Insee Flash Pays de la Loire ·
Mars 2023 · n° 136Les femmes travaillent plus près de chez elles et utilisent moins la voiture
Dans les Pays de la Loire, les femmes travaillent plus près de leur domicile que les hommes. Pour se déplacer, elles utilisent moins souvent les modes de transport motorisés (voiture ou deux-roues) ou le vélo, et davantage les transports en commun ou la marche. Le mode de déplacement reflète en partie la nature du trajet à effectuer, mais il fait aussi intervenir des facteurs plus culturels. Les différences femmes-hommes sont plus accentuées pour les familles monoparentales ou en milieu urbain.
- Les déplacements domicile-travail sous l’angle des inégalités de genre : à l’intersection de différents enjeux
- Travailler à côté de chez soi : un critère féminin
- Les femmes utilisent moins la voiture et les deux-roues
- Dans les grandes villes, les femmes préfèrent les transports en commun au vélo
- Des professions font exception
- Familles monoparentales : plus de difficultés à s’équiper
Les déplacements domicile-travail sous l’angle des inégalités de genre : à l’intersection de différents enjeux
L’analyse des déplacements domicile-travail sous l’angle du genre fait émerger différents enjeux : cibler les populations pour lesquelles réduire les émissions de gaz à effet de serre est possible ; prendre la mesure des difficultés persistantes des femmes à concilier carrière et contraintes personnelles ; enfin, encourager l’activité physique, qu’elle soit féminine ou masculine, à travers les déplacements du quotidien. Les actifs en emploi résidant dans les Pays de la Loire en 2019, qu’ils travaillent ou non dans la région, font l’objet de cette étude. Les Ligériennes affichent le plus fort taux d’emploi des régions françaises (65 %), mais celui-ci reste inférieur de 5 points à celui des hommes. Les déplacements font partie des contraintes prises en compte dans le choix d’un poste et peuvent jouer sur l’emploi des femmes.
Travailler à côté de chez soi : un critère féminin
En 2019, les Ligériennes effectuent moins de distance que les hommes pour aller travailler : 13 kilomètres (km) en moyenne contre 15 km. D’un côté, les hommes sont plus nombreux à travailler loin de leur domicile. Ainsi, 26 % des hommes parcourent plus de 20 km contre 21 % des femmes (figure 1). En moyenne, les hommes connaissent davantage de mobilités géographiques au cours de leur carrière : cela peut davantage les éloigner de leur domicile. D’un autre côté, les femmes sont plus nombreuses à n’effectuer aucun déplacement : 6 %, contre 4 % des hommes. Elles occupent plus souvent des métiers qui s’exercent à domicile (assistantes maternelles, etc.) et, même à profession identique, elles conjuguent plus souvent lieu de vie et de travail. Ainsi, 55 % des agricultrices vivent sur leur lieu de travail, contre 40 % des agriculteurs, ou encore 22 % des commerçantes contre 13 % des commerçants. Plus fortement impliquées dans la gestion de la vie domestique, les femmes font de la proximité géographique un critère dans leurs choix professionnels. Dans la région, le souhait de concilier carrière et vie de famille est prégnant : le taux d’emploi féminin est élevé malgré une forte fécondité, et le recours des femmes au temps partiel affiche un taux record (31 %).
tableauFigure 1 – Répartition des actifs en emploi et taux d’utilisation de la voiture selon la distance domicile-travail et le sexe, dans les Pays de la Loire en 2019
Distance (en km) | Répartition des actifs en emploi | Taux d’utilisation de la voiture | ||
---|---|---|---|---|
Femmes | Hommes | Femmes | Hommes | |
0 | 6 | 4 | - | - |
Moins de 1 | 2 | 2 | 13 | 21 |
1 à 3 | 12 | 12 | 61 | 63 |
3 à 5 | 19 | 17 | 72 | 75 |
5 à 10 | 17 | 17 | 88 | 86 |
10 à 20 | 23 | 22 | 95 | 94 |
20 à 30 | 11 | 12 | 97 | 96 |
30 à 40 | 5 | 6 | 94 | 96 |
40 à 50 | 2 | 3 | 91 | 94 |
Plus de 50 | 3 | 5 | 83 | 89 |
Ensemble | 100 | 100 | 77 | 80 |
- Lecture : 2 % des femmes et 2 % des hommes parcourent moins de 1 km pour se rendre au travail. Parmi ces personnes, 13 % des femmes utilisent la voiture contre 21 % des hommes.
- Champ : actifs en emploi résidant dans les Pays de la Loire et effectuant des trajets de moins de 100 km.
- Source : Insee, Recensement de la population (RP) 2019, distancier Métric-OSRM (distance théorique par la route).
graphiqueFigure 1 – Répartition des actifs en emploi et taux d’utilisation de la voiture selon la distance domicile-travail et le sexe, dans les Pays de la Loire en 2019
Les femmes utilisent moins la voiture et les deux-roues
Les femmes qui travaillent utilisent moins souvent un véhicule individuel motorisé que les hommes. En effet, même si la voiture reste très largement, le mode de transport le plus répandu quel que soit le genre, elle est utilisée par 77 % des femmes, contre 80 % des hommes. De même, les deux-roues motorisés (scooters, mobylettes, motos, etc.) sont moins utilisés par les femmes en emploi (1 % contre 3 % des hommes).
A contrario, les femmes se déplacent davantage en transports en commun (9 % contre 6 % des hommes) ou à pied (5 % contre 4 %). Le vélo, y compris à assistance électrique, est la seule mobilité dite « douce » davantage prisée des hommes que des femmes : 3 % contre 2 %.
Le choix du mode de transport résulte en partie du trajet à effectuer. En effet, les femmes travaillent plus souvent dans des communes urbaines denses, où les transports en commun sont plus développés. Elles réalisent aussi plus souvent des trajets courts, propices à la marche. Sur les trajets les plus courts (inférieurs à 1 km) ou les plus longs (supérieurs à 50 km), les écarts entre femmes et hommes sont les plus marqués. La moindre utilisation de la voiture par les femmes dans ces situations pourrait être culturelle. Au niveau national, les femmes adultes détiennent nettement moins souvent le permis B que les hommes (76 % contre 91 % en 2007). Cette différence perdure avec un écart de réussite à l’examen qui reste en grande partie inexpliqué.
Dans les grandes villes, les femmes préfèrent les transports en commun au vélo
Le choix du mode de transport est nettement plus genré en milieu urbain qu’en milieu rural. La préférence féminine pour les transports en commun ou la marche, au détriment du vélo, émerge dans les trois plus grandes villes de la région (figure 2). En Vendée et en Mayenne, départements plus ruraux, l’écart entre femmes et hommes en matière d’utilisation de la voiture est négligeable : quel que soit le sexe, le véhicule individuel est privilégié (87 % en Vendée et 82 % en Mayenne).
tableauFigure 2 – Utilisation des mobilités douces pour les trajets internes aux grandes villes en 2019
Commune | Sexe | Vélo | Marche | Transports en commun |
---|---|---|---|---|
Nantes | Femmes | 11 | 14 | 35 |
Hommes | 15 | 13 | 25 | |
Angers | Femmes | 9 | 18 | 21 |
Hommes | 12 | 16 | 12 | |
Le Mans | Femmes | 5 | 14 | 25 |
Hommes | 8 | 11 | 15 |
- Lecture : 35 % des femmes qui habitent et travaillent à Nantes utilisent les transports en commun, contre 25 % des hommes.
- Source : Insee, Recensement de la population (RP) 2019.
graphiqueFigure 2 – Utilisation des mobilités douces pour les trajets internes aux grandes villes en 2019
Des professions font exception
Même si globalement les femmes utilisent moins souvent la voiture, certaines professions font exception. Ainsi, parmi les employés, notamment dans la fonction publique ou les services aux particuliers, les femmes utilisent davantage la voiture que les hommes : 75 % contre 71 %. Il en est de même des professions intermédiaires de la santé et du travail social, qui nécessitent d’effectuer des visites à domicile : dans ces métiers, 85 % des femmes utilisent la voiture, contre 80 % des hommes. Parmi les cadres, l’utilisation de la voiture est identique chez les femmes et les hommes (74 %).
Familles monoparentales : plus de difficultés à s’équiper
Les femmes en charge de familles monoparentales se démarquent par une faible utilisation de la voiture (77 %), par comparaison aux hommes dans la même situation (84 %) ou aux femmes en couple avec enfants (82 %). Plus présentes en territoire urbain, elles utilisent plus souvent les transports en commun. Au regard du taux de pauvreté très élevé des familles monoparentales (33 % dans la région en 2018), leur moindre motorisation traduit probablement une difficulté financière à s’équiper. Les véhicules des familles monoparentales sont souvent plus anciens : selon l’enquête « Mobilité des personnes » de 2019, 47 % ont au moins 12 ans d’ancienneté, contre 39 % tous ménages confondus.
En dehors des familles monoparentales, la situation familiale a une influence sur le mode de transport utilisé, mais elle affecte assez peu les écarts de comportements entre femmes et hommes en matière de mobilité. Les couples avec enfants sont les plus grands utilisateurs de la voiture, avec respectivement 82 % et 85 % des femmes et hommes en emploi. Le lieu de résidence des familles et la prise en compte des contraintes familiales incitent sans doute à ce choix. À l’inverse, les personnes vivant seules l’utilisent moins que la moyenne (69 % et 74 %) et marchent davantage (10 % et 7 %), ayant plus de possibilités d’optimiser la localisation de leur domicile en fonction de leur lieu de travail, ou inversement.
Pour comprendre
Les mesures de la distance parcourue et du mode de déplacement souffrent de plusieurs limites. D’une part, seul le mode de transport principal déclaré par l’enquêté est retenu, sans permettre de repérer les déplacements multi-modes ou les effets de saisons. D’autre part, la distance estimée ne tient pas compte des arrêts multiples sur un même trajet (courses, établissements scolaires, démarches, etc). Enfin, les situations de télétravail ne sont pas prises en compte. Or, en 2021, parmi les femmes ayant travaillé au moins une heure dans la semaine, 20 % ont télétravaillé contre 23 % des hommes, notamment car elles occupent moins souvent des métiers télétravaillables.
Sources
La plupart des résultats sont issus du recensement de la population de 2019. Le champ est constitué des actifs en emploi, âgés de 15 ans ou plus, résidant dans les Pays de la Loire. Le distancier Métric-OSRM (open source routing machine) mesure les distances routières théoriques entre lieux de résidence et de travail, par la géolocalisation des deux adresses. L’enquête « Ouvrir dans un nouvel ongletMobilité des personnes » a été réalisée par le Service des données et études statistiques (Sdes) en 2018 et 2019. Elle succède à l’enquête nationale transports et déplacements (ENTD) conduite en 2007 et 2008.
Pour en savoir plus
(1) Lecomte C., Robin J., Ouvrir dans un nouvel ongletLa dimension territoriale de l’accès à l’emploi des femmes, Comprendre, Agence Nationale de la Cohésion des Territoires, 2021.
(2) Delhomme I. et al., Regards sur la parité dans les Pays de la Loire - Des évolutions mais des inégalités persistantes, Insee Dossier Pays de la Loire no 09, octobre 2022.
(3) Fouchard C., Rodrigues A., Déplacements domicile-travail : la voiture en pole position, même pour de courtes distances, Insee Flash Pays de la Loire no 106, janvier 2021.
(4) Barré M., Hervy C., Déplacements domicile-travail en Vendée : Un recours à la voiture très présent, des trajets propices au vélo, Insee Analyses Pays de la Loire no 106, septembre 2022.