Insee Analyses Provence-Alpes-Côte d'Azur · Décembre 2021 · n° 98

Pourtour de l’étang de Berre - Entre 2008 et 2018, progression de l’emploi aéronautique, recul des industries très liées au port

Le pourtour de l’étang de Berre est un territoire des Bouches-du-Rhône où sont implantés de grands établissements industriels. Depuis le début du XIXe siècle, l’industrie chimique et la métallurgie des non-ferreux y sont présents. L’industrie pétrolière s’installe dans les années 1930 et se développe fortement après la Seconde Guerre mondiale. Fruit d’une politique volontariste d’aménagement du territoire de la Délégation à l’aménagement du territoire et à l’action régionale (Datar), la zone industrialo-portuaire (ZIP) de Fos-sur-Mer voit le jour en 1968, dans la même période que les autres zones industrialo-portuaires de France (Saint-Nazaire, Le Havre, Dunkerque). Son expansion est rapidement contrariée par les chocs pétroliers. Pour autant, le pourtour de l’étang de Berre conserve encore aujourd’hui un caractère industriel marqué avec une industrie aéronautique qui se développe à partir des années 1990.

En 2018, 274 000 personnes vivent sur le pourtour de l’étang de Berre et 126 000 y travaillent. Le territoire attire des travailleurs venant de l’extérieur : il compte 1,2 fois plus d’emplois que d’actifs occupés résidents, en particulier à Fos-sur-Mer (2,1) et Marignane (1,9). Les trois territoires de comparaison offrent encore plus d’emplois par actif occupé au lieu de résidence.

Le pourtour de l’étang de Berre est spécialisé dans l’industrie, le transport-entreposage, les services administratifs et de soutien et le commerce de gros. L’industrie et ces trois secteurs connexes aux activités portuaires et industrielles représentent au total 42 % des emplois (figure 1).

Du fait notamment de ses chantiers navals, la zone de Saint-Nazaire est plus spécialisée dans l’industrie (27 % contre 21 % sur le pourtour de l’étang de Berre), ainsi que dans les services administratifs et de soutien. La zone du Havre, premier port français pour le trafic de conteneurs, est spécialisée dans le transport-entreposage (15 % des emplois contre 10 % sur le pourtour de l’étang de Berre). Les services administratifs et de soutien rassemblent 8 % des emplois et le commerce de gros 3 %.

La richesse dégagée par les établissements de l’industrie et des secteurs connexes sur le pourtour de l’étang de Berre s’élève à 5,2 milliards d’euros en 2018, soit 60 % de la richesse produite par les établissements du secteur marchand. Cette part est la plus élevée des territoires de comparaison. Dans l’industrie et les secteurs connexes, les activités très liées au port représentent 48 % de la richesse dégagée, une part moindre que dans les zones de Dunkerque (54 %) et du Havre (51 %) mais plus importante que dans celle de Saint-Nazaire (39 %).

Du fait de la forte implantation de l’aéronautique et de la présence de l’aéroport de Marignane, les activités très liées au port représentent seulement 30 % des emplois de l’industrie et des secteurs connexes sur le pourtour de l’étang de Berre contre plus de 40 % dans les zones de Dunkerque et du Havre (figure 2 et figure 3). Dans les activités très liées au port, les industries sidérurgique et chimique ainsi que l’entreposage rassemblent le plus grand nombre d’emplois.

Entre 2008 et 2018, l’emploi total (salarié et non salarié) stagne sur le pourtour de l’étang de Berre alors qu’il diminue dans les zones du Havre et de Dunkerque et augmente à Saint-Nazaire. Entre 1999 et 2008, l’emploi avait davantage progressé sur le pourtour de l’étang de Berre (+ 1,8 % par an) que dans les territoires de comparaison.

Dans l’industrie et les secteurs connexes, l’emploi salarié s’est accru de 0,3 % par an entre 2008 et 2018 sur le pourtour de l’étang de Berre, malgré le recul des activités très liées au port (- 920 salariés sur la période) (figure 4). Dans les activités très liées au port, la baisse est moins forte qu’au Havre ou Saint-Nazaire. L’emploi recule fortement dans la fabrication d'autres produits chimiques organiques de base, le raffinage de pétrole et la sidérurgie. Ces trois activités perdent également des emplois dans les autres territoires, la baisse étant plus prononcée dans l’industrie chimique sur le pourtour de l’étang de Berre. L’emploi progresse dans les activités liées à l’emploi (placement de main d’œuvre, intérim), particulièrement dynamiques sur le pourtour de l’étang de Berre, l’entreposage et stockage frigorifique et non frigorifique, l'affrètement et organisation des transports et la manutention portuaire.

Dans les autres activités, la construction aéronautique et spatiale, fortement implantée et en essor également sur les territoires de comparaison, le nettoyage des bâtiments, les services auxiliaires des transports aériens sont très dynamiques tandis que les effectifs des activités de sécurité privée et du transport ferroviaire interurbain de voyageurs diminuent.

La crise liée à l’épidémie de Covid-19 pourrait infléchir ces tendances (encadré 1).

Hors industrie et secteurs connexes, les relais de croissance sur le pourtour de l’étang de Berre se sont montrés limités. Entre 2008 et 2018, l’emploi salarié progresse néanmoins dans l’action sociale (+ 710) et l’administration publique (+ 560).

En 2018, dans l’industrie et les secteurs connexes, les niveaux de qualification des salariés sont plus élevés sur le pourtour de l’étang de Berre que dans les territoires de comparaison. Ainsi, 39 % des salariés possèdent un diplôme au moins de niveau bac + 2 (entre 32 % et 34 % dans les territoires de comparaison) et 18 % sont cadres (moins de 15 % dans les territoires de comparaison). La catégorie socioprofessionnelle la plus représentée est celle des ouvriers qualifiés (33 %). Entre 2008 et 2018, comme dans les autres territoires, les niveaux de formation des salariés s’élèvent : en 2008, 30 % des salariés étaient titulaires d’un bac + 2 ou plus et 16 % étaient cadres.

En lien avec le niveau de diplôme et de qualification, en 2018, le salaire annuel net médian (28 570 euros) est élevé dans l’industrie et les secteurs connexes, particulièrement dans les activités très liées au port. Comme dans les territoires de comparaison, la rémunération annuelle nette médiane dans les activités très liées au port (31 560 euros) dépasse celle des autres activités (27 180 euros).

En 2018, dans l’industrie et les secteurs connexes, la moitié (52 %) des effectifs salariés appartiennent à des grandes entreprises. Cette part est plus élevée que dans les territoires de comparaison (de 39 % au Havre à 50 % à Dunkerque).

Dans les activités très liées au port, notamment la sidérurgie et la chimie, les plus grands groupes perdent des effectifs entre 2008 et 2018. Dans les activités non portuaires, les groupes aéronautiques gagnent des emplois.

Sur le pourtour de l’étang de Berre, dans les secteurs étudiés, 22 % des salariés dépendent d’un centre de décision situé à l’étranger. C’est moins qu’à Dunkerque (43 %) mais plus qu’au Havre (18 %) ou Saint-Nazaire (15 %). Les activités très liées au port sont les plus concernées (50 %). C’est particulièrement le cas pour la chimie, la sidérurgie et le raffinage. Les activités moins liées au port sont nettement moins dépendantes de l’étranger (10 % sur le pourtour de l’étang de Berre).

Le pourtour de l’étang de Berre rassemble 16 % des emplois des Bouches-du-Rhône et 34 % de ses emplois industriels mais contribue à 65 % du potentiel de réchauffement global (PRG) du département, le plaçant ainsi parmi les dix départements français émettant le plus de gaz à effet de serre par habitant.

Dans les activités fortement émettrices, telles que la sidérurgie et la pétrochimie présentes à Fos-sur-Mer et Martigues Lavéra, les enjeux environnementaux deviennent cruciaux pour les grands groupes. Afin d’aider les industriels à diminuer de manière significative leurs rejets de gaz à effet de serre, le pourtour de l’étang de Berre bénéficiera du Fonds de transition juste de l’Union européenne (encadré 2).

Hors gaz à effet de serre, les émissions industrielles polluantes sont également élevées. Le pourtour de l’étang de Berre génère 95 % des émissions de monoxyde de carbone (CO) de l'industrie des Bouches-du-Rhône et plus de 70 % des émissions industrielles d’oxydes d’azote (NO_X) ou de dioxyde soufre (SO₂). Il génère 40 % des émissions industrielles des composés organiques volatils non méthaniques (COV_nm), tel le benzène.

Entre 2007 et 2018, les émissions polluantes ont fortement diminué. Le potentiel de réchauffement global total émis sur le pourtour de l’étang de Berre a baissé d’un quart, soit deux fois plus que sur le reste du département. Les émissions industrielles de NO_X ont baissé d’un tiers. Grâce à l’amélioration des processus industriels réalisée par les grands établissements de la zone et au recul de certaines activités, les émissions industrielles de SO₂ ont diminué de 70 % et celles des COV_nm de 60 % sur la période.