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Août 2022 · n° 73À La Réunion, 20 % des adultes sont pauvres durablement Devenir pauvre, le rester ou sortir de la pauvreté entre 2015 et 2018
À La Réunion, 20 % des adultes sont pauvres sans interruption de 2015 à 2018, soit quatre fois plus qu’en France métropolitaine. Avoir un emploi constitue la meilleure protection contre cette pauvreté persistante. La vie en couple joue elle aussi un rôle protecteur en atténuant les chocs sur les revenus du ménage, à la suite d’une perte d’emploi par exemple.
D’une année à l’autre, 6 % des adultes basculent dans la pauvreté et 7 % en sortent. Les sorties de la pauvreté se font avant tout parce que l’on trouve ou retrouve un emploi. Elles se font aussi fréquemment à la fin de la vie professionnelle, qui se traduit plus souvent à La Réunion qu’ailleurs par l’attribution du minimum vieillesse, dont le montant est supérieur aux autres minima sociaux.
Dans une moindre mesure, les unions génèrent aussi des sorties plus fréquentes de la pauvreté. À l’inverse, les naissances, les séparations et les veuvages induisent un risque plus important de basculer dans la pauvreté.
- Six personnes pauvres sur dix le restent plusieurs années
- Avoir un emploi, la meilleure protection contre une pauvreté persistante
- La pauvreté persistante concerne moins les couples
- Chaque année, 6 % des adultes basculent dans la pauvreté et 7 % en sortent
- Sortir de la pauvreté : avant tout parce que l’on trouve ou retrouve un emploi
- Deux fois plus de sorties de la pauvreté lorsque la vie professionnelle se termine
- Deux fois plus de bascules dans la pauvreté à l’occasion d’une naissance, d’une séparation ou d’un veuvage
- Deux fois plus de sorties de la pauvreté lors d’une union
- Encadré – Partenariat
La pauvreté reste très élevée à La Réunion, malgré sa réduction ces dernières années. Ainsi, de 2015 à 2018, environ 35 % des adultes sont pauvres au sens monétaire, une part près de trois fois plus élevée qu’en France métropolitaine : leur niveau de vie est inférieur au seuil de pauvreté national. Pour lutter contre la pauvreté, il est notamment utile de mieux connaître les raisons d’une pauvreté persistante ou au contraire, les événements particuliers déclenchant une entrée ou une sortie de la pauvreté. Cette préoccupation s’inscrit dans la Ouvrir dans un nouvel ongletstratégie nationale de prévention et de lutte contre la pauvreté.
Six personnes pauvres sur dix le restent plusieurs années
À La Réunion, parmi les adultes pauvres en 2015, 58 % le restent au moins jusqu’en 2018 ; c’est le cas de 42 % des personnes pauvres en 2015 résidant en France métropolitaine. Au total, parmi les adultes ayant vécu à La Réunion de 2015 à 2018, 20 % sont pauvres sans interruption pendant ces quatre années. Cette pauvreté persistante est quatre fois plus élevée à La Réunion que dans l’Hexagone où elle touche 5 % des adultes (figure 1). Dans les Hauts-de- France, région de l’Hexagone la plus proche de La Réunion en termes de prégnance de la pauvreté et de jeunesse de la population, la pauvreté persistante concerne également une part bien moindre de la population (7 %).
À La Réunion, entre 2015 et 2018, près d’un adulte sur deux a été pauvre au moins une fois au cours de ces années, tandis que les autres n’ont jamais été pauvres au cours de cette période. La situation est bien moins défavorable dans l’Hexagone, où moins d’un adulte sur cinq a été touché par la pauvreté au cours des années 2015 à 2018, comme dans les Hauts-de-France (moins d’un adulte sur quatre).
tableauFigure 1 – Répartition-type de 100 adultes selon leur situation de pauvreté durant les quatre années 2015 à 2018
Territoire | Pauvreté persistante sur 4 ans | Pauvreté et non-pauvreté | Non-pauvreté | Ensemble |
---|---|---|---|---|
La Réunion | 20 | 27 | 53 | 100 |
France Métropolitaine | 5 | 14 | 81 | 100 |
- Lecture : à La Réunion, sur 100 adultes, 20 sont pauvres quatre années consécutives de 2015 à 2018, 27 connaissent des épisodes de pauvreté et de non-pauvreté et 53 ne connaissent la pauvreté aucune de ces quatre années.
- Champ : personnes de 18 ans ou plus en ménage ordinaire, connues des services fiscaux et habitant de manière continue à La Réunion ou en France métropolitaine entre 2015 et 2018.
- Source : Insee, données fiscales de l’échantillon démographique permanent 2019.
graphiqueFigure 1 – Répartition-type de 100 adultes selon leur situation de pauvreté durant les quatre années 2015 à 2018
Avoir un emploi, la meilleure protection contre une pauvreté persistante
À La Réunion, parmi les adultes qui n’ont jamais été pauvres entre 2015 et 2018, 87 % vivaient dans des ménages ayant des revenus d’activité professionnelle en 2015. Cette part est 2 fois moindre parmi les adultes pauvres sans interruption durant ces quatre années (42 %) (figure 2). La protection que confère l’emploi est encore plus importante à La Réunion qu’ailleurs. Dans l’Hexagone, y compris dans les Hauts-de-France, les adultes durablement pauvres étaient 1,5 fois moins nombreux à travailler en 2015 par rapport à ceux qui n’ont jamais été pauvres au cours des quatre années. Parce qu’ils trouvent plus facilement un emploi, les diplômés sont également moins nombreux parmi les adultes touchés par la pauvreté persistante.
tableauFigure 2 – Part d’adultes vivant dans un ménage ayant des revenus d’activité professionnelle, selon leur situation de pauvreté à La Réunion
Situation de pauvreté | Part |
---|---|
Pauvreté persistante sur 4 ans | 42 |
Pauvreté et non-pauvreté | 75 |
Non-pauvreté | 87 |
- Lecture : 42 % des adultes pauvres sans interruption de 2015 à 2018 vivent dans un ménage ayant des revenus d’activité professionnelle en 2015.
- Champ : personnes de 18 ans ou plus en ménage ordinaire, connues des services fiscaux et habitant de manière continue à La Réunion entre 2015 et 2018.
- Source : Insee, données fiscales de l’échantillon démographique permanent 2019.
graphiqueFigure 2 – Part d’adultes vivant dans un ménage ayant des revenus d’activité professionnelle, selon leur situation de pauvreté à La Réunion
La pauvreté persistante concerne moins les couples
Parmi les adultes n’ayant jamais été pauvres entre 2015 et 2018, 64 % vivaient en couple en 2015, une part plus élevée que parmi ceux touchés par une pauvreté persistante (47 %). Avoir deux apports potentiels de ressources au sein d’un ménage limite en effet le risque d’être pauvre. À l’inverse, la pauvreté durable touche bien plus les femmes à la tête d’une famille monoparentale : elles sont deux fois plus nombreuses parmi les adultes durablement pauvres à La Réunion que parmi ceux non touchés par la pauvreté durant 4 ans (15 % contre 7 %). Dans une moindre mesure, les célibataires sans enfant sont aussi plus souvent confrontés à une pauvreté persistante (17 % contre 12 %).
Le départ des jeunes du domicile familial est souvent marqué par une phase de pauvreté. Parmi les jeunes de 18 à 29 ans devenus autonomes fiscalement entre 2015 et 2018, 45 % sont pauvres à l’issue de leur détachement fiscal du foyer parental, contre 21 % dans l’Hexagone. Cela explique en partie leur départ plus tardif du domicile parental : en 2018, 61 % des jeunes de 16 à 29 ans vivent chez leurs parents à La Réunion contre 47 % dans l’Hexagone [Sui-Seng, 2022].
Chaque année, 6 % des adultes basculent dans la pauvreté et 7 % en sortent
Basculer dans la pauvreté est plus fréquent à La Réunion qu’ailleurs : d’une année sur l’autre, 6 % des adultes basculent sous le seuil de pauvreté monétaire, contre 4 % en France métropolitaine (figure 3). Toutefois, les sorties de la pauvreté sont plus nombreuses (7 %) que les entrées à La Réunion, alors qu’ailleurs, entrées et sorties se compensent. Le taux de pauvreté baisse donc à La Réunion, de 3 points entre 2015 et 2019, pour atteindre 37 % de l’ensemble de la population en 2019 (adultes et enfants confondus).
tableauFigure 3 – Répartition-type de 100 adultes selon leur situation de pauvreté durant deux années consécutives
Territoire | Personne pauvre deux années consécutives | Personne entrée dans la pauvreté | Personne sortie de la pauvreté | Personne non pauvre deux années consécutives | Ensemble |
---|---|---|---|---|---|
La Réunion | 28 | 6 | 7 | 59 | 100 |
France métropolitaine | 8 | 4 | 4 | 84 | 100 |
Hauts-de-France | 11 | 4 | 4 | 81 | 100 |
- Lecture : à La Réunion, sur 100 adultes, 28 sont pauvres deux années consécutives entre 2015 et 2018, 6 entrent dans la pauvreté d’une année sur l’autre, 7 en sortent et 59 ne connaissent la pauvreté aucune de ces deux années.
- Champ : personnes de plus de 18 ans en ménage ordinaire, connues des services fiscaux et habitant deux années consécutives à La Réunion ou en France métropolitaine entre 2015 et 2018.
- Source : Insee, données fiscales de l’échantillon démographique permanent 2019.
graphiqueFigure 3 – Répartition-type de 100 adultes selon leur situation de pauvreté durant deux années consécutives
Les changements de situation au regard de la pauvreté interviennent selon deux configurations, pouvant parfois se cumuler : un changement de composition (union, séparation, naissance, décès) impactant le budget partagé par le ménage, ou encore une évolution de l’un des revenus perçus dans le ménage. À La Réunion comme ailleurs, basculer dans la pauvreté ou en sortir tient principalement à une évolution significative du revenu. Dans huit cas sur dix, les bascules dans la pauvreté sont liées à une baisse de revenu, et les sorties de la pauvreté à une hausse de revenu. Un changement dans la composition du ménage explique les autres cas : par exemple, l’union avec une personne en emploi peut faire sortir un célibataire de la pauvreté.
Par la suite, afin de mesurer l’impact des événements professionnels, on ne tient pas compte des personnes vivant dans un ménage dont le nombre d’adultes a évolué.
Sortir de la pauvreté : avant tout parce que l’on trouve ou retrouve un emploi
Les sorties de la pauvreté sont trois fois plus fréquentes lorsque l’on trouve ou retrouve un emploi que parmi l’ensemble de la population réunionnaise adulte. Ainsi, parmi les adultes vivant dans un ménage dont un membre trouve un emploi ou augmente de manière significative son activité professionnelle, 23 % sortent de la pauvreté (figure 4). Néanmoins, les emplois peu rémunérés ou à temps partiel ne donnent pas toujours lieu à une hausse suffisante du niveau de vie pour sortir de la pauvreté : 40 % des personnes qui trouvent un emploi restent pauvres.
tableauFigure 4 – Situation de pauvreté suite à un événement professionnel
Événement professionnel | Personne pauvre deux années consécutives | Personne entrée dans la pauvreté | Personne sortie de la pauvreté | Personne non pauvre deux années consécutives |
---|---|---|---|---|
Personne dont le ménage connaît une augmentation significative d’activité | 40 | 2 | 23 | 35 |
Personne dont le ménage connaît un passage au chômage | 28 | 12 | 4 | 56 |
Personne dont le ménage connaît un passage en retraite | 9 | 3 | 8 | 80 |
Personne dont le ménage connaît un passage au minimum-vieillesse | 35 | 1 | 34 | 30 |
Ensemble des adultes | 28 | 6 | 7 | 59 |
- Lecture : parmi les adultes vivant dans un ménage connaissant un passage au minimum-vieillesse, 35 % restent pauvres l’année suivante, 1 % entrent dans la pauvreté d’une année sur l’autre, 34 % sortent de pauvreté et 30 % ne connaissent la pauvreté aucune de ces deux années. Les ménages passant en retraite ne touchent pas le minimum-vieillesse, alors que ceux passant au minimum-vieillesse peuvent recevoir ce minimum soit en complément de leur retraite si leurs droits à la retraite sont insuffisants, soit en totalité s’ils n’ont pas de droit à la retraite.
- Champ : personnes de 18 ans ou plus en ménage ordinaire, connues des services fiscaux et habitant deux années consécutives à La Réunion entre 2015 et 2018 dans un ménage dont le nombre d’adultes n’a pas évolué.
- Source : Insee, données fiscales de l’échantillon démographique permanent 2019.
graphiqueFigure 4 – Situation de pauvreté suite à un événement professionnel
À l’inverse, le passage au chômage d’un membre du ménage se traduit par une bascule plus fréquente dans la pauvreté qu’au sein de la population adulte réunionnaise (12 % contre 6 %). Ces personnes occupaient auparavant un emploi peu rémunéré, ne leur ouvrant pas droit à des indemnités chômage suffisantes pour rester au-dessus du seuil de pauvreté. Dans la majorité des cas néanmoins (56 %), la perte d’un emploi ne provoque pas une entrée dans la pauvreté, grâce à la perception d‘allocations chômage suffisamment élevées. À l’inverse, dans 28 % des cas, les personnes étaient pauvres avant même le passage au chômage et le restent à la suite de la baisse de leurs revenus.
Ne bénéficiant pas de l’effet protecteur du couple, les célibataires sont davantage sensibles à la perte ou à la reprise d’un emploi : lors d’un passage au chômage, 21 % des célibataires basculent dans la pauvreté contre 9 % de ceux vivant en couple. Mais lors d’une augmentation significative de l’activité professionnelle, les célibataires, avec ou sans enfant, sortent plus fréquemment de la pauvreté que les personnes en couple (29 % contre 19 %). Les femmes ne sont pas plus exposées que les hommes à ces événements professionnels : tout autant que les hommes, elles sortent de la pauvreté lors d’une reprise d’emploi ou basculent dans la pauvreté lors d’un passage au chômage.
Ailleurs en France, la reprise ou la perte d’un emploi provoquent les mêmes effets qu’à La Réunion sur les parcours de pauvreté, mais de façon un peu moins marquée. Ainsi, lors d’une augmentation significative de l’activité professionnelle, 17 % des adultes sortent de la pauvreté dans l’Hexagone (6 points de moins qu’à La Réunion), tandis que le passage au chômage s’accompagne d’une bascule dans la pauvreté dans 7 % des cas dans l’Hexagone (5 points de moins qu’à La Réunion).
Deux fois plus de sorties de la pauvreté lorsque la vie professionnelle se termine
La fin de la vie professionnelle, marquée par le passage à la retraite ou au minimum-vieillesse, constitue elle aussi un événement marquant les parcours de pauvreté. Au sein des ménages dont le nombre d’adultes est stable, la fin de la vie professionnelle s’accompagne d’une sortie de la pauvreté dans 15 % des cas, soit deux fois plus souvent que dans la population adulte réunionnaise. À l’inverse, cette transition se traduit rarement par une entrée dans la pauvreté : 3 % contre 6 % en moyenne.
Les sorties de la pauvreté lors de la fin de la vie professionnelle sont deux fois plus importantes à La Réunion que dans l’Hexagone (7 %). En effet, les Réunionnais et Réunionnaises sont nettement plus nombreux que dans l’Hexagone à bénéficier du minimum-vieillesse à l’âge du passage à la retraite : 27 %, soit 7 fois plus que dans l’Hexagone (4 %). De par des carrières moins rémunérées et plus morcelées que dans l’Hexagone, les pensions réunionnaises sont plus faibles et donc plus souvent complétées, voire remplacées, par l’Aspa [Seguin, Sui-Seng, 2022]. Ainsi, dans 34 % des cas, le passage à l’Aspa d’un membre du ménage se traduit par une sortie de la pauvreté, contre seulement 8 % lors d’un passage à la retraite où sont perçues uniquement des pensions d’un ou plusieurs régimes de retraite.
En effet, pour une personne percevant le revenu de solidarité active (RSA), le passage à l’Aspa peut se traduire par une augmentation de revenu et donc une possibilité de sortir de la pauvreté. Par exemple, pour une personne seule, le RSA s’élève en 2022 à 575 € mensuels contre 916 € pour l’Aspa. Ces montants peuvent être complétés par d’autres allocations comme les aides personnelles au logement ou l’allocation personnalisée d’autonomie (APA) en cas de perte d’autonomie. Toutefois, la fin de la vie professionnelle n’est qu’en apparence plus favorable aux bénéficiaires de minima sociaux : 35 % sont et restent pauvres malgré l’obtention de l‘Aspa, contre seulement 9 % des nouveaux retraités. Après la fin définitive de l’activité professionnelle, les perspectives d’augmentation des revenus sont fortement limitées. Ainsi à La Réunion, les 65 ans ou plus sont davantage en situation de pauvreté persistante que l’ensemble des adultes, ce qui n’est pas le cas dans l’Hexagone.
Deux fois plus de bascules dans la pauvreté à l’occasion d’une naissance, d’une séparation ou d’un veuvage
Les événements familiaux constituent eux aussi des moments où les entrées et sorties de la pauvreté sont plus fréquentes. Ainsi, 11 % des naissances, 13 % des séparations et 12 % des veuvages s‘accompagnent d’une bascule dans la pauvreté, soit environ deux fois plus que dans l’ensemble de la population réunionnaise (figure 5). À l’inverse, ces événements familiaux s’accompagnent d’une sortie de pauvreté dans 8 à 9 % des cas, soit un peu plus que pour l’ensemble.
tableauFigure 5 – Situation de pauvreté suite à un événement familial
Événement familial | Personne pauvre deux années consécutives | Personne entrée dans la pauvreté | Personne sortie de la pauvreté | Personne non pauvre deux années consécutives |
---|---|---|---|---|
Personne dont le ménage vit une naissance | 26 | 11 | 9 | 54 |
Personne vivant une séparation | 22 | 13 | 9 | 56 |
Personne subissant un veuvage | 24 | 12 | 8 | 56 |
Personne contractant une union | 18 | 9 | 12 | 61 |
Ensemble des adultes | 28 | 6 | 7 | 59 |
- Lecture : parmi les adultes vivant dans un ménage connaissant une naissance, 26 % restent pauvres l’année suivant cette naissance, 11 % entrent dans la pauvreté d’une année sur l’autre, 9 % sortent de pauvreté et 54 % ne connaissent la pauvreté aucune de ces deux années.
- Champ : personnes de 18 ans ou plus en ménage ordinaire, connues des services fiscaux et habitant deux années consécutives à La Réunion entre 2015 et 2018 et ayant vécu une naissance, une séparation, un veuvage ou une union.
- Source : Insee, données fiscales de l’échantillon démographique permanent 2019.
graphiqueFigure 5 – Situation de pauvreté suite à un événement familial
À La Réunion, les naissances s’accompagnent un peu plus souvent d’une entrée dans la pauvreté que dans l’Hexagone : 11 % contre 7 %. En effet, même à revenus inchangés, un ménage accueillant un nouvel enfant peut basculer dans la pauvreté du fait de l’augmentation du nombre de personnes dans le foyer, et des dépenses associées. Les familles monoparentales plus nombreuses sur l’île expliquent en partie cet écart : 10 % des personnes ayant connu une naissance dans leur foyer élèvent seules leurs enfants contre 6 % dans l’Hexagone. Toutefois, même pour les naissances au sein d’un couple, les bascules dans la pauvreté sont plus nombreuses à La Réunion qu’en France métropolitaine : 9 % contre 6 %. En revanche, les conséquences d’une séparation ou d’un veuvage sont similaires à La Réunion et dans l’Hexagone, avec presque autant de bascules dans la pauvreté.
Deux fois plus de sorties de la pauvreté lors d’une union
Que ce soit par un mariage, un pacs ou une union libre, 12 % des Réunionnais et Réunionnaises se mettant en couple sortent de la pauvreté, contre 7 % dans le cas général, et 8 % dans l’Hexagone. Ces unions permettent plus souvent aux femmes de sortir de la pauvreté l’année de l’union (15 % contre 10 % pour les hommes). Les femmes sont en effet moins souvent en emploi que les hommes, et lorsqu’elles travaillent, elles sont davantage à temps partiel et moins rémunérées [Grangé, 2021].
À l’inverse, les unions peuvent occasionner une bascule dans la pauvreté : c’est le cas pour 9 % des adultes se mettant en couple, et même pour 16 % d’entre eux lorsqu’un enfant naît dans l’année.
Encadré – Partenariat
Cette publication a été réalisée en partenariat entre l’Insee, le Département de La Réunion, la Direction des entreprises, de l’emploi, du travail et des solidarités (Deets) et la Caisse d’allocations familiales (CAF) de La Réunion, dans le cadre de la stratégie de prévention et de lutte contre la pauvreté.
Définitions
L’échantillon démographique permanent (EDP) est un panel de personnes comportant environ 4 % de la population française. Il contient depuis 2015 des données fiscales réunionnaises qui permettent de suivre les évolutions des niveaux de vie des personnes échantillonnées dans le panel. Le champ de l’étude est restreint aux personnes de 18 ans ou plus, qui déclarent leurs revenus à l’administration fiscale.
Pour analyser l’impact des événements professionnels sur les entrées et les sorties de la pauvreté, sont exclues les personnes vivant dans un ménage dont le nombre d’adultes a changé, ou ayant déclaré des revenus d’activité négatifs. Une personne âgée de 18 à 65 ans appartient à un ménage ayant vécu un passage au chômage si le montant des allocations chômage du ménage augmente d’une année sur l’autre et si, dans le même temps, le montant des revenus d’activité du ménage diminue. Augmenter significativement son activité professionnelle signifie que le ménage voit ses revenus d’activité augmenter d’au moins 30 % alors qu’il percevait le RSA ou des allocations chômage l’année précédente (ou que le montant de ces revenus était nul une année donnée et, qu’il devient positif l’année suivante). Une personne de 50 ans ou plus appartient à un ménage ayant vécu un passage en retraite ou au minimum-vieillesse (remplacé depuis 2006 par l’allocation de solidarité aux personnes âgées - Aspa) si le montant global des retraites et de l’Aspa augmente d’au moins 460 euros par mois et si le montant des revenus d’activité du ménage diminue (ou est nul les deux années).
Les unions (mariage, pacs ou union libre) et les séparations sont identifiées en comparant la situation conjugale d’une année donnée et de la précédente de chaque personne déclarant ou co-déclarant de leur foyer fiscal. Le veuvage concerne toute personne dont le conjoint ou la conjointe décède, quel que soit le statut légal de leur union.
Une personne appartient à un ménage ayant vécu une naissance si le nombre d’enfants de moins de 14 ans augmente.
Le niveau de vie correspond au revenu disponible du ménage rapporté au nombre d’unités de consommation (UC). Une personne est considérée comme pauvre au sens monétaire lorsqu’elle vit dans un ménage dont le niveau de vie est inférieur au seuil de pauvreté, fixé à 60 % du niveau de vie médian métropolitain (1 100 euros par mois en 2019). Le revenu disponible correspond à l’ensemble des revenus d’activité, des retraites et pensions, des revenus du patrimoine, des revenus financiers et des prestations sociales (prestations familiales, aides au logement et minima sociaux). Les UC permettent de comparer les niveaux de vie des ménages de tailles et de compositions différentes. Le premier adulte du ménage compte pour 1 UC, les autres personnes de 14 ans ou plus pour 0,5 UC, les enfants de moins de 14 ans pour 0,3 UC.
Pour en savoir plus
Robin M., « Pauvreté à La Réunion : deux approches complémentaires », Insee Analyses La Réunion n° 71, juillet 2022.
Grangé C., « Niveaux de vie et pauvreté à La Réunion en 2019 - Près d’un enfant mineur sur deux vit dans un ménage pauvre », Insee Flash La Réunion n° 219, janvier 2022.
Fabre V., Lacour C., « Être en couple amortit le contrecoup financier d’une perte d’emploi », Insee Première n° 1848, mars 2021.