Croissance modeste, sur fond d’incertitudes géopolitiques Note de conjoncture - octobre 2023

Note de conjoncture
Paru le :Paru le12/10/2023
Note de conjoncture- Octobre 2023
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Vue d'ensemble

Note de conjoncture

Paru le :12/10/2023

La pandémie de Covid-19, puis la guerre en Ukraine ont mis à l’épreuve les conditions de production dans le monde, affectant nombre de chaînes de valeur industrielles. Les tensions sur l’offre ont ainsi atteint en 2021 et 2022 des niveaux souvent inédits. Ces tensions se sont nettement atténuées depuis plusieurs trimestres. Pour autant, certaines persistent, s’agissant par exemple des cours du pétrole, qui ont nettement grimpé cet été, avant même le nouvel accroissement des tensions géopolitiques au Moyen-Orient depuis le 7 octobre.

La forte volatilité des cours du pétrole depuis la fin septembre illustre d’ailleurs bien les hésitations conjoncturelles du moment. Les inquiétudes sur l’offre, qui peuvent refléter une certaine accentuation de la fragmentation géopolitique du monde et soutiennent les cours, se conjuguent avec les craintes sur la demande, dans un contexte de taux d’intérêt élevés. Le commerce mondial peine ainsi à redémarrer et les enquêtes de conjoncture auprès des entreprises suggèrent peu de dynamisme chez les principaux partenaires européens de la France, tant dans l’industrie que dans les services.

Le renchérissement du pétrole ne remet a priori pas en cause le mouvement de reflux de l’inflation engagé depuis plusieurs mois dans la plupart des pays occidentaux, et dont témoigne, en amont, la baisse graduelle des prix de production, mais les incertitudes sur les cours de l’énergie font peser un aléa supplémentaire sur les prévisions. En France, le rebond des prix des produits pétroliers a ainsi contrebalancé en septembre le ralentissement sur un an des autres prix (alimentation, services, produits manufacturés). Mais les prix de l’alimentation ont connu leur premier repli mensuel (-0,3 %) depuis près de deux ans. Ils resteraient globalement quasi stables à l’horizon de la prévision (soit la fin 2023) de sorte que leur glissement annuel serait d’environ +7 % en décembre (contre +15,9 % en mars dernier). L’inflation d’ensemble s’élèverait à +4,4 % sur un an en décembre (et à +5,0 % en moyenne annuelle), et l’inflation sous-jacente à +3,9 % (+5,2 % en moyenne annuelle).

Après s’être replié en mai dernier, le climat des affaires en France est resté quasi stable depuis lors, à son niveau de longue période. La croissance du deuxième trimestre (+0,5 %) avait certes surpris à la hausse, en partie du fait de facteurs ponctuels, mais la tendance de fond de l’économie française paraît plus modérée. Nous maintenons par conséquent la prévision de croissance trimestrielle déjà publiée dans nos Notes de conjoncture de juin et septembre dernier : +0,1 % au troisième trimestre 2023 puis +0,2 % au quatrième. L’activité ralentirait dans les services comme dans l’industrie – même si certains effets de rattrapage perdureraient dans les branches auparavant affectées par des difficultés de production – et continuerait de reculer dans la construction. La croissance annuelle s’élèverait à +0,9 % en 2023, malgré une baisse de 0,2 % de la consommation des ménages en moyenne annuelle, et avec un « acquis » relativement modeste pour 2024.

Au contraire du deuxième trimestre 2023, soutenu par les échanges extérieurs, la croissance du troisième trimestre aurait surtout été tirée par le rebond de la consommation des ménages, dans un contexte de moindre inflation. Cette reprise se poursuivrait cet automne, mais à un rythme modeste : la confiance des ménages dans la situation économique peine en effet à se redresser depuis son point bas de la mi-2022. L’investissement des entreprises aurait quant à lui progressé sensiblement cet été, du fait d’un renouvellement important des flottes de véhicules, mais il pourrait fléchir en fin d’année, compte tenu du renchérissement du capital. Enfin, les mouvements des exportations seraient, comme souvent, marqués par le calendrier des livraisons aéronautiques et navales, avec un nouveau rebond attendu en fin d’année.

L’amélioration des termes de l’échange en 2023 soutient, directement ou indirectement, le revenu des ménages et des entreprises. Ainsi, le taux de marge des sociétés non financières se situerait en moyenne en 2023 à un niveau un peu supérieur à celui d’avant la crise sanitaire, bénéficiant du net ralentissement du prix des intrants et d’une relative modération salariale. En termes réels, après avoir baissé au premier semestre 2023, les salaires rebondiraient toutefois au second. En moyenne annuelle, les salaires nominaux progresseraient ainsi au même rythme que l’inflation. Malgré le ralentissement de l’emploi (+133 000 créations nettes prévues sur l’année, essentiellement au premier semestre, et une légère hausse du chômage prévue au second semestre, à 7,3 % de la population active), les revenus d’activité seraient donc relativement dynamiques, ainsi que les revenus de la propriété et les prestations sociales, en grande partie indexées sur l’inflation. Au total, le pouvoir d’achat des ménages progresserait de +1,2 % en 2023, soit +0,7 % par unité de consommation.

Les aléas susceptibles d’affecter cette prévision restent nombreux, qu’il s’agisse par exemple de la vitesse de transmission du resserrement monétaire à l’économie réelle, des tensions géopolitiques pouvant entraîner de nouveaux chocs sur les cours internationaux de l’énergie ou des matières premières, ou bien du comportement des consommateurs, dont le taux d’épargne reste bien au-dessus de son niveau d’avant la crise sanitaire.