Insee Analyses Nouvelle-AquitaineBordeaux, une métropole européenne parmi les grands pôles régionaux supérieurs

Odile Pinol, Karim Mouhali (Insee)

Au sein de l’espace européen, Bordeaux se classe parmi les « pôles régionaux supérieurs » par sa taille et son influence avant tout régionale. Les emplois publics y sont surreprésentés, illustrant l’absence d’une spécialisation marquée dans les autres activités économiques. Dans sa catégorie, Bordeaux obtient des performances mitigées sur le marché du travail, néanmoins elle dispose d’un potentiel humain et entrepreneurial dynamique. Son principal atout réside dans sa forte capacité à attirer les populations résidentielle et touristique. Cette attractivité engendre cependant deux défis concernant la qualité de vie dans la métropole : la préservation du cadre de vie et le développement d’une offre culturelle adaptée. L’ouverture à l’international et le renforcement des activités métropolitaines, qui rapprocheraient Bordeaux des « technopôles attractifs », peuvent représenter des perspectives.

Insee Analyses Nouvelle-Aquitaine
No 92
Paru le :Paru le20/10/2020
Odile Pinol, Karim Mouhali (Insee)
Insee Analyses Nouvelle-Aquitaine No 92- Octobre 2020

L’essor du phénomène de métropolisation engendre une concentration des individus et une polarisation des activités dans de grandes agglomérations en forte évolution démographique. Les métropoles s’insèrent ainsi dans différents réseaux d’échanges. Elles possèdent un rôle déterminant en matière de développement économique, d’innovation et de transition énergétique et influencent un ensemble plus ou moins étendu de territoires. Elles entrent en concurrence au niveau international en cherchant à valoriser leur potentiel et leurs performances. Cette émulation incite aux comparaisons géographiques et structurelles entre métropoles pour rechercher des similitudes ou des perspectives.

L’étude porte sur 103 « cities » européennes de plus de 400 000 habitants dont 9 sont implantées en France. Au niveau européen, pour leur comparaison, l’hétérogénéité des définitions administratives des métropoles nécessite l’élaboration d’un cadre statistique harmonisé. L’office de statistiques de l’Union européenne, Eurostat, a ainsi défini la notion de city en reprenant la méthode de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) fondée sur la contiguïté de l’urbain (méthodologie). Dans le cas de Bordeaux, la city représente 82 % de la population et 87 % de l’emploi de Bordeaux Métropole, un degré de recouvrement qui justifie pleinement que l’on substitue les caractéristiques économiques, démographiques et sociales de la métropole administrative à celles de la city, seul objet statistique à bénéficier d’une définition internationale reconnue.

Bordeaux parmi les grands « pôles régionaux supérieurs »

Dans le paysage européen, la métropole bordelaise se situe à la 40e place des 103 cities pour la taille de sa population et à la 41e pour son volume d’emplois. Elle est classée dans le groupe des « pôles régionaux supérieurs » (figure 1) dont l’influence s’exerce avant tout sur un territoire relativement proche ; c’est le cas des métropoles françaises de Toulouse et Nantes comme celles un peu plus peuplées de Lyon et Lille. Au niveau européen, elle se situe dans le même groupe qu’Aarhus au Danemark, Vilnius la capitale de la Lituanie, Eindhoven aux Pays-Bas, Séville et Bilbao en Espagne et enfin Cardiff, Édimbourg, Glasgow, Bristol et Newcastle au Royaume-Uni.

Figure 1Bordeaux classée parmi les “pôles régionaux supérieurs”Typologie des cities européennes de plus de 400 000 habitants

Bordeaux classée parmi les “pôles régionaux supérieurs”
Code cities Libellés cities Classe Noms des classes
DK001C1 København 1 Villes-monde
ES001C1 Madrid 1 Villes-monde
FI001C2 Helsinki 1 Villes-monde
SE001C1 Stockholm 1 Villes-monde
FR001C1 Paris 1 Villes-monde
NO001C1 Oslo 1 Villes-monde
UK001K2 London 1 Villes-monde
EE001C1 Tallinn 2 Capitales ouvertes
LV001C1 Riga 2 Capitales ouvertes
EL001C2 Athina 2 Capitales ouvertes
UK560C1 Oxford 3 Cités internationales
CH004C1 Bern 3 Cités internationales
CH003C1 Basel 3 Cités internationales
BE001C1 Bruxelles 3 Cités internationales
CH001C1 Zürich 4 Pôles financiers
CH002C1 Genève 4 Pôles financiers
IE001C1 Dublin 4 Pôles financiers
DE005C1 Frankfurt 4 Pôles financiers
LU001C1 Luxembourg 4 Pôles financiers
IT007C1 Firenze 5 Destinations de voyage
ES010C1 Palma de Mallorca 5 Destinations de voyage
CY001C1 Lefkosia 5 Destinations de voyage
MT001C1 Valletta 5 Destinations de voyage
ES003C1 Valencia 6 Ports de commerce
BE002C1 Antwerpen 6 Ports de commerce
FR203C1 Marseille 6 Ports de commerce
NL003C2 Rotterdam 6 Ports de commerce
UK006C1 Liverpool 6 Ports de commerce
ES006C1 Málaga 6 Ports de commerce
DE002C1 Hamburg 6 Ports de commerce
IT006C1 Genova 6 Ports de commerce
BE005C1 Liège 7 Pôles productifs
ES005C1 Zaragoza 7 Pôles productifs
ES007C1 Murcia 7 Pôles productifs
UK002C1 Birmingham 7 Pôles productifs
UK014C1 Leicester 7 Pôles productifs
DE502C1 Mannheim 7 Pôles productifs
DE012C1 Bremen 7 Pôles productifs
DE010C1 Dortmund 7 Pôles productifs
NL002C2 Amsterdam 8 Technopôles attractifs
ES002C1 Barcelona 8 Technopôles attractifs
DE003C1 München 8 Technopôles attractifs
PT001C1 Lisboa 8 Technopôles attractifs
PT002C1 Porto 8 Technopôles attractifs
IT002C1 Milano 8 Technopôles attractifs
IT001C1 Roma 8 Technopôles attractifs
IT004C1 Torino 8 Technopôles attractifs
AT001C1 Wien 8 Technopôles attractifs
DE009C1 Dresden 9 Métropoles résidentielles
SE002C1 Göteborg 9 Métropoles résidentielles
DE001C1 Berlin 9 Métropoles résidentielles
FR205C2 Nice 9 Métropoles résidentielles
CZ001C1 Praha 9 Métropoles résidentielles
UK012C2 Belfast 9 Métropoles résidentielles
UK007C1 Edinburgh 10 Pôles régionaux supérieurs
LT001C1 Vilnius 10 Pôles régionaux supérieurs
FR004C2 Toulouse 10 Pôles régionaux supérieurs
UK004C1 Glasgow 10 Pôles régionaux supérieurs
UK011C1 Bristol 10 Pôles régionaux supérieurs
UK009C1 Cardiff 10 Pôles régionaux supérieurs
FR008C1 Nantes 10 Pôles régionaux supérieurs
DK002C1 Århus 10 Pôles régionaux supérieurs
FR003C2 Lyon 10 Pôles régionaux supérieurs
FR007C1 Bordeaux 10 Pôles régionaux supérieurs
ES019C1 Bilbao 10 Pôles régionaux supérieurs
NL005C2 Eindhoven 10 Pôles régionaux supérieurs
ES004C1 Sevilla 10 Pôles régionaux supérieurs
UK013C1 Newcastle 10 Pôles régionaux supérieurs
FR009C1 Lille 10 Pôles régionaux supérieurs
UK008C1 Manchester 11 Métropoles de réseau
DE007C1 Stuttgart 11 Métropoles de réseau
FR006C2 Strasbourg 11 Métropoles de réseau
UK010C1 Sheffield 11 Métropoles de réseau
EL002C1 Thessaloniki 11 Métropoles de réseau
DE035C1 Karlsruhe 11 Métropoles de réseau
NL001C2 La Haye 11 Métropoles de réseau
UK003C1 Leeds 11 Métropoles de réseau
DE013C1 Hannover 11 Métropoles de réseau
UK029C1 Nottingham 11 Métropoles de réseau
IT009C1 Bologna 11 Métropoles de réseau
DE004C1 Köln 11 Métropoles de réseau
DE040C1 Saarbrücken 11 Métropoles de réseau
DE014C1 Nürnberg 11 Métropoles de réseau
DE008C1 Leipzig 12 Métropoles régionales intermédaires
HU001C1 Budapest 12 Métropoles régionales intermédaires
SI001C1 Ljubljana 12 Métropoles régionales intermédaires
BG001C1 Sofia 13 Métropoles à rayonnement national
PL001C1 Warszawa 13 Métropoles à rayonnement national
PL003C1 Kraków 13 Métropoles à rayonnement national
PL004C1 Wroclaw 14 Métropoles peu influentes
PL005C1 Poznan 14 Métropoles peu influentes
PL006C1 Gdansk 14 Métropoles peu influentes
HR001C1 Zagreb 14 Métropoles peu influentes
PL007C1 Szczecin 14 Métropoles peu influentes
PL010C1 Katowice 14 Métropoles peu influentes
PL002C1 Lódz 14 Métropoles peu influentes
IT008C1 Bari 14 Métropoles peu influentes
IT003C1 Napoli 14 Métropoles peu influentes
IT005C1 Palermo 14 Métropoles peu influentes
RO001C1 Bucuresti 14 Métropoles peu influentes
SK001C1 Bratislava 14 Métropoles peu influentes
CZ002C1 Brno 14 Métropoles peu influentes
CZ003C1 Ostrava 14 Métropoles peu influentes
  • Source : Eurostat, Audit urbain de 2010 à 2018, Insee

Figure 1Bordeaux classée parmi les “pôles régionaux supérieurs”Typologie des cities européennes de plus de 400 000 habitants

  • Source : Eurostat, Audit urbain de 2010 à 2018, Insee

La forte croissance démographique observée dans ces agglomérations est à l’origine des phénomènes d’étalement urbain et de périurbanisation qui conduisent à une influence territoriale de plus ou moins grande envergure. Les métropoles de la catégorie de Bordeaux, de taille modeste, comptent 40 % d’habitants de moins que la population moyenne des cities étudiées.

Pour appréhender le potentiel métropolitain des villes, le poids démographique n’est cependant pas suffisant. L’ouverture à l’international est aussi un critère à prendre en compte dans les atouts d’une métropole. Ainsi, rapportée à la population totale, la part des ressortissants étrangers dans les pôles régionaux supérieurs reste inférieure à la moyenne européenne. De même, dans cette catégorie de métropoles, à l’exception de Bordeaux et de Séville qui attirent de nombreux visiteurs de l’étranger, le nombre de nuitées touristiques par habitant est relativement faible par comparaison à la moyenne européenne.

Cette relative faiblesse de leur ouverture et connexion au monde reflète un rayonnement restreint à l’échelle nationale. En effet, les métropoles des classes « villes-monde » (Paris), des « capitales ouvertes » (Athènes), des « cités internationales » (Bruxelles) ou des « pôles financiers » (Genève) s’inscrivent davantage dans des systèmes d’échanges internationaux.

Dans les cities de la classe de Bordeaux, la part des diplômés du supérieur dans la population active est supérieure de 25 % à celle de la moyenne des métropoles européennes. Cette forte concentration laisse présager un niveau de vie élevé des habitants. Enfin, la pollution de l’air est modérée par rapport à la moyenne des cities.

Des profils sectoriels variés pour les métropoles de la classe de Bordeaux

Le potentiel métropolitain se fonde aussi sur le développement d’activités ayant un effet d’entraînement important sur le tissu économique. L’hétérogénéité des profils sectoriels des pôles régionaux supérieurs est caractéristique de leur appartenance à une classe qui n’est pas dominée par une spécialisation, a contrario de celles des « pôles financiers » (Luxembourg), des « destinations de voyage » (Florence), des « ports de commerce » (Rotterdam) ou des « pôles productifs » (Birmingham).

Cependant, une caractéristique commune relie les cities de la catégorie de Bordeaux : les activités du commerce, du transport et de l’hôtellerie-restauration y sont moins développées. Alors que pour les cities européennes, ce secteur regroupe, en moyenne, un quart des emplois, sa part est inférieure de 2 points dans les pôles régionaux supérieurs (figure 2).

Figure 2Des pôles régionaux supérieurs aux activités diversifiées Part des principaux secteurs d’activités selon le type de cities

(en %)
Des pôles régionaux supérieurs aux activités diversifiées ((en %))
Bordeaux Moyenne des pôles régionaux supérieurs Moyenne des 103 cities
Administration publique Éducation Santé Action sociale 35 32 28
Commerce Transport Hôtellerie-Restauration 22 23 25
Activités scientifiques et techniques Services administratifs et de soutien 13 18 18
Industrie 7 7 9
Construction 6 5 5
Activités financières et assurance 6 5 5
Spectacles et loisirs Arts Autres activités de service 5 5 6
Information-Communication 4 5 5
  • Source : Eurostat, Audit urbain de 2010 à 2018

Figure 2Des pôles régionaux supérieurs aux activités diversifiées Part des principaux secteurs d’activités selon le type de cities

  • Source : Eurostat, Audit urbain de 2010 à 2018

Les pôles régionaux supérieurs n’étant pas rassemblés sur le critère d’une spécialisation sectorielle forte, les fonctions les plus développées sont diverses. Les activités industrielles sont mieux représentées à Toulouse, l’immobilier est relativement développé à Vilnius alors qu’Édimbourg est plutôt ancrée dans la finance et l’assurance. Nantes et Aarhus se distinguent dans le domaine de l’information-communication tandis que Glasgow, Bristol, Bilbao et Eindhoven sont des métropoles plus tournées vers les activités scientifiques et techniques et les activités de services administratifs et de soutien. Bordeaux est le pôle régional supérieur ayant la plus faible part d’emplois dans ce dernier secteur. Elle se classe même dans les derniers rangs des cities européennes. En revanche, on la retrouve dans le haut du classement pour sa proportion d’emplois dans l’administration publique, la défense, l’éducation, la santé et l’action sociale.

Une part importante des emplois du secteur public dans la métropole bordelaise

En l’absence d’une spécialisation dans des activités métropolitaines, l’emploi public est surreprésenté dans la métropole bordelaise et sa classe. Ce secteur regroupe l’administration publique et différentes activités telles que la défense, l’éducation, la santé et l’action sociale dont l’emploi dépend de l’État en France. Ces activités sont également les premières employeuses de l’ensemble des cities européennes (28 % en moyenne) et le poids de ce secteur encore plus prépondérant dans les pôles régionaux supérieurs (32 %). Bordeaux se situe même en 4e position de sa catégorie pour sa proportion d’emplois dans ces activités publiques et en 13e position des 103 cities étudiées. Sur les 15 pôles régionaux supérieurs, les 5 français se répartissent entre la 4e et la 12e position. Cette prédominance de l’emploi public dans les cities françaises est le reflet de l’organisation administrative territoriale et des effets de la décentralisation. Dans d’autres pays européens, certaines activités de ce secteur ne relèvent pas directement de l’emploi public : en Allemagne par exemple, les métiers de la santé sont occupés par des emplois privés.

Marché du travail : un bilan mitigé

Les deux tiers de la population en âge de travailler possèdent un emploi dans la métropole bordelaise, la plaçant en dessous de la moyenne de sa classe et de l’ensemble des métropoles européennes. Cette proportion atteint 80 % à Vilnius et Bristol en tête du classement des pôles régionaux supérieurs. Le de la région métropolitaine atteint 9,6 % en moyenne de 2010 à 2018, ce qui situe Bordeaux dans le premier tiers de sa catégorie où il est le plus élevé. Le positionnement des cities françaises en matière de chômage s’explique par des différences de flexibilité du marché du travail et de protection sociale selon les pays.

La dynamique de l’emploi est cependant plutôt favorable dans la métropole bordelaise. Entre les périodes 2010-2013 et 2014-2017, l’emploi augmente en moyenne plus vite que dans les métropoles de la même classe et que dans l’ensemble des métropoles européennes. Cela reste pourtant insuffisant pour absorber la demande croissante d’emplois, en partie due à sa forte attractivité démographique.

Si l’on considère la part de la population active sur la population totale en âge de travailler (taux d’activité), l’écart entre femmes et hommes est assez faible dans la métropole bordelaise : 74 % des Bordelaises sont actives, soit un niveau supérieur à la moyenne des pôles régionaux supérieurs, contre 80 % des Bordelais (légèrement en dessous de la moyenne). Cet écart reste plus élevé que dans de nombreuses métropoles du nord de l’Europe, mais bien plus faible que dans les métropoles espagnoles de la classe de Bordeaux : à Bilbao et Séville, il atteint respectivement 10 et 14 points.

Potentiel humain et créations d’entreprises : des capacités prometteuses

Bordeaux dispose d’un capital humain et d’un dynamisme entrepreneurial susceptibles de renforcer sa vigueur économique. Sa proportion d’actifs qualifiés (46 %) est bien plus élevée que la moyenne des métropoles européennes (39 %), malgré un positionnement plus modeste parmi celles de sa classe (49 % en moyenne) (figure 3). En effet, ces dernières se distinguent par leur forte part d’actifs diplômés, supérieure de 10 points à la moyenne européenne. Bordeaux se place, derrière Toulouse et Newcastle, en troisième position pour le nombre d’étudiants accueillis dans l’enseignement supérieur.

Le constitue un autre atout avec 12,2 % dans la région métropolitaine, parmi les plus dynamiques tant à l’échelle des pôles régionaux supérieurs qu’à l’échelle européenne.

Figure 3Accueil touristique et niveau d’éducation sont des atouts de la métropole bordelaise Positionnement de Bordeaux par rapport à sa classe et à l’ensemble des cities

Accueil touristique et niveau d’éducation sont des atouts de la métropole bordelaise
Population Indice de vieillissement Taux d’emploi Part des activités support scientifiques techniques Part des diplômés du supérieur Nuitées touristiques par habitant Pollution de l’air Part de ressortissants hors Union Européenne
Moyenne des 103 cities 1,7 1,3 1,0 1,0 0,8 1,4 1,1 1,4
Moyenne des pôles régionaux supérieurs 1,0 1,0 1,0 1,0 1,0 1,0 1,0 1,0
Bordeaux 1,2 1,0 1,0 0,7 0,9 1,5 0,9 0,9
  • Note : la pollution de l’air est mesurée par la concentration annuelle moyenne de NO2 et de PM10 en µg/m3.
  • Lecture : les nuitées touristiques par habitant à Bordeaux sont 1,5 fois supérieures à celles observées en moyenne dans la classe des pôles régionaux supérieurs.
  • Source : Eurostat, Audit urbain de 2010 à 2018

Figure 3Accueil touristique et niveau d’éducation sont des atouts de la métropole bordelaise Positionnement de Bordeaux par rapport à sa classe et à l’ensemble des cities

  • Note : la pollution de l’air est mesurée par la concentration annuelle moyenne de NO2 et de PM10 en µg/m3.
  • Lecture : les nuitées touristiques par habitant à Bordeaux sont 1,5 fois supérieures à celles observées en moyenne dans la classe des pôles régionaux supérieurs.
  • Source : Eurostat, Audit urbain de 2010 à 2018

Une métropole attractive

L’attractivité bordelaise est à la fois résidentielle et touristique. Avec 620 000 habitants, la city de Bordeaux en compte près de 100 000 de plus que la population moyenne des pôles régionaux supérieurs. L’excédent migratoire de la région métropolitaine est le plus fort de sa classe, son solde naturel plus modéré reste néanmoins positif. L’attractivité résidentielle constitue un moteur essentiel de la croissance démographique de la métropole. En lien avec les profils des nouveaux arrivants, la population est vieillissante, davantage par rapport à sa catégorie que par rapport à l’ensemble des cities.

L’attractivité touristique constitue un point fort de la métropole : Bordeaux compte 6,3 nuitées par habitant contre 4,3 en moyenne, ce qui la classe en deuxième position des pôles régionaux supérieurs. Le nombre de passagers est lui aussi plus important dans les aéroports de la région. Malgré ce rayonnement, peu de ressortissants étrangers vivent dans la métropole bordelaise qui attire, avant tout, des résidents de France métropolitaine (7,5 % de la population, contre 11,8 % pour l’ensemble des cities européennes).

Des performances modérées en matière de cadre de vie

La métropolisation engendre des risques environnementaux qui renforcent les enjeux de la transition énergétique et du développement durable sur des territoires soumis aux déplacements pendulaires, à la congestion des centre-villes et à l’artificialisation des sols. À Bordeaux, la qualité de l’air est assez bonne : la pollution liée à la concentration en dioxyde d’azote et en particules fines est la quatrième plus faible de sa classe. Pourtant, Bordeaux se positionne seulement à la huitième place pour sa part de déplacements domicile-travail effectuée en transports publics : ceux-ci représentent un cinquième des navettes alors que cette proportion monte jusqu’à un tiers à Lyon, en tête des pôles régionaux supérieurs. Bordeaux n’est également pas très bien classée pour son volume trop important de déchets domestiques et commerciaux généré par habitant (dixième place).

L’espérance de vie s’élève à 83 ans dans la région métropolitaine, supérieure de près d’un an et demi à la médiane de sa classe. La proportion de morts violentes (meurtre d’une personne, y compris homicide involontaire) à Bordeaux est un peu plus importante que celle de son groupe : Vilnius et Glasgow sont en queue de classement, précédées par le peloton des métropoles françaises. Cependant, le positionnement de Bordeaux est sensiblement meilleur lorsque la comparaison s’effectue avec l’ensemble des cities européennes.

Un rayonnement culturel encore en retrait

Structurellement, à Bordeaux, les activités liées à la culture et aux pratiques artistiques concentrent une part plus faible d’emplois qu’en moyenne dans les pôles régionaux supérieurs. Bordeaux figure dans le bas du classement pour sa fréquentation culturelle, mesurée par le nombre d’entrées de musées par habitant. En dépit de son attractivité touristique et de l’ouverture en 2016 de la Cité du vin, la fréquentation des musées bordelais est cinq fois moins élevée que celle du premier pôle régional supérieur : à Bilbao, le musée Guggenheim dope le nombre d’entrées. Les bibliothèques publiques sont des équipements culturels bien représentés dans la capitale girondine et, de manière générale, dans les métropoles françaises du groupe puisque celles-ci occupent les cinq premières positions du classement.

Vers un développement des activités métropolitaines et une ouverture à l’international ?

La métropole bordelaise se distingue par son attractivité résidentielle et touristique dans une classe de cities marquée par le niveau élevé de qualification de sa population active. Ce qui incite à comparer son profil et son positionnement à un autre groupe de cities, celui des « technopôles attractifs » (comme Barcelone, Milan, Munich, Lisbonne…) pour lequel ces points forts dominent particulièrement.

La répartition sectorielle de ces derniers met en évidence une proportion d’emplois dans les activités métropolitaines plus élevée que dans la métropole bordelaise (figure 4). Ces secteurs regroupent des activités économiques à haute valeur ajoutée, des services stratégiques, des compétences rares ou innovantes. Ils constituent des attributs privilégiés pour la compétitivité des métropoles et leur insertion dans l’économie de la connaissance et des réseaux. Ainsi, les technopôles ont, par exemple, une part deux fois plus importante d’emplois dans les activités scientifiques et techniques que la métropole bordelaise. Dans ces cities, le poids du secteur de l’information-communication est également plus fort.

Par rapport à cet autre référentiel, Bordeaux est une métropole de taille modeste peu cosmopolite : elle compte deux fois moins d’habitants et accueille trois fois moins de ressortissants étrangers qu’un technopôle attractif. La fréquentation touristique de la capitale girondine, conséquente dans sa propre classe, atteint presque les deux tiers de celle mesurée en moyenne pour les technopôles. Dans ce dernier groupe, 4 des 9 métropoles sont des capitales de pays européens influents : Amsterdam, Vienne, Lisbonne et Rome. Dès lors, la portée du rayonnement bordelais s’en trouve forcément relativisée. En revanche, face aux technopôles attractifs, Bordeaux reste compétitive sur des indicateurs qui portent eux aussi de forts enjeux métropolitains : la bonne qualité de l’air et la forte représentation d’actifs diplômés du supérieur.

Figure 4Des activités métropolitaines moins développées que dans les technopôles attractifs Part des secteurs regroupant les activités métropolitaines

(en %)
Des activités métropolitaines moins développées que dans les technopôles attractifs ((en %))
Bordeaux Moyenne des technopôles attractifs
Activités scientifiques et techniques Services administratifs et de soutien 13,0 26,1
Activités financières et assurance 5,6 6,5
Information-Communication 4,4 7,6
  • Source : Eurostat, Audit urbain de 2010 à 2018

Figure 4Des activités métropolitaines moins développées que dans les technopôles attractifs Part des secteurs regroupant les activités métropolitaines

  • Source : Eurostat, Audit urbain de 2010 à 2018

Pour comprendre

Typologie des métropoles européennes

La comparaison des métropoles européennes se fonde sur le concept de city défini par une méthodologie commune à l’OCDE et Eurostat s’appuyant sur la grille de densité.

La définition de ce zonage statistique uniformisé basé sur la contiguïté de l’urbain permet des comparaisons européennes pertinentes. Cependant, il ne recouvre pas exactement les métropoles administratives couramment caractérisées par leur nombre d’habitants et d’emplois : on observe ainsi des taux de couverture compris entre 47 % (pour l’emploi de la métropole Aix-Marseille-Provence) et 140 % (pour les habitants du Grand Paris). La city de Bordeaux couvre 82 % de la population et 87 % des emplois de la métropole bordelaise Maptam.

Toutes les cities définies par la méthodologie d’Eurostat n’ont pas une population suffisante pour être considérées comme des métropoles. La typologie mise en œuvre dans cette étude utilise un seuil de 400 000 habitants afin de sélectionner les métropoles Maptam et de pouvoir analyser des territoires comparables. Le classement des cities européennes vise une caractérisation aisément compréhensible des groupes avec des critères propres aux métropoles. Il veille également à ce que les groupes soient représentatifs de différents pays. Les indicateurs ont été utilisés sous la forme de ratios pour avoir des ordres de grandeur comparables et ceux qui ont été choisis sont ceux qui n’induisent pas d’effet géographique. La méthodologie retenue repose sur une classification ascendante hiérarchique avec méthode itérative puis sur une classification ascendante hiérarchique sur 8 variables. La typologie ainsi constituée comporte 14 classes.

Sources

L’audit urbain est une opération statistique visant à recueillir des données sur un grand nombre de variables décrivant la qualité de vie dans les villes européennes. Eurostat centralise ces données collectées dans plus de 30 pays. Les données utilisées dans cette étude sont des moyennes faites sur la période 2010-2018.

Définitions

Taux de chômage de la région métropolitaine : donnée disponible sur le périmètre de la « région métropolitaine » au niveau 3 de la Nomenclature des unités territoriales statistiques d’Eurostat (NUTS 3). En France, selon la nomenclature NUTS 2016 actuellement en vigueur, le niveau NUTS 3 correspond au département administratif.

Taux de création d'entreprises de la région métropolitaine : nombre de créations d’entreprises par rapport au nombre d’entreprises actives, sur le périmètre de « région métropolitaine » au niveau NUTS 3.

Pour en savoir plus

Lacour C., Tchiveindhais C., « L’espace métropolitain bordelais, au cœur des réseaux du Sud-Ouest », Insee Analyses Aquitaine n° 2, septembre 2014

Aussilloux V., Girard P.L., Le Guilly M.F., « Ouvrir dans un nouvel ongletTableau de bord de l’emploi public – Situation de la France et comparaisons internationales », France Stratégie, juin 2020