Insee Analyses Provence-Alpes-Côte d'Azur ·
Novembre 2022 · n° 107
Base aérienne d’Orange : un plan d’exposition au bruit révisé pour l’arrivée du Rafale
L’arrivée du Rafale sur la base aérienne d’Orange nécessite la révision du plan d’exposition au bruit (PEB). Le nouveau PEB, qui concerne six communes au lieu de cinq, limite les constructions sur un total de 3 300 hectares, soit 50 % de plus que celui de 1985 précédemment en vigueur. Ces zones sont majoritairement agricoles et très peu urbanisées.
3 950 habitants résident dans le périmètre du nouveau PEB, soit 8 % de plus que dans celui de 1985, avec des incidences variables selon les communes. À l’exception notable d’Orange, la population a augmenté entre 2008 et 2018 dans les communes concernées (+ 1,2 % par an en moyenne), malgré les restrictions de construction induites par le PEB. Par ailleurs, le nouveau PEB a un impact très limité sur les équipements publics et collectifs.
- La base aérienne 115 accueille le Rafale à l’été 2024
- Un nouveau plan d’exposition au bruit pour l’arrivée du Rafale
- Des restrictions urbanistiques sur une zone plus étendue, majoritairement agricole
- Des incidences différentes selon les communes
- Orange reste la commune la plus concernée en termes de superficie
- Peu d’impact en matière d’équipements collectifs
- Encadré 1 – La base aérienne 115 et ses missions
- Encadré 2 – Le plan d’exposition au bruit (PEB)
- Encadré 3 – Partenariat
La base aérienne 115 accueille le Rafale à l’été 2024
À l’été 2024, la base aérienne 115, implantée sur les communes d’Orange, Jonquières et Camaret-sur-Aigues, accueillera le Rafale. Dans le cadre de la loi de programmation militaire 2019-2025, ce nouvel avion plus moderne succédera au Mirage 2000, utilisé depuis 1985, dans ses missions de sûreté aérienne (encadré 1).
Pour préparer cette arrivée, une révision du plan d’exposition au bruit (PEB) datant de 1985 a été lancée dès 2020 par les services de l’État.
Un nouveau plan d’exposition au bruit pour l’arrivée du Rafale
Conformément aux codes de l’urbanisme et de l’environnement, tout aérodrome, civil ou militaire, doit faire l’objet d’un document visant à prévenir et limiter l’exposition de la population aux nuisances sonores, en réglementant la construction et l’occupation du sol (encadré 2). Ce document est annexé au plan local d’urbanisation des communes concernées.
Le nouveau PEB s’appuie sur une nouvelle modélisation de la nuisance sonore, traduite en courbes « isophoniques » (Pour comprendre), produite par la Direction générale de l’aviation civile. Il fait apparaître trois zones A, B et C, soumises à contraintes urbanistiques, classées par ordre d’impact sonore décroissant (figure 1). Ces zones ont été arrêtées par le préfet de Vaucluse après réunion de la commission consultative de l’environnement, qui a rassemblé des élus, des associations et des professionnels de l’aéronautique.
graphiqueFigure 1 – Zones de restrictions urbanistiques liées aux plans d’exposition au bruit de 2022 et 1985

- Lecture : la zone A est la plus proche de la base aérienne. Elle est soumise aux plus fortes contraintes urbanistiques. Les trois lignes noires correspondent au PEB de 1985 avec les limites extérieures des zones A, B et C (en partant du centre) ; les contours rouge, orange et vert correspondent au nouveau PEB.
- Sources : PEB 2022 ; PEB 1985.
Des restrictions urbanistiques sur une zone plus étendue, majoritairement agricole
Le nouveau PEB concerne directement six communes au lieu de cinq pour celui de 1985 : Camaret-sur-Aigues, Courthézon, Jonquières, Orange, Sérignan-du-Comtat et Uchaux. Parmi elles, seule la commune d’Uchaux n’était pas concernée par le PEB de 1985.
Le nouveau PEB s’étend sur 3 286 hectares, contre 2 149 précédemment, soit 50 % de surface supplémentaire. Cette extension, principalement à l’est et à l’ouest de la base, s’explique par une modélisation différente tenant compte des spécificités du Rafale. Une partie des surfaces supplémentaires est toutefois déjà soumise à d’autres contraintes réglementaires (plans de prévention de risques par exemple). Ces zones sont majoritairement agricoles et très peu urbanisées.
En termes de population concernée par le PEB, on dénombre en 2017 environ 3 950 habitants (population fiscale) (sources) pour le contour du nouveau PEB, soit 8 % de plus qu’avec le contour du PEB de 1985 (figure 2).
Autour de la base aérienne, la commune d’Orange est la seule qui a perdu de la population entre 2008 et 2018. Dans les cinq autres communes concernées par le nouveau PEB, la population s’est accrue (+ 1,2 % en moyenne annuelle), en particulier à Jonquières (+ 2,3 %), malgré les restrictions de construction du plan d’exposition au bruit de 1985. L’évolution des contraintes liées au PEB pourra avoir des conséquences sur le développement urbanistique des communes concernées.
tableauFigure 2 – Incidence de la révision du plan d’exposition au bruit, par commune
Ville – Année | Zone A | Zone B | Zone C |
---|---|---|---|
Orange – 1985 | 227 | 288 | 369 |
Orange – 2022 | 374 | 720 | 208 |
Camaret-sur-Aigues – 1985 | 253 | 98 | 92 |
Camaret-sur-Aigues – 2022 | 261 | 327 | 144 |
Jonquières – 1985 | 162 | 153 | 194 |
Jonquières – 2022 | 184 | 323 | 118 |
Courthézon – 1985 | 0 | 0 | 73 |
Courthézont – 2022 | 0 | 177 | 157 |
Sérignan-du-Comtat – 1985 | 0 | 56 | 184 |
Sérignan-du-Comtat – 2022 | 0 | 118 | 96 |
Uchaux – 1985 | 0 | 0 | 0 |
Uchaux – 2022 | 0 | 0 | 79 |
- Sources : Insee, fichier démographique des logements et des individus 2018 ; PEB 1985 ; PEB 2022.
graphiqueFigure 2 – Incidence de la révision du plan d’exposition au bruit, par commune

- Sources : Insee, fichier démographique des logements et des individus 2018 ; PEB 1985 ; PEB 2022.
Des incidences différentes selon les communes
La commune de Camaret-sur-Aigues est celle où le nombre d’habitants soumis aux restrictions urbanistiques augmente le plus (figure 3). Très peu de terrains vont sortir des contraintes de l’ancien PEB, tandis que près de 300 hectares où vivent environ 800 individus vont y rentrer. Sur ces espaces, situés au sud-ouest de la partie urbanisée de la commune et composés essentiellement de maisons, plus aucune construction d’habitation ne sera possible sauf exception.
À l’inverse, la commune de Jonquières est moins contrainte par le nouveau PEB. La surface totale incluse dans les trois zones augmente de 115 hectares, mais la commune passe du 2e au 3e rang (derrière Orange et Camaret-sur-Aigues) du point de vue de la surface contrainte par le PEB. Près de 300 hectares, principalement des terrains agricoles, entrent dans le périmètre contraint. Mais une grande partie du centre de la ville (environ 160 hectares anciennement en zone C) est libérée des contraintes urbanistiques. Plus d’un millier d’habitants y résidait. Une autre zone touchant le centre-ville passe d’une classification B en C, laissant là aussi quelques opportunités supplémentaires de construction. Jonquières est la commune autour de la base aérienne qui a connu le plus fort essor démographique sur les dix dernières années : + 2,3 % en moyenne annuelle entre 2008 et 2018. Ce desserrement urbanistique pourrait donc permettre à la ville de poursuivre sa croissance démographique.
Orange reste la commune la plus concernée en termes de superficie
La commune d’Orange héberge au sein de son périmètre la majorité des installations de la base aérienne. C’est donc la commune la plus concernée par le PEB en termes de superficie : 1 300 hectares sont désormais soumis au plan d’exposition au bruit contre 890 auparavant. Deux zones de la ville sont concernées par ces changements. Au nord de la ville, plus de 400 hectares de terrains sortent du périmètre du PEB. Ces zones sont actuellement peu peuplées (150 habitants). À l’inverse, plus de 800 hectares, deviennent contraints par le PEB et se retrouvent localisés en zone B principalement. Ils se situent entre la partie urbanisée de la ville et la base aérienne et sont composés de terrains agricoles et de quelques entreprises industrielles.
Pour la commune d’Uchaux, nouvellement intégrée aux contraintes du PEB, l’impact est mineur puisque seuls 79 hectares, essentiellement agricoles, se trouvent maintenant en zone C, soit 1 % de la surface totale de la commune. Une dizaine d’habitations au sud de la commune sont concernées. Des constructions individuelles non groupées pourront donc y être autorisées dans les zones déjà urbanisées.
Sur la commune de Sérignan-du-Comtat, l’effet est plus complexe mais touche globalement des zones peu habitées, essentiellement agricoles ou boisées. Une zone de 77 hectares comportant une cinquantaine de logements (maisons individuelles espacées) passe de la zone C sur le PEB de 1985 à la zone B avec le nouveau PEB. À côté, une petite zone de l’ouest de la commune comprenant moins de dix habitations sort de toutes contraintes liées au PEB.
Pour Courthézon, le nouveau PEB vient contraindre environ 10 % de la surface communale, au nord de la commune et à l’est. Cependant, ces zones sont à l’écart de la partie urbanisée de la ville. Le nouveau PEB devrait avoir peu d’effet sur l’urbanisation de la commune dans les années à venir.
graphiqueFigure 3 – Effets du nouveau plan d’exposition au bruit

- Lecture : en rouge et rose, les nouveaux territoires qui entrent dans le périmètre du PEB. En vert, ceux qui en sortent. En violet, les territoires qui restent dans le périmètre du PEB mais changent de zone (de B en C). La partie grise identifie les territoires présents dans le PEB de 1985 et celui de 2022.
- Sources : PEB 1985 ; PEB 2022.
Peu d’impact en matière d’équipements collectifs
Des équipements publics ou collectifs peuvent être construits en zone A et B s’ils sont nécessaires à l’activité aéronautique ou indispensables aux populations existantes. En zone C, ils sont autorisés sous réserve d’une isolation acoustique spécifique. Dans le périmètre du nouveau PEB, on ne retrouve aucun établissement scolaire ou de service public par exemple. Les seuls équipements sportifs présents (piscine, gymnase…) sont ceux de la base aérienne. On y retrouve quelques petits commerces pour lesquels aucune réglementation ne s’applique.
Outre les résidences principales et les équipements collectifs, d’autres lieux pourraient accueillir de la population au moins une partie de l’année. De ce point de vue, il n’y a pas d’établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes ni d’équipement touristique ou de loisir (camping, centre aéré…).
Encadré 1 – La base aérienne 115 et ses missions
La base aérienne 115 (BA 115), dite « Capitaine de Seynes », a été créée en 1939. Elle abrite aujourd’hui plusieurs unités opérationnelles, réparties entre la plateforme aéronautique Caritat, qui s’étend sur les communes d’Orange, Jonquières et Camaret-sur-Aigues depuis 1939, et le « quartier Geille », dans le centre-ville d’Orange depuis 2015. La base aérienne est engagée sur le territoire national à travers la posture permanente de sûreté aérienne (PPS), garante de la souveraineté de l’espace aérien national. Dotée de Mirage 2000 et d’hélicoptères Fennec, la base contribue aussi aux opérations Sentinelle et Résilience, ainsi qu’à l’alerte de recherche et sauvetage (« search and rescue » ou SAR) au profit des aéronefs (civils et militaires) en détresse. Elle contribue enfin aux alertes Rapace et Mousquetaire tenues par le commando parachutiste de l’air n° 20 et intervient sur des théâtres d’opérations extérieures, Barkhane en Afrique et à Chammal au Moyen-Orient.
Plus de 2 500 personnes, militaires, civils, réservistes et stagiaires, travaillent sur le site [Jamet et Zampini, 2021].
Encadré 2 – Le plan d’exposition au bruit (PEB)
L’évaluation de l’exposition au bruit des riverains des aérodromes repose sur la loi du 11 juillet 1985 relative à l’urbanisme au voisinage des aéroports. Celle-ci rend obligatoire l’adoption d’un plan d’exposition au bruit (PEB) à proximité des aérodromes. Ce dispositif a pour objet de délimiter les zones exposées au bruit des aérodromes concernés, à l’intérieur desquelles l’urbanisation est réglementée, afin de prévenir l’exposition de nouvelles populations.
Le PEB est un instrument juridique destiné à maîtriser l’utilisation des sols aux abords des aérodromes, en vue d’interdire ou limiter la construction de logements et d’y prescrire des activités plus compatibles (agriculture par exemple). Il est opposable à toute personne publique ou privée. Les dispositions des plans locaux d’urbanisme doivent être compatibles avec les prescriptions du PEB en vigueur.
Le PEB est de compétence de l’État et de ce fait est proposé et approuvé par le préfet de département, après enquête publique et avis de la commission consultative de l’environnement. Un arrêté fixant ses nouveaux contours a été publié le 16 août 2022.
Pour les trois zones A, B, C définies par le PEB, aucune construction collective ou en lotissement ne sera permise. Les réhabilitations sont tolérées si elles n’accroissent pas la population. Dans les zones A et B (zones de bruit fort), les logements et équipements publics ou collectifs liés à l’activité aéronautique sont autorisés. Ceux liés à l’activité agricole le sont également. Dans la zone C (zone de bruit modéré), les constructions individuelles non groupées sont possibles si le secteur est déjà urbanisé.
Depuis le 1er juin 2020, tout vendeur d’un logement exposé au bruit d’un aérodrome doit en informer les futurs acquéreurs (avant signature de l’acte authentique) dès lors que le logement se situe dans une zone visée par un PEB.
Encadré 3 – Partenariat
Cette étude a été réalisée en partenariat avec le ministère des Armées.
Pour comprendre
La mesure du bruit et le calcul des courbes isophoniques ont été réalisés par la Direction générale de l’aviation civile (DGAC) à partir d’hypothèses sur le trafic aérien des vingt prochaines années, les trajectoires et les procédures de vol fournies par l’armée de l’air et de l’espace. Ils tiennent compte aussi des modélisations techniques des aéronefs fournies par les industriels.
La méthode utilisée pour le calcul du niveau de gêne sonore est celle de l’indice européen Lden (level day-evening-night). Cet indice représente le niveau de bruit moyen pondéré au cours de la journée, en donnant un poids plus fort au bruit produit en soirée (18-22 h) (+ 5 dB(A)) et durant la nuit (22h-6 h) (+ 10 dB(A)), pour tenir compte de la sensibilité accrue des individus aux nuisances sonores durant ces deux périodes. Cet indicateur est calculé sur la base de niveaux équivalents sur les trois périodes de base : jour, soirée et nuit, auxquels on ajoute une pondération suivant la période de la journée.
Utilisée depuis 2002, cette méthode est différente de celle utilisée pour le PEB de 1985 (indice psophique). La différence majeure est la prise en compte des gênes sonores sur l’ensemble des 24 h d’une journée et la mise en place d’une pondération positive sur les activités de soirée et de nuit.

Sources
Les données relatives au nombre de logements et d’individus proviennent du fichier démographique des logements et des individus (Fidéli), issu de la source fiscale.
Les données d’évolution de la population sont celles du recensement de la population.
Des cartes des niveaux sonores simulés pour la rédaction du plan d’exposition au bruit fournies par le ministère des Armées ont également été utilisées.
Pour en savoir plus
Jamet L. et Zampini C., « 3 120 emplois locaux dépendent de la base aérienne 115 d’Orange », Insee Analyses Provence-Alpes-Côte-d’Azur n° 95, juillet 2021.