissions, par produits et secteurs institutionnels
de la demande finale, ainsi que des comparaisons internationales. Ils sont mis à disposition
sur les sites internet du SDES et de l’Insee.
Définitions
Les émissions de gaz à effet de serre (GES) sont les émissions de dioxyde de carbone (CO2), méthane (CH4), protoxyde d'azote (N2O) et gaz fluorés liées à l’activité des ménages et des branches productives, qui conduisent à retenir une partie de la chaleur reçue du soleil dans l’atmosphère.
La demande finale intérieure française est constituée de la consommation finale des ménages, des administrations, des organismes à but non lucratif et de la formation brute de capital (investissements et variations de stocks).
L’empreinte carbone de la France représente les émissions de gaz à effet de serre induites par la demande finale intérieure française, que les biens ou services consommés soient produits sur le territoire national ou importés. À l’inverse, les émissions françaises associées aux exportations ne contribuent pas à l’empreinte carbone.
L’intensité en GES du PIB français est le ratio entre les émissions des activités économiques (hors émissions directes des ménages) et le produit intérieur brut (PIB).
Pour en savoir plus
Baude M., Larrieu S., « Estimation de l’empreinte carbone de la France entre 1990 et 2023 », Documents de travail, Insee, à paraître.
Citepa, « Ouvrir dans un nouvel ongletÉmissions de gaz à effet de serre en France : nouvelle estimation - L’année 2023 avec les données Secten du Citepa », mai 2024.
Eurostat, Ouvrir dans un nouvel ongletÉmissions mondiales de CO2 – L’UE vis-à-vis du reste du monde, février 2024.
Baude M., « Ouvrir dans un nouvel ongletL’empreinte carbone de la France de 1995 à 2022 », Derniers résultats, SDES, octobre 2023.