Du pouvoir d'achat, dans un contexte de ralentissement européen Note de conjoncture - décembre 2018

Julien Pouget - Frédéric Tallet - Romain Bour - Clément Rousset

Dans un contexte international qui reste incertain et marqué par les tensions protectionnistes, l’activité économique dans la zone euro montre des signes d’essoufflement. Elle croîtrait d’environ 0,3 % par trimestre d’ici la mi-2019.

Au quatrième trimestre 2018, l’économie française ne progresserait que de 0,2 %. Puis elle se redresserait en début d’année 2019 (+0,4 % de croissance au premier trimestre puis +0,3 % au deuxième), portée par la demande intérieure et notamment la consommation des ménages.

En moyenne annuelle, l’acquis de croissance pour la France en 2019 serait de +1,0 % à mi-année (après +1,5 % prévu pour l’ensemble de l’année 2018). L’acquis de croissance du pouvoir d’achat (mesuré au niveau global) serait de +2,0 % à la mi-2019 (après +1,4 % sur l’ensemble de l’année 2018).

Xavier Guillet, Adiren Lagouge, Bastien Virely et Clément Rousset
Note de conjoncture- Décembre 2018
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Tensions sur l’offre et position de l’économie dans le cycle

Xavier Guillet, Adiren Lagouge, Bastien Virely et Clément Rousset

Les enquêtes de conjoncture menées dans différents secteurs de l’économie, en France comme en zone euro, attestent du nombre croissant d’entreprises qui rencontrent des freins à la production depuis mi-2017. Plus précisément, les entrepreneurs interrogés dans l’industrie manufacturière, la construction et les services font état de difficultés croissantes à satisfaire la demande. Si la part des chefs d’entreprise à indiquer être limités par un déficit de demande a largement décru, ceux signalant des difficultés à produire pour des raisons d’offre sont de plus en plus nombreux, notamment en Allemagne et en France. En particulier, les obstacles liés à un manque de personnel et aux difficultés à l’accroître sont désignés majoritairement.

Le déficit d’offre en regard de l’excès de demande ainsi mis en évidence tranche avec le message conjoncturel que les enquêtes rapportaient jusque-là. En effet, les chefs d’entreprises indiquaient davantage un déséquilibre contraire c’est-à-dire une insuffisance de la demande. En France, l’accroissement des tensions sur l’offre ainsi que la croissance élevée enregistrée en 2017, contrastant avec la dernière décennie, interrogent sur la situation conjoncturelle actuelle. L’économie française a-t-elle atteint un haut de cycle en 2017 ? Ou, au contraire, peut-elle continuer de croître à un rythme aussi soutenu compte tenu des tensions déjà observées sur l’appareil productif ?

Répondre à ces questions suppose d’identifier la position de l’économie dans son cycle, exercice d’autant plus incertain que tous les indicateurs ne montrent pas les mêmes tensions, comme en témoigne notamment le niveau relativement faible de l’inflation sous–jacente. Pour ce faire, les économistes mobilisent la notion de produit intérieur brut (PIB) potentiel, quantité inobservable correspondant à une utilisation soutenable des facteurs de production. Autrement dit, le PIB potentiel désigne un niveau de production qui serait atteint en l’absence de déséquilibre dans l’économie. L’écart entre le niveau observé de la production et le PIB potentiel indique donc la position occupée par l’économie dans le cycle. Cependant, cette notion est difficile à estimer. Plusieurs méthodes sont donc passées en revue : une méthode dite « structurelle » reposant sur une représentation théorique de l’appareil productif, une méthode « semi-structurelle » visant à décomposer le PIB en deux composantes inobservables (sa tendance ou PIB potentiel, et son cycle ou écart de production), et enfin une méthode directe, purement statistique à partir d’indicateurs économiques, sans modélisation a priori.

Cette analyse est menée ici pour la France, mais les cas de l’Allemagne, de l’Espagne et de l’Italie sont également évoqués. Ces estimations sont à prendre avec précaution : les choix de modélisation peuvent être discutés et certaines fragilités des méthodes de calcul incitent à la prudence dans l’interprétation des résultats. Cependant, dans le cas de la France, elles aboutissent à un diagnostic conjoncturel relativement convergent. Ainsi, après s’être nettement creusé d’une part en 2008, et d’autre part en 2012-2013, l’écart de production se serait progressivement refermé depuis 2014 en lien avec la disparition des tensions sur la demande et l’apparition de tensions sur l’offre. En 2018, l’économie française se situerait au voisinage de son potentiel, selon ces trois méthodes.

Note de conjoncture

Paru le :18/12/2018