Insee Analyses Hauts-de-FranceSalaire horaire dans le secteur privé : les Hauts-de-France dans la moyenne de province

Auteurs : Mickaël Bréfort, Véronique Bruniaux, Didier Castille

En 2014, le salaire horaire dans le secteur privé des Hauts-de-France est en moyenne de 17,4 euros bruts, soit l'équivalent à ce qui se pratique à l'échelle de la province. Plusieurs facteurs déterminant pour le niveau de salaire, comme la taille de l'entreprise, le type de contrat de travail ou l'âge du salarié, impriment une marque plus forte en Hauts-de-France que dans les autres régions. Ainsi, l'écart de salaire horaire entre les salariés des petites et grandes entreprises est plus étendu qu'en province. Il en est de même entre les salariés ayant un contrat à durée indéterminée ou non et entre salariés plus jeunes et plus âgés.

Insee Analyses Hauts-de-France
No 70
Paru le :Paru le15/02/2018
Auteurs : Mickaël Bréfort, Véronique Bruniaux, Didier Castille
Insee Analyses Hauts-de-France No 70- Février 2018

Avec 2 180 000 emplois, les Hauts-de-France concentrent 8,2 % de l’emploi de la France métropolitaine et se situent au 5e rang des 13 régions. Le salariat y est un peu plus développé que dans les autres régions et concerne plus de 9 emplois sur 10. Parmi les salariés, 1 200 000 sont employés dans le secteur privé. Ils représentent 62 % des salariés, soit 3 points en dessous du niveau national, positionnant la région au 9e rang des 13 régions de métropole.

Un salaire horaire comparable à la moyenne des régions de province

Dans les Hauts-de-France, le salaire horaire brut moyen dans le secteur privé s’élève à 17,4 euros en 2014. Pour comparaison, le salaire minimum interprofessionnel de croissance (Smic) est de 9,5 euros. Ce niveau est similaire à celui de la France de province (17,5 euros), mais inférieur de presque 10 % à celui de la France métropolitaine (19,3 euros). En effet, l’Île-de-France se démarque nettement des autres régions avec un salaire horaire de 24,5 euros, soit un niveau de rémunération supérieur de 25 % à celui pratiqué en Auvergne-Rhône- Alpes (18,4 euros, première des régions de province). À l’opposé, se trouve la Corse avec un salaire horaire brut de 16,1 euros. Au final, les Hauts-de-France se situent en 6e position parmi les 13 régions métropolitaines (figure 1).

Figure 1Des salaires horaires dans la moyenne de provinceSalaire horaire brut moyen dans le secteur privé en 2014

Des salaires horaires dans la moyenne de province
CODGEO REGION Salaire horaire brut (en euros)
11 Île-de-France 24,47
84 Auvergne-Rhône-Alpes 18,44
93 Provence-Alpes-Côte d'Azur 17,99
44 Grand Est 17,51
76 Occitanie 17,43
32 Hauts-de-France 17,35
28 Normandie 17,26
24 Centre- Val de Loire 17,20
52 Pays de la Loire 16,99
75 Nouvelle-Aquitaine 16,90
27 Bourgogne-Franche-Comté 16,81
53 Bretagne 16,65
94 Corse 16,10
  • Source : Insee, Dads – salariés en 2014.

Figure 1Des salaires horaires dans la moyenne de provinceSalaire horaire brut moyen dans le secteur privé en 2014

  • Source : Insee, Dads – salariés en 2014.

Les entreprises des départements du Nord et de l’Oise offrent les salaires horaires moyens les plus élevés de la région, respectivement de 18,1 euros et 17,6 euros. Ces deux départements occupent les 10e et 17e positions parmi ceux de province. Le salaire horaire est inférieur à la moyenne régionale dans l’Aisne (16,2 euros), le Pas-de-Calais (16,3 euros) et la Somme (16,7 euros). Ces départements se retrouvent ainsi en milieu du classement.

Des écarts de salaire liés aux caractéristiques des régions

Les écarts de salaire horaire entre régions s’expliquent notamment par les caractéristiques des personnes (âge, sexe) et de leur emploi (type de contrat, condition d’emploi, catégorie sociale), ainsi que la structure du tissu productif local (secteur d’activité, taille des entreprises). Chaque région se caractérise ainsi par une combinaison particulière de ces facteurs. Pour exemple, une proportion de cadres plus importante en Île-de-France, et dans une moindre mesure en Auvergne-Rhône- Alpes, augmente le salaire horaire régional. La présence de secteurs d’activité fortement rémunérateurs, comme celui des activités financières et des assurances, y contribue également.

Des caractéristiques qui se compensent en Hauts-de-France

Ces différents facteurs orientent vers le haut ou vers le bas le salaire horaire moyen d’une région. En Hauts-de-France, leurs effets se compensant, le niveau de rémunération dans le secteur privé est équivalent à celui observé en province.

Les entreprises de grande taille sont plus présentes dans la région. Ainsi, 46,4 % des entreprises emploient 250 salariés ou plus contre 39,2 % en moyenne des régions de province. En offrant des salaires plus importants que dans les entreprises de plus petite taille, elles contribuent à élever le niveau de salaire horaire moyen de la région (figure 2).

Figure 2Taille d’entreprise et catégorie socioprofessionnelle influencent l’écart de salaireCaractéristiques du secteur concurrentiel en Hauts-de-France et en France de province

%
Taille d’entreprise et catégorie socioprofessionnelle influencent l’écart de salaire (%)
Hauts-de-France France de province
Part des entreprises d'au moins 250 salariés 46 39
Part des ouvriers 38 36
Part du secteur santé et action sociale 14 13
Part des salariés au Smic 07 06
  • Source : Insee, Dads – salariés en 2014.

Figure 2Taille d’entreprise et catégorie socioprofessionnelle influencent l’écart de salaireCaractéristiques du secteur concurrentiel en Hauts-de-France et en France de province

  • Source : Insee, Dads – salariés en 2014.

À l’inverse, d’autres caractéristiques orientent le salaire horaire moyen de la région vers la baisse. Ainsi, les ouvriers, plus nombreux qu’en province (38,4 % contre 35,9 %), ont un niveau de rémunération inférieur à celui des autres catégories. De même, la plus forte présence dans la région d’activités liées à l’enseignement, la santé humaine et l’action sociale dans le secteur privé (13,6 % contre 12,9 % en province) orientent vers le bas également le salaire. En effet, les salaires horaires pratiqués y sont plus faibles que dans les autres secteurs d’activités.

Pour expliquer les écarts de salaire entre salariés, plusieurs caractéristiques entrent en jeu. Pour mieux appréhender l’impact de chacune d’entre elles, il faut raisonner « toutes choses observées égales par ailleurs » c’est-à-dire faire abstraction des autres caractéristiques disponibles. Cette mesure permet de mieux rendre compte des disparités entre salariés (méthodologie).

Des écarts de salaires plus marqués qu’en province selon le type de contrat…

Le salaire horaire brut des salariés en contrat à durée déterminée (CDD) est plus faible que celui des salariés en contrat à durée indéterminée (CDI) : 13,2 euros contre 17,9 euros, soit une différence de – 26,2 %. Lorsqu’on compare ces salariés à âge, sexe, catégorie sociale et type d’emploi égaux, ils gardent entre eux un écart de salaire de – 6,1 %. Celui-ci est plus important qu’en moyenne de province (– 4,8 %) (figure 3).

Figure 3Les déterminants du salaire pour les Hauts-de-France et la province

Les déterminants du salaire pour les Hauts-de-France et la province
Caractéristique Hauts-de-France France de province L'écart région - France de province est significatif ou pas
Salaire horaire brut Écart à la valeur de référence (Ref) Écart à la valeur de référence (Ref), toutes choses observées égales par ailleurs Salaire horaire brut Écart à la valeur de référence (Ref) Écart à la valeur de référence (Ref), toutes choses observées égales par ailleurs
CDD 13,2 -26,2% -6,1% 13,3 -26,1% -4,8% OUI
CDI (Ref) 17,9 18,0
Autres 15,5 -13,4% -4,0% 15,7 -12,7% -4,6% OUI
Moins de 10 salariés 15,1 -7,6% -4,8% 14,9 -9,5% -4,3% NON
de 10 à 19 salariés 16,0 -1,9% -1,3% 16,1 -2,4% -0,9% NON
de 20 à 49 salariés (Ref) 16,3 16,5
de 50 à 99 salariés 16,6 1,8% 1,4% 16,8 2,1% 1,4% NON
de 100 à 249 salariés 17,7 8,8% 3,8% 17,7 7,5% 3,3% NON
de 250 à 499 salariés 18,2 11,9% 7,7% 18,2 10,5% 5,6% OUI
500 salariés ou plus 18,7 14,9% 8,1% 19,6 19,0% 7,5% OUI
Moins de 25 ans 12,1 -30,5% -12,7% 12,1 -30,9% -12,2% NON
25-29 ans 14,2 -18,2% -9,2% 14,3 -18,3% -8,2% NON
30-34 ans 15,9 -8,3% -4,2% 16,0 -8,5% -3,7% NON
35-39 ans (Ref) 17,4 17,5
40-44 ans 18,3 5,5% 3,3% 18,4 5,0% 2,8% OUI
45-49 ans 18,8 8,1% 5,3% 18,8 7,7% 4,6% NON
50-54 ans 19,1 9,7% 6,3% 19,3 10,2% 5,9% NON
55-59 ans 19,8 13,9% 8,5% 20,0 14,3% 8,3% OUI
60 ans ou plus 24,8 42,5% 21,7% 23,6 35,1% 18,3% OUI
Temps partiel 15,1 -14,8% -2,6% 15,4 -13,7% -3,2% OUI
Temps complet (Ref) 17,8 17,8
Femme 15,6 -15,5% -8,2% 15,6 -16,6% -7,8% NON
Homme (Ref) 18,4 18,7
Cadres 31,6 66,8% 55,8% 31,6 66,3% 53,0% OUI
Employés 13,6 -28,1% -19,3% 13,6 -28,1% -18,9% OUI
Ouvriers 14,4 -23,8% -26,2% 14,4 -24,3% -25,1% OUI
Professions intermédiaires (Ref) 18,9 19,0
  • Note de lecture : dans les Hauts-de-France, les salariés travaillant à temps partiel ont un salaire inférieur de 14,8 % à la valeur de référence (Ref), soit ici celui des salariés travaillant à temps complet (15,1 contre 17,8 euros). Cependant, à âge, sexe, contrat de travail, catégorie sociale, secteur d’activité et taille de l’entreprise identiques, l’écart n’est plus que de – 2,6 %. Au niveau de la France de province, l’écart « toutes choses observées égales par ailleurs » est de – 3,2 %. Cet écart de salaire entre personnes travaillant à temps partiel et personnes travaillant à temps complet est moins important dans la région qu’en France de province, puisque le test statistique de Chow pratiqué conclut à la significativité de cet écart (valeur « OUI » dans la dernière colonne du tableau). Pour d’autres caractéristiques, on ne peut comparer l’écart constaté en région à celui constaté au niveau France de province au vu du résultat du test réalisé.
  • Source : Insee, Dads – salariés en 2014.

… ainsi que selon la taille de l’entreprise ou l’âge du salarié

Le salaire est également lié à la taille de l’entreprise. En Hauts-de-France, il est de 18,2 euros dans les entreprises de 250 à 499 salariés et de 15,1 euros dans les moins de 10 salariés. Si on le compare au salaire pratiqué dans les entreprises de 20 à 49 salariés (valeur de référence), après prise en compte des effets de structure, l’écart de rémunération est respectivement de + 7,7 % et – 4,8 %. En province, les écarts sont moins marqués, + 5,6 % et – 4,3 %.

Enfin, l’avancement en âge se traduit par une croissance du salaire. Ainsi, un salarié des Hauts-de-France gagne 19,8 euros bruts de l’heure quand il est âgé de 55 à 59 ans et 24,8 euros bruts de l’heure quand il a 60 ans ou plus. Son salaire horaire est respectivement supérieur de 13,9 % et 42,5 % à celui d’un salarié âgé de 35 à 39 ans (17,4 euros). Après prise en compte des effets de structure, l’écart atteint + 8,5 % et + 21,7 %, soit des différences supérieures à celles observées en moyenne en province (+ 8,3 % et + 18,3 %).

Un salaire selon la durée de l’emploi, le sexe et la catégorie sociale moins différencié par rapport à la province

Dans la région comme au niveau national, un salarié à temps complet touche un salaire horaire plus important qu’un salarié à temps partiel : 17,8 euros contre 15,1 euros, soit un écart d’environ – 15 %. Après prise en compte des effets de structure, celui-ci se réduit sensiblement mais reste inférieur de 2,6 %, soit une différence proche de la moyenne de province (– 3,2 %).

De la même façon, les femmes sont moins bien rémunérées que les hommes. Dans les Hauts-de-France, leur salaire horaire brut est de 15,6 euros contre 18,4 euros pour les hommes, soit – 15,5 %. À caractéristiques identiques, l’écart de salaire femmes-hommes subsiste et s’élève à – 8,2 %. Cet écart est proche de celui observé en moyenne de province (– 7,8 %).

Une autre dimension importante du salaire est la catégorie socioprofessionnelle. En 2014, le salaire horaire d’un cadre de la région est de 31,6 euros contre 18,9 euros pour un salarié classé en profession intermédiaire, soit un écart relatif de + 66,8 %. À âge, sexe, conditions de travail et types d’emploi égaux, ces salariés gardent entre eux un écart de salaire important (+ 55,8 %), proche de celui observé en moyenne dans les régions de province (+ 53,0 %).

Les écarts de salaire dans le commerce et la réparation automobile

Selon le secteur d’activité, le salaire horaire varie de 14,9 euros (enseignement, santé humaine et action sociale) à 24,4 euros (activités financières et d’assurance). À situations équivalentes, les écarts avec la province sont généralement proches. « toutes choses observées égales par ailleurs », le salaire dans le commerce et la réparation automobile est toutefois supérieur de 3,7 % à celui des services aux entreprises, alors qu’il est inférieur de 1,1 % en province. Comparé aux salaires pratiqués dans l’enseignement, la santé humaine et l’action sociale du secteur privé, l’écart est un peu plus prononcé en région qu’en province, – 12,2 % contre – 10,9 %.

Des emplois au Smic plus fréquents en raison d’un plus grand nombre d’ouvriers non qualifiés et d’emplois aidés

Dans les Hauts-de-France, 6,5 % des salariés du secteur privé sont rémunérés à un niveau proche du Smic, soit moins de 10 euros bruts de l’heure en 2014. La moyenne nationale est de 6 %, avec un minimum de 5  % pour l’Île-de-France et un maximum de 8,1 % pour la Corse.

Ce plus fort taux dans la région peut s’expliquer par deux facteurs, d’une part par une proportion d’ouvriers non qualifiés plus importante dans la région qu’en province, soit 15,1 % contre 13,6 % (figure 2), d’autre part par un nombre important d’emplois aidés (champ et définitions). En effet, conséquence d’un contexte économique peu favorable, la région bénéficie davantage qu’ailleurs d’emplois aidés. Elle concentre à elle seule 12,5 % du volume total des emplois aidés alloués par l’État, alors que son poids dans l’emploi salarié privé de France métropolitaine est de 8,2 %.

Pour comprendre

Champ

Le champ retenu pour l’étude est celui du secteur concurrentiel. Celui-ci correspond à l’ensemble des salariés du secteur privé et des entreprises publiques à caractère industriel et commercial. Les fonctions publiques d’État, hospitalière et territoriale (repérées par leur catégorie juridique) ainsi que les employés de particuliers-employeurs sont exclus de l’analyse. Les bénéficiaires de contrats aidés employés dans le secteur privé sont inclus dans le champ.

Méthodologie : Les déterminants individuels du salaire

L’étude s’appuie sur une modélisation des principaux déterminants des salaires bruts, à savoir les caractéristiques des salariés (âge, sexe, catégorie sociale), leurs conditions de travail (type de contrat de travail, temps complet ou non) et les caractéristiques de l’employeur (activité et taille de l’entreprise). Ce modèle de régression linéaire a été appliqué au niveau province et au niveau régional. Le logarithme du salaire horaire brut suivant traditionnellement une loi normale, c’est celui-ci qui a été modélisé. Plus qu’une analyse « toutes choses égales par ailleurs », il convient de privilégier une analyse « toutes choses observées égales par ailleurs ». En effet, plusieurs éléments caractéristiques de la constitution du salaire, tels que le diplôme ou la compétence, ne sont pas disponibles dans les DADS et quelques éléments restent inobservés.

Par ailleurs, des tests de Chow ont été mis en œuvre afin de comparer deux modèles portant sur des géographies distinctes. Il est ainsi possible d’aller plus loin dans la compréhension des écarts de salaires entre la région et la moyenne de province et de s’interroger, indépendamment des effets de structure observés, sur les particularités locales du fonctionnement du marché du travail et de détermination des salaires. Ces tests permettent de mesurer si l’effet du secteur d’activité, de la taille de l’entreprise, du sexe est proche de la moyenne observée en province ou s’il est au contraire spécifique à la région.

Définitions

Les salaires annuels et les effectifs sont connus grâce aux déclarations annuelles de données sociales (DADS) que les entreprises adressent à l’administration publique. Le salaire brut correspond à l’intégralité des sommes perçues par le salarié au titre de son contrat de travail, avant toute déduction de cotisations obligatoires salariales. Il intègre les sommes versées au titre de la participation et de l’intéressement. Pour le calcul du salaire, les bénéficiaires de contrats aidés sont pris en compte alors que les apprentis, les stagiaires en sont exclus.

Pour en savoir plus

« Les salaires dans les régions en 2012 », Insee Première n° 1623, novembre 2016.

« Un salaire horaire plus élevé qu'en France de province mais davantage de très bas salaires », Insee Analyses Provence-Alpes-Côte d'Azur n° 39, novembre 2016.