Insee Flash Auvergne-Rhône-AlpesPolitique de la ville : la majorité des habitants des QPV vit dans un quartier HLM d’une grande unité urbaine

Aline Labosse, Valérie Vanelle (Insee)

En Auvergne-Rhône-Alpes, les 140 quartiers prioritaires de la politique de la ville rassemblent plus de 400 000 personnes. Les centres anciens accueillent plutôt étudiants et jeunes actifs. Dans les grandes agglomérations, les quartiers HLM périphériques hébergent une population un peu plus scolarisée et diplômée que ceux des banlieues éloignées. Ces derniers comptent davantage de familles nombreuses en lien avec une part plus importante de logements de grande taille. La population plus ouvrière des quartiers HLM de petites unités urbaines s’insère plus difficilement sur le marché du travail.

Insee Flash Auvergne-Rhône-Alpes
No 74
Paru le :Paru le28/05/2020
Aline Labosse, Valérie Vanelle (Insee)
Insee Flash Auvergne-Rhône-Alpes No 74- Mai 2020

En Auvergne-Rhône-Alpes, un peu plus de 400 000 personnes vivent dans les 140 quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV). Ils représentent 5 % de la population régionale mais 9 % de celle des concernées par la géographie prioritaire. De grandes disparités existent toutefois, surtout parmi les petites unités urbaines (encadré).

Présentant de nombreuses fragilités économiques et sociales, la population des QPV réside dans . Elle se répartit dans les centres anciens, les quartiers périphériques de petites adresses ou les quartiers HLM de petites ou grandes unités urbaines. Dans les grandes unités, les quartiers HLM périphériques se distinguent de ceux de banlieues éloignées (sources). Observer les caractéristiques des populations selon le type de QPV peut permettre de mieux cerner des spécificités propres à chacune, afin d’adapter les différents leviers de la politique de cohésion urbaine et de solidarité.

Sept habitants en QPV sur dix vivent dans un quartier HLM d’une grande unité urbaine

La grande majorité des habitants en QPV vivent dans un quartier HLM de grande unité urbaine. Ainsi, 39 % demeurent dans l’un des 44 quartiers HLM périphériques et 30 % dans l’un des 34 quartiers HLM de banlieues éloignées des unités urbaines de Lyon, Grenoble, Saint-Étienne, Clermont-Ferrand, Chambéry, Genève – Annemasse (partie française) ou Valence (figure 1). Les cinq QPV les plus peuplés (plus de 12 000 habitants) en font partie. Ils rassemblent un habitant en QPV sur cinq. La banlieue de l’agglomération de Lyon en compte trois (« Minguettes-Clochettes » à Vénissieux, « Grande Île » à Vaulx-en-Velin et « Ville Nouvelle » à Rillieux-la-Pape), les deux autres étant des quartiers périphériques de Lyon (« États-Unis Langlet Santy ») et de Grenoble (« Villeneuve – Village Olympique »). Hormis ces cinq QPV, les quartiers prioritaires ne dépassent pas 8 500 habitants et, pour la moitié d’entre eux, totalisent moins de 1 800 habitants.

Figure 1Quatre habitants en QPV sur dix vivent dans un quartier HLM périphérique d’une grande unité urbaineRépartition de la population vivant en QPV selon le cadre de vie du quartier prioritaire en Auvergne-Rhône-Alpes

Quatre habitants en QPV sur dix vivent dans un quartier HLM périphérique d’une grande unité urbaine
Libellé de la classe (typologie « Cadre de vie ») Population du QPV (2013) Part de la population de la classe dans l’ensemble de la population vivant en QPV (en %) Nombre de quartiers
Centres anciens 37 103 9 13
Quartiers HLM de petites unités urbaines 76 997 19 40
Quartiers périphériques de petites adresses 13 619 3 9
Quartiers HLM périphériques de grandes unités urbaines 159 863 39 44
Quartiers HLM de banlieues éloignées de grandes unités urbaines 123 848 30 34
  • Source : Insee, Recensement de la population 2013

Figure 1Quatre habitants en QPV sur dix vivent dans un quartier HLM périphérique d’une grande unité urbaineRépartition de la population vivant en QPV selon le cadre de vie du quartier prioritaire en Auvergne-Rhône-Alpes

  • Source : Insee, Recensement de la population 2013

Deux habitants en QPV sur dix vivent par ailleurs dans un des 40 quartiers HLM de petites unités urbaines. Enfin, un sur dix vit dans l’un des 13 centres anciens ou des 9 quartiers périphériques de petites adresses de la région (localisés dans une petite ou une grande agglomération).

Dans les grandes agglomérations, les quartiers périphériques ont des niveaux de diplôme et d’emploi supérieurs

Les quartiers HLM, notamment des grandes agglomérations, comprennent une part importante d’adresses de plus de 20 logements et d’habitats sociaux. En général plus proche du centre de l’unité urbaine, la population des quartiers périphériques peut, davantage que celle des banlieues éloignées, profiter de la proximité des lieux d’études supérieures et des emplois qualifiés que concentrent les grandes agglomérations. La part des diplômés du supérieur est ainsi plus importante en périphérie qu’en banlieue (+ 3 points) tandis que celle des non-diplômés y est plus faible (– 2 points). De même, la part des artisans, commerçants, chefs d’entreprise, cadres et professions intellectuelles supérieures est plus forte en périphérie (+ 2 points par rapport à la banlieue) ; celle des ouvriers y est moins importante (– 4 points). Le constat est le même pour les jeunes adultes. La part des 16-25 ans non scolarisés et sans emploi y est ainsi inférieure de 4 points (figure 2).

Figure 2Des profils d’habitants différents selon le cadre de vie du quartier prioritairePrincipaux indicateurs socio-démographiques selon le cadre de vie du quartier prioritaire en Auvergne-Rhône-Alpes (en %)

Des profils d’habitants différents selon le cadre de vie du quartier prioritaire
Quartiers HLM Quartiers situés dans une petite ou une grande unité urbaine Ensemble des 140 QPV Ensemble des unités urbaines comprenant au moins un QPV
de petites unités urbaines de grandes unités urbaines Centres anciens Périphériques de petites adresses
périphériques de banlieues éloignées
Part des 0-14 ans dans la population 25,0 25,6 27,7 20,6 21,9 25,6 18,2
Part des 15-24 ans dans la population 13,5 14,0 13,3 16,8 13,7 13,9 13,6
Taux d’emploi 42,3 43,3 44,0 45,1 47,5 43,6 63,0
Taux de chômage 34,4 32,3 31,1 30,4 29,5 32,1 14,0
*Part d’actifs artisans, commerçants... 6,6 9,6 7,3 15,1 10,5 8,9 24,3
Part d’actifs ouvriers 47,9 37,8 41,9 34,0 40,6 40,6 20,7
Part de la population sans diplôme 53,5 49,6 51,9 44,7 50,7 50,6 28,8
Part de la population avec un diplôme de niveau Bac+2 ou supérieur 9,2 14,5 11,5 17,7 14,3 12,9 32,3
Part des 16-25 ans non scolarisés et sans emploi 34,5 28,7 32,6 24,7 28,7 30,5 14,5
Taux de scolarisation des 15-24 ans 51,7 59,2 55,8 60,0 52,5 56,7 68,4
  • Note : les cases en rouge correspondent au taux le plus important parmi les 5 types de QPV, les cases en bleu au taux le plus faible.
  • * Part d’actifs artisans, commerçants, chefs d’entreprise, cadres et professions intellectuelles supérieures.
  • Source : Insee, Recensement de la population 2015

Les banlieues éloignées accueillent la plus grande part de ménages de six personnes et plus et d’enfants de moins de 15 ans, en lien avec la part plus importante de très grands logements pouvant les recevoir. Les immigrés sont aussi davantage présents dans les quartiers HLM des grandes agglomérations, que ce soit en périphérie ou en banlieue.

Une population ouvrière moins insérée sur le marché du travail dans les quartiers HLM de petites unités urbaines

La forte présence des ouvriers dans les quartiers HLM de petites unités urbaines (+ 7 points par rapport à l’ensemble des QPV) va de pair avec des difficultés sur le marché de l’emploi. Dans ces quartiers, les habitants sont relativement moins souvent en emploi et plus fréquemment au chômage. La population est plus souvent non diplômée et davantage ouvrière. Les jeunes ne sont pas mieux lotis, avec la plus forte part de 16-25 ans non scolarisés et sans emploi et le plus faible taux de scolarisation parmi les différentes catégories de QPV.

Les quartiers périphériques de petites adresses comprennent des logements sociaux et anciens mais une part moins élevée de logements collectifs. Peu présents dans la région, ils abritent une population relativement plus âgée et davantage en couple, qui semble mieux s’insérer sur le marché du travail.

Les centres anciens accueillent étudiants et jeunes actifs

Les centres anciens se caractérisent par une faible part de logements sociaux et davantage de petits logements anciens. Ils accueillent de nombreux étudiants et jeunes actifs sans enfants. La moitié des ménages ne compte qu’une personne (+ 12 points par rapport à l’ensemble des QPV) et les moins de 15 ans y sont moins présents. Le niveau élevé d’emploi et de diplôme de leur population constitue une spécificité de ces QPV. La part des artisans, commerçants, chefs d’entreprise, cadres et professions intellectuelles supérieures y est plus importante (+ 6 points) au détriment de celle des ouvriers (– 7 points). La part des diplômés du supérieur est aussi plus forte tandis que celle des non-diplômés est inférieure. Enfin, les 15-24 ans, relativement plus nombreux dans ce type de QPV, sont plus souvent scolarisés. La part des jeunes adultes non scolarisés et sans emploi y est ainsi minimale parmi les QPV (– 6 points).

Encadré - Une part d’habitants en QPV variée selon les unités urbaines

Les habitants en QPV représentent entre 3 % et 25 % de la population de leur unité urbaine.

Cette population particulièrement fragile représente en moyenne 9,5 % de celle des grandes agglomérations. Sa part est de 6 % pour Genève – Annemasse (partie française) et Chambéry et jusqu’à 11 % à Saint-Étienne, Valence ou Lyon. Avec 43 QPV, l’unité urbaine de Lyon concentre à elle seule 42 % de la population vivant en QPV alors qu’elle ne regroupe que 36 % de la population totale des 38 unités urbaines comprenant au moins un quartier prioritaire.

Dans les petites unités urbaines, en moyenne, 8,5 % de la population vit dans un QPV mais les disparités sont beaucoup plus importantes, et sans lien avec la taille des agglomérations. Alors que moins de 3 % de la population des unités urbaines de Thonon-les-Bains et d’Albertville vit en QPV, 20 % de celle de Thiers et 25 % de celle de Pierrelatte est concernée.

Sources

Cette étude porte sur les quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV) d'Auvergne-Rhône-Alpes définis par la loi de programmation pour la ville et la cohésion urbaine du 21 février 2014 dite loi Lamy. Leurs caractéristiques démographiques s’appuient sur le recensement de la population de 2015. La population vivant en QPV est toutefois établie à partir de celui de 2013.

Définitions

Parmi l’ensemble des unités urbaines (UU) comprenant au moins un QPV, on distingue les petites unités urbaines (nombre d’habitants compris entre 10 000 et 100 000) des grandes (nombre d’habitants supérieur à 100 000).

L’Observatoire national de la politique de la ville (ONPV) a défini cinq types de QPV selon leur cadre de vie via des données sur le bâti, la dynamique du marché du logement et le temps pour aller de la mairie de la commune-centre de l’unité urbaine à celle de la commune du QPV.

Unité urbaine / Agglomération / Agglomération multicommunale / Agglomération urbaine :

La notion d’unité urbaine repose sur la continuité du bâti et le nombre d’habitants. Les unités urbaines sont construites en France métropolitaine et dans les DOM d’après la définition suivante : une commune ou un ensemble de communes présentant une zone de bâti continu (pas de coupure de plus de 200 mètres entre deux constructions) qui compte au moins 2 000 habitants.

Si l’unité urbaine se situe sur une seule commune, elle est dénommée ville isolée.

Si l’unité urbaine s’étend sur plusieurs communes, et si chacune de ces communes concentre plus de la moitié de sa population dans la zone de bâti continu, elle est dénommée agglomération multicommunale.

Si une de ces communes concentre moins de la moitié de sa population dans la zone de bâti continu mais qu’elle y concentre 2 000 habitants ou plus alors elle constituera une unité urbaine isolée. L’agglomération de Paris désigne l’agglomération multicommunale contenant Paris. Enfin, on désigne par « commune hors unité urbaine », les communes non affectées à une unité urbaine.

Remarque :

Ces seuils, 200 mètres pour la continuité du bâti et 2 000 habitants pour la population des zones bâties, résultent de recommandations adoptées au niveau international. À titre d’exemple, dans le règlement européen encadrant le recensement de la population, des statistiques de population basées sur le zonage en unités urbaines sont attendues.

Le calcul de l’espace entre deux constructions est réalisé par l’analyse des bases de données sur le bâti de l’Institut national de l’information géographique et forestière (IGN). Il tient compte des coupures du tissu urbain telles que cours d’eau en l’absence de ponts, gravières, dénivelés importants.

Depuis le découpage de 2010, certains espaces publics (cimetières, stades, aérodromes, parcs de stationnement…), terrains industriels ou commerciaux (usines, zones d’activités, centres commerciaux…) ont été traités comme des bâtis avec la règle des 200 mètres pour relier des zones de construction habitées, à la différence des découpages précédents où ces espaces étaient seulement annulés dans le calcul des distances entre bâtis.

Les unités urbaines sont redéfinies périodiquement. L’actuel zonage, daté de 2020, est établi en référence à la population connue au recensement de 2017 et sur la géographie administrative du territoire au 1er janvier 2020. L’exercice précédent, daté de 2010, reposait sur le recensement de 2007 et la géographie administrative du territoire au 1er janvier 2010.

Une première délimitation des villes et agglomérations avait été réalisée à l’occasion du recensement de 1954. De nouvelles unités urbaines ont ensuite été constituées lors des recensements de 1962, 1968, 1975, 1982, 1990 et 1999.

Les unités urbaines peuvent s’étendre sur plusieurs départements, voire traverser les frontières nationales (voir unité urbaine internationale).

Le découpage en unités urbaines concerne toutes les communes de France métropolitaine et des départements d’outre-mer.

Pour en savoir plus

« Les quartiers prioritaires de la politique de la ville », Insee Analyses Auvergne-Rhône-Alpes n° 99, mai 2020

« Logement social et pauvreté : deux facteurs de mobilité dans les QPV », Insee Analyses Auvergne-Rhône-Alpes n° 90, décembre 2019

« Les quartiers de la politique de la ville : jeunesse et précarité », Insee Analyses Auvergne-Rhône-Alpes n° 14, mai 2016