Insee Analyses Réunion ·
Décembre 2022 · n° 79Panorama des évolutions de la société réunionnaise de 2010 à 2020 Enquête Migrations, Famille et Vieillissement 2020-2021
En 2020, à La Réunion, parmi les habitants de 18 à 79 ans, huit sur dix sont natifs de l’île. Cette part diminue légèrement sur la décennie 2010 du fait de l’arrivée un peu plus importante de natifs de France métropolitaine. Très attachés à l’île, les natifs sont moins enclins que ceux des autres départements et régions d’Outre-mer à s’installer durablement ailleurs, que ce soit pour poursuivre des études ou trouver un emploi. Cependant, ils sont de plus en plus nombreux à effectuer de courts séjours en dehors de l’île.
Cet attachement à l’île se retrouve aussi dans l’importance accordée à la langue créole qui reste bien implantée sur le territoire. Le poids démographique des jeunes demeure important, du fait de la fécondité élevée, notamment des jeunes femmes. Malgré une amélioration depuis 10 ans, les jeunes connaissent encore des difficultés d’insertion professionnelle tout en étant de moins en moins nombreux à bénéficier de l’aide financière de leur famille. Néanmoins, comme ailleurs en France, la population réunionnaise vieillit. L’état de santé des seniors s’améliore mais en parallèle, ils bénéficient moins souvent qu’avant de l’aide de leur famille.
- Une population qui reste très majoritairement originaire de l’île
- Des natifs de La Réunion de plus en plus mobiles pour de courts séjours
- Pas plus de jeunes prêts à partir qu’il y a dix ans
- La fécondité se maintient à un niveau élevé depuis 25 ans, portée par les femmes non diplômées
- Des maternités qui restent plus précoces qu’ailleurs
- Un peu moins de jeunes en difficulté d’insertion professionnelle, mais ils sont moins aidés financièrement
- Une meilleure santé mais un isolement accru des personnes âgées
- Encadré 1 – Les résidents qui ne sont pas nés sur l’île sont satisfaits de leurs conditions de vie
- Encadré 2 – Langue créole et religion : des valeurs qui restent bien ancrées
- Encadré 3 – Partenariat
Quels changements ont connu la société et la population réunionnaises au cours de la décennie 2010, que ce soit en termes de migrations, de famille, de solidarités intergénérationnelles, de pratiques linguistiques et religieuses, de vieillissement et d‘état de santé de la population âgée ? Autant de questions auxquelles répond cette étude basée sur l’enquête Migrations, Famille et Vieillissement réalisée en partenariat entre l’Insee et l’Institut national des études démographiques (Ined) pour la deuxième fois en 2020-2021, après une première édition en 2009 – 2010 (source). La présente publication constitue la synthèse d’un Dossier présentant de manière plus détaillée les principaux résultats de l’enquête de 2020-2021 [Ouvrir dans un nouvel ongletBreton et al., 2022].
Une population qui reste très majoritairement originaire de l’île
Les personnes nées à La Réunion y résident en très grande majorité. Ainsi, en 2019, parmi les 842 000 natifs de l’île qui résident en France, 84 % vivent à La Réunion, et seulement 16 % en France métropolitaine. La Réunion est ainsi la région française où la part de natifs vivant dans leur région de naissance est la plus élevée. Cela illustre à la fois l’éloignement géographique de La Réunion et un attachement des natifs à leur île natale.
Comme les natifs de La Réunion restent vivre sur l’île, ils composent la grande majorité de la population. Ainsi, 79 % des habitants de l’île de 18 à 79 ans en 2020 y sont nés, une part un peu plus faible que dix ans auparavant (– 4 points) (figure 1). Cette baisse n’est pas due à un départ accru des natifs en dehors de l’île, mais elle est la conséquence d’une légère hausse de l’arrivée de natifs de métropole [Insee, 2022 ]. Les natifs de l’Hexagone représentent ainsi 13 % de la population adulte de La Réunion, soit 3 points de plus qu’en 2010 (encadré 1).
tableauFigure 1 – Composition de la population réunionnaise
Résidents à La Réunion selon le lieu de naissance |
Résidents nés ailleurs | Natifs de La Réunion | ||||
---|---|---|---|---|---|---|
Nés à l’étranger | Nés ailleurs en Outre-mer |
Nés en métropole |
Natifs de retour |
Natifs ayant quitté l’île pour un court séjour |
Natifs sédentaires |
|
2009-2010 | 5 | 2 | 10 | 22 | 39 | 22 |
2020-2021 | 6 | 2 | 13 | 18 | 49 | 12 |
- Note : la catégorie « natifs ayant quitté l’île pour un court séjour » regroupe les personnes nées à La Réunion et qui ont séjourné moins de six mois en dehors de l’île. Celle des « natifs de retour » concerne les natifs ayant déjà séjourné six mois ou plus en dehors de l’île.
- Champ : personnes résidant à La Réunion au moment de l’enquête et âgées de 18 à 79 ans.
- Sources : Ined-Insee ; enquêtes Migrations, Famille et Vieillissement 1 (2009-2010) et 2 (2020-2021).
graphiqueFigure 1 – Composition de la population réunionnaise
Des natifs de La Réunion de plus en plus mobiles pour de courts séjours
Même s’ils résident majoritairement dans leur île natale, les natifs de La Réunion voyagent de plus en plus souvent en dehors de l’île, du fait de facilités plus importantes que dans le passé (hausse du pouvoir d’achat moyen de la population, tarifs de transport aérien plus accessibles, dispositifs d’aide à la continuité territoriale, etc.). Ainsi, la part des natifs n’ayant jamais quitté le département diminue fortement, de 26 % en 2010 à 15 % en 2020. La Réunion n’est plus le département ou région d’Outre-mer (Drom) où la part de ces natifs, qualifiés ici de « sédentaires », est la plus forte : elle est désormais devancée par la Guyane et l’écart avec les Antilles s’est fortement réduit. Ces natifs sédentaires sont ceux qui cumulent les difficultés socio-économiques : six sur dix n’ont pas de diplôme, huit sur dix n’ont pas d’emploi et neuf sur dix vivent sous le seuil de pauvreté.
Pour autant, si les natifs quittent de plus en plus souvent l’île, c’est avant tout pour de courts séjours d’une durée inférieure à six mois, comme des vacances ou un stage, et non pour aller s’installer et vivre ailleurs pour un emploi ou encore pour poursuivre des études. Ainsi, 6 natifs de La Réunion sur 10 qui y résident en 2020 ont déjà voyagé dans l’Hexagone ou à l’étranger pour un court séjour, mais seulement 2 sur 10 ont déjà vécu plus de six mois en dehors de l’île. C’est moins qu’aux Antilles, où 3 natifs sur 10 ont déjà séjourné plus de six mois ailleurs que sur leur île natale. La nette hausse du niveau de formation des natifs réunionnais ne se traduit pas par plus de départs vers l’Hexagone, contrairement aux autres Drom [Besson et al., 2021]. L’augmentation de l’offre de formations post-baccalauréat et l’amélioration du marché du travail y contribuent certainement : en 25 ans, le nombre de cadres natifs a ainsi été multiplié par quatre, passant de 3 700 en 1990 à 14 500 en 2016 [Thibault, 2020].
Quand ils reviennent s’installer à La Réunion, les natifs de l’île pointent l’éloignement familial et le mal du pays comme principales difficultés à l’origine de leur retour ; l’attachement à l’île joue donc un rôle essentiel dans leur décision de retour. Cependant, les natifs qui ont déjà vécu un long séjour en métropole sont très majoritairement satisfaits de cette expérience : 72 % d’entre eux la jugent « positive » et 20 % « plutôt positive ».
Pas plus de jeunes prêts à partir qu’il y a dix ans
Parmi les natifs de 18 à 34 ans, seuls 4 sur 10 habitant La Réunion accepteraient de partir pour un emploi, dans l’Hexagone ou ailleurs. Cette part est plus faible que chez les jeunes natifs des autres Drom (entre 5 et 6 sur 10). Plusieurs facteurs se conjuguent pour expliquer cette relative faible propension au départ des jeunes nés sur l’île : l’attachement à leur île, la séparation d’avec les proches au regard notamment de l’éloignement entre La Réunion et l’Hexagone, les difficultés logistiques que constituent un départ (démarches administratives, recherche de logement, etc.), l’incertitude d’un éventuel retour ultérieur. Cette part est quasiment stable depuis dix ans. Quel que soit leur niveau de diplôme, les jeunes natifs de l’île préféreraient en majorité y rester. Même parmi les jeunes diplômés du supérieur, les plus enclins à vouloir migrer, seuls 45 % accepteraient de partir pour un emploi.
La possibilité de retourner sur leur île natale dicte de moins en moins le souhait d’un éventuel départ. En 2020, 49 % des jeunes natifs conditionnent leur départ à la possibilité d’un retour, contre 57 % en 2010. En outre, parmi ceux prêts à un départ, 51 % l’envisageraient sans recours à l’aide publique à la mobilité, contre 36 % en 2010.
La fécondité se maintient à un niveau élevé depuis 25 ans, portée par les femmes non diplômées
À La Réunion, la fécondité des femmes se maintient à un haut niveau depuis les années 1990, proche de 2,5 enfants par femme. En comparaison, celle des femmes de l’Hexagone oscille entre 1,7 et 2,0 enfants par femme sur la même période. Ce sont les non-diplômées qui contribuent le plus à cette fécondité élevée à La Réunion. Elles deviennent généralement mères pour la première fois à un âge précoce et ont davantage d’enfants que les autres femmes : 79 % des femmes non diplômées nées entre 1986 et 1995 ont au moins un enfant à 25 ans, soit quatre fois plus que les diplômées du supérieur de ces générations (figure 2). Cet écart s’est creusé au cours de la dernière décennie : la fécondité à 25 ans est restée stable entre les femmes non diplômées nées entre 1966 et 1975 et celles nées dix ans plus tard, alors que la proportion de diplômées du supérieur mères à 25 ans est passée de 32 % à 20 % entre ces deux mêmes générations. En outre, les femmes non diplômées restent les plus nombreuses à avoir au moins trois enfants.
tableauFigure 2 – Nombre d’enfants par femme à 25 ans selon la génération et le niveau d’études
Diplôme | Année de naissance | Nombre d’enfants à 25 ans | ||
---|---|---|---|---|
Deux enfants ou plus | Un enfant | Pas d’enfant | ||
Aucun diplôme | Femmes nées entre 1966 et 1975 |
45 | 32 | 23 |
Femmes nées entre 1986 et 1995 |
51 | 28 | 21 | |
Diplôme du supérieur |
Femmes nées entre 1966 et 1975 |
7 | 19 | 74 |
Femmes nées entre 1986 et 1995 |
0 | 17 | 83 |
- Lecture : 45 % des femmes sans aucun diplôme nées entre 1966 et 1975 et résidant à La Réunion en 2020 avaient deux enfants ou plus à 25 ans.
- Champ : femmes nées entre 1966 et 1975 ou entre 1986 et 1995 et résidant à La Réunion au moment de l’enquête.
- Sources : Ined-Insee ; enquêtes Migrations, Famille et Vieillissement 1 (2009-2010) et 2 (2020-2021).
graphiqueFigure 2 – Nombre d’enfants par femme à 25 ans selon la génération et le niveau d’études
Des maternités qui restent plus précoces qu’ailleurs
L’importance des maternités précoces explique en partie le niveau élevé de la fécondité à La Réunion. Ainsi, 13 % des natives de l’île de la génération 1990-1999 ont été mères avant leur vingtième année. Cette part baisse de 8 points en dix ans, mais reste deux fois plus élevée qu’aux Antilles ou dans l’Hexagone. Ces maternités à un jeune âge constituent de plus en plus souvent, en plus de leur niveau de diplôme fréquemment faible, un obstacle supplémentaire à la recherche d’emploi. Ainsi, parmi les habitantes de La Réunion de moins de 25 ans ayant terminé leurs études, seules 4 % de celles ayant un enfant occupent un emploi contre 46 % des autres, soit un écart de 42 points contre 12 points en 2010.
Par ailleurs, même si la monoparentalité reste moins répandue qu’aux Antilles, de plus en plus d’enfants vivent dans une famille monoparentale à La Réunion : 47 % des enfants nés entre 2005 et 2009 ont vécu quelque temps au moins avec un seul de leur parent au cours des dix années écoulées, soit 9 points de plus que pour les enfants nés entre 1995 et 1999 (figure 3). En particulier, 17 % des enfants nés entre 2005 et 2009 ont toujours vécu dans une famille monoparentale, contre 10 % des enfants nés entre 1995 et 1999.
tableauFigure 3 – Structure familiale durant les dix premières années de l’enfance selon les générations
Période de naissance | Parents toujours en couple | Parents ensemble puis rupture | Famille monoparentale toujours | Famille monoparentale suivie d’une union |
---|---|---|---|---|
Enfants nés entre 1995 et 1999 | 62 | 19 | 10 | 8 |
Enfants nés entre 2005 et 2009 | 53 | 21 | 17 | 9 |
- Lecture : 17 % des enfants nés entre 2005 et 2009 d’un parent répondant résidant à La Réunion en 2020-2021 ont vécu les dix premières années de leur vie en famille monoparentale uniquement.
- Champ : personnes nées entre 1995 et 1999 ou entre 2005 et 2009 et résidant à La Réunion au moment de l’enquête.
- Sources : Ined-Insee ; enquêtes Migrations, Famille et Vieillissement 2 (2020-2021).
graphiqueFigure 3 – Structure familiale durant les dix premières années de l’enfance selon les générations
Un peu moins de jeunes en difficulté d’insertion professionnelle, mais ils sont moins aidés financièrement
En 2020, du fait d’une fécondité élevée, La Réunion reste le troisième département le plus jeune de France, derrière la Guyane et Mayotte. Les jeunes de moins de 20 ans représentent encore 30 % de la population en 2020, contre 34 % en 2010. L’enjeu de leur bonne insertion professionnelle et sociale à leur arrivée à l’âge adulte reste donc prégnant. Celle-ci s’est améliorée significativement et se traduit par moins de difficultés financières : en 2020, 38 % des jeunes de 18 à 24 ans ne sont ni en emploi, ni en études, soit 9 points de moins qu’en 2010 (figure 4). La part de jeunes ni en emploi ni en études reste plus élevée à La Réunion qu’aux Antilles, mais moins qu’en Guyane où la situation s’est détériorée.
tableauFigure 4 – Part de jeunes ni en études, ni en emploi en 2010 et 2020 selon le territoire
Territoire | 2010 | 2020 |
---|---|---|
La Réunion | 47 | 38 |
Guadeloupe | 38 | 33 |
Martinique | 34 | 29 |
Guyane | 36 | 45 |
- Champ : personnes de 18 à 24 ans en 2010 ou 2020 et résidant à La Réunion, ou en Guadeloupe, Martinique ou Guyane.
- Sources : Ined-Insee ; enquêtes Migrations, Famille et Vieillissement 1 (2009-2010) et 2 (2020-2021).
graphiqueFigure 4 – Part de jeunes ni en études, ni en emploi en 2010 et 2020 selon le territoire
Cette baisse du nombre de jeunes qui peinent à s’insérer sur le marché du travail va de pair avec une diminution de la part de jeunes aidés financièrement par leurs proches : en 2020, 22 % reçoivent une aide financière de la part de leur entourage contre 35 % en 2010. Cette aide financière est le plus souvent irrégulière, seuls 9 % des jeunes ni en emploi ni en études recevant une aide financière régulière de leur entourage (figure 5). Cette baisse est plus marquée encore pour la génération un peu plus âgée : seuls 2 % des 25-34 ans sans emploi reçoivent de l’aide financière contre 25 % il y a dix ans. La fragilisation économique d’une partie des ménages suite à la pandémie de Covid-19 pourrait expliquer en partie cette évolution. En revanche, la cohabitation intergénérationnelle se renforce : en 2018, davantage de jeunes qu’en 2008 vivent chez leurs parents [Sui-Seng, 2022 /fr/statistiques/6050491]. En particulier, 74 % des jeunes ni en emploi, ni en études de 18 à 24 ans cohabitent avec au moins un autre adulte que leur conjoint,soit 6 points de plus qu’il y a dix ans.
tableauFigure 5 – Parts de 18-24 ans ni en emploi, ni en études et de 55 ans ou plus recevant de l’aide de leur entourage en 2010 et 2020
Type d’aide reçue par l’entourage | 18-24 ans ni en emploi, ni en études (2010) |
18-24 ans ni en emploi, ni en études (2020) |
55 ans ou plus (2010) |
55 ans ou plus (2020) |
---|---|---|---|---|
Reçoit une aide financière régulière | 28 | 9 | 5 | 1 |
Reçoit une aide non financière | 41 | 42 | 36 | 28 |
Cohabite avec un membre de la famille* | 68 | 74 | 39 | 25 |
- * hors conjoint et enfants/beaux-enfants de moins de 18 ans.
- Sources : Ined-Insee ; enquêtes Migrations, Famille et Vieillissement 1 (2009-2010) et 2 (2020-2021).
graphiqueFigure 5 – Parts de 18-24 ans ni en emploi, ni en études et de 55 ans ou plus recevant de l’aide de leur entourage en 2010 et 2020
Une meilleure santé mais un isolement accru des personnes âgées
La population réunionnaise continue de vieillir : la part de personnes de 60 ans ou plus augmente ainsi de 12 % en 2010 à 18 % en 2020. Elle atteindrait 23 % en 2030, si les tendances démographiques récentes se prolongeaient [Dehon, 2022].
Bien qu’il reste en moyenne plus dégradé que dans l’Hexagone, l’état de santé des seniors de La Réunion s’améliore et est désormais proche de celui des seniors des Antilles : 35 % des 55 ans ou plus ont des limitations d’activité, soit 16 points de moins qu’il y a dix ans. Mais seuls 15 % des seniors de 55 ans ou plus bénéficient de l’aide d’un professionnel à La Réunion. Les autres doivent compter sur l’aide de leur entourage en cas de besoin : 28 % des habitants de La Réunion de 55 ans ou plus bénéficient ainsi d’une aide non financière de la part de leur(s) proche(s), une part un peu inférieure à ce qu’elle était en 2010 (36 %). La cohabitation intergénérationnelle pour les seniors est de moins en moins fréquente, ce qui pourrait expliquer la baisse de l’aide reçue, en plus d’un éventuel impact de la crise sanitaire de 2020 : en 2020, seuls 25 % des personnes de 55 ans ou plus vivent avec au moins un autre adulte que leur conjoint, contre 39 % en 2010. Dans le même temps, le réseau d’aidants familiaux potentiels se réduit, d’une part parce que les seniors d’aujourd’hui ont eu moins d’enfants que leurs aînés, d’autre part parce que ces enfants sont plus mobiles. Ainsi, 12 % des habitants de 55 ans ou plus ayant au moins un enfant n’en ont aucun résidant sur l’île, soit 3 points de plus qu’en 2010.
Encadré 1 – Les résidents qui ne sont pas nés sur l’île sont satisfaits de leurs conditions de vie
La majorité des résidents non natifs de l’île sont nés en France métropolitaine, les autres venant pour la plupart des îles proches de l’océan Indien (Mayotte, Madagascar, Maurice, Comores). Parmi eux, 42 % sont arrivés seuls sur l’île, 24 % en famille et 18 % en couple sans enfant.
Les non-natifs s’installent en général durablement sur l’île : 45 % pensent leur installation durable, 37 % l’estiment définitive et seuls 14 % la tiennent pour provisoire. Ils citent principalement comme avantages de la vie à La Réunion l’agrément du cadre de vie et du climat. Ainsi, 76 % d’entre eux conseilleraient à des proches de s’installer à La Réunion. Cette part, en progression de 6 points en dix ans, est nettement supérieure à celles relevées dans les autres Drom (un peu plus de 60 %). À La Réunion, très peu de résidents non natifs font état d’une expérience négative à vivre sur l’île, mais il est probable qu’une partie des personnes concernées avaient déjà quitté l’île au moment de l’enquête.
Interrogés sur leurs relations sociales, 37 % des résidents non natifs déclarent plutôt fréquenter des natifs de La Réunion, 17 % plutôt des personnes originaires du même territoire qu’eux et 43 % autant les uns que les autres. Le choix et l’intensité de ces fréquentations sont fortement corrélés à la durée de présence : plus durable est l’installation, moins exclusives sont les fréquentations entre natifs de même origine.
Encadré 2 – Langue créole et religion : des valeurs qui restent bien ancrées
Les natifs de l’île accordent une grande importance à la langue créole qui reste bien implantée sur le territoire. En 2020, 90 % des natifs de La Réunion considèrent que la langue créole est importante pour l’identité du département. C’est un peu plus qu’en 2010 (86 %). La quasitotalité des natifs de l’île indiquent d’ailleurs la comprendre et la parler facilement, avec toutefois un léger recul parmi les natifs de 18-24 ans : parmi ces derniers, 90 % comprennent la langue créole et la parlent facilement, soit 7 points de moins que pour les natifs plus âgés. De plus en plus de natifs estiment en outre que le créole réunionnais devrait être enseigné à l’école : c’est le cas de 49 % d’entre eux en 2020, soit 9 points de plus que dix ans auparavant.
De plus, 35 % des natifs pensent que le créole devrait se limiter à la seule sphère privée, alors que c’était le cas de 47 % d’entre eux dix ans auparavant.
La pratique du créole et le souhait qu’il soit enseigné à l’école sont donc de plus en plus affirmés à La Réunion. Mais sur certains points, l’écart reste important avec les autres Drom. Ainsi, la grande majorité des natifs des Antilles-Guyane (de 84 % à 89 % ) pensent que le créole devrait être enseigné à l’école et 20 % qu’il devrait se limiter à la sphère privée.
Les habitants de La Réunion sont par ailleurs très croyants : 81 % des 15 ans ou plus déclarent avoir une religion, soit un peu moins qu’en 2010 (86 %).
À La Réunion comme ailleurs en Outre-mer, les natifs du département ainsi que les immigrants nés à l’étranger sont ceux qui déclarent le plus fréquemment avoir une religion (respectivement 86 % et 90 %). Les résidents venus d’ailleurs en France se démarquent quant à eux par une part moindre de personnes déclarant une religion (55 %).
Au contraire des habitants des Antilles également très croyants, la confession chrétienne n’a pas l’exclusivité à La Réunion où plusieurs religions coexistent. Les trois religions les plus citées sont les religions chrétienne (86 % des croyants), hindouiste (12 %) et musulmane (7 % des croyants). Particularité supplémentaire, 11 % des croyants déclarent avoir plusieurs religions.
Dans le même temps, 45 % de ceux qui déclarent avoir une religion y accordent beaucoup d’importance, une part en baisse de 6 points par rapport à 2010.
Encadré 3 – Partenariat
Cette étude constitue une synthèse du rapport plus complet de l'Ined consacré aux résultats de l'enquête Migrations, Famille et Vieillissement. Elle est le fruit d'un partenariat entre l'Insee et l'Institut national des études démographiques (Ined).
Sources
Conçue par l’Ined et conduite en partenariat avec l’Insee, la direction générale des Outre-mer (DGOM), le Département de La Réunion, la Région Réunion et la Caisse d’allocations familiales, l’enquête « Migrations, Famille et Vieillissement » vise à mesurer les mutations démographiques en cours dans les départements d’Outre-mer et à en appréhender leurs conséquences socio-économiques. L’enquête couvre de nombreuses thématiques : trajectoires migratoires, ressources, mode de vie et état de santé des personnes âgées, diversité des formes d’union, proximité géographique des générations, pratiques culturelles et sociales, discriminations vécues par les populations, etc.
À La Réunion, cette enquête a été conduite en face-à-face auprès d’un échantillon de 2 919 personnes âgées de 18 à 79 ans, entre janvier 2020 et juin 2021. Elle fait suite à une première édition datant de 2009-2010.
Pour en savoir plus
Breton D., Marie C.-V., Floury E., Crouzet M , Dehon M., Fabre E., « Ouvrir dans un nouvel ongletMigrations, Famille et Vieillissement à La Réunion. Premiers résultats de l’enquête MFV-2 en outre-mer », Ined, décembre 2022.
Insee, « Ouvrir dans un nouvel ongletVidéo - Panorama des évolutions de la société réunionnaise de 2010 à 2022 », Chaîne YouTube de l'Insee, décembre 2022.
Demougeot L., Besson L., Thibault P., « Les natifs des Antilles, de Guyane et de Mayotte quittent souvent leur région natale, contrairement aux Réunionnais », Insee Première n° 1853, avril 2021.
Marie C.-V., Breton D., Crouzet M., Fabre E., Merceron S., « Migrations, natalité et solidarités familiales – La société de Mayotte en pleine mutation », Insee Analyses Mayotte n° 12, mars 2017.
Fabre E., « Freins à la mobilité des jeunes Réunionnais en 2012 - Six jeunes sur dix prêts à tenter une expérience de mobilité en Métropole », Insee partenaires n° 22, juin 2013.
Marie C.-V., Temporal F., Condon S., Abdouni S. et Breton D., « Des défis pour La Réunion de demain », Insee partenaires n° 12, mai 2011.
Temporal, F. Marie, C., Bernard S., « Ouvrir dans un nouvel ongletInsertion professionnelle des jeunes ultramarins : DOM ou métropole ? » Population, 66, 555-599, mars 2011.
Marie C.-V., « Ouvrir dans un nouvel ongletL’enquête Migrations, Famille et Vieillissement - Première grande enquête menée dans les DOM pour mieux cerner les défis de demain », Revue des politiques sociales et familiales n° 106, 2011.