Insee Flash Nouvelle-AquitaineLe développement des micro‑entreprises et des PME alimente aussi la croissance des ETI et des grandes entreprises

Nadia Wojciechowski, Stéphane Levasseur (Insee)

La progression de l’emploi dans les grandes entreprises et les ETI s’explique par la croissance des PME et des ETI qui changent ainsi de catégorie, mais aussi par les créations de nouveaux établissements. Dans les micro-entreprises et les PME, ce sont les établissements pérennes qui créent des emplois. Ainsi, 22 000 emplois salariés marchands supplémentaires sont créés en Nouvelle-Aquitaine de 2008 à 2017.

Insee Flash Nouvelle-Aquitaine
No 63
Paru le :Paru le18/02/2021
Nadia Wojciechowski, Stéphane Levasseur (Insee)
Insee Flash Nouvelle-Aquitaine No 63- Février 2021

En Nouvelle-Aquitaine, les 360 000 établissements marchands, hors agriculture, emploient 1,2 million de salariés en 2017, soit 22 000 salariés de plus qu'en 2008. Cette progression de l’emploi de 0,2 % en moyenne annuelle est trois fois supérieure à celle observée en France.

Cette hausse s’explique par les entrées d’établissements (créations et arrivées en provenance d’autres régions), qui ont généré plus d’emplois que les sorties (disparitions et départs vers d’autres régions) ; ce solde de 27 000 emplois est appelé « renouvellement » (figure 1). Les établissements « pérennes », c’est-à-dire présents au cours de la période 2008 à 2017, ont perdu 7 000 emplois. Enfin, les changements de champ (secteur) ont un effet négligeable sur l’emploi.

Figure 1Le renouvellement dans les ETI et les GE contribue à la croissance de l'emploi régionalÉvolution de l’emploi par phénomène entre 2008 et 2017 et solde de l’emploi, par catégorie d’entreprise en Nouvelle-Aquitaine

Le renouvellement dans les ETI et les GE contribue à la croissance de l'emploi régional - Lecture : les changements de catégorie d’entreprise ont entraîné une perte de 31 400 emplois dans les micro-entreprises entre 2008 et 2017. Le renouvellement des établissements (solde des entrées et des sorties) a pour effet une diminution de 2 600 emplois. Les micro-entreprises pérennes sur la période ont créé 9 100 emplois. Les changements de champ ont un effet négligeable sur l’emploi. Ces mouvements se soldent par une diminution de 25 000 emplois dans les micro-entreprises.
Catégorie Évolutiondes pérennes Renouvellement Changementde catégorie Changementde champ Solde d’emplois
Ensemble -6 878 27 412 0 1 456 21 990
Grandes entreprises -19 244 11 643 35 823 -192 28 030
ETI -10 188 14 940 19 069 417 24 238
PME 13 420 3 470 -23 487 1 257 -5 340
Micro-entreprises 9 134 -2 641 -31 405 -26 -24 938
  • Lecture : les changements de catégorie d’entreprise ont entraîné une perte de 31 400 emplois dans les micro-entreprises entre 2008 et 2017. Le renouvellement des établissements (solde des entrées et des sorties) a pour effet une diminution de 2 600 emplois. Les micro-entreprises pérennes sur la période ont créé 9 100 emplois. Les changements de champ ont un effet négligeable sur l’emploi. Ces mouvements se soldent par une diminution de 25 000 emplois dans les micro-entreprises.
  • Champ : établissements marchands non agricoles
  • Source : Insee, Clap, Flores, Lifi

Figure 1Le renouvellement dans les ETI et les GE contribue à la croissance de l'emploi régionalÉvolution de l’emploi par phénomène entre 2008 et 2017 et solde de l’emploi, par catégorie d’entreprise en Nouvelle-Aquitaine

  • Lecture : les changements de catégorie d’entreprise ont entraîné une perte de 31 400 emplois dans les micro-entreprises entre 2008 et 2017. Le renouvellement des établissements (solde des entrées et des sorties) a pour effet une diminution de 2 600 emplois. Les micro-entreprises pérennes sur la période ont créé 9 100 emplois. Les changements de champ ont un effet négligeable sur l’emploi. Ces mouvements se soldent par une diminution de 25 000 emplois dans les micro-entreprises.
  • Champ : établissements marchands non agricoles
  • Source : Insee, Clap, Flores, Lifi

Globalement, l’emploi progresse dans (ETI), avec un solde positif de 52 000 emplois salariés, tandis que (PME) en perdent 30 000.

Grandes entreprises et ETI, un dynamisme qui s’explique par le développement des micro-entreprises et des PME

Si l’emploi progresse fortement dans les grandes entreprises et les ETI, cela s’explique surtout par les changements de catégorie, c’est-à-dire soit par le franchissement d’un seuil (emploi, chiffres d'affaires, bilan), soit par le rachat par une entreprise de taille supérieure. En effet, pour développer de nouvelles activités, ces catégories d'entreprises ont souvent tendance à investir dans des sociétés ayant les compétences attendues, à travers des rachats, acquisitions-fusions, et intégrations de ces entreprises souvent de taille plus modeste.

Ainsi, les PME présentes en 2008 et qui se sont développées ont apporté 50 000 emplois en 9 ans dans les ETI. Cela représente 32 000 emplois pour les ETI devenues des grandes entreprises, pour ce que l’on pourrait qualifier de « croissance importée ».

Aussi les pertes d’emplois dans les micro-entreprises et les PME, observées également à l’échelle de la France, sont-elles en trompe-l’œil. Elles résultent en grande partie du développement de ces entreprises, qui les font basculer dans une autre catégorie d’entreprise. Les micro-entreprises et les PME créent en revanche des emplois par l’intermédiaire des établissements pérennes. De même, le renouvellement des établissements permet quelques créations d’emplois dans les PME. Il entraîne cependant des pertes dans les micro-entreprises, mais d’ampleur limitée sur la période.

Le « renouvellement » des établissements a toutefois généré environ 12 000 emplois dans les grandes entreprises et 15 000 dans les ETI. Cette progression importante est cependant atténuée par des pertes d'emplois dans les établissements « pérennes » : 19 000 emplois sont perdus dans les grandes entreprises et 10 000 dans les ETI.

48 000 emplois supplémentaires dans le tertiaire marchand

Dans le tertiaire marchand, toutes catégories d’entreprise confondues, la dynamique de créations d’établissements a permis de générer 80 % des 48 000 créations nettes d’emplois du secteur. De plus, grâce à l’apport des autres catégories d’entreprise, les grandes entreprises et les ETI enregistrent respectivement 14 000 et 24 000 emplois supplémentaires, tandis que la perte d’emplois dans les micro-entreprises est due au développement d’établissements qui rejoignent les PME. Parmi les pérennes, les PME se développent avec 16 000 emplois supplémentaires, tandis que les grandes entreprises et les ETI en suppriment 19 000 au total.

Le tertiaire principalement non marchand comprend les établissements qui ont une activité marchande dans ce secteur d’activité (cliniques…). Ce secteur a gagné près de 18 000 emplois, pour deux tiers provenant de créations d’emplois dans les établissements pérennes, et pour un quart du renouvellement des établissements dans ce secteur.

Durement touchée par la crise de 2008, l’industrie a perdu 26 000 emplois. Seules les grandes entreprises se sont développées (+ 5 000), stimulées par le développement d’ETI. Les établissements stables perdent des emplois dans toutes les catégories, sauf les micro-entreprises dans lesquelles les effectifs sont relativement stables. Le renouvellement est également porteur de pertes d’emplois, hormis pour les grandes entreprises.

Le secteur de la construction a perdu près de 18 000 emplois de 2008 à 2017. L’emploi des ETI progresse grâce à l’apport des PME. Cependant, les micro-entreprises et les PME perdent des emplois dans le renouvellement des établissements, tandis que les effectifs baissent dans les établissements pérennes de chaque catégorie.

Encadré - Décomposition de l’évolution de l’emploi par catégorie d’entreprise

S’il est relativement aisé de décrire et de comparer, à une date donnée, les grands ensembles d’entreprises, étudier la dynamique de l’emploi par taille d’entreprise est beaucoup plus difficile : la variable étudiée (l’emploi) influe directement sur la variable qui sert à la catégoriser (la catégorie d’entreprise).

Autrement dit, comment calculer l’évolution de l’emploi suivant la catégorie d’entreprise, elle-même dépendant directement du niveau d’emploi ?

Cette question méthodologique a été largement débattue, notamment aux États-Unis au cours du XXe siècle. Plusieurs conventions sont possibles, chacune ayant donné lieu à des publications, des chiffrages et des débats. Proposée en 1996, l’approche dynamique, qui a rassemblé le plus d’avis favorables dans les débats entre économistes, est retenue pour cette étude. Elle consiste à répartir l’évolution de l’emploi en fonction des seuils définissant les catégories d’entreprises.

Ainsi, si une micro-entreprise compte 7 salariés en 2014 et devient une PME de 15 salariés en 2015, le seuil déterminant la limite entre les micro-entreprises et les PME étant de 9 salariés, 2 emplois sont attribués aux créations d’emplois des micro-entreprises et 6 emplois aux créations des PME. En revanche, si une micro-entreprise de 7 salariés est rachetée par une PME, il n’y a ni création, ni suppression d’emploi, mais un flux de 7 salariés des micro-entreprises vers les PME.

Sources

Les données utilisées proviennent des données de démographie des établissements de 2008 à 2017 (stocks et transferts d’établissements, continuité économique…), enrichies de données sur l’emploi issues des sources Clap (2008 à 2015) et Flores (à partir de 2016) et des informations sur le contour des entreprises issues de la source Lifi (liaisons financières) pour calculer les catégories d’entreprise. Des travaux méthodologiques ont été réalisés pour traiter les ruptures de séries et pour gérer au mieux les continuités économiques qui ont impacté des grands groupes (la SNCF, la Poste…). L’objectif est d’avoir une approche économique de la démographie des établissements en minimisant les effets administratifs.

Le champ sectoriel est le champ marchand non agricole ; les intérimaires ne sont pas pris en compte.

Les données utilisées dans cette étude permettent d’obtenir des évolutions d’emploi à des niveaux géographiques fins, en disposant d’informations précises sur les établissements et leur entreprise. Cependant, les « estimations d’emplois localisés » constituent la source de référence sur l’emploi et ses évolutions. Des écarts peuvent apparaître entre les deux sources : ils s’expliquent par des différences de champ et surtout par la prise en compte des intérimaires dans les estimations d’emplois.

Définitions

Catégories d’entreprise : quatre catégories d’entreprise sont définies dans le décret d’application de la loi de modernisation de l’économie (décret n° 2008-1354) pour les besoins de l’analyse statistique et économique, les petites et moyennes entreprises dont les micro-entreprises ; les entreprises de taille intermédiaire ; les grandes entreprises.

Pour déterminer la catégorie à laquelle une entreprise appartient, les données suivantes, afférentes au dernier exercice comptable clôturé et calculées sur une base annuelle, sont utilisées : l’effectif, le chiffre d’affaires et le total du bilan.

Pour en savoir plus

Bacheré H., Mirouse B., « Une dynamique d’emploi spécifique dans les grandes entreprises », Insee Première n° 1839, février 2021.

Piot F., « Des petites entreprises nettement majoritaires et relativement autonomes en Nouvelle-Aquitaine », Insee Analyses Nouvelle-Aquitaine n° 53, février 2018.