Un tiers des établissements de Bourgogne Franche-Comté se renouvelle chaque année

Madeline Bertrand, Insee Bourgogne - Stéphane Adrover, Insee Franche-Comté

Entre 2008 et 2013, le nombre d'établissements a progressé de 2,7 % par an en Bourgogne Franche-Comté. L'évolution du nombre d'établissements est loin de rendre compte du fort renouvellement du tissu productif. Créations, cessations, cessions-reprises ou transferts, ces mouvements concernent en effet chaque année un tiers des établissements. Ils sont encore plus fréquents dans les activités tertiaires où la taille des établissements est relativement faible et l’investissement de départ peu élevé. Le renouvellement constant de l’appareil productif est à l’origine de créations nettes d’emplois dans la moitié des 25 zones d’emploi de Bourgogne Franche-Comté, alors que les établissements pérennes réduisent leurs effectifs entre 2008 et 2013 dans la quasi totalité des zones.

Insee Analyses Bourgogne
No 11
Paru le :Paru le28/05/2015
Madeline Bertrand, Insee Bourgogne - Stéphane Adrover, Insee Franche-Comté
Insee Analyses Bourgogne No 11- Mai 2015

En Bourgogne Franche-Comté, les activités marchandes hors agriculture comptent 149 100 établissements au 1er janvier 2013. Depuis 2008, ce nombre a progressé en moyenne de 2,7 % par an, un rythme plus faible qu’en France métropolitaine où il atteint 3,5 %.

Le renouvellement du tissu productif est beaucoup plus important que ne le laisse imaginer cette augmentation du nombre d’établissements. Chaque jour des établissements se créent ou disparaissent, des cessions-reprises et des transferts ont lieu. En moyenne, sur la période 2008 - 2013, 35 % des établissements de la région se renouvellent chaque année : 19 % entrent dans le parc et 16 % en sortent.

Chaque année, 26 100 établissements entrent dans le stock. Ce sont principalement, pour 80 % d’entre eux, des créations ou des réactivations. Les sorties d’établissements (22 500 par an en moyenne) sont pour les trois quarts des cessations d’activité. Viennent ensuite les transferts géographiques, c’est-à-dire des déménagements d’établissements à une nouvelle adresse. Ils constituent le second motif d’entrée comme de sortie. Enfin les reprises et cessions d’établissements sont moins fréquentes et par définition s’équilibrent.

En cinq ans, le cumul de ces mouvements représente 130 700 établissements entrant, un volume équivalent au stock d’établissements actifs en 2008. Pour autant, ce fort renouvellement du tissu productif s’effectue par entrées et sorties autour d’un noyau dur d’établissements pérennes. Il existe un lien fort entre le taux de sortie et le taux d’entrée, généralement proches l’un de l’autre. Près de la moitié des nouveaux établissements créés disparaissent dans les cinq ans.

Figure 1Davantage de créations - réactivations que de cessations entre 2008 et 2013

Davantage de créations - réactivations que de cessations entre 2008 et 2013
Établissements Emplois salariés
Nombre par an % dans le total en début d'année Nombre par an % dans le total en début d'année
Entrées 26 100 18,7 30 300 5,3
Créations, réactivations 20 800 14,9 17 300 3,0
Reprises 1 300 1,0 5 200 0,9
Transferts (emménagements) 4 000 2,8 7 800 1,4
Sorties 22 500 16,0 30 100 5,2
Cessations 17 200 12,2 17 000 2,9
Cessions 1 300 1,0 5 200 0,9
Transferts (déménagements) 4 000 2,8 7 900 1,4
Évolution dans les établissements pérennes
Augmentation dans les établissements en croissance 36 200 6,2
Diminution dans les établissements en déclin 40 800 7,0
  • Champ : établissements ayant une activité marchande, hors agriculture
  • Source : Insee, REE et Clap

L’information et la communication : un secteur en constant renouvellement

Le taux de renouvellement varie selon l’activité. Il est plus élevé dans les activités tertiaires où la taille des établissements est assez faible et le coût de lancement moins élevé. Le secteur « information et communication » se renouvelle le plus avec un taux annuel de 59 %. Le renouvellement est aussi important dans les activités scientifiques et techniques et les services administratifs et de soutien ainsi que les autres activités de services marchands (soins de beauté, réparation d’ordinateur, entretien corporel…).

À l’inverse, dans la plupart des secteurs industriels, le taux de renouvellement est assez faible et varie de 16 % à 19 %. Les établissements industriels, de plus grande taille, nécessitent souvent un investissement de départ plus élevé : cela restreint le nombre d’établissements créés chaque année.

Entre 2008 et 2013, dans plusieurs secteurs particulièrement affectés par la crise, les sorties d’établissements dépassent les entrées. Cela concerne les principaux secteurs industriels, le transport et l’entreposage et les activités immobilières. Ce dernier secteur a le plus fort déficit d’établissements, avec un taux d’entrée moyen inférieur de trois points au taux de sortie (14 % contre 17 %).

Figure_2Des taux de renouvellement plus forts dans les services que dans l’industrie

  • Note de lecture : les secteurs situés à droite de la diagonale sont ceux pour lesquels les sorties sont plus nombreuses que les entrées. À l’inverse, ceux situés à gauche comptent davantage d’entrées que de sorties.
  • Champ : établissements ayant une activité marchande, hors agriculture
  • Source : Insee, REE et Clap

Toutes les zones d’emploi gagnent des établissements

Dans toutes les zones d’emploi, les entrées dépassent les sorties, durant la période 2008 - 2013, entraînant une augmentation du nombre d’établissements. Toutefois le taux de renouvellement varie d’une zone à l’autre, en lien avec leur structure productive et leur dynamique démographique et économique.

Cinq zones d’emploi renouvellent fortement leur tissu productif avec un taux annuel de près de 38 % : Sens, Besançon, Belfort-Montbéliard-Héricourt, Dijon et Dole. Les mouvements sont nombreux dans ces zones qui concentrent une grande part de l’activité de la région. Ce sont aussi celles qui gagnent le plus d’établissements, avec des taux d’entrées qui dépassent les 20 %.

À l’opposé, dans la zone du Morvan, peu attractive et dans celles de Morteau et de Saint-Claude, plus industrielles, le taux de renouvellement n’atteint pas 30 % par an.

Figure_3Besançon, Dijon, Belfort - Montbéliard - Héricourt, Sens et Dole : fort renouvellement des établissements

  • Note de lecture : les secteurs situés à droite de la diagonale sont ceux pour lesquels les sorties sont plus nombreuses que les entrées. À l’inverse, ceux situés à gauche comptent davantage d’entrées que de sorties. En bleu,les zones d’emploi de Franche - Comté, en rouge celles de Bourgogne.
  • Champ : établissements ayant une activité marchande, hors agriculture
  • Source : Insee, REE et Clap

Le renouvellement a peu d’incidence sur l’évolution de l’emploi

Tous ces mouvements ont des répercussions sur l’emploi très variables selon la taille de l’établissement considéré. Le déménagement du cabinet d’un médecin, d’un dentiste ou d’un avocat aura, a priori, moins d’impact sur l’économie que la fermeture d’une usine.

Entre 2008 et 2013, les 26 100 établissements créés, repris ou qui ont déménagé ont permis la création de 30 300 emplois par an en Bourgogne Franche-Comté. Dans le même temps, 30 100 emplois ont été détruits chaque année par cessations, cessions et transferts d’établissements. Tous ces mouvements modifient le tissu productif et par voie de conséquence la nature des emplois mais leurs effets, légèrement positifs, apparaissent faibles sur le volume même de l’emploi. Cela n’est pas le cas des établissements pérennes, c’est-à-dire ceux présents en 2008 et toujours actifs cinq ans plus tard. Ici, les effectifs salariés se sont resserrés : ils baissent de 4 500 emplois par an en moyenne.

Les établissements en croissance créent chaque année 36 200 emplois en moyenne quand ceux en déclin en détruisent 40 800. Cette diminution des effectifs dans les établissements pérennes est plus marquée en Bourgogne Franche-Comté qu’au niveau national.

Le renouvellement, créateur d’emploi dans les services

Entre 2008 et 2013, les quatre secteurs qui gagnent de l’emploi salarié sont aussi ceux dont le taux de renouvellement est parmi les plus importants. L’administration publique, enseignement, santé humaine et action sociale ainsi que les activités scientifiques et techniques, services administratifs et de soutien bénéficient d’une évolution positive de l’emploi due à la fois au renouvellement du tissu productif et aux établissements pérennes. Ce sont les deux secteurs dans lesquels l’augmentation des effectifs salariés est la plus importante. Dans deux autres secteurs des services marchands, celui de l’hébergement - restauration et celui des autres activités de services, le gain net d’emplois est uniquement porté par le renouvellement du tissu productif alors que les effectifs employés dans les établissements pérennes se réduisent.

Tous les autres secteurs perdent des emplois. Celui du commerce et de la réparation d’automobiles et de motocycles bénéficie d’un renouvellement de son tissu productif favorable à la création d’emplois. Mais, au final l’emploi diminue sous l’effet d’une plus forte réduction des effectifs salariés dans les établissements pérennes.

Dans les transports et l’entreposage, la situation est inversée : les établissements pérennes créent de l’emploi, mais pas assez pour compenser la perte nette d’effectifs induite par les créations, destructions et transferts d’établissements.

Tous les autres secteurs se caractérisent par une baisse de l’emploi dans les établissements pérennes comme au jeu des mouvements d’établissements. C’est en particulier le cas de l’industrie et des activités immobilières, secteurs dans lesquels l’emploi salarié se contracte de plus de 3 % par an en moyenne.

Figure_4Baisse de l’emploi dans les établissements pérennes surtout à l’ouest

  • Champ : établissements ayant une activité marchande, hors agriculture entre 2008 et 2013
  • Source : Insee, REE et Clap

Figure_5Des gains d’emplois liés au renouvellement surtout à l’est

  • Champ : établissements ayant une activité marchande, hors agriculture entre 2008 et 2013
  • Source : Insee, REE et Clap

Pontarlier, Lons-le-Saunier : seules zones à gagner de l’emploi

Dans la moitié des 25 zones d’emploi, plutôt situées à l'est de l’espace Bourgogne Franche-Comté, le renouvellement des établissements génère des créations nettes d’emplois. En revanche dans la quasi totalité des zones, les établissements pérennes ont perdu des emplois. Ces deux composantes se combinent de façon différente selon les zones. Celles de Pontarlier et Lons-le-Saunier cumulent l’effet positif du renouvellement et des gains d’emplois dans les établissements pérennes.

À l’inverse, dans de nombreuses zones d’emploi, aux destructions d'emplois liées au renouvellement s’ajoute la diminution des effectifs dans les établissements pérennes. Celle-ci pèse fortement sur les zones de Cosne-Clamecy, Saint-Claude et Le Creusot-Montceau. Dans celles de Chatillon, du Charolais et du Morvan, le jeu des créations-destructions et transferts d’établissements produit d’importantes diminutions d’emplois.

Enfin, un tiers des zones est soumis à deux tendances divergentes. D’une part le renouvellement leur fait gagner de l’emploi salarié. D’autre part la situation dans les établissements pérennes leur en fait perdre. C’est à Avallon que ces deux tendances opposées sont les plus prononcées, avec d’une part le gain le plus élevé pour l’emploi lié au renouvellement des établissements et d’autre part l'une des plus fortes pertes dans les établissements pérennes.

Dans les zones de Besançon et Dijon, les pertes dues aux établissements pérennes sont de même ampleur. En revanche, les mouvements d’établissements génèrent des gains plus favorables à Besançon qu’à Dijon.

Pour comprendre

L’étude porte sur les c’est-à-dire les unités de production géographiquement localisées. Un établissement produit des biens ou des services : ce peut être une usine, une boulangerie, un magasin de vêtements, un des hôtels d’une chaîne hôtelière, la « boutique » d’un réparateur de matériel informatique... Chaque établissement dépend juridiquement d’une entreprise. L’entreprise peut avoir un ou plusieurs établissements. L’étude porte sur les établissements ayant une activité principale marchande dans l’industrie, la construction, le commerce ou les services, à l’exclusion de l’agriculture.

Différents événements affectent la vie des établissements. Ainsi, la création correspond à la « naissance » de l’établissement, c’est-à-dire au début de son activité. La disparition ou cessation correspond à son « décès », c’est-à-dire à la fin de son activité. Le transfert correspond à la migration, c’est-à-dire au déplacement complet des moyens de production d’un établissement d’un lieu géographique à un autre. Pour le territoire de départ de l’établissement, on parlera de transfert sortant ; pour le territoire d’arrivée, de transfert entrant. Dans cette étude, les lieux de départ et d’arrivée ne sont pas identifiés simultanément. Un établissement qui change d’adresse dans la même zone sera compté pour la zone à la fois en transfert sortant et en transfert entrant.

D’autres événements affectant les établissements n’ont pas de correspondance avec la démographie classique. La réactivation est le fait qu’un établissement disparu reprenne son activité moins d’un an après l’avoir interrompue. Le changement de propriétaire d’un établissement se traduit par une cession du côté de l’établissement qui cède son activité et une reprise du côté de celui qui la reprend.

Sur un territoire, on comptabilise l’ensemble des entrées et des sorties. Les entrées sont les créations, transferts entrants, réactivations et reprises. Les sorties sont les disparitions, transferts sortants et cessions. Les taux d’entrée et de sortie sont mesurés en ramenant les entrées et les sorties au nombre d’établissements au 1er janvier de l’année. Les établissements pérennes sont ceux qui ne font pas l’objet d’entrée ou de sortie.

Les créations et suppressions d’emplois sont mesurées en comparant les effectifs salariés des établissements en début et en fin d’année.

Le renouvellement des établissements mesure l’ensemble des mouvements sur le territoire, en sommant l’ensemble des entrées et sorties (créations, disparitions, transferts, cessions, reprises).

La réallocation des emplois correspond à la même idée sur les emplois salariés. Elle somme l’ensemble des effectifs des établissements entrants ou sortants sur le territoire. Sont également ajoutées les augmentations d’effectifs dans les établissements pérennes en croissance et les diminutions d’effectifs dans les établissements pérennes en déclin. Les réallocations d’emplois ne sont pas celles des salariés. Un salarié peut changer d’emploi, même si l’emploi qu’il quitte et celui qu’il reprend ne sont pas modifiés.

L’emploi étudié est l’emploi salarié des établissements, au 31 décembre ou au 1er janvier selon les cas. Il est en « personnes physiques » au sens où un salarié compte pour un, même s’il est à temps partiel.

Sources

Les données sur les établissements proviennent du répertoire des entreprises et des établissements (REE) de . Les effectifs salariés sont issus de .

Définitions

Établissement / Siret :

L'établissement est une unité de production géographiquement individualisée, mais juridiquement dépendante de l'unité légale. Il produit des biens ou des services : ce peut être une usine, une boulangerie, un magasin de vêtements, un des hôtels d'une chaîne hôtelière, la « boutique » d'un réparateur de matériel informatique...

L'établissement, unité de production, constitue le niveau le mieux adapté à une approche géographique de l'économie.

Remarque :

La population des établissements est relativement stable dans le temps et est moins affectée par les mouvements de restructuration juridique et financière que celle des entreprises.

Système informatisé du répertoire national des entreprises et des établissements / Sirene / SIRENE :

Ce système informatisé du répertoire national des entreprises et des établissements (SIRENE) dont la gestion a été confiée à l'Insee enregistre l'état civil de toutes les entreprises et leurs établissements, quelle que soit leur forme juridique et quel que soit leur secteur d'activité, situés en métropole, dans les Dom (Guadeloupe, Guyane, Martinique, La Réunion et Mayotte) et à Saint-Pierre et Miquelon. Les entreprises étrangères qui ont une représentation ou une activité en France y sont également répertoriées.

Pour en savoir plus

Lecrenais C., Léger M., « Portrait des zones d'emploi bourguignonnes », Insee Bourgogne dossier n°61, septembre 2013.

Doisneau L., « un tiers du tissu productif local se renouvelle chaque année », Insee Première n° 1551, mai 2015

Batto V., Rousseau S., « Hausse des créations d’entreprise en 2014, notamment des sociétés », Insee Première n°1534, janvier 2015

Hagège C., Masson C., « Moins de créations d’entreprises individuelles en 2011 », Insee Première n°1387, janvier 2012