Insee PremièreLa création d'entreprise en 2009 dopée par les auto-entrepreneurs

Claire Hagège et Clotilde Masson, division Répertoire statistique et autres infrastructures, Insee

Le nombre de créations d'entreprises atteint un niveau record en 2009, avec 580 200 créations, soit 75 % de plus qu'en 2008. C'est le nouveau régime d'auto-entrepreneur qui explique cette augmentation sans précédent, observée dans pratiquement tous les secteurs d'activité et dans toutes les régions. Plus de la moitié des créateurs d'entreprises de 2009 sont des auto-entrepreneurs. De ce fait, la part des créations sous régime sociétaire passe de 50 % à 25 %. La part des auto-entrepreneurs est la plus élevée dans les secteurs des services, où deux créateurs sur trois sont des auto-entrepreneurs. En dehors de ce nouveau régime, le nombre de créations diminue fortement dans tous les secteurs d'activité à l'exception de l'industrie, et dans toutes les régions. La quasi-totalité des auto-entrepreneurs créent leur entreprise sans salarié. Parmi les autres créations, la part de créations avec au moins un salarié augmente très légèrement. L'impact considérable des auto-entrepreneurs sur le volume des créations ne s'explique pas par leur profil, proche de celui des autres créateurs d'entreprises individuelles.

Claire Hagège et Clotilde Masson, division Répertoire statistique et autres infrastructures, Insee
Insee Première No 1277- Janvier 2010

Le nombre de créations d'entreprises s'accroît de 75 % en 2009

Avec 580 200 créations en 2009, contre 331 400 en 2008, le nombre total de dans les secteurs marchands hors activité agricole s'accroît très fortement : + 75,1 % (graphique 1).

Toutefois, cette augmentation est principalement due aux 320 000 créations d'auto-entrepreneurs. En effet, en dehors de ce nouveau régime, le rythme des créations ralentit nettement (− 21,5 %) après sept ans de hausse. Il n'est pas possible, dans cette baisse, de distinguer précisément ce qui est lié à la récession de 2009 et ce qui relève d'un effet de substitution : un certain nombre de créateurs ont opté pour le régime d'auto-entrepreneur qu'ils considéraient comme plus avantageux, mais leur entreprise aurait tout de même vu le jour en l'absence de ce régime, alors que pour d'autres, c'est l'existence même du nouveau régime qui explique la création (encadré).

Graphique 1Le nombre de créations d'entreprises s'accroît très fortement en 2009

  • Champ : ensemble des activités marchandes non agricoles.
  • Source : Insee, répertoire des entreprises et des établissements (Sirene).

Une forte hausse des créations dans la quasi-totalité des secteurs d'activité

La hausse des créations touche tous les secteurs à l'exception des activités immobilières, mais avec de très fortes disparités sectorielles (graphique 2).

En 2009, les hausses sont les plus élevées dans les activités de services : + 109 % pour l'activité de soutien aux entreprises, + 141 % pour l'information et la communication, et + 193 % pour les autres services aux ménages qui comprennent principalement les arts, spectacles et services aux particuliers. Ces trois secteurs en très forte hausse représentent 39 % des créations de 2009, et 48 % des créations d'auto-entrepreneurs.

Dans l'industrie aussi, les créations augmentent fortement, quoique dans une moindre mesure : + 100 %. L'industrie représente 5 % des créations de 2009, et 4,5 % des créations d'auto-entrepreneurs.

Dans le secteur de l'enseignement, de la santé et de l'action sociale, dans celui du commerce, des transports, de l'hébergement et de la restauration, et enfin dans la construction, les créations sont également en forte hausse (respectivement : + 67 %, + 57 % et + 44 %). Ces secteurs rassemblent 51 % des créations de 2009, et 46 % des créations d'auto-entrepreneurs.

Les créations sont à peine au-dessus du niveau de 2008 dans le secteur des activités financières (+ 3 %), et diminuent même dans le secteur de l'immobilier (− 8 %). Le poids de ces deux secteurs dans la création d'entreprise est faible : moins de 5 % des créations de 2009, et moins de 1,5 % des créations d'auto-entrepreneurs.

Les hausses sont les plus importantes dans les secteurs où la part des auto-entrepreneurs parmi les créateurs est la plus élevée. Ainsi, dans le secteur des autres services aux ménages, trois quarts des nouveaux créateurs sont auto-entrepreneurs, contre un peu plus d'un sur deux pour la moyenne des créations. À l'inverse, dans le secteur de l'immobilier, qui représente moins de 3 % des créations de 2009, seul un créateur sur six est auto-entrepreneur (graphique 3).

Graphique 2Le nombre de créations d'entreprises évolue de manière très variable selon les secteurs d'activité en 2008 et 2009

  • Champ : ensemble des activités marchandes non agricoles.
  • Source : Insee, répertoire des entreprises et des établissements (Sirene).

Graphique 3La part de créations d'auto-entrepreneurs selon le secteur d'activité en 2009

  • Lecture : la part des auto-entrepreneurs dans les créations de chaque secteur est très importante et généralement voisine de 50 % ou supérieure. Il n'y a que deux secteurs où cette part est plus faible (de l'ordre de 15 %). Toutefois, c'est dans ces deux secteurs que la proportion d'entreprises individuelles parmi les créations est la moins importante, en 2008 et en 2009.
  • Champ : ensemble des activités marchandes non agricoles.
  • Source: Insee, répertoire des entreprises et des établissements (Sirene).

En dehors des auto-entrepreneurs, les créations baissent dans presque tous les secteurs

En 2009, la baisse du nombre de créations, hors auto-entrepreneurs, n'épargne que le secteur de l'industrie (+ 2,4 %) où, notamment, 5 530 entreprises sont créées dans le sous-secteur « production et distribution d'électricité, de gaz, de vapeur et d'air conditionné », contre 1 040 en 2008. Ce sous-secteur, où seuls 2 % des créateurs de 2009 sont des auto-entrepreneurs, représente 19 % des créations de l'industrie, contre 7 % en 2008. Dans les autres sous-secteurs de l'industrie, l'évolution des créations est nettement à la baisse (− 29 % en moyenne). Les baisses sont assez homogènes sur l'ensemble des huit autres grands secteurs d'activité (entre − 36 % et − 12 %), et ce même à un niveau plus détaillé de la nomenclature.

De même, dans toutes les régions, le nombre de créations hors régime d'auto-entrepreneur diminue nettement (entre − 32 % et − 11 %). Sur les seules régions métropolitaines, la baisse du nombre de créations est encore plus homogène : entre − 27 % et − 17 %, alors qu'avec les auto-entrepreneurs, la hausse du nombre de créations est supérieure à 60 % partout en métropole, et dépasse 97 % en Poitou-Charentes (graphique 4).

Graphique 4Le nombre de créations d'entreprises hors auto-entrepreneurs baisse entre 2008 et 2009 dans toutes les régions de façon assez homogène

  • Champ : ensemble des activités marchandes non agricoles.
  • Source : Insee, répertoire des entreprises et des établissements (Sirene).

Les créations de sociétés en baisse

Depuis 2000, la part des sociétés dans les créations d'entreprises était passée progressivement d'un peu plus de 40 % à près de 50 %. En 2009, elle chute brusquement dans tous les secteurs d'activité, du fait de l'arrivée des auto-entrepreneurs : elle ne représente plus, en moyenne, qu'un quart des créations. Par ailleurs, sur l'ensemble de cette année marquée par la récession économique, les créations de sociétés diminuent aussi en nombre. On enregistre 152 300 créations de sociétés en 2009, contre 161 800 en 2008, soit une baisse globale de 6 %.

Les représentent, de très loin, la plus grosse part des sociétés créées (85 % en 2009, 91 % en 2008). Le nombre de SARL créées baisse encore plus que celui de l'ensemble des sociétés : 128 900 créations en 2009, contre 147 000 en 2008, soit une diminution de 12 %. Cette baisse est due à la montée en puissance du régime de l'auto-entrepreneur, et à l'effet de substitution : un certain nombre d'entreprises créées sous le régime de l'auto-entrepreneur auront vocation à devenir ultérieurement des SARL.

À l'inverse des sociétés, les créations d'entreprises individuelles sont en très forte hausse (+ 152 %) : 169 600 nouvelles entreprises individuelles en 2008, 427 900 en 2009, dont trois quarts sous le régime de l'auto-entrepreneur. Les créations sous ce régime se répartissent à peu près également entre les artisans (33 %), les commerçants (31 %) et les professions libérales (36 %), alors que les autres créations d'entreprises individuelles se composent pour moitié de professions libérales, pour un tiers de commerçants, et pour un cinquième d'artisans (graphique 5).

Graphique 5Part des sociétés et des entreprises individuelles dans les créations

  • Champ : ensemble des activités marchandes non agricoles.
  • Source : Insee, répertoire des entreprises et des établissements (Sirene).

Le nombre moyen de salariés lors de la création se maintient, en-dehors des créations d'auto-entrepreneurs

La création sous le régime d'auto-entrepreneur se fait, à de très rares exceptions, sans salarié. La part de créations sans salarié sur l'ensemble des créations de 2009 est donc très élevée : 94,1 %. Mais parmi les créations hors auto-entrepreneurs, la part des créations avec au moins un salarié est un peu plus élevée qu'en 2008 : 13,2 % contre 12,6 %. Dans les entreprises qui se créent avec au moins un salarié, il y a en moyenne trois salariés, comme en 2008. Dans tous les secteurs d'activité, ce nombre moyen de salariés est très proche de ce qu'il était en 2008. C'est encore dans le secteur de l'industrie qu'il est le plus élevé (4,9) (tableau).

Tableau 1Créations d'entreprises en 2008 et 2009 en fonction du nombre de salariés et de l'activité

Créations d'entreprises en 2008 et 2009 en fonction du nombre de salariés et de l'activité
Secteur d'activité Créations sans salarié parmi l'ensemble des créations en 2008 (en %) Créations sans salarié parmi l'ensemble des créations en 2009 (en %) Créations sans salarié parmi les créations hors auto-entrepreneurs en 2009 (en %) Nombre moyen de salariés en 2008 (si au moins un salarié) Nombre moyen de salariés en 2009 (si au moins un salarié) Répartition des créations en 2009 (en %)
Industrie 82,2 92,4 85,3 4,6 4,9 5,1
Construction 77,1 88,4 76,7 2,9 3,1 13,9
Commerce, transports, hébergement et restauration 85,4 91,8 84,3 2,8 2,8 28,4
Information et communication 93,6 97,8 92,9 2,6 3,0 5,2
Activités financières 91,7 93,4 92,3 2,7 2,5 2,1
Activités immobilières 95,2 96,9 96,2 2,0 2,1 2,7
Soutien aux entreprises 91,9 96,6 91,1 3,4 3,3 21,6
Enseignement, santé, action sociale 96,7 98,3 96,4 3,2 3,1 8,7
Autres services aux ménages 89,8 96,7 85,0 2,2 2,2 12,3
Ensemble 87,4 94,1 86,8 3,0 3,0 100,0
  • Champ : ensemble des activités marchandes non agricoles.
  • Source : Insee, répertoire des entreprises et des établissements (Sirene).

Les auto-entrepreneurs ressemblent aux autres créateurs d'entreprises individuelles

Le régime de l'auto-entrepreneur est très largement représenté dans toutes les catégories de la création d'entreprise en 2009. La population des auto-entrepreneurs ne se différencie de l'ensemble des autres créateurs individuels que dans la nuance.

Les auto-entrepreneurs sont majoritairement des hommes (66 %), mais à peine plus que les autres créateurs d'entreprises individuelles (63 %). Ils sont également à peine plus âgés : ils ont en moyenne 39 ans, contre 38 ans pour les autres créateurs.

Chez les hommes, les auto-entrepreneurs sont surreprésentés par rapport aux autres créateurs, parmi les plus de 60 ans et les moins de 30 ans. Ils sont, en revanche, sous-représentés dans les classes d'âges intermédiaires (de 30 à 60 ans). Chez les femmes, les auto-entrepreneuses sont surreprésentées au-delà de 40 ans, et sous-représentées parmi les créatrices de 20 à 40 ans.

Dans trois secteurs d'activité, les auto- entrepreneurs sont nettement surreprésentés par rapport aux autres créateurs d'entreprises individuelles : « soutien aux entreprises », « information et communication » et « autres services aux ménages ». À l'inverse, les auto-entrepreneurs sont sous-représentés dans les secteurs « enseignement, santé, action sociale » et « commerce, transports, hébergement et restauration ».

Le régime de l'auto-entrepreneur

Le régime de l'auto-entrepreneur a été créé par la loi de modernisation de l'économie (LME) d'août 2008. Il s'applique depuis le 1er janvier 2009 aux personnes physiques qui créent ou possèdent déjà une entreprise individuelle pour exercer une activité commerciale, artisanale ou libérale (hormis certaines activités), à titre principal ou complémentaire. L'entreprise individuelle doit remplir les conditions du régime fiscal de la microentreprise (réaliser moins de 80 000 euros de chiffre d'affaires pour une activité commerciale ou moins de 32 000 euros pour les prestations de services et les activités libérales). La personne physique doit opter pour exercer en franchise de TVA.

Le régime de l'auto-entrepreneur offre des formalités de création d'entreprises allégées ainsi qu'un mode de calcul et de paiement simplifié des cotisations sociales et de l'impôt sur le revenu. L'auto-entrepreneur bénéficie ainsi :

− d'un régime microsocial simplifié ;

− d'une dispense d'immatriculation au registre du commerce et des sociétés (RCS) pour les commerçants, ou au répertoire des métiers (RM) pour les artisans ;

− d'une exonération de TVA ;

− et sur option, d'un régime microfiscal simplifié (versement libératoire de l'impôt sur le revenu) et d'une exonération de taxe professionnelle pendant trois ans à compter de la date de création.

De la difficulté de caractériser l'auto-entreprenariat

Comme les déclarations de créations sont simplifiées, l'information statistique disponible sur les auto-entrepreneurs est, en partie, lacunaire. Le nombre de créations d'auto-entrepreneurs intègre en effet, sans distinction, toutes les entreprises créées sous ce régime, qu'elles aient ou non effectivement démarré leur activité, y compris celles à qui ce régime a été refusé après la déclaration de création. Or, selon le concept harmonisé au niveau européen, une création d'entreprise doit s'accompagner de la mise en œuvre effective de nouveaux moyens de production. Les entreprises créées hors du régime d'auto-entrepreneur satisfont ce critère, mais seules les créations d'auto- entrepreneurs qui satisfont ce critère devraient être « légitimement » comptabilisées comme créations.

L'évolution globale du nombre de créations, prenant en compte cette part « légitime », résulterait de la combinaison de deux effets :

− un effet de substitution : création sous le régime de l'auto-entrepreneur de préférence à un autre régime, considéré comme moins avantageux ;

− un effet d'ajout : création, sous le régime de l'auto-entrepreneur, d'entreprises qui n'auraient jamais vu le jour sans ce régime.

Sources

Pour les créations d'entreprises, les statistiques proviennent du répertoire des entreprises et des établissements (Sirene) géré par l'Insee.

L'étude porte sur les créations d'entreprises de l'ensemble des activités marchandes non agricoles (ou champ de l'industrie, du commerce et de l'ensemble des services). Ce champ inclut les activités financières et les activités de location de biens immobiliers.

La décomposition en secteurs d'activité utilisée dans cette étude s'appuie, pour l'essentiel, sur le niveau d'agrégation en dix postes dit A10 de la nomenclature d'activités française révision 2 (NAF rév. 2, 2008), mais seuls neuf postes sont utilisés car le champ est hors activités agricoles. Les intitulés de certains postes ont été résumés : ainsi, par exemple, le poste « Autres activités de services » a été renommé « Autres services aux ménages », mais il ne recoupe pas les activités du poste « Services aux particuliers » de la nomenclature d'activités française révision 1 (NAF rév. 1, 2003).

Définitions

Créations d'entreprises : la définition des créations d'entreprises dénombrées par l'Insee s'appuie sur les concepts harmonisés au niveau européen. Les créations d'entreprises correspondent aux nouvelles immatriculations dans le répertoire Sirene, qui enregistrent un début d'activité relevant de l'un des cas suivants :

− création de nouveaux moyens de production ;

− cas où l'entrepreneur redémarre une activité après une interruption de plus d'un an ;

− cas où l'entrepreneur redémarre une activité après une interruption de moins d'un an, mais avec changement d'activité ;

− reprise par une entreprise nouvelle des activités d'une autre entreprise s'il n'y a pas continuité entre la situation du cédant et celle du repreneur, en termes d'activité et de localisation.

SARL : société groupant des associés dont la responsabilité est limitée à leur apport personnel.

Pour en savoir plus

S. Tellier, « Croissance plus faible des créations d'entreprises en 2008 », Insee Première n° 1221, janvier 2009.

S. Déprez , « Nouvelles entreprises, cinq ans après : plus d'une sur deux est toujours active en 2007 », Insee Première n° 1274, janvier 2010.