Insee Analyses Nouvelle-Aquitaine · Mars 2024 · n° 146

La culture de la vigne, premier employeur des saisonniers agricoles en Nouvelle-Aquitaine

En 2019, 41 900 postes salariés saisonniers en Nouvelle-Aquitaine contribuent à l’activité dans l’agriculture, la sylviculture, la pêche et les industries agroalimentaires hors artisanat commercial (IAA) (pour comprendre). La Nouvelle-Aquitaine est la deuxième région de France (figure 1 ) en termes de postes saisonniers dans ces secteurs, après le Grand Est (49 500 emplois).

En équivalent temps plein, ces postes correspondent à 3 700 emplois. Dans la région, 28 500 personnes travaillent comme saisonniers agricoles.

La main-d’œuvre saisonnière vient en complément des salariés employés à l’année, des exploitants non salariés et des intérimaires, notamment pendant les pics de saison (récoltes de fruits et légumes en printemps-été, vendanges de septembre-octobre). Pendant les vendanges, le seuil de 10 000 postes saisonniers est dépassé (figure 2 ).

La plupart des 38 700 postes de saisonniers agricoles sont dans la viticulture et la culture des fruits et légumes. La culture de la vigne, premier employeur, représente ainsi 14 700 postes saisonniers (figure 3 ). Les activités de soutien aux cultures sont également un important employeur de saisonniers agricoles (6 200 postes). Ces activités sont par ailleurs très présentes dans les territoires viticoles, via des entreprises spécialisées.

Cette forte présence de la filière viti-vinicole ou d’activités liées est le reflet de la spécialisation de l’agriculture de la région. En effet, plus d’un tiers de la valeur de la production agricole néo-aquitaine provient de la viticulture (10 % au niveau national) et les vignes de la région constituent 30 % des surfaces viticoles de France.

Toujours en lien avec les caractéristiques de l’agriculture néo-aquitaine, les trois secteurs cultures de fruits, de légumes et de céréales proposent un nombre important d’emplois saisonniers (15 300 postes). En effet, 6 % de la production agricole de la région provient de la culture des fruits (3,5 % en France métropolitaine). Outre les surfaces en prunes d’Ente, la Nouvelle-Aquitaine fait partie des premières régions en termes de surfaces de noix, noisettes, châtaignes, pommes. La région est aussi connue pour ses productions de kiwis et de fraises. Si les productions légumières ne sont pas particulièrement représentées en Nouvelle-Aquitaine, la région a parmi ses spécialités, le maïs doux, les asperges, les melons, les haricots verts et les carottes, cultures qui mobilisent plus de main-d’œuvre.

En outre, parmi les saisonniers agricoles, certains travaillent aussi pour des activités liées à la mer ou à l’aquaculture (1 200 emplois). La Nouvelle-Aquitaine produit en effet 50 % des huîtres de France et contribue à 30 % de la production de l’aquaculture métropolitaine.

Même si la Nouvelle-Aquitaine est l’une des régions les plus boisées de France, les entreprises de la sylviculture et de l’exploitation forestière mobilisent peu de saisonniers. De même, les activités agroalimentaires font moins appel aux saisonniers agricoles (3 200 postes).

Le travail des saisonniers représente 5 % du temps de travail annuel de l’ensemble des secteurs de l’agriculture, la sylviculture, la pêche et les industries agroalimentaires hors artisanat commercial. Malgré un nombre important d’emplois saisonniers, le taux de recours aux saisonniers agricoles est dans la moyenne des régions.

Ainsi, le travail saisonnier ne représente que 4 % des heures de travail dans la culture de la vigne, secteur phare de l’emploi saisonnier agricole. En effet, ces activités recrutent certes de nombreux saisonniers durant les périodes de récolte notamment, mais emploient également beaucoup de salariés tout au long de l’année.

À l’inverse, la « culture des fruits à pépins et à noyau » a fortement recours aux saisonniers : 29 % du temps de travail annuel est fait par des saisonniers. De même, le recours aux saisonniers est marqué dans la « culture d’autres fruits d’arbres et de fruits à coque » (24 % du temps de travail) et la « culture de légumes, melons, racines et tubercules » (20 %). Dans ces activités, les saisonniers réalisent un travail important de récolte manuelle de produits assez fragiles qui arrivent à maturité dans un temps assez court.

Le salaire moyen versé aux saisonniers agricoles et des IAA est de 9,60 euros net par heure, soit sensiblement moins que pour les saisonniers de l’ensemble des secteurs de la région (11,30 euros). Le type de poste explique ces différences de rémunérations : 97 % des saisonniers de l’agriculture et des IAA occupent un emploi d’ouvrier non qualifié, contre seulement 31 % pour l’ensemble des saisonniers.

En particulier, la culture de la vigne rémunère modestement (9,2 euros par heure). Tous les saisonniers occupent en effet des postes d’ouvriers non qualifiés. À l’opposé, les activités des IAA proposent des salaires horaires plus élevés. Les postes proposés sont plus qualifiés (21 % d’emplois d’ouvriers qualifiés). Dans la vinification, la rémunération horaire est également plus élevée (10,7 euros), du fait d’une technicité plus grande.

Un emploi saisonnier dans l’agriculture dure en moyenne 32 jours, mais les contrats sont plus longs dans les IAA (58 jours). Salaires peu élevés et périodes de travail de courte durée incitent les saisonniers à occuper plusieurs postes. Ainsi, un saisonnier agricole occupe 2,1 postes en moyenne dans l’année. Les autres emplois occupés ne sont pas forcément tous des emplois saisonniers. Dans les IAA, les saisonniers occupent un peu plus d’emplois dans l’année (2,6 postes saisonniers ou non) que dans l’agriculture seule (2).

Les autres emplois peuvent être occupés en même temps que l’emploi saisonnier : 9 % des saisonniers sont multi-actifs. Cette part monte à 12 % dans les IAA. Les jeunes et les plus de 50 ans sont particulièrement multi-actifs (26 %).

Parmi les saisonniers multi-actifs des IAA occupant deux postes, quatre sur cinq occupent ce second poste dans un autre secteur. Toutefois, c’est toujours dans le même secteur pour la pêche en mer et près d’une fois sur deux dans la culture de céréales.

Sur dix saisonniers dans l’agriculture et les IAA, six sont des hommes. Cette plus grande part des hommes est propre aux seuls emplois de l’agriculture. En revanche, les emplois saisonniers dans les IAA sont autant occupés par les femmes que les hommes.

Comme pour l’ensemble des secteurs d’activité, dans l’agriculture et les IAA, les travailleurs saisonniers sont plus jeunes que les autres salariés : ils ont en moyenne 35 ans contre 40 ans pour les salariés de ces secteurs. Les emplois saisonniers sont souvent considérés comme des emplois étudiants. En effet, 40 % des saisonniers ont 25 ans ou moins, une part deux fois plus importante que parmi les salariés de ces secteurs. Toutefois, 30 % des saisonniers sont âgés de 30 à 49 ans et 22 % ont 50 ans ou plus.

Deux tiers des saisonniers néo-aquitains travaillent dans la zone d’emploi où ils résident. Cette part est plus faible dans les activités de soutien aux cultures (environ un sur deux), tandis qu’elle est plus importante dans beaucoup de secteurs agroalimentaires. Par exemple, 83 % des saisonniers employés dans la « transformation et conservation de poisson, de crustacés et de mollusques » résident et travaillent dans la même zone. Cette différence entre métiers agricoles et IAA est liée aux contrats plus longs dans les IAA que dans l’agriculture.

La culture de la vigne concentre plus d’un tiers des emplois saisonniers de la région. Dès lors, les zones d’emploi à orientation viticole sont celles qui emploient le plus de saisonniers, telles Lesparre-Médoc (5 600 postes), Bergerac (4 200), Libourne (3 500), Cognac (2 700), Bordeaux (2 600) (figure 4 ).

Dans ces territoires, les emplois saisonniers sont prépondérants dans la culture de la vigne, mais les activités de soutien aux cultures recrutent aussi de nombreux saisonniers. La viticulture est particulièrement concernée par ces activités de soutien. Par ailleurs, la zone d’emploi de Bergerac se singularise avec la culture de fruits (36 % des saisonniers) notamment en pommes à côté de la culture de la vigne (appellations Bergerac et Monbazillac). À Saintes, la culture de fruits (pommes et melons) est également très présente ainsi que la culture des champignons.

Toutefois, dans ces territoires viticoles, le recours aux saisonniers est limité au regard du nombre de personnes employées à l’année (par exemple 7 % des heures salariées à Lesparre-Médoc).

Dans les zones d’emploi de Limoges (pommes), Bressuire (pommes), Brive et Périgueux (fraises), les saisonniers sont concentrés dans les cultures de fruits (hors raisin et melon). À Marmande, les saisonniers se partagent à parts égales entre la culture de fruits (tomates, fraises) et celle de légumes. À Agen, ce sont surtout la culture de fruits et à un degré moindre celle de légumes qui ont recours aux saisonniers.

Selon l’orientation des activités agricoles sur le territoire, le recours à l’emploi saisonnier peut fortement varier. À Limoges ou Brive-la-Gaillarde, l’emploi salarié permanent est peu important. Dès lors, l’emploi saisonnier représente plus de la moitié des heures travaillées par les salariés de l’agriculture et des IAA sur l’année, ces saisonniers étant mobilisés en particulier durant les périodes de récolte et de traitement des pommiers. Par ailleurs, des entreprises de Limoges sont spécialisées dans la transformation et la conservation de la viande de boucherie ou dans la préparation industrielle de produits à base de viande.

Les cultures du maïs et des asperges font appel à de nombreux saisonniers à Mont-de-Marsan et à Dax. Toutefois, dans ces territoires, la transformation et la conservation de poisson, de crustacés et de mollusques reste le principal recruteur.

À Royan, pêche et aquaculture regroupent les deux tiers des saisonniers, devant la culture de légumes (melons). À La Rochelle, la pêche et l’aquaculture ont moins recours aux saisonniers que la culture de légumes.

La transformation de légumes concentre plus de la moitié des saisonniers à Bayonne tandis que la transformation et conservation, en particulier celles des pruneaux, est une activité importante à Villeneuve-sur-Lot.

Le champ de l’étude : l’agriculture et les industries agroalimentaires hormis les secteurs de l’artisanat commercial

Cette étude analyse les emplois salariés saisonniers dans les secteurs de l’agriculture et des industries agroalimentaires hormis les secteurs de l’artisanat commercial (Charcuterie, Cuisson de produits de boulangerie, Boulangerie et boulangerie-pâtisserie et Pâtisserie). En effet, ces derniers sont des secteurs plus orientés vers le commerce que l’agriculture et la production agroalimentaire.

Il n’a pas été possible d’ajouter les emplois intérimaires saisonniers aux saisonniers de l’agriculture et des IAA dans cette étude. Par ailleurs, les travailleurs pour lesquels il n’y a pas de déclaration de cotisations sociales ne sont pas inclus.

Comment est définie une saison ?

Les saisons sont déterminées à partir du volume quotidien des postes comptabilisés pour chaque croisement zone d’emploi par sous-classe de la nomenclature des secteurs d’activité. Les séries de volume quotidien d’emplois sont observées sur une période s’étalant du 1^er janvier 2015 au 31 décembre 2019 afin de s’assurer de la récurrence des saisons.

En 2019, une activité est qualifiée de saisonnière si :

Pour garantir une certaine robustesse, les saisons pour lesquelles les effectifs sont trop faibles ne sont pas retenues.

Le recensement agricole 2020 ne comptabilise pas l’emploi saisonnier de la même manière

Le recensement agricole est une opération décennale européenne et obligatoire réalisé par les Directions régionales de l’agriculture, de l’alimentation et de la forêt (DRAAF) et ayant pour objectif d’actualiser les données sur l’agriculture française ainsi que de mesurer son poids dans l'agriculture européenne. Les exploitations agricoles sont interrogées sur l’ensemble de leur main-d’œuvre.

Parmi les salariés, les personnes employées plus de huit mois sont considérées comme étant des salariés permanents. À l’inverse, celles employées moins de huit mois correspondent aux salariés saisonniers ou occasionnels, même en l’absence de pic d’activité. Ainsi, cette définition diffère de celle retenue dans l’étude présentée ici. De plus, l’aquaculture, les travaux forestiers et les IAA ne font pas partie du champ du recensement agricole.

En 2020, sur un total de 111 500 emplois en équivalent temps plein (ETP) dans les exploitations agricoles de Nouvelle-Aquitaine, 70 000 sont des chefs d’exploitation, co-exploitants ou familiaux, 27 000 sont des salariés permanents non familiaux et 14 500 sont des saisonniers ou occasionnels.

Le temps de travail des salariés des entreprises de travaux agricoles (ETA), des coopératives d’utilisation de matériel agricole (Cuma) ou d’un autre type de prestataire est aussi estimé dans le recensement agricole.