Ciel voilé en Europe Note de conjoncture - juin 2018

Julien Pouget - Frédéric Tallet - Xavier Guillet - Camille Parent

Après une année 2017 de forte croissance, l’activité économique a ralenti début 2018. Ce ralentissement, qui n’est pas spécifique à la France, s’explique sans doute par la conjonction de facteurs ponctuels et de déterminants plus globaux : remontée des prix du pétrole, appréciation de l’euro, craintes de tensions protectionnistes, capacités de production très sollicitées dans certains pays, etc.

Note de conjoncture- Juin 2018
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Vue d’ensemble : Ciel voilé en Europe

Après une année 2017 de forte croissance, l’activité économique a ralenti début 2018. Ce ralentissement, qui n’est pas spécifique à la France, s’explique sans doute par la conjonction de facteurs ponctuels et de déterminants plus globaux : remontée des prix du pétrole, appréciation de l’euro, craintes de tensions protectionnistes, capacités de production très sollicitées dans certains pays, etc.

Le commerce mondial garderait toutefois de l’élan en 2018 et la croissance française s’établirait à 1,7 % en moyenne. La consommation des ménages serait un peu plus allante, avec notamment - malgré la remontée de l’inflation - l’accélération du pouvoir d’achat attendue au dernier trimestre. L’investissement des entreprises garderait du tonus ; celui des ménages continuerait en revanche de décélérer. Le commerce extérieur, quant à lui, soutiendrait la croissance économique notamment en fin d’année.

Les créations d’emploi resteraient dynamiques en 2018, en particulier dans le secteur tertiaire, mais elles ralentiraient dans le sillage de l’activité économique. Le taux de chômage continuerait de diminuer, pour s’établir à 8,8 % fin 2018, soit une baisse de - 0,2 point sur un an.

Note de conjoncture

Paru le :19/06/2018

Résumé

Après une année 2017 de forte croissance, le freinage de l’activité économique française est apparu relativement brutal début 2018. Le produit intérieur brut (PIB) n’a en effet augmenté que de 0,2 % au premier trimestre, interrompant le rythme solide observé depuis la fin 2016 (+ 0,6 % à + 0,8 % de croissance trimestrielle).

Ce ralentissement, qui n’est pas spécifique à la France, s’explique sans doute par la conjonction de facteurs ponctuels et de déterminants plus globaux. L’année 2017 s’est terminée en fanfare pour la production manufacturière : le contrecoup a doncété important début 2018, en particulier pour les matériels de transport. Côté demande, la consommation des ménages est restée atone au premier trimestre, dans l’attente du rebond du pouvoir d’achat prévu aux trimestres suivants. Par ailleurs, l’investissement en logement des ménages tend à se stabiliser après deux années de fort rattrapage.

Mais ces facteurs, que l’on peut qualifier de ponctuels, ne peuvent à eux seuls rendre compte du ralentissement des climats des affaires depuis le début de l’année dans l’ensemble de la zone euro. Des facteurs plus globaux sont sans doute à l’oeuvre et se conjuguent pour dessiner en 2018 un horizon conjoncturel plus voilé et incertain qu’en 2017.

La forte remontée du prix du pétrole, alimentée entre autres par les tensions géopolitiques au Moyen-Orient, fait sans conteste partie de ces facteurs. La forte appréciation de l’euro au cours de l’année 2017 a également pu peser sur la compétitivité des entreprises exportatrices. Les tensions protectionnistes tendent à s’intensifier depuis les États-Unis, où le resserrement progressif de la politique monétaire et la crainte d’une remontée de l’inflation plus vive que prévu accentuent par ailleurs les incertitudes sur les marchés financiers. Enfin, l’activité économique pourrait, dans certains pays dont notamment l’Allemagne, buter sur les contraintes d’un appareil productif désormais très sollicité.

Malgré ces nuages, l’environnement économique international reste porteur. L’activité économique resterait robuste dans la plupart des pays émergents ; la croissance américaine serait fortement soutenue, certes de manière procyclique, par une politique budgétaire très expansionniste. Le commerce mondial conserverait ainsi de l’élan, malgré une légère décélération. Les marchés financiers, quant à eux, semblent résister à la montée des incertitudes.

La croissance de la zone euro s’établirait donc en 2018 un cran en dessous du haut régime de 2017 (+ 2,1 % après + 2,6 %) et la France ne retrouverait pas, à court terme, le rythme de croissance de l’an dernier : l’activité y progresserait de + 1,7 % en moyenne annuelle, après + 2,3 % en 2017. Elle accélérerait légèrement au printemps (+ 0,3 % après + 0,2 %) puis à l’été et à l’automne (+ 0,4 % par trimestre). Au niveau macroéconomique, les grèves dans les transports n’auraient qu’un faible impact, d’au plus – 0,1 point sur la croissance du PIB au deuxième trimestre.

La consommation des ménages retrouverait un peu d’élan au fil de l’année, avec notamment – malgré la remontée de l’inflation – l’accélération du pouvoir d’achat attendue au dernier trimestre sous l’effet des baisses de cotisations salariales, de la réduction de la taxe d’habitation, ainsi que du dynamisme des revenus d’activité. L’investissement des entreprises garderait du tonus malgré la baisse de régime en début d’année ; celui des ménages continuerait en revanche de décélérer. Le commerce extérieur, quant à lui, soutiendrait la croissance économique notamment en fin d’année, comme en 2017, compte tenu du calendrier attendu des livraisons aéronautiques.

Dans ce contexte, les créations d’emploi resteraient dynamiques, en particulier dans le secteur tertiaire, mais elles ralentiraient dans le sillage de l’activité économique. L’emploi total progresserait ainsi de 183 000 personnes en 2018. Le taux de chômage continuerait de diminuer, à un rythme cependant moins important qu’en 2017 : il s’établirait à 8,8 % fin 2018, soit une baisse de 0,2 point sur un an.

Ce scénario reste subordonné aux nombreuses incertitudes qui caractérisent actuellement l’environnement international, qu’il s’agisse d’aléas économiques ou financiers (cours du pétrole, marché des changes, politique monétaire, protectionnisme, tensions sur l’offre) ou bien politiques avec par exemple les conséquences des élections italiennes sur la bonne marche de la zone euro. En France, le dynamisme du pouvoir d’achat attendu en fin d’année pourrait par ailleurs entraîner dans son sillage une consommation des ménages plus vigoureuse que prévu.

Vue d’ensemble

Ralentissement des échanges internationaux en début d’année 2018

Le commerce mondial a freiné au premier trimestre 2018 après une année faste

Les importations des principales économies mondiales, avancées comme émergentes, ont perdu une bonne partie de leur élan de 2017 en début d’année 2018. Le dynamisme des échanges des économies avancées à l’automne (+ 1,8 %) a fait place à une forte modération durant l’hiver (+ 0,4 % au premier trimestre). Les évolutions des climats des affaires de chaque grande zone indiquent également un pic d’activité mondiale fin 2017, suivi d’un repli, ce dernier étant plus marqué pour la zone euro et les émergents que pour les économies avancées hors zone euro.

Début 2018, l’activité a ralenti dans les pays avancés...

Dans la plupart des économies avancées, l’embellie de l’activité en 2017 a laissé place à un ralentissement au premier trimestre 2018. Alors qu’aux États-Unis et en zone euro, le produit intérieur brut (PIB) a moins crû début 2018 que fin 2017 (+ 0,5 % après + 0,7 % outre-Atlantique, + 0,4 % après cinq trimestres de croissance à + 0,7 % en zone euro), il a calé au Japon (– 0,2 % après + 0,3 %), faisant suite à une croissance inédite depuis 2013 (+ 1,7 % en 2017). Aux États-Unis, le ralentissement du PIB a concerné l’ensemble des principaux postes de la demande, tandis qu’au Japon c’est la poursuite de la baisse de l’investissement des ménages (– 1,8 % après – 2,7 % au quatrième trimestre 2017) conjuguée à la stagnation des autres composantes de la demande qui explique le ralentissement observé. Côté européen, ce seraient plutôt les exportations et l’investissement qui auraient décéléré.

... et notamment dans les principales économies européennes

Les principales économies européennes connaissent une baisse de régime en début d’année, qu’il s’agisse de l’Allemagne (+ 0,3 % après + 0,6 %), de la France (+ 0,2 % après + 0,7 %) et du Royaume-Uni (+ 0,1 % après + 0,4 %). L’Espagne et l’Italie ont quant à elles conservé leur rythme de croissance, soutenu pour la première (+ 0,7 % à + 0,9 % par trimestre depuis trois ans), plus modeste pour la seconde (+ 0,3 % à + 0,4 % par trimestre depuis le printemps 2017).

La croissance reste soutenue dans les principales économies émergentes

Au sein des économies émergentes, l’activité s’est reprise en Russie et au Brésil en 2017, après deux années de récession, et la croissance en Inde et dans les pays d’Europe centrale et orientale est toujours dynamique. Enfin, le ralentissement très progressif de l’économie chinoise tend à se poursuivre, mais la croissance affichée y reste néanmoins substantielle (+ 1,6 % au premier trimestre 2018).

Après une fin d’année 2017 vigoureuse, l’activité en France perd de son élan

En 2017, la croissance du produit intérieur brut français (+ 2,3 %) a été la plus forte depuis 2007 (éclairage Les comptes trimestriels sont passés en base 2014). Elle a principalement été soutenue par le dynamisme de l’investissement des entreprises (+ 4,4 %) et des ménages (+ 5,6 %). L’investissement des entreprises a calé en début d’année (+ 0,1 % au premier trimestre 2018 après + 1,2 %). Ce ralentissement provient essentiellement du repli de l’investissement en biens manufacturés, alors que l’investissement en services progresse toujours vivement. La consommation des ménages a crû modérément en 2017 (+ 1,1 %), et a conservé au premier trimestre 2018 le rythme atone de fin d’année 2017 (+ 0,1 %). Les échanges extérieurs se sont légèrement repliés en début d’année après des exportations vigoureuses fin 2017 (+ 2,3 %). Celles-ci avaient notamment conduit à une forte contribution du commerce extérieur à la croissance au quatrième trimestre 2017 (+ 0,7 point) ; cette contribution est devenue nulle au premier trimestre 2018.

La normalisation des politiques monétaires en avance de phase outre-Atlantique

La Fed continue de relever le taux directeur américain

La Réserve fédérale (Fed) poursuit son programme de relèvement progressif du taux directeur américain dans un contexte de hausse de l’inflation (à + 2,3 % en glissement annuel au premier trimestre). Celle-ci s’élèverait à + 3,0 % au deuxième trimestre 2018 du fait de la hausse des prix pétroliers et d’une conjoncture du marché du travail très favorable (chômage à 4,1 % en début d’année 2018). Fixé à 1,75 % depuis mars 2018, le taux directeur américain pourrait être relevé encore deux à trois fois d’ici la fin de l’année. Parallèlement, la Fed amplifierait la réduction de son bilan, à la différence de la Banque centrale européenne (BCE) qui poursuit de façon allégée son assouplissement quantitatif.

Les taux américains remontent bien plus que les taux européens

En zone euro, la BCE poursuivrait ses rachats d’actifs au moins jusqu’en septembre 2018. Ce rythme serait toutefois réduit de moitié en 2018 (30 milliards d’euros par mois) par rapport à 2017. En raison du maintien des taux directeurs très bas par la BCE (taux de refinancement à 0,0 % depuis mars 2016), les taux souverains en zone euro demeureraient beaucoup plus faibles qu’aux États-Unis (environ 0,5 % en Allemagne et 0,8 % en France contre près de 3,0 % outre-Atlantique pour les taux à 10 ans). Les incertitudes politiques récentes en Italie et en Espagne ont toutefois conduit à une remontée subite des taux des emprunts nationaux à 10 ans.

L’euro se replie un peu après la forte appréciation de 2017

Après avoir atteint 1,25 $ en début d’année, l’euro est revenu un peu en deçà de 1,20 $ au printemps, permettant au taux de change effectif réel de la France de se replier après s’être nettement apprécié en 2017.

Le déficit du marché physique des produits pétroliers tire le prix du baril à la hausse

En 2017, l’accord de limitation de la production de pétrole des pays de l’Opep a été respecté et l’offre s’est donc maintenue légèrement en deçà de la demande. Cette situation pourrait se poursuivre durant l’année 2018. Les stocks actuels de produits pétroliers, encore relativement élevés, continueraient de décroître au cours de l’année. La demande progresserait toujours à un rythme plus soutenu que l’offre, du fait principalement de la Chine, des émergents et des États-Unis. En conséquence, et dans un contexte de tensions géopolitiques au Moyen-Orient, le prix du baril de Brent a dépassé 75 $ au printemps 2018 alors qu’il s’établissait autour de 50 $ à la mi-2017.

Soutien budgétaire aux États-Unis

Les incitations fiscales porteraient l’investissement et se conjugueraient aux dépenses budgétaires pour soutenir la croissance américaine

Malgré un climat des affaires moins bien orienté au premier semestre 2018 qu’en fin d’année dernière, l’économie américaine accélérerait au printemps (+ 0,7 %). En effet, les allègements fiscaux soutiendraient, entre autres, l’investissement des entreprises (+ 1,6 % au deuxième trimestre après + 2,2 %, puis + 2,0 % par trimestre au second semestre) via notamment les mesures de suramortissement. Le revenu des ménages bénéficierait à la fois des allégements fiscaux votés fin 2017 et du dynamisme des salaires. Le pouvoir d’achat des ménages serait donc bien plus dynamique en 2018 (+ 2,2 %) qu’en 2017 (+ 1,2 %), malgré le regain d’inflation d’ici la fin de l’année. La consommation des ménages continuerait de croître de 0,7 % au deuxième trimestre puis de 0,5 % par trimestre, et leur taux d’épargne se maintiendrait à peine au-dessus de 2,9 %. Au total, l’économie américaine accélérerait au second semestre (+ 0,8 % par trimestre), conduisant à une croissance annuelle supérieure à celle de 2017 (+ 2,8 % contre + 2,3 %). Le caractère procyclique de la politique budgétaire des États-Unis pourrait toutefois faire peser un risque de surchauffe sur l’activité économique.

Au Royaume-Uni, l’activité rebondirait au printemps après une fin d’hiver affectée par les chutes de neige (+ 0,5 % au deuxième trimestre après + 0,1 %), puis progresserait à un rythme plus lent (+ 0,3 % par trimestre), pénalisée par l’attentisme en vue du Brexit.

La croissance reste robuste dans les principaux pays émergents

En Chine, la croissance conserverait un rythme soutenu en 2018, à peine inférieur à celui de 2017 (+ 6,4 % après + 6,9 % en 2017). À partir du deuxième trimestre 2018, les exportations chinoises progresseraient modérément (environ + 0,9 % par trimestre), freinées par l’appréciation passée du yuan et par une demande extérieure moins dynamique qu’en 2017, tandis que les importations marqueraient une pause après un premier trimestre dynamique, avant de croître de 1,5 % par trimestre au second semestre 2018. Les économies russe et brésilienne, en accélération, bénéficieraient en 2018 de la baisse des taux directeurs et de la faiblesse de l’inflation. L’activité indienne et celle des pays d’Europe de l’Est conserveraient également leur dynamisme. En revanche, la Turquie pâtirait de la remontée de l’inflation après la forte dépréciation de sa monnaie.

Les échanges internationaux suivraient un rythme un peu moins dynamique à partir du printemps 2018

Les échanges mondiaux croîtraient de l’ordre de + 1,1 % par trimestre au partir du deuxième trimestre 2018. Le rythme de fin d’année serait plus modéré qu’en 2017, aussi bien pour les économies émergentes que les économies avancées, comme le suggère l’orientation un peu moins favorable des climats des affaires. Le risque de politiques commerciales plus protectionnistes pèserait également sur la dynamique des échanges internationaux du second semestre.

La croissance en zone euro en 2018 s’établirait un cran en dessous du haut régime de 2017

Comme le suggèrent les enquêtes de conjoncture, l’activité ralentirait par rapport à 2017

Les enquêtes de conjoncture européennes font état d’un repli de l’opinion des entrepreneurs depuis le début de l’année, dans les quatre principaux pays de la zone euro et dans l’ensemble des secteurs (industrie, services, commerce) à l’exception de la construction. Dans le prolongement du premier trimestre 2018, la croissance du PIB de la zone euro serait donc modérée au deuxième (+ 0,4 %). Après avoir atteint en 2017 un rythme de croissance inédit depuis 2010 (+ 0,7 % par trimestre), la zone euro retrouverait une cadence plus modérée en 2018. La croissance trimestrielle du PIB à partir du deuxième trimestre serait ainsi de + 0,5 % en Allemagne (+ 0,4 % en fin d’année, en léger ralentissement sous l’effet des contraintes d’offre), + 0,3 % en Italie et + 0,6 % en Espagne. Au final, après une croissance de 2,6 % en 2017, le PIB de la zone euro progresserait de 2,1 % en 2018.

Les salaires européens entraîneraient le pouvoir d’achat

L’emploi en zone euro progresserait de 1,5 % en 2018 (après + 1,3 %) et les salaires réels accéléreraient (+ 0,9 % après + 0,2 %), si bien que les gains de pouvoir d’achat excéderaient ceux de 2017 (+ 2,1 % après + 1,4 %). Après avoir progressé de 0,5 % au premier trimestre, la consommation des ménages ralentirait au deuxième trimestre (+ 0,4 %) et accélérerait à + 0,5 % par trimestre au second semestre.

L’investissement en zone euro ralentirait

L’investissement en construction progresserait toujours de façon robuste en zone euro en 2018 (+ 3,6 % après + 4,1 %). Du côté des biens d’équipement, la situation économique favorable et les tensions sur l’appareil productif conduiraient les entreprises à maintenir un rythme élevé d’investissements. La baisse passagère du premier trimestre (– 0,5 %) serait rattrapée par le dynamisme des trimestres suivants (+ 0,9 % à + 1,2 % par trimestre), portant la croissance annuelle des investissements en équipement à + 4,5 % en 2018, en peu en deçà de celle de 2017 (+ 5,4 %).

Les échanges extérieurs français accéléreraient au cours de l 'année

Après une pause en début d’année, les exportations retrouveraient du dynamisme en lien avec la demande mondiale adressée à la France

Au premier trimestre 2018, les exportations françaises ont baissé, après un dernier trimestre 2017 en fanfare (– 0,3 % après + 2,3 %), en particulier pour les matériels de transport. Les cadences des livraisons aéronautiques accéléreraient en cours d’année, notamment à l’automne 2018, avec une progression des exportations manufacturières comparable à celle du dernier trimestre 2017. Par ailleurs, les exportations agricoles et de services accéléreraient également en 2018. La demande mondiale adressée à la France, qui croîtrait de 4,3 % en moyenne en 2018, soutiendrait les exportations, qui progresseraient de 4,4 % en moyenne sur l’année (après 4,7 % en 2017).

La contribution du commerce extérieur à la croissance serait faible d’ici la fin de l’année

Les importations ont également reflué en début d’année 2018 mais retrouveraient une progression supérieure à 1,0 % par trimestre à partir du deuxième trimestre. Au total, le commerce extérieur contribuerait positivement à la croissance en fin d’année 2018. En moyenne annuelle, il contribuerait à hauteur de + 0,5 point à la croissance du PIB, davantage du fait des importantes livraisons de fin d’année 2017 que des contributions du dernier trimestre 2018.

L’activité française ralentirait par rapport à 2017

Le climat des affaires se replie après avoir atteint des sommets fin 2017, mais les tensions sur l’offre persistent

Dans tous les secteurs à l’exception du bâtiment, les enquêtes se sont repliées depuis leur point haut de la fin 2017 ou de janvier 2018. Le climat des affaires en France est ainsi passé de 112 en décembre 2017 à 106 en mai 2018, en baissant de façon continue. Cependant, les tensions sur l’offre continuent de progresser ou se maintiennent à des niveaux élevés. Ainsi, le taux d’utilisation des capacités de production dans l’industrie est toujours au-dessus de 85 %, son plus haut niveau depuis l’été 2008. Dans la construction, il dépasse même 89 %.

Les rythmes de production seraient un peu atténués par rapport à la fin 2017

La production manufacturière, particulièrement allante en fin d’année 2017, s’est contractée au premier trimestre (– 1,0 % après + 1,3 %). Elle progresserait moins rapidement qu’en 2017 au cours des trois trimestres suivants. Sur l’ensemble de l’année, la production manufacturière augmenterait deux fois moins vite qu’en 2017 (+ 1,2 % en moyenne annuelle en 2018). La production de services marchands hors commerce continuerait sa progression soutenue de + 0,4 % à + 0,5 % par trimestre jusqu’à la fin d’année 2018, suivant un rythme toutefois moins dynamique que l’an dernier. Dépendant de la conjoncture de l’industrie et des services, le commerce connaîtrait également une expansion moins rapide en 2018 qu’en 2017. La construction progresserait un peu moins vite qu’en 2017 à partir du printemps (de + 0,3 % à + 0,4 % par trimestre), du fait notamment du ralentissement de l’investissement des ménages en bâtiment. Enfin, l’activité dans les transports serait affectée au deuxième trimestre par les grèves dans le secteur ferroviaire et aérien puis elle reviendrait à la normale à l’été.

Au total, le PIB progresserait moins vite qu’en 2017, de 0,3 % au deuxième trimestre puis de + 0,4 % au troisième comme au quatrième trimestre 2018. La croissance annuelle de l’économie française serait de + 1,7 % en 2018 après + 2,3 % en 2017.

Dans le sillage de l’activité, les créations d’emploi se poursuivraient sur un rythme plus modéré

L’emploi marchand ralentirait en 2018

La croissance soutenue de l’année 2017 a été bénéfique à l’emploi salarié marchand qui a vivement augmenté, de 172 000 emplois au premier semestre puis 161 000 au second. Début 2018, les enquêtes de conjoncture signalent une situation un peu moins favorable pour les variations des effectifs tandis que les difficultés de recrutement restent importantes. Au premier semestre, l’emploi salarié marchand croîtrait à un rythme inférieur à celui de l’année précédente (+ 83 000), rythme qu'il garderait en seconde moitié d’année (+ 80 000). Les créations d’emploi dans le tertiaire marchand hors intérim s'atténueraient (+ 134 000 sur l’année, après + 175 000 en 2017), constituant l’essentiel de la hausse. L’intérim ralentirait nettement (+ 17 000 après + 124 000 en 2017) alors que l’industrie perdrait à nouveau des emplois.

L’emploi non marchand pâtirait de la baisse des emplois aidés en première moitié d’année puis rebondirait au second semestre

L’emploi salarié non marchand a diminué au deuxième semestre 2017 (– 9 000) sous l’effet d’une baisse du nombre de bénéficiaires d’emplois aidés, avec notamment une forte réduction des entrées dans les anciens contrats à partir de la mi-2017. Cette tendance s'estomperait au premier semestre 2018 (– 3 000) puis s’inverserait au second (+ 22 000), profitant de la montée en charge du nouveau dispositif « Parcours emploi compétences ». Au total, l’emploi (y compris non salarié) progresserait de 81 000 au premier semestre puis de 102 000 au second, soit 183 000 sur l ’année 2018.

Le taux de chômage diminuerait de nouveau en 2018, à un rythme moins rapide qu’en 2017

Au-delà des fluctuations au trimestre le trimestre, le taux de chômage continuerait de baisser en 2018, pour s’établir à 8,8 % en fin d’année après 9,0 % fin 2017 et 10,0 % fin 2016. Sous l’effet de créations d’emploi toujours solides, la tendance à la baisse du taux de chômage se poursuivrait à un rythme toutefois moindre qu’en 2017.

Les mesures fiscales soutiendraient les gains de pouvoir d’achat d’ici la fin de l’année

L’inflation s’est redressée au printemps, l’inflation sous-jacente augmenterait un peu

Alors que l’inflation a été relativement modérée en 2017 (+ 1,0 % en moyenne), elle s’est sensiblement rehaussée durant l’hiver et le printemps 2018, pour atteindre + 2,0 % en mai. Cette accélération des prix à la consommation provient notamment du renchérissement des prix de l’énergie et du relèvement des prix du tabac. Si l’inflation sous-jacente a également augmenté (passant de + 0,5 % en moyenne en 2017 à + 0,8 % en avril 2018), elle s’est toutefois relevée un peu plus modérément que l’inflation d’ensemble. Le dynamisme des salaires et la baisse du taux de chômage contribueraient à la faire remonter jusqu’à + 1,1 % d’ici la fin de l’année. L’inflation d’ensemble atteindrait 2,3 % durant l’été puis refluerait autour de + 1,7 % à la fin de l ’année.

Les salaires réels seraient freinés par la remontée de l’inflation

Les salaires nominaux par tête dans le secteur marchand non agricole accéléreraient un peu en 2018 (+ 2,1 % après + 1,7 %), compte tenu des difficultés de recrutement déclarées par les employeurs. En revanche, l’accélération des prix à la consommation rognerait un peu plus les salaires réels qu’en 2017, si bien qu’ils progresseraient de 0,5 % en 2018 comme en 2017. Dans la fonction publique, le gel du point d’indice et le report de l’application de certaines modalités du protocole Parcours professionnels, carrières et rémunérations (PPCR) contribueraient à un léger ralentissement des salaires nominaux.

Le dynamisme des revenus d’activité soutiendrait le pouvoir d’achat en 2018 mais serait compensé par le regain d’inflation

Les revenus d’activité, progressant de près de 3 % grâce aux créations d’emploi combinées à la poursuite du dynamisme des salaires, soutiendraient le revenu disponible brut des ménages (+ 2,6 % en 2018 après + 2,7 % en 2017). Cependant, le regain d’inflation en 2018 freinerait la progression du pouvoir d’achat en moyenne annuelle (+ 1,0 % après + 1,4 %). La chronique infra-annuelle serait également marquée en 2018 par le calendrier fiscal : après avoir reculé en début d’année, le pouvoir d’achat rebondirait vivement en fin d’année du fait notamment de la suppression du reliquat de cotisations d’assurance chômage pour les salariés et de la réduction de la taxe d’habitation pour les ménages concernés.

La consommation des ménages progresserait à un rythme de nouveau modéré

Les ménages consommeraient à un rythme modéré peu affecté par les fluctuations de leur pouvoir d’achat

Malgré des gains de pouvoir d’achat relativement soutenus en 2017, la consommation des ménages a crû modérément (+ 1,1 %) au regard de la situation économique favorable. Cette modération se poursuivrait en 2018, la consommation ne progressant que de 1,0 % en moyenne sur l’année. Les ménages lisseraient les effets sur leur consommation des fluctuations trimestrielles de leur pouvoir d’achat. Ils n’accéléreraient donc que de manière contenue le rythme de leurs achats d’ici la fin de l’année. Leur taux d’épargne s’établirait ainsi à 15,1 % en fin d’année, après un creux à 13,6 % au premier trimestre 2018.

Le repli de la consommation de biens manufacturés au premier trimestre (– 0,2 %) ne serait suivi que d’une accélération modérée durant les trimestres suivants, conduisant à un net ralentissement des achats manufacturés des ménages en 2018 (+ 0,9 % après + 1,8 %). La consommation en services marchands conserverait son rythme de 2017 (+ 1,8 %). Enfin, les consommations liées au tourisme des étrangers bénéficieraient encore du rattrapage de la fréquentation touristique après la forte baisse de l’année 2016.

L’investissement des entreprises serait encore soutenu, notamment en services ; celui des ménages décélérerait

Le taux d’investissement des entreprises continue de battre des records

Après avoir fortement progressé en 2017, l’investissement des entreprises non financières (ENF) resterait dynamique en 2018 (+ 3,1 % après + 4,4 %), malgré la baisse de régime temporaire au premier trimestre (+ 0,1 %) qui provient surtout du repli de l’investissement des entreprises en biens manufacturés. Au deuxième trimestre, il progresserait de 0,9 % puis de + 0,6 % par trimestre au second semestre. Cela porterait fin 2018 le taux d’investissement des ENF à 22,4 %, un point au-dessus de son précédent sommet de 2008. Les tensions sur l’appareil de production ainsi que la revalorisation d’un point du taux de CICE (versé en 2018 au titre de l’année 2017), expliqueraient la poursuite de cette hausse malgré le léger ralentissement de l’activité. Ce dynamisme serait principalement tiré par l’investissement en services, qui gagnerait près de 6 % en 2018 comme en 2017, tandis que l’investissement en construction et en produits manufacturés croîtrait d’un peu plus de 1 % en moyenne sur l’année.

L’investissement des ménages ralentirait ; celui des administrations publiques progresserait de nouveau nettement

L’investissement des ménages, dont la croissance a été en 2017 la plus élevée depuis 1999, ralentirait nettement en 2018 (+ 1,6 % après + 5,6 %). Les ventes de logements anciens, qui contribuent via l’investissement en services immobiliers, ainsi que les permis de construire seraient en léger recul. Ainsi, à l’horizon de la prévision, l’investissement desménages serait quasiment stable. Après cinq années de repli, l’investissement public a rebondi en 2017. Il accélérerait en 2018 (+ 2,4 % après + 1,6 %) profitant notamment des dépenses associées aux chantiers du Grand Paris Express.

Les incertitudes se multiplient

Les risques monétaires et financiers perdurent dans un contexte de haut de cycle

Si les principales banques centrales resserrent de manière très progressive leur politique monétaire, la phase conjoncturelle actuelle fait peser un risque de correction financière lié au risque de surchauffe économique, à l’ampleur de l’endettement et aux niveaux atteints par les marchés boursiers. La politique budgétaire expansive menée aux États-Unis est, en outre, de nature à augmenter ce risque.

Les aléas politiques et les tensions géopolitiques persistent

Alors que les incertitudes politiques persistent en Europe (en Italie et en Espagne en fonction des politiques menées par les nouveaux gouvernements, au Royaume-Uni avec la mise en oeuvre du Brexit), les risques protectionnistes pèsent également sur la vigueur des échanges internationaux (en particulier entre les États-Unis, la Chine et l’Europe). Par ailleurs, les marchés pétroliers pourraient pâtir du regain de tensions au Moyen-Orient.

Les tensions sur l’offre pourraient finir par contraindre la production dans certains pays

Certains pays, notamment l’Allemagne, ont atteint des niveaux inédits de contraintes sur leur appareil productif. Pour l’instant, l’absence de net regain d’inflation (qu’il s’agisse des prix ou des salaires) suggère que leur activité économique peut se poursuivre à un rythme encore solide. Mais ces contraintes pourraient à terme venir grever leur croissance. À l’inverse, en France et en Allemagne, la consommation des ménages pourrait être plus dynamique que prévu, compte tenu des gains importants de pouvoir d’achat escomptés (en particulier en fin d’année en France).