Insee Analyses Guyane · Février 2024 · n° 68

En Guyane, 6 200 enfants âgés de 3 à 16 ans ne sont pas scolarisés en 2020

En 2020, les enfants âgés de 3 à 16 ans représentent 30 % de la population guyanaise. Parmi eux, 7 % ne sont pas scolarisés, ce qui représente 6 207 enfants (figure 1). Cette proportion est plus élevée que la moyenne nationale (4 % pour la même tranche d’âge). Entre 2013 et 2020, le taux de non-scolarisation des enfants âgés de 3 à 16 ans reste stable en Guyane. Les filles et les garçons sont concernés dans les mêmes proportions en Guyane comme en France hexagonale. En revanche, la non-scolarisation varie fortement selon la tranche d’âge. Avec 2 556 enfants concernés, la tranche des 3 à 5 ans affiche le taux de non-scolarisation le plus élevé (14 %). En France métropolitaine, cette tranche d’âge est également la plus concernée mais dans une moindre mesure (8 %). Les enfants en âge d’être au collège, de 12 à 16 ans, sont 2 142 à être non-scolarisés, soit une proportion de 7 % équivalente à la moyenne régionale.

Les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) de la Guyane ne sont pas concernés dans les mêmes proportions (figure 2). L’Est Guyanais et l’Ouest Guyanais affichent les taux de non-scolarisation les plus élevés (respectivement 11 % et 10 %), quelle que soit la tranche d’âge. Ainsi, pour les enfants de 3 à 5 ans, le taux de non-scolarisation s’établit à 20 % pour l’Est Guyanais et 17 % pour l’Ouest Guyanais, soient des taux supérieurs à la moyenne régionale pour cette tranche d’âge (14 %).

Dans l’Ouest Guyanais, qui regroupe 40 % des enfants âgés de 3 à 16 ans, trois communes se distinguent par des taux de non-scolarisation parmi les plus élevés de la Guyane. Il s’agit de Grand-Santi (24 %), d’Apatou (19 %) et de Maripasoula (10 %) (figure 3). Parmi ces trois communes, deux se situent en Guyane non-routière où les difficultés de transport accentuent l’éloignement entre les lieux de vie et les établissements scolaires. L’ouest Guyanais compte 76 établissements de la maternelle au collège, un sur deux étant situé dans la commune de Saint-Laurent du Maroni. Dans l’Est Guyanais, où se situent 3 % des enfants âgés de 3 à 16 ans, 12 établissements de la maternelle au collège sont recensés sur les 217 comptabilisés en Guyane en 2020. Dans cet EPCI, la commune de Camopi, située en Guyane non-routière, affiche le taux de non-scolarisation le plus élevé (18 %).

Sur les 8 361 enfants de 3 à 16 ans recensés en Guyane non-routière, 1 322 ne sont pas scolarisés, soit un taux de non-scolarisation de 16 %, près de trois fois supérieur à celui de la Guyane routière. Les enfants de la Guyane non-routière ne disposent pas tous d'une offre scolaire de proximité et doivent donc, dès l’entrée au collège pour certains, s’installer vers le littoral ou faire les trajets en pirogue pour se rendre sur leur lieu d’enseignement. La Guyane non-routière possède 29 établissements scolaires contre 208 en Guyane routière.

Les enfants de 12 à 16 ans sont les plus concernés par la non-scolarisation en Guyane non-routière (21 %). Sur les 31 collèges recensés en Guyane, 4 se situent en Guyane non-routière. Cette non-scolarisation élevée est liée en partie au déracinement familial vécu par les enfants au moment de leur entrée au collège [Vié, 2018 ; pour en savoir plus (5)]. En Guyane, dans la plupart des cas, l’entrée au collège nécessite un déménagement qui peut engendrer une perte de repères synonyme de décrochage scolaire. Le nombre important de grossesses précoces chez les mineures peut également contribuer à ce taux élevé de non-scolarisation. En effet, Le recours à l’interruption volontaire de grossesse chez les femmes âgées de 15 à 17 ans en Guyane (17,5 %) est quatre fois plus élevé qu’en France métropolitaine (4,7 %) [Le Tyrant, 2023 ; pour en savoir plus (6)].

Les enfants nés à l’étranger sont trois fois plus touchés par la non-scolarisation (20 %) que ceux nés en France (6 %). Ils représentent 31 % des enfants non-scolarisés en Guyane. De nombreux obstacles contribuent à la non-scolarisation de ces enfants notamment d’ordre administratif : les documents exigés à l’inscription peuvent paraître longs et compliqués à obtenir. La barrière de la langue peut également constituer un frein à l’inscription des enfants nés à l’étranger.

En France métropolitaine, la proportion d’enfants non-scolarisés nés à l’étranger est de 5 %, soit une part quatre fois moins élevée qu’en Guyane. Hors enfants nés dans l’Union européenne, ce taux descend à 4 %.

En Guyane, trois enfants nés au Suriname sur dix sont non-scolarisés (figure 4). Les enfants nés à Haïti et au Brésil ont également des taux de non-scolarisation supérieurs à la moyenne de la région, avec respectivement 18 % et 16 %. Sur les 1 923 enfants non-scolarisés nés à l’étranger, 46 % résident dans l’Ouest guyanais et 44 % dans le Centre littoral. Les enfants non-scolarisés nés à l’étranger sont essentiellement âgés de 12 à 16 ans (964 enfants), suivi des enfants âgés de 6 à 11 ans (571 enfants) puis des enfants de 3 à 5 (388 enfants).

L’inactivité des parents est un autre facteur déterminant de la scolarisation des enfants. Ainsi, le taux de non-scolarisation chez les enfants de parents inactifs s’élève à 14 %, soit un taux plus de deux fois supérieur à celui des enfants dont au moins un parent est actif (6 %). Par ailleurs, 52,2 % des parents inactifs n’ont aucun diplôme contre 34,6 % des parents actifs.

La part des enfants d’inactifs non-scolarisés est la plus élevée dans l’Est guyanais (20 %) suivi de l’Ouest guyanais (15 %), du Centre littoral (10 %) et des Savanes (9 %). Le taux de non-scolarisation est nettement moins élevé pour les enfants de parents actifs quel que soit l’EPCI concerné, le taux le plus élevé étant à nouveau pour l’Est et l’Ouest guyanais (8 %).

Le taux de non-scolarisation des enfants de 3 à 5 ans ayant des parents inactifs est deux fois plus élevé que pour les enfants ayant des parents actifs (21 % contre 12 %). Chez les enfants âgés de 12 à 16 ans, il est également deux fois supérieur pour les enfants ayant des parents inactifs relativement à ceux ayant des parents actifs (15 % contre 6 %).

La non-scolarisation concerne 8 % des enfants en famille monoparentale en 2020, soit 2 points de plus que les enfants de couple. Les familles monoparentales qui représentent 30 % des familles guyanaises regroupent un total de 42 162 enfants âgés de 3 à 16 ans. Par ailleurs, 29 % sont des familles de couples avec enfant. A titre de comparaison, les familles monoparentales en France hexagonale représentent 9 % des familles et les couples avec enfant, 25 %. En Guyane, parmi les familles monoparentales ayant un enfant âgé de 3 à 16 ans, 20 % des parents sont inactifs contre 9 % des parents parmi les couples. De même, la proportion de parents ayant un niveau de diplôme supérieur au Baccalauréat est plus élevée dans les couples (23 %) que dans les familles monoparentales (14 %).

Le taux de non-scolarisation des enfants issus d’une famille monoparentale est marqué dans l’Ouest Guyanais où 11 % de ces enfants sont non-scolarisés contre 7 % pour les enfants de couple. En revanche, dans l’Est Guyanais les enfants d’une famille monoparentale affichent un taux de non-scolarisation inférieur à celui des enfants de couple, respectivement 6 % et 9 % (figure 5).

La qualité du logement dans lequel habite l’enfant, reflète ses conditions de vie matérielles et influe fortement sur le taux de non-scolarisation. Ce dernier atteint 20 % chez les enfants vivant dans un logement n’ayant pas d’eau, ni électricité, ni sanitaires, ni évacuation des eaux usées. Plus le logement remplit un nombre important de critères liés au confort, plus le taux de non-scolarisation des enfants habitants dans ces logements diminue. Ainsi, pour les enfants vivants dans des logements vérifiant tous les critères de salubrité évoqués précédemment, le taux de non-scolarisation est quatre fois plus faible (5 %).