Insee Analyses Nouvelle-Aquitaine · Septembre 2023 · n° 137

Entre 2009 et 2019, dans la Vienne, les caractéristiques des logements accentuent la consommation d’espace Consommation d’espace pour l’habitat

Dans la Vienne, 1 800 hectares d’espaces naturels, agricoles ou forestiers ont été consommés pour l’habitat entre 2009 et 2019. Autrement dit, chaque jour, l’équivalent d’un terrain de football a été utilisé pour l’habitat pendant ces 10 années.

Ainsi, l’habitat représente les deux tiers de la consommation d’espace totale. Le développement urbain continue progressivement de réduire les espaces naturels, agricoles ou forestiers. Les enjeux environnementaux conduisent à réfléchir aux politiques d’aménagement du territoire à venir. La loi Climat et résilience, entrée en vigueur à l’été 2021, fixe comme objectifs la neutralité de l’artificialisation des sols à l’horizon 2050, et à plus court terme la réduction de moitié du rythme de consommation d’espace d’ici 10 ans (encadré 1).

Entre 2009 et 2019, l’espace consacré à l’habitat augmente de 6,3 %. Bien que cette progression soit inférieure à la moyenne régionale (+8,7 %), en Nouvelle-Aquitaine, seule la Creuse consomme moins vite (+5,0 %), trente-trois départements français ont consommé moins d’espace que la Vienne pour construire des habitations.

Au sein du département, la consommation d’espace pour l’habitat progresse plus dans la périphérie de Poitiers y compris dans les intercommunalités du Haut-Poitou et des Vallées du Clain, celle du Grand Châtellerault et au nord du Pays Loudunais. À l’inverse, elle progresse moins dans le sud de la Vienne, notamment dans de nombreuses communes des intercommunalités de Vienne et Gartempe, et du Civraisien en Poitou (figure 1).

De même qu’au niveau régional ou national, la consommation d’espace allouée à l’habitat ralentit sur la période plus récente. Dans la Vienne, elle augmente de 3,4 % entre 2009 et 2014, puis passe à +2,8 % entre 2014 et 2019. Ce ralentissement est plus marqué dans le nord et l’ouest du département, notamment dans le Grand Châtellerault et le Pays Loudunais (figure 2). En revanche, dans l’intercommunalité de Vienne et Gartempe et dans celle de Grand Poitiers, cette consommation d’espace évolue au même rythme sur les deux périodes.

L’espace est essentiellement consommé pour répondre aux besoins en logements des nouveaux ménages dans le département, encore plus que dans la région (figure 3). Séparations, départs des enfants du domicile parental ou vieillissement engendrent de nouveaux besoins en logements. Ainsi, les décohabitations expliquent à elles seules 33 % de l’augmentation de la consommation d’espace liée à l’habitat dans la Vienne entre 2009 et 2019.

Entre 2014 et 2019, cette diminution de la taille des ménages contribue deux fois plus à l’évolution des surfaces consommées que dans les cinq années précédentes.

Dans le même temps, la population progresse, mais moins vite que dans l’ensemble de la région (3 % contre 5 % entre 2009 et 2019). Ainsi, la croissance démographique n’explique que 23 % de l’augmentation de la consommation d’espace due à l’habitat entre 2009 et 2019.

D’ailleurs, dans une grande partie de la Vienne, la dynamique de consommation d’espace pour l’habitat est supérieure à celle de la croissance de population. Dans les intercommunalités qui perdent de la population, comme Vienne et Gartempe, Grand Châtellerault et dans une moindre mesure Pays Loudunais et Civraisien en Poitou, la surface au sol consommée par les résidences principales est essentiellement portée par la baisse de la taille des ménages. Dans la communauté d’agglomération (CA) du Grand Châtellerault, cette surface consommée augmente même de 9 %, alors que la population baisse de 1,8 % entre 2009 et 2019.

A contrario, dans les EPCI du Grand Poitiers, du Haut-Poitou ainsi que des Vallées du Clain, l’augmentation du nombre de résidences principales est essentiellement due à la croissance de la population. La population y évolue quasiment au même rythme que la consommation d’espace, voire deux fois plus vite dans les Vallées du Clain.

La hausse des logements vacants dans la Vienne explique 17 % de l’augmentation de la consommation d’espace. En effet, leur nombre a progressé de 19 % en 10 ans et ils représentent désormais 9,5 % du parc du logement viennois. Cette part atteint même 16 % dans l’intercommunalité Vienne et Gartempe, 14 % dans le Pays Loudunais et 13 % dans le Civraisien en Poitou. Cette situation pose la question de l’adéquation entre le parc de logements disponibles et les attentes de la population résidente.

Dans la Vienne, les logements vacants sont souvent construits avant 1990 (85 %) voire même avant 1970 (66 %). Une partie d’entre eux n’est plus adaptée aux normes actuelles et nécessite des travaux importants de réhabilitation pour être loués ou vendus. De plus, leur localisation ne correspond pas nécessairement aux attentes des nouveaux arrivants. Les ménages optent alors probablement davantage pour la construction neuve ou récente, ce qui entraîne une augmentation des surfaces consommées.

Comme en Nouvelle-Aquitaine, la variation du nombre de résidences secondaires ou occasionnelles participe à hauteur de 10 % à l’augmentation de la surface consommée au sol entre 2009 et 2019. C’est davantage le cas dans l’intercommunalité du Pays Loudunais, et dans une moindre mesure dans celle de Vienne et Gartempe. En revanche, dans celles du Civraisien en Poitou, du Haut-Poitou et des Vallées du Clain, le nombre de résidences secondaires, en diminution, atténue en partie la consommation d’espace, le parc existant contribuant à accueillir les nouveaux habitants.

Entre 2014 et 2019, le nombre de logements vacants continue d’augmenter mais plus lentement. Ainsi, la vacance contribue moins à la consommation d’espace, contrairement aux résidences secondaires sur cette période récente.

Les caractéristiques des logements, telles que la taille, le nombre d’étages, etc. contribuent aussi à l’évolution de la consommation d’espace. Entre 2009 et 2019, leurs effets sont notamment plus marqués dans la Vienne qu’au niveau régional (17 % contre 3 %).

Le taux d’emprise au sol des logements augmente dans la Vienne. Il contribue en effet à 15 % de la croissance de la consommation d’espace, soit bien plus que dans la région (9 %). La part du logement individuel reste importante (trois quarts de maisons) et mobilise de la ressource foncière par un étalement de l’habitat.

Le taux d’emprise au sol contribue de façon similaire dans les départements de Haute-Vienne, Lot-et-Garonne, Charente et Corrèze, mais moins que dans la Creuse (21 %) et bien plus qu’en Gironde (2 %). Le prix de l’immobilier et la disponibilité des terrains peuvent expliquer en partie les différences. Dans les territoires où la contribution de l’emprise au sol est plus forte, le coût des terrains est souvent plus faible.

Dans la Vienne, la surface des logements augmente entre 2009 et 2019, ce qui explique aussi 2 % de la hausse de la consommation d’espace. C’est également le cas en Haute-Vienne, en Dordogne, en Corrèze ou encore dans la Creuse. Toutefois, au niveau régional, la surface moyenne des logements diminuant, la contribution sur la consommation d’espace est de fait négative.

Cependant, entre 2014 et 2019, la surface moyenne des logements diminue, ce qui contribue à atténuer la consommation d’espace dans la période plus récente. De même, la progression de l’emprise au sol ralentit et contribue moins à la consommation d’espace pour l’habitat.

La consommation d’espace pour l’habitat s’étend et progresse à la périphérie des principales agglomérations. Entre 2009 et 2019, elle augmente plus dans les couronnes des agglomérations de Poitiers (+7,2 %) et de Châtellerault (+8,4 %) que dans le département en moyenne. Dans le Grand Poitiers et dans bon nombre de communes des intercommunalités limitrophes, cette augmentation s’accompagne de celle du nombre de ménages.

La consommation d’espace pour l’habitat augmente également plus rapidement dans des communes situées à la limite nord du département, sous l’influence des aires d’attraction des villes de Chinon (Indre-et-Loire) et de Saumur (Maine-et-Loire). Cette relative attractivité résidentielle du nord du Pays Loudunais s’explique notamment par des prix de l’immobilier plus accessibles.

À l’inverse, les centres urbains sont moins consommateurs d’espace. Le foncier y est déjà bâti et les prix plus élevés. La consommation d’espace progresse alors seulement de 2,8 % sur 10 ans à Poitiers et de 3,7 % à Châtellerault. L’habitat y est plus dense et donc la consommation par ménage supplémentaire plus faible.

Des territoires très éloignés des centres urbains ont également consommé de l’espace, même si l’évolution démographique est faible (figure 4). En effet, plus de la moitié des communes du département ont accueilli au plus 20 ménages sur 10 ans, avec pourtant une consommation d’espace en augmentation (classes 3 et 4 de la figure 4). Dans les communes principalement rurales situées notamment dans les intercommunalités du Civraisien en Poitou, de Vienne et Gartempe et dans la partie sud du Pays Loudunais, la consommation progresse alors que la dynamique démographique est atone. La vacance des logements y est par ailleurs beaucoup plus importante.

Dans d’autres territoires, la consommation d’espace s’explique davantage par la démographie (classes 1 et 2 de la figure 4). En particulier, dans les communes de la classe 2, la consommation progresse modérément, en parallèle d’une augmentation du nombre de ménages.