Insee Analyses Auvergne-Rhône-Alpes · Mai 2022 · n° 143

SCoT Nord-Isère : un territoire hétérogène qui se développe sous l’influence de l’agglomération lyonnaise

Le territoire du SCoT Nord-Isère se situe entre les agglomérations de Lyon, Chambéry et Grenoble (figure 1). La proximité et l’influence de Lyon lui confèrent un fort caractère périurbain. Ainsi, près de sept habitants sur dix résident dans la couronne de l’aire d’attraction de Lyon.

Le territoire s’étend sur 68 communes, regroupées au sein de trois intercommunalités. La communauté d’agglomération Porte de l’Isère (CAPI), moteur d’emplois, concentre plus de la moitié de la population, en particulier à Bourgoin-Jallieu et dans les communes de la Ville Nouvelle de l’Isle-d’Abeau. La CAPI est bordée par la communauté de communes des Collines Isère Nord (COLL’in Communauté), située à l’ouest, très dépendante de l’agglomération lyonnaise, et par celle des Vals du Dauphiné à l’est.

L’analyse des tendances démographiques et du tissu économique, comme l’étude des flux domicile-travail et des liens internes entre les intercommunalités, sont autant d’éléments qui permettent de mieux connaître le fonctionnement du territoire et ainsi répondre aux grands enjeux à venir. Ces derniers concernent particulièrement l’aménagement du territoire dans un contexte de réduction de consommation des sols (le mot du partenaire).

Afin d’appréhender ses spécificités, le ScoT Nord-Isère est comparé, dans cette étude, aux autres SCoT périurbains de France de taille comparable (méthodologie).

En 2018, 195 000 habitants vivent sur le territoire du SCoT, soit 15 % de la population iséroise. Entre 2013 et 2018, la population a augmenté de 8 300 habitants, ce qui correspond à une hausse de 0,9 % par an en moyenne. Cette augmentation est supérieure à celle de la région (+ 0,6 %) et très proche de celle du territoire de comparaison.

La croissance démographique a longtemps été portée par le mouvement de périurbanisation aux alentours de Lyon et par la création de la Ville Nouvelle. Jusque dans les années 1990, l’apport migratoire a ainsi été le principal moteur de cet essor. Depuis, le solde migratoire diminue continuellement ; il contribue à hauteur de 23 % à la hausse de la population entre 2013 et 2018 (figure 2), contre 31 % entre 2008 et 2013 et 46 % entre 1999 et 2008. Au cours des dix dernières années, la croissance démographique est donc surtout portée par l’excédent des naissances sur les décès, un solde naturel stable dans le temps, soutenu par une population jeune. La moitié de la population du territoire a en effet moins de 39 ans, contre un âge médian de 43 ans pour le territoire de comparaison, où la part de retraités est plus importante.

Le SCoT Nord-Isère apparaît donc moins attractif que le territoire de comparaison, où le solde migratoire, bien qu’en baisse depuis 20 ans, est nettement plus élevé (contribution de + 0,8 % en moyenne par an contre + 0,2 %). Le territoire de comparaison comprend en effet une majorité de SCoT situés le long du littoral, zones en forte croissance démographique. Le SCoT reste cependant un territoire bien plus attractif que le département dans lequel il s’inscrit, l’Isère, où les départs sont supérieurs aux arrivées entre 2013 et 2018.

L’évolution de la population est uniforme au sein des trois intercommunalités du SCoT, mais les leviers de cette croissance diffèrent. La périurbanisation se poursuivant aux alentours de Lyon, la hausse démographique dans l’EPCI COLL’in Communauté est portée majoritairement par l’excédent migratoire. Dans la CAPI, les arrivées depuis la Métropole de Lyon sont compensées par des départs nombreux vers les Vals du Dauphiné, reflet d’un desserrement urbain de second ordre. In fine, la croissance de la CAPI est intégralement portée par le seul solde naturel. Dans les Vals du Dauphiné, solde migratoire et solde naturel tirent la croissance démographique dans les mêmes proportions.

La hausse de la population (+ 4,4 % entre 2013 et 2018) s’est accompagnée d’une augmentation du parc de logements plus importante encore (+ 7,6 %). Le phénomène de décohabitation s’amplifie et contribue à hauteur de 35 % à la hausse du parc. Les ménages d’une seule personne sont de plus en plus nombreux et la taille des ménages diminue continuellement, accentuant la demande de logements.

Le parc locatif social est très développé au sein du SCoT Nord-Isère. Il représente 22 % des logements, soit deux fois plus que dans le territoire de comparaison (10 %) et 6 points de plus qu’en Auvergne-Rhône-Alpes. La très forte présence de l’habitat social puise son explication dans la création de la Ville Nouvelle, qui devait capter une partie de la croissance urbaine de Lyon. Pour cela, dans les années 1980, une politique volontariste sur le logement a été mise en place et des milliers de logements HLM ont été créés. Aujourd’hui, le parc social reste très important : 48 % des logements à Villefontaine, 38 % à l’Isle-d’Abeau et 25 % à Saint-Quentin-Fallavier. Ces trois villes concentrent 45 % de l’ensemble des logements sociaux du SCoT. Conséquence de la forte présence du logement social, les habitants du SCoT sont moins souvent propriétaires qu’au sein du référentiel (61 % contre 67 %) et les maisons individuelles y sont moins nombreuses.

En 2018, peu de logements sont vacants (6,8 %), un niveau légèrement inférieur à celui du territoire de comparaison (7,2 %), de l’Isère (7,7 %) et de la région (8,5 %). Dans le territoire du SCoT, le taux de vacance augmente d’ouest en est ; il est de 5,0 % dans l’EPCI COLL’in Communauté, de 6,4 % dans la CAPI et de 8,3 % dans les Vals du Dauphiné. Cette intercommunalité, plus éloignée de Lyon et hors de l’attraction de Grenoble et de Chambéry, est de fait moins attractive. La tension immobilière y est plus faible et donc la vacance plus importante. En outre, le parc de logements est plus ancien. Les logements où l’on observe le plus de vacance peuvent ne plus correspondre aux normes thermiques ou aux modes de vie actuels. L’inadéquation entre l’offre de logements et la demande y est plus forte. La vacance des petits logements est en effet importante : 34 % pour les studios et 18 % pour les 2 pièces. Ces taux sont très largement supérieurs à ceux observés dans les deux autres intercommunalités du ScoT.

Entre 2017 et 2018, le SCoT a accueilli 400 habitants de plus qu’il n’en a vu partir. Cet excédent migratoire est principalement composé de couples avec enfants et de familles monoparentales. Les arrivants proviennent surtout de la partie est du Rhône (+ 700 personnes), notamment de Saint-Priest, Lyon, Meyzieu et Mions, ce qui souligne encore le phénomène de desserrement de la métropole lyonnaise.

Les ouvriers, les cadres et les professions intermédiaires sont plus nombreux à arriver qu’à quitter le SCoT. COLL’in Communauté, par sa proximité avec Lyon, est une zone d’installation de choix pour les actifs souvent très qualifiés de l’agglomération lyonnaise. Ainsi, au jeu des arrivées et des départs, cette intercommunalité est la seule à gagner des cadres.

Face à une offre d’enseignement supérieur limitée et comme dans la zone de comparaison, les jeunes étudiants quittent le territoire pour rejoindre les pôles universitaires, Lyon et Grenoble en premier lieu (– 500 étudiants en 2018).

Enfin, le solde migratoire des retraités est équilibré dans le SCoT Nord-Isère, contrairement à ce qui se passe dans le territoire de comparaison. En effet, plusieurs SCoT qui composent ce référentiel sont situés sur le pourtour méditerranéen et sur la côte atlantique, des zones d’installation privilégiées par les retraités.

Le SCoT est bien doté en équipements (commerces, écoles, équipements de santé, de sports, de loisirs ou de culture, etc.) : 30 en moyenne par commune, contre 23 dans le territoire de comparaison. De plus, les temps d’accès y sont moindres, ce qui contribue certainement à son attractivité. L’offre d’équipements s’est étoffée entre 2015 et 2020, en lien avec l’augmentation de la population. Le nombre de médecins généralistes a toutefois diminué sur cette même période (– 3 %). Le SCoT reste cependant bien doté en comparaison au référentiel. Seulement 2 % de la population vit dans une commune en déficit de médecins généralistes (indicateur APL), contre 11 % dans le référentiel.

Situé au cœur d’un triangle Lyon-Chambéry-Grenoble, le SCoT Nord-Isère est bien desservi par le chemin de fer et l’autoroute. Ainsi, 82 % de la population est à moins de 10 minutes d’une gare et 43 % des habitants disposent d’une gare au sein de leur commune ; des proportions largement supérieures à celles du territoire de comparaison (respectivement 48 % et 29 %). Pour autant, les réseaux de transports en commun peinent à capter une population toujours très utilisatrice de la voiture : 83 % des déplacements domicile-travail se font encore en voiture, 91 % des ménages ont au moins une voiture et près d’un sur deux en a au moins deux. Seuls 8 % des déplacements se font en train, une part stable entre 2013 et 2018, principalement pour des déplacements vers Lyon. Le train est ainsi utilisé par 42 % des actifs se rendant à Lyon. L’existence d’une gare au sein de la commune renforce l’utilisation du train (52 % des actifs).

En 2018, 35 200 actifs, soit 42 % des actifs du SCoT, le quittent pour aller travailler. Ils vont principalement dans l’unité urbaine de Lyon (55 %), en particulier à Lyon même et dans sa proche agglomération (Saint-Priest, Villeurbanne, Bron, Vénissieux). Le phénomène est très marqué dans l’EPCI COLL’in Communauté où plus de six actifs sur dix quittent l’intercommunalité. Les cadres et les professions intermédiaires sont respectivement 62 % et 50 % à quitter le SCoT pour aller travailler.

Si le SCoT voit partir une part de ses actifs chaque jour, la majorité travaille au sein de celui-ci (58 %). En outre, des actifs vivant à l’extérieur viennent y travailler (27 700 en 2018). Près d’un emploi sur trois situé dans le SCoT est occupé par un actif venant de l’extérieur. Les navetteurs sortant du SCoT sont toutefois plus nombreux que les entrants (pour un solde négatif de 7 500 navetteurs). Ce solde s’est légèrement réduit depuis 2013 alors qu’il continue à se creuser dans le territoire de comparaison. Plus précisément, dans le SCoT, les navettes entrantes augmentent à un rythme plus élevé que les navettes sortantes, permettant la réduction du solde de navetteurs d’une part, et traduisant d’autre part une intensification des flux.

Le SCoT compte 91 emplois pour 100 actifs occupés. Ce déficit d’emplois est caractéristique des zones périurbaines et traduit une fonction plutôt résidentielle de ces territoires et une dépendance aux métropoles. Ce déficit est toutefois bien moindre dans le SCoT que dans le référentiel (75 emplois pour 100 actifs occupés).

Les emplois sont inégalement répartis sur le territoire, se concentrant au sein de la CAPI où leur nombre est supérieur à celui des actifs occupés qui y résident (51 200 emplois pour 45 200 actifs occupés, soit un ratio de 113 pour 100). L’intercommunalité attire donc des actifs de l’extérieur. COLL’in Communauté constitue une zone particulièrement résidentielle fortement liée à Lyon et avec peu d’activité (51 emplois pour 100 actifs occupés). Enfin, à l’est, dans les Vals du Dauphiné, le nombre d’emplois est également inférieur au nombre d’actifs occupés (70 pour 100). Ce ratio diminue au cours du temps, le caractère résidentiel du territoire des Vals du Dauphiné s’accentuant. Quand les actifs ne restent pas travailler au sein de l’intercommunalité, ils vont principalement dans la CAPI (figure 3). L’attraction de la Métropole de Lyon est ici moins forte.

Bourgoin-Jallieu et Saint-Quentin-Fallavier représentent des centres d’activités au sein du territoire. Bourgoin-Jallieu est la commune proposant le plus d’emplois (17 500, soit 23 % des emplois du SCoT). Saint-Quentin-Fallavier, qui accueille une grande partie du Parc International de Chesnes, première plateforme logistique terrestre de France et troisième européenne, compte 13 000 emplois. Les infrastructures nombreuses et la proximité de l’aéroport ont permis le développement de ce grand pôle logistique par desserrement des activités de l’aire lyonnaise. Ses emplois restent très dépendants économiquement de l’activité de la métropole.

L’attractivité de la CAPI est également visible en dehors du SCoT. Le solde de navetteurs est ainsi largement positif avec les intercommunalités des Balcons du Dauphiné et de Bièvre Isère. Ces flux dessinent le contour de la zone d’emploi de Bourgoin-Jallieu, espace où la plupart des actifs résident et travaillent, et dans lequel les établissements peuvent trouver l’essentiel de la main d’œuvre nécessaire pour occuper les emplois offerts.

Le SCoT Nord-Isère compte 76 000 emplois, pour les trois quarts dans le secteur tertiaire. Entre 2008 et 2018, ce nombre a augmenté de 8,6 % (+ 6 000 emplois), à un rythme légèrement plus élevé que dans le référentiel (+ 7,5 %). Cette hausse est très fortement portée par celle des emplois tertiaires (+ 7 600 emplois).

A contrario, l’emploi industriel a diminué de 12,4 % en 10 ans (– 1 800 emplois), une baisse similaire à celle observée dans la région. L’industrie, qui représentait 21 % des emplois du SCoT en 2008, n’en représente plus que 17 % en 2018. Le secteur industriel reste toutefois plus présent que dans le référentiel (14 % des emplois).

La réduction de l’emploi industriel s’observe de la même façon dans les trois intercommunalités du SCoT. Les Vals du Dauphiné, ayant en proportion plus d’emplois industriels et moins d’emplois tertiaires, est l’intercommunalité qui pâtit le plus de cette désindustrialisation. La hausse du nombre d’emplois y est ainsi limitée (+ 2,2 % contre + 10,4 % dans la CAPI et + 16,1 % dans l’EPCI COLL’in Communauté).

Portée par l’activité de la plate-forme logistique de Chesnes et l’implantation de grands groupes tels que Ikéa, XPO, Lidl ou Newlog, le transport et l’entreposage est une activité importante (9 % de l’emploi contre 5 % dans la région).

Les autres activités spécifiques du territoire se concentrent autour de la fabrication de textiles et de la maroquinerie (Porcher Tissages, Hermès, Serge Ferrari), ainsi que de la fabrication d’équipements électriques. Radiall à Saint-Quentin-Fallavier et Mafelec à Chimilin regroupent plus de 70 % des emplois de ce dernier secteur.

L’importance du parc locatif social ne se traduit pas par une plus grande précarité au sein du SCoT au regard du territoire de comparaison. La moitié des habitants du SCoT vivent avec moins de 22 300 euros par an, contre 22 000 euros dans le référentiel. Le taux de pauvreté est de 11,7 % dans le SCoT, très proche de celui du référentiel (11,8 %). Enfin, les 10 % des habitants les plus riches du SCoT ont un niveau de vie supérieur à 37 100 euros par an, comme dans le référentiel (37 000 euros).

Cependant, ce constat masque une nouvelle fois d’importantes disparités entre les intercommunalités du SCoT. Le taux de pauvreté est de 5,0 % pour l’EPCI COLL’in Communauté alors qu’il s’établit à 10,6 % dans les Vals du Dauphiné et à 14,0 % dans la CAPI.