Insee
Insee Analyses Grand Est · Mai 2021 · n° 133
Insee Analyses Grand EstSurmortalité dans le Grand Est de mars 2020 à mars 2021 : la deuxième vague moins meurtrière que la première

Corinne Challand, Olivasoa Razafindramanana (Insee)

Sur l’année écoulée, de mars 2020 à mars 2021, l’excès de mortalité dans le Grand Est a atteint 18,2 % par rapport aux cinq années précédentes. Si une partie découle du vieillissement de la population, cette surmortalité a été importante pendant les deux vagues épidémiques dues au Covid-19, qui se sont déroulées aux mêmes moments dans quasiment toutes les régions françaises, ainsi que dans les pays voisins. Ces deux épisodes ont particulièrement touché les plus de 70 ans, avec une majorité de plus de 80 ans, surtout ceux vivant en institution. Les moins de 60 ans ont été peu affectés. L’excès de mortalité concerne davantage les hommes que les femmes. La densité de population des communes ainsi que le nombre moyen de personnes par logement semblent jouer un rôle dans cette surmortalité.

Insee Analyses Grand Est
No 133
Paru le :Paru le27/05/2021

Dans le Grand Est, 62 400 décès ont été enregistrés entre le 1er mars 2020 et le 28 février 2021, contre 52 800 décès en moyenne par an pour les cinq années précédentes (2015 à 2019), soit un de 18,2 %, ce qui place la région en troisième position derrière l’Île-de-France (+ 22,5 %) et Auvergne-Rhône-Alpes (+ 20,1 %).

Deux périodes de surmortalité importante

Il existe deux périodes de surmortalité importante : une première vague très intense sur moins de dix semaines, au printemps 2020, avec un pic enregistrant 2,2 fois plus de décès que lors des semaines correspondantes de la période de référence, et une deuxième vague, débutant mi-octobre, moins haute mais plus longue (figure 1a).

Durant la première période de surmortalité, entre le 2 mars et le 10 mai 2020 (semaines 10 à 19), l’excès de mortalité a été de 48,7 %, soit 5 100 décès supplémentaires ; durant la deuxième période, entre le 12 octobre 2020 et le 28 février 2021 (semaines 42 à 8), il a été de 19,0 %, soit 4 100 décès supplémentaires. Dans la région, cette deuxième période est d’un niveau équivalent à celle de la France métropolitaine, contrairement à celle du printemps 2020.

Figure 1aIndice de surmortalité par semaine

Indice de surmortalité par semaine - Lecture : durant la semaine du 15 au 21 février 2021 (semaine 7), la mortalité dans le Grand Est est 1,16 fois supérieure à la mortalité moyenne observée en semaine 7 les cinq années précédentes (1,08 en France métropolitaine).
Semaine France métropolitaine Grand Est
2 mars 2020 0,96 0,92
1,05 1,16
1,19 1,57
1,40 2,05
1,66 2,22
1,58 1,95
1,40 1,67
1,18 1,26
1,05 1,15
4 mai 1,04 1,06
1,02 1,02
1,06 1,05
1,02 1,03
1,02 1,02
1,03 1,06
1,01 1,07
1,08 1,07
29 juin 0,94 0,86
1,01 0,98
0,98 0,95
1,02 0,97
1,08 1,15
3 août 1,05 1,00
1,18 1,17
1,02 1,03
1,03 1,00
1,06 1,09
1,09 1,03
1,11 1,02
21 sept. 1,03 0,91
1,09 1,01
1,07 1,00
1,11 0,99
19 oct. 1,23 1,12
1,31 1,14
1,39 1,24
1,37 1,30
1,32 1,21
1,28 1,25
30 nov. 1,25 1,35
1,22 1,27
1,15 1,30
1,10 1,29
4 janv. 21 1,04 1,15
1,08 1,17
1,15 1,20
1,13 1,13
1,10 1,10
1,07 1,11
15 fév. 1,08 1,16
1,02 0,95
0,99 0,95
  • Note : rapport entre le nombre de décès observés chaque semaine entre le 2 mars 2020 et le 7 mars 2021 et le nombre moyen de décès des années 2015 à 2019.
  • Lecture : durant la semaine du 15 au 21 février 2021 (semaine 7), la mortalité dans le Grand Est est 1,16 fois supérieure à la mortalité moyenne observée en semaine 7 les cinq années précédentes (1,08 en France métropolitaine).
  • Champ : France, décès répertoriés à la commune de résidence.
  • Source : Insee, statistiques de l'état civil, fichier du 26 mars 2021.

Figure 1aIndice de surmortalité par semaine

  • Note : rapport entre le nombre de décès observés chaque semaine entre le 2 mars 2020 et le 7 mars 2021 et le nombre moyen de décès des années 2015 à 2019.
  • Lecture : durant la semaine du 15 au 21 février 2021 (semaine 7), la mortalité dans le Grand Est est 1,16 fois supérieure à la mortalité moyenne observée en semaine 7 les cinq années précédentes (1,08 en France métropolitaine).
  • Champ : France, décès répertoriés à la commune de résidence.
  • Source : Insee, statistiques de l'état civil, fichier du 26 mars 2021.

Le Haut-Rhin, la Meuse et les Vosges, davantage touchés

Cet excès de mortalité est variable selon les départements de la région. Ainsi, de mars 2020 à mars 2021, il est supérieur de 26 % à la moyenne quinquennale dans le Haut-Rhin, de 16 à 21 % dans les départements lorrains, dans le Bas-Rhin et en Haute-Marne, et de 11 à 13 % dans les autres départements champenois (figure 1b).

C’est dans le Haut-Rhin que la surmortalité atteint le niveau le plus élevé : 2,5 fois plus de décès en mars 2020 que la moyenne des cinq années précédentes, et jusqu’à 4 fois plus au cours de la semaine 13 (23-29 mars) ; en revanche, l’intensité de surmortalité est beaucoup plus faible durant la deuxième période dans ce département.

Dans les Vosges, l’excès de mortalité dépasse les 60 % pendant plusieurs mois : en mars et avril, puis en décembre 2020. Le fait que les personnes âgées de 75 ans et plus vivent un peu plus souvent en maisons de retraite y a sans doute contribué ; celles-ci sont classées parmi les collectivités les plus à risque de transmission et de diffusion du Sars-CoV-2 par Santé publique France (12 % des 75 ans et plus résidant dans les Vosges vivent en communauté, contre 11 % pour le Grand Est et 10 % pour la France métropolitaine). La part des décès en établissement pour personnes âgées (EPA) entre mars 2020 et mars 2021 y est également un peu plus élevée que la moyenne régionale (19 % contre 16 %).

Dans les autres départements, l’évolution de la surmortalité durant ces périodes se distingue assez peu du reste de l’année. Cependant, dans les départements peu peuplés, les courbes doivent être interprétées avec précaution, en raison d'un effet "petit nombre" : un faible nombre de décès hebdomadaires sur 2015-2019 peut expliquer de fortes fluctuations en 2020 ou 2021.

En dehors de ces deux périodes, aucune surmortalité n’est observée, sauf localement lors de la canicule du mois d’août 2020, pendant les semaines 31 et 33 (celles du 27 juillet et du 10 août), avec à chaque fois 15 % de décès supplémentaires dans la région, bien visibles dans les EPA. Cela a particulièrement touché la Meurthe-et-Moselle et la Meuse, mais c’est sans commune mesure avec l’excès dans les Hauts-de-France (+ 47 % d’excès de mortalité en semaine 33).

De nombreux décès de personnes âgées, à l’hôpital ou en clinique

Entre 2015 et 2019, 76 % des décès toutes causes confondues concernent des personnes âgées de 70 ans ou plus. De mars 2020 à mars 2021, cette proportion frôle les 80 %. La surmortalité est en effet particulièrement forte dans cette classe d’âges (+ 23,6 % sur l’ensemble de la période), tandis qu’elle reste relativement stable chez les 60-69 ans (+ 4,8 %) ; on constate même une légère sous-mortalité chez les moins de 60 ans (- 3,7 %) (figure 2).

C’est donc dans les EPA que l’on observe les plus fortes surmortalités : 96 % et 15 % pendant les première et deuxième vagues, soit 40 % sur toute la période. Les décès à domicile et à l’hôpital ont augmenté respectivement de 23 % et 12 % sur les douze mois par rapport à la moyenne quinquennale 2015-2019. Ce sont dans ces trois lieux que la surmortalité pendant les vagues épidémiques s’avère la plus marquante (figure 3a) : premièrement les hôpitaux, où le nombre de décès a progressé de 2 200 et 1 800 personnes par vague, suivis, à parts égales, des EPA et du domicile (entre 1 000 et 1 400 décès en plus par lieu et par vague).

En effectif, les décès excédentaires concernent les 80 ans ou plus. C’est cette classe d’âges qui a payé le plus lourd tribut durant l’épidémie de coronavirus ; elle représente les deux tiers de l’excès de mortalité, le dernier tiers se rapportant aux 70-79 ans, les autres tranches d’âges ayant été peu ou pas touchées (figure 3b).

La surmortalité concerne un peu plus les hommes : 4 à 5 points d’écart entre hommes et femmes, quelle que soit la vague (figure 2). Cette surmortalité masculine est encore plus importante à partir de 70 ans : elle est en effet de 67 % en mars-avril et de 31 % d’octobre à février, soit plus de 13 points d’écart avec les femmes de la même tranche d’âges (+ 53 % et + 19 %). Le surcroît de décès chez les femmes de 60 à 69 ans dépasse celui des hommes au printemps, ce qui n’est plus le cas au cours de l’automne-hiver 2020-2021.

Figure 2Excès de mortalité

En %
Excès de mortalité (En %) - Lecture : entre le 12 octobre 2020 et le 28 février 2021, il y a eu 4 140 décès de plus par rapport à la moyenne observée en décembre les cinq années précédentes, soit une augmentation de 19 %.
Vague 1 Vague 2 Période d’étude
du 2 mars au 10 mai 2020 du 12 octobre 2020 au 28 février 2021 du 1er mars 2020 au 28 février 2021
Excès de mortalité 5 050 (+ 48,7 %) 4 140 (+ 19,0 %) 9 630 (+ 18,2 %)
Hommes + 50,6 + 21,8 + 19,3
Femmes + 46,7 + 16,3 + 17,2
Âge
moins de 60 ans + 1,4 - 4,5 - 3,7
60 à 69 ans + 21,0 + 5,6 + 4,8
70 à 79 ans + 61,8 + 28,4 + 26,7
80 ou plus + 58,9 + 23,1 + 22,7
Lieu de décès
Hôpital, clinique + 36,6 + 6,1 + 11,6
Maison de retraite + 96,0 + 14,6 + 40,1
Logement + 46,1 + 34,5 + 22,6
Autres + 66,7 + 23,9 + 16,8
  • Note : évolution du nombre de décès observés par rapport au nombre moyen de décès des années 2015 à 2019.
  • Lecture : entre le 12 octobre 2020 et le 28 février 2021, il y a eu 4 140 décès de plus par rapport à la moyenne observée en décembre les cinq années précédentes, soit une augmentation de 19 %.
  • Champ : France, décès répertoriés à la commune de résidence.
  • Source : Insee, statistiques de l'état civil, fichier du 26 mars 2021.

Figure 3aSurmortalité et contribution des lieux de décès

%
Surmortalité et contribution des lieux de décès (%) - Lecture : pendant la 2e vague épidémique, la surmortalité a été de 19 %. Les décès à l’hôpital ont contribué pour près de la moitié à cette surmortalité. Les « autres lieux » comprennent également les lieux de décès « non renseignés ».
Vague 1 Vague 2
Hôpital, clinique 21,23 8,43
Maison de retraite 13,36 4,79
Domicile 10,39 5,40
Autres 3,68 0,36
  • Note : évolution du nombre de décès observés par rapport au nombre moyen de décès des années 2015 à 2019.
  • Lecture : pendant la 2e vague épidémique, la surmortalité a été de 19 %. Les décès à l’hôpital ont contribué pour près de la moitié à cette surmortalité. Les « autres lieux » comprennent également les lieux de décès « non renseignés ».
  • Champ : France, décès répertoriés à la commune de résidence.
  • Source : Insee, statistiques de l'état civil, fichier du 26 mars 2021.

Figure 3aSurmortalité et contribution des lieux de décès

  • Note : évolution du nombre de décès observés par rapport au nombre moyen de décès des années 2015 à 2019.
  • Lecture : pendant la 2e vague épidémique, la surmortalité a été de 19 %. Les décès à l’hôpital ont contribué pour près de la moitié à cette surmortalité. Les « autres lieux » comprennent également les lieux de décès « non renseignés ».
  • Champ : France, décès répertoriés à la commune de résidence.
  • Source : Insee, statistiques de l'état civil, fichier du 26 mars 2021.

Une surmortalité dans les communes densément peuplées, surtout au plus fort de l’épidémie

Dans la région, au printemps 2020, l’excès de mortalité s’avère d’autant plus important que la commune est . En effet, la surmortalité est de 60 % dans les communes densément peuplées et de 15 % dans celles qui sont très peu denses. Il en est de même en Île-de-France (91 % et 13 %) ou en Bourgogne-Franche-Comté (51 % et 7 %). Ce n’est en revanche plus le cas lors de la deuxième vague : dans laquelle l’excès de mortalité n’a pas atteint les niveaux du printemps. En effet, dans le Grand Est, ce sont les communes les plus denses qui présentent alors le taux le plus faible (19 %) et les communes de densité intermédiaire qui ont le taux le plus élevé (24 %). En Île-de-France et en Bourgogne-Franche-Comté, la surmortalité est également la plus forte dans les communes de densité intermédiaire (respectivement 21 % et 37 %) à l’automne-hiver 2020-2021. Par contre, le constat fait sur la première vague reste vrai lors de la deuxième vague pour la région la plus durement touchée, Auvergne-Rhône-Alpes : l’excès de mortalité est de 48 % pour les communes les plus densément peuplées, et ce taux décroît en fonction de la densité.

La surmortalité est plus importante dans les communes où les logements comptent en moyenne plus de deux personnes, et cela se vérifie pour les deux vagues. La surmortalité est d’autant plus forte que les logements sont plus « peuplés » ; elle dépasse la moyenne régionale d’au moins 10 points dans les communes où le nombre de personnes par ménage est supérieur à 2,6 au niveau de la commune (+ 77 % au printemps et + 36 % en automne-hiver).

La mortalité due au Covid-19 toujours présente pendant l’hiver

Un excédent de mortalité apparaît en janvier et février 2021, alors que ces mois connaissent généralement un surcroît de décès pour les personnes âgées de 80 ans et plus. Ce dernier peut être assez important certaines années, comme ce fut le cas durant l’hiver 2016-2017 (figure 4). Les infections respiratoires aiguës dues aux pneumonies, grippes et autres virus sont en effet plus fréquentes de décembre à mars, d’où une surmortalité de 20 à 35 % durant cette période, par rapport aux mois d’été comptant le moins de décès (juin et septembre). Cependant, les décès dus au Covid existent toujours, ce qui supposerait une moindre présence des autres infections respiratoires cette année. Le nombre de décès semble décroître à partir de fin février 2021, comme c’est habituellement le cas.

Figure 4Décès quotidiens dans le Grand Est depuis 2015 par classe d’âges

  • Champ : France, décès répertoriés à la commune de résidence.
  • Source : Insee, statistiques de l'état civil, fichier du 26 mars 2021 pour les années 2020 et 2021.

Une part de la hausse est due au vieillissement de la population

Chaque année, deux effets jouent sur l’évolution du nombre de décès : le vieillissement de la population, et les conditions de mortalité, qui fluctuent d’une année sur l’autre. Ainsi, des phénomènes exceptionnels, comme les épidémies de grippe ou de Covid, ou la canicule, augmentent le nombre de décès, tandis que des gains en espérance de vie continuent d’être réalisés, principalement en raison d’une amélioration des traitements des cancers et des maladies de l’appareil respiratoire. L’effet du vieillissement de la population sur la mortalité se fait en calculant le nombre de décès « attendus », selon les taux de mortalité, constants d’une année sur l’autre, pour chaque tranche d’âges. La différence entre le nombre de décès attendus et le nombre de décès réels est attribuée aux conditions de mortalité. Ainsi, sur les 9 500 décès supplémentaires enregistrés entre mars 2020 et mars 2021 par rapport à la même période de l’année précédente, 1 100 peuvent s’expliquer par l’augmentation du nombre de personnes âgées, les autres décès étant dus à d’autres facteurs (figure 5). Néanmoins, certains d’entre eux, comme l’obésité, la sédentarité, la consommation d’alcool, le tabagisme, voire la pollution, sont des facteurs qui touchent le Grand Est davantage que d’autres régions, et constituent des facteurs de risque associés aux évolutions sévères du Covid-19.

Figure 5Évolution annuelle des décès dans le Grand Est décomposée selon les effets du vieillissement et des conditions de mortalité

Évolution annuelle des décès dans le Grand Est décomposée selon les effets du vieillissement et des conditions de mortalité - Lecture : entre mars 2013 et mars 2014, deux effets contraires ont joué sur l’évolution du nombre de décès. Pris seul, le vieillissement de la population aurait dû être à l’origine de 1 489 décès supplémentaires, mais les conditions de mortalité favorables ont évité 2 019 décès. Il en résulte 530 décès de moins qu’entre mars 2012 et mars 2013.
Effet des conditions de mortalité Effet du vieillissement de la population Variation du nombre de décès par rapport à l’année précédente
2013-14 -2019 1489 -530
2014-15 60 1431 1491
2015-16 -1431 1515 84
2016-17 1572 1480 3052
2017-18 -3750 1518 -2232
2018-19 1032 1189 2221
2019-20 -2273 1280 -993
2020-21 8424 1091 9515
  • Note : chaque colonne comptabilise les décès de mars à mars de l’année suivante.
  • Lecture : entre mars 2013 et mars 2014, deux effets contraires ont joué sur l’évolution du nombre de décès. Pris seul, le vieillissement de la population aurait dû être à l’origine de 1 489 décès supplémentaires, mais les conditions de mortalité favorables ont évité 2 019 décès. Il en résulte 530 décès de moins qu’entre mars 2012 et mars 2013.
  • Source : Insee, état civil, estimations de population.

Figure 5Évolution annuelle des décès dans le Grand Est décomposée selon les effets du vieillissement et des conditions de mortalité

  • Note : chaque colonne comptabilise les décès de mars à mars de l’année suivante.
  • Lecture : entre mars 2013 et mars 2014, deux effets contraires ont joué sur l’évolution du nombre de décès. Pris seul, le vieillissement de la population aurait dû être à l’origine de 1 489 décès supplémentaires, mais les conditions de mortalité favorables ont évité 2 019 décès. Il en résulte 530 décès de moins qu’entre mars 2012 et mars 2013.
  • Source : Insee, état civil, estimations de population.

Des vagues d’intensité variable chez les voisins étrangers

Si les vagues de surmortalité du printemps se sont déroulées de manière synchrone, accompagnées de mesures similaires (confinement, fermeture des écoles et des magasins non essentiels, forte incitation au télétravail, restrictions de circulation, etc.), il n’en est plus de même pour celles de l’automne-hiver. Elles débutent mi-octobre 2020 pour toutes les régions étudiées, mais s’achèvent plus ou moins rapidement selon les cas : dès mi-décembre en Wallonie et à Bruxelles, puis à partir de début février 2021 pour les autres (fin du mois pour la région Grand Est). La Wallonie et la Flandre ont connu une première vague équivalente à celle du Grand Est, avec des semaines comptant deux fois plus de décès que lors des années 2015-2019, tandis que Bruxelles suivait la courbe de l’Île-de-France, avec des semaines comptant plus de trois fois plus de décès qu’en moyenne. Le Luxembourg et la Suisse connaissent au printemps 2020 un excédent de mortalité de 50 %, tandis qu’il se situe entre 10 et 30 % dans les Länder du Bade-Wurtemberg, de la Sarre et de Rhénanie Palatinat.

Il n’y a plus de surmortalité après le 10 mai, et ce jusqu’à la mi-août. Comme c’est le cas en particulier dans les Hauts-de-France, un excès de mortalité apparaît aux alentours de la semaine 33 en raison de la canicule, dans les régions belges (60 % à Bruxelles ou en Flandre et 47 % en Wallonie), en Nord-Rhénanie-Westphalie, Sarre, Rhénanie-Palatinat (20 à 30 %), ainsi qu’au Luxembourg (34 %).

La situation se dégrade à nouveau à partir de la mi-octobre, avec l’arrivée de la deuxième vague. Celle-ci est plus importante que la première en Suisse, en Wallonie (jusqu’à 130 % d’excès de mortalité au cours de la semaine du 2 novembre comparés à la période de référence, contre 110 % lors du pic de la première vague), au Luxembourg (pic épidémique avec 80 % de surmortalité) et dans certains Länder allemands comme le Bade-Wurtemberg ou la Rhénanie-Palatinat (pic épidémique avec 30 à 40 % d’excès de mortalité). Les pics sont par contre moins élevés que lors du printemps en Flandre, ou à Bruxelles, tout en restant importants (60 à 90 % de surmortalité certaines semaines).

Néanmoins, les records hebdomadaires d’excès de mortalité ne donnent pas forcément la mesure de la surmortalité globale en fin de vague ou pour toute la première année de pandémie (de mars à mars) : très faible dans les Länder voisins (5 à 7 %), la surmortalité est un peu plus forte au Luxembourg, en Flandre et en Suisse (entre 13 et 15 %) et atteint un niveau plus élevé en Wallonie et dans la région de Bruxelles (18 et 20 %).

Chez nos voisins aussi, les décès ont concerné les plus âgés. L’excès de mortalité des personnes de 65 ans ou plus est très marquant à Bruxelles, en Wallonie et dans les cantons situés à l’ouest et à l’est de la Suisse (figure 6). Les Länder allemands ont été épargnés, à l’exception de la Saxe (à l’est). La surmortalité touche là aussi davantage les hommes que les femmes.

Figure 6Indice de surmortalité des personnes âgées de 65 ans ou plus

  • Note : rapport entre le nombre de décès observés entre le 2 mars 2020 et le 28 février 2021 et le nombre moyen de décès survenus entre 2015 et 2019 (2016 et 2019 pour l’Allemagne).
  • Sources : Insee, Destatis, Statbel, OFS, Eurostat (Luxembourg).
Publication rédigée par :Corinne Challand, Olivasoa Razafindramanana (Insee)

Sources

Cette étude utilise les données de décès recensés par les services de l’État civil entre 2015 et 2021. Les statistiques diffusées sont provisoires pour les années 2020 et 2021. Elles sont issues du fichier en date du 26 mars 2021 et l’analyse s’arrête au 28 février 2021. Les décès sont comptabilisés dans la commune de résidence du défunt et non au lieu de décès, contrairement aux données mises en ligne chaque semaine.

Définitions

L’indice de surmortalité, ou excès de mortalité, est le rapport entre le nombre de décès observés entre mars 2020 et mars 2021 et le nombre moyen de décès durant les années 2015 à 2019 (période de comparaison). Comparer à une valeur moyenne sur cinq ans permet d’atténuer notamment les effets de la mortalité liée à la grippe, très variable d’une année à l’autre. Un indice supérieur à 1 correspond à une augmentation du nombre de décès, alors qu’un indice inférieur à 1 correspond à une diminution de ce nombre ; l’indice est égal à 1 lorsque le nombre de décès attendus est égal au nombre de décès observés.

Cet indice ne corrige ni les effets de taille de population, ni les effets de structure. Ainsi, l’augmentation du nombre de décès d’une population peut être en partie liée à l’augmentation du nombre de personnes. Toutefois, les variations en taille et en structure ne sont vraisemblablement pas assez importantes pour affecter les résultats.

La grille communale de densité permet de comparer le degré d’urbanisation des pays européens, avec une méthodologie homogène et relativement indépendante des découpages administratifs de chaque pays. Elle s’appuie sur une grille de carreaux de 1 km², dans lesquels la population est calculée à partir des données géolocalisées issues, en France, des fichiers démographiques sur les logements et les individus (Fideli 2018), base de données issue principalement des fichiers fiscaux liés à la taxe d’habitation. Les communes sont caractérisées en fonction de la répartition de la population sur leur territoire. Plus la population est concentrée et nombreuse, plus la commune est considérée comme dense.

Pour en savoir plus

Le Minez S., Roux V., « 2020 : une hausse des décès inédite depuis 70 ans », Insee Première, n° 1847, mars 2021.

Pison G., Meslé F., « Ouvrir dans un nouvel ongletFrance 2020 : 68 000 décès supplémentaires imputables à l’épidémie de Covid-19 », Ined, Population et société, n° 587, mars 2021.

Hecker I., Pic V., Breton D., Gagnon A., « Le Grand Est : deuxième région française la plus touchée par l’épidémie de Covid-19 », Insee Analyses Grand Est, n° 115, juillet 2020.

ARS Grand Est, « Ouvrir dans un nouvel ongletProjet régional de santé 2018-2027, état de santé de la population et état de l’offre de la région Grand Est », avril 2017.

Papon S., Robert-Bobée I., « Décès en 2020 : hausse plus forte pour les personnes nées à l’étranger que pour celles nées en France, surtout en mars-avril », Insee Focus, n° 231, avril 2021.