Insee Première ·
Juillet 2025 · n° 2063
Niveau de vie et pauvreté en 2023 Taux de pauvreté et inégalités s’accroissent fortement
En 2023, le niveau de vie annuel médian des personnes vivant dans un logement ordinaire en France métropolitaine progresse plus vite que l’inflation (+0,9 % en euros constants), grâce à une conjoncture qui reste favorable à l’emploi salarié et au dynamisme des revenus financiers. La hausse des revenus financiers soutient également le niveau de vie des ménages les plus aisés, qui augmente nettement. À l’inverse, le niveau de vie des ménages les plus modestes recule en euros constants, en raison notamment de la hausse du nombre de ménages déclarant de faibles revenus d'activité indépendante et de la non-reconduction des mesures exceptionnelles de soutien au pouvoir d’achat mises en place en 2022. Dans ce contexte, les inégalités de niveau de vie sont en hausse.
Le taux de pauvreté augmente fortement (15,4 % après 14,4 % en 2022, soit +0,9 point du fait des arrondis) et atteint son niveau le plus élevé depuis 1996, année où débute la série. En 2023, 9,8 millions de personnes occupant un logement ordinaire en France métropolitaine vivent sous le seuil de pauvreté monétaire. La hausse du taux de pauvreté touche plus particulièrement les familles monoparentales et les enfants, tandis que les retraités sont moins affectés. Cependant, l’intensité de la pauvreté, mesurée par l’écart entre le niveau de vie médian des personnes pauvres et le seuil de pauvreté, est en léger recul en 2023.
- Le niveau de vie médian progresse en 2023
- Recul du niveau de vie des ménages les plus modestes
- Hausse du niveau de vie des ménages les plus aisés
- Les inégalités augmentent fortement en 2023
- Le taux de pauvreté à son maximum depuis le début des séries
- Léger recul de l’intensité de la pauvreté
- La hausse de la pauvreté est moins marquée chez les retraités
- Forte hausse de la pauvreté pour les familles monoparentales
- Encadré – Le nombre de personnes pauvres sur l’ensemble du territoire
Le niveau de vie médian progresse en 2023
En 2023, selon l’enquête Revenus fiscaux et sociaux (ERFS), le niveau de vie annuel médian des personnes vivant dans un logement ordinaire de France métropolitaine est de 25 760 euros par unité de consommation. Il correspond à un revenu disponible de 2 150 euros mensuels pour une personne seule et de 3 860 euros pour un couple avec un enfant de moins de 14 ans.
Le niveau de vie médian augmente en 2023 de 5,9 % en euros courants, dans un contexte où l’inflation se maintient à un niveau élevé (4,9 % en 2023 en moyenne annuelle, après +5,2 % en 2022). Il augmente de 0,9 % en euros constants, c’est-à-dire en tenant compte de l’inflation entre 2022 et 2023 (figure 1). En l’absence de nouvelles mesures fiscales ou sociales concernant les ménages situés au milieu de la distribution, cette hausse s’explique principalement par l’augmentation du niveau de vie médian avant redistribution (+0,8 % en euros constants). Ce dernier bénéficie des revalorisations successives du salaire minimum en janvier et en mai 2023 (+5,4 % en moyenne en euros courants sur l’année 2023, soit +0,5 % en euros constants) et d’une conjoncture de l’emploi salarié toujours favorable (110 000 créations nettes d’emplois salariés et un taux de chômage stable en moyenne entre 2022 et 2023). Il est également soutenu par la hausse des taux de rendement des produits financiers, en particulier des livrets exonérés (livrets A, LEP).
tableauFigure 1a – 1ᵉʳ décile de niveau de vie de 1996 à 2023
Année | Après redistribution | Avant redistribution |
---|---|---|
1996 | 81,2 | 73,1 |
1997 | 81,7 | 74,9 |
1998 | 85,1 | 80,6 |
1999 | 87,1 | 82,5 |
2000 | 88,5 | 85,8 |
2001 | 91,5 | 88,4 |
2002 | 94,7 | 96,2 |
2003 | 94,3 | 94,5 |
2004 | 94,5 | 94,5 |
2005 | 94,7 | 95,9 |
2006 | 95,9 | 97,7 |
2007 | 97,9 | 98,5 |
2008 | 100,0 | 100,0 |
2009 | 98,9 | 98,3 |
2010 | 97,5 | 93,8 |
2011 | 96,7 | 90,6 |
2012 | 95,5 | 89,1 |
2013 | 97,0 | 92,6 |
2014 | 96,7 | 91,5 |
2015 | 96,9 | 88,1 |
2016 | 98,3 | 86,9 |
2017 | 98,7 | 86,7 |
2018 | 97,1 | 88,6 |
2019 | 99,8 | 92,7 |
2020 | 104,4 | 94,9 |
2021 | 102,0 | 92,0 |
2022 | 102,3 | 93,1 |
2023 | 101,2 | 91,9 |
- Note : Les données de 2020 présentent des fragilités liées aux difficultés de production en 2020.
- Lecture : En 2023, le premier décile (D1) de niveau de vie est 1,2 % plus élevé qu'en 2008 en euros constants (indice 101,2, base 100 en 2008). Il diminue de 1,0 % entre 2022 et 2023. Avant redistribution, le niveau de vie médian diminue de 8,1 % entre 2008 et 2023 (indice 108,4). Il diminue de 1,3 % entre 2022 et 2023.
- Champ : France métropolitaine, personnes vivant dans un logement ordinaire, dans un ménage dont le revenu déclaré est positif ou nul et dont la personne de référence n'est pas étudiante.
- Sources : Insee-DGI, enquêtes Revenus fiscaux et sociaux rétropolées de 1996 à 2004 ; Insee-DGFiP-Cnaf-Cnav-CCMSA, enquêtes Revenus fiscaux et sociaux de 2005 à 2023.
graphiqueFigure 1a – 1ᵉʳ décile de niveau de vie de 1996 à 2023

- Note : Les données de 2020 présentent des fragilités liées aux difficultés de production en 2020.
- Lecture : En 2023, le premier décile (D1) de niveau de vie est 1,2 % plus élevé qu'en 2008 en euros constants (indice 101,2, base 100 en 2008). Il diminue de 1,0 % entre 2022 et 2023. Avant redistribution, le niveau de vie médian diminue de 8,1 % entre 2008 et 2023 (indice 108,4). Il diminue de 1,3 % entre 2022 et 2023.
- Champ : France métropolitaine, personnes vivant dans un logement ordinaire, dans un ménage dont le revenu déclaré est positif ou nul et dont la personne de référence n'est pas étudiante.
- Sources : Insee-DGI, enquêtes Revenus fiscaux et sociaux rétropolées de 1996 à 2004 ; Insee-DGFiP-Cnaf-Cnav-CCMSA, enquêtes Revenus fiscaux et sociaux de 2005 à 2023.
Recul du niveau de vie des ménages les plus modestes
En 2023, le niveau de vie des ménages les plus modestes baisse en euros constants, après s’être maintenu en 2022. Dans un contexte d’inflation élevée, le premier décile (D1), niveau de vie plafond des 10 % les plus modestes, diminue (-1,0 % en euros constants). Les deuxième et troisième déciles se replient également (-0,9 % et -0,3 %).
Les deux premiers déciles de niveau de vie reculent avant redistribution (-1,3 % pour le D1 et -0,6 % pour le D2, en euros constants). Ce recul s’explique notamment par la part croissante de ménages qui déclarent de faibles revenus d’activité indépendante. La part des micro-entrepreneurs, dont les revenus d’activité sont en moyenne six fois moins élevés que ceux des travailleurs indépendants classiques, croît au sein des non‑salariés depuis la création de ce statut à la fin des années 2000 [Amar, 2025]. Par ailleurs, la part des retraités, qui disposent d’un niveau de vie en moyenne plus élevé parmi les ménages modestes, recule dans les deux premiers dixièmes de niveau de vie.
Après redistribution, la non-reconduction de mesures exceptionnelles de soutien au pouvoir d’achat mises en œuvre en 2022 (notamment indemnité inflation et « prime exceptionnelle de rentrée ») a pesé sur le niveau de vie des plus modestes, malgré l’effet en année pleine, favorable, de la revalorisation en novembre 2022 de 50 % de l’allocation de soutien familial destinée aux parents isolés.
Hausse du niveau de vie des ménages les plus aisés
En 2023, le niveau de vie des ménages les plus aisés augmente nettement après avoir légèrement reculé en 2022. Le neuvième décile (D9), niveau de vie plancher des 10 % les plus aisés, croît de 2,1 % et le huitième décile (D8) de 1,1 %, en euros constants. La majeure partie de cette hausse est due à l’augmentation des revenus financiers impulsée par la hausse des taux d’intérêt et à l'augmentation des revenus d'investissement, notamment des placements et assurance-vie. Dans une moindre mesure, ces ménages ont également bénéficié de la dernière phase de l’exonération de la taxe d’habitation sur la résidence principale qui, en 2023, a concerné les 20 % de foyers fiscaux les plus aisés. À l’inverse, ils ont pu pâtir de la baisse des salaires les plus élevés en euros constant [Sokhna, Duquesne, 2024].
Les inégalités augmentent fortement en 2023
En 2023, les indicateurs d’inégalités sont en hausse après s’être stabilisés en 2022 à un niveau relativement élevé au regard des dernières années. La baisse du niveau de vie des plus modestes, concomitante à la hausse de celui des plus aisés, conduit les indicateurs d’inégalités à atteindre des niveaux parmi les plus élevés depuis 30 ans.
En 2023, les 20 % les plus modestes perçoivent 8,5 % de la somme des niveaux de vie et les 20 % les plus aisés, 38,5 %, soit 4,5 fois plus (ratio (100-S80)/S20) (figure 2). Ce rapport des sommes de niveaux de vie atteint en 2023 son maximum depuis 1996, année d’origine des séries. L’indice de Gini, autre indicateur d’inégalités, augmente également en 2023 à 0,297, après s’être stabilisé à 0,294 en 2022. Il se rapproche de son maximum de 0,298, atteint en 2011. Le rapport interdécile, rapport entre le niveau de vie plancher des 10 % les plus aisés et le niveau de vie plafond des 10 % les plus modestes, augmente à 3,49, dépassant sa moyenne historique mais sans atteindre le maximum de 2011 (3,58).
tableauFigure 2 – Indicateurs d'inégalités de 1996 à 2023
Année | Ratio interdécile D9/D1 | Ratio (100-S80)/S20 | Indice de Gini |
---|---|---|---|
1996 | 3,51 | 4,08 | 0,274 |
1997 | 3,49 | 4,03 | 0,274 |
1998 | 3,42 | 3,99 | 0,272 |
1999 | 3,44 | 4,07 | 0,279 |
2000 | 3,50 | 4,14 | 0,282 |
2001 | 3,43 | 4,09 | 0,281 |
2002 | 3,39 | 3,98 | 0,277 |
2003 | 3,35 | 4,01 | 0,276 |
2004 | 3,30 | 3,97 | 0,276 |
2005 | 3,35 | 4,14 | 0,281 |
2006 | 3,41 | 4,19 | 0,286 |
2007 | 3,38 | 4,16 | 0,285 |
2008 | 3,38 | 4,19 | 0,285 |
2009 | 3,44 | 4,21 | 0,286 |
2010 | 3,48 | 4,40 | 0,295 |
2011 | 3,58 | 4,47 | 0,298 |
2012 | 3,55 | 4,44 | 0,295 |
2013 | 3,44 | 4,17 | 0,281 |
2014 | 3,43 | 4,17 | 0,282 |
2015 | 3,47 | 4,20 | 0,285 |
2016 | 3,42 | 4,17 | 0,280 |
2017 | 3,43 | 4,17 | 0,281 |
2018 | 3,50 | 4,34 | 0,290 |
2019 | 3,44 | 4,20 | 0,281 |
2020 | 3,29 | 4,07 | 0,277 |
2021 | 3,41 | 4,45 | 0,294 |
2022 | 3,38 | 4,40 | 0,294 |
2023 | 3,49 | 4,53 | 0,297 |
- Notes : Les données de 2020 présentent des fragilités liées aux difficultés de production en 2020. Les données de 1996 à 2020 sont rétropolées pour permettre une comparaison temporelle et peuvent donc différer des séries longues diffusées par ailleurs sur insee.fr avec des ruptures de série en 2010, 2012 et 2020.
- Lecture : En 2023, les 20 % de personnes les plus aisées perçoivent une part de la somme des niveaux de vie 4,53 fois plus élevée que les 20 % de personnes les plus modestes (ratio (100-S80)/S20).
- Champ : France métropolitaine, personnes vivant dans un logement ordinaire, dans un ménage dont le revenu déclaré est positif ou nul et dont la personne de référence n'est pas étudiante.
- Sources : Insee-DGI, enquêtes Revenus fiscaux et sociaux rétropolées de 1996 à 2004 ; Insee-DGFiP-Cnaf-Cnav-CCMSA, enquêtes Revenus fiscaux et sociaux de 2005 à 2023.
graphiqueFigure 2 – Indicateurs d'inégalités de 1996 à 2023

- Notes : Les données de 2020 présentent des fragilités liées aux difficultés de production en 2020. Les données de 1996 à 2020 sont rétropolées pour permettre une comparaison temporelle et peuvent donc différer des séries longues diffusées par ailleurs sur insee.fr avec des ruptures de série en 2010, 2012 et 2020.
- Lecture : En 2023, les 20 % de personnes les plus aisées perçoivent une part de la somme des niveaux de vie 4,53 fois plus élevée que les 20 % de personnes les plus modestes (ratio (100-S80)/S20).
- Champ : France métropolitaine, personnes vivant dans un logement ordinaire, dans un ménage dont le revenu déclaré est positif ou nul et dont la personne de référence n'est pas étudiante.
- Sources : Insee-DGI, enquêtes Revenus fiscaux et sociaux rétropolées de 1996 à 2004 ; Insee-DGFiP-Cnaf-Cnav-CCMSA, enquêtes Revenus fiscaux et sociaux de 2005 à 2023.
Le taux de pauvreté à son maximum depuis le début des séries
En 2023, le seuil de pauvreté monétaire, fixé à 60 % du niveau de vie médian, s’établit à 1 288 euros par mois et par unité de consommation. Il correspond à un revenu disponible mensuel de 1 288 euros pour une personne seule, 1 932 euros pour un couple, auxquels il faut ajouter 386 euros pour chaque enfant de moins de 14 ans et 644 euros pour chaque enfant plus âgé. En 2023, 9,8 millions de personnes résidant dans un logement ordinaire en France métropolitaine vivent en dessous de ce seuil, soit environ 650 000 personnes de plus qu’en 2022 (encadré).
Le taux de pauvreté monétaire, c’est-à-dire la part de personnes pauvres dans la population, s’établit en 2023 à 15,4 % en France métropolitaine (figure 3). Il augmente fortement par rapport à 2022 (14,4 %, soit +0,9 point du fait des arrondis) et est au plus haut depuis 1996, date de début de la série.
tableauFigure 3 – Indicateurs de pauvreté au seuil de 60 % du niveau de vie médian de 2016 à 2023
Indicateur | 2016 | 2017 | 2018 | 2019 | 2020 | 2021 | 2022 | 2023 |
---|---|---|---|---|---|---|---|---|
Nombre de personnes pauvres (en milliers) | 8 469 | 8 572 | 9 004 | 8 921 | 8 565 | 9 117 | 9 145 | 9 792 |
Taux de pauvreté (en %) | 13,7 | 13,8 | 14,5 | 14,3 | 13,6 | 14,5 | 14,4 | 15,4 |
Seuil de pauvreté (en euros constants de 2023 par mois) |
1 220 | 1 224 | 1 226 | 1 258 | 1 283 | 1 278 | 1 276 | 1 288 |
Niveau de vie médian des personnes pauvres (en euros constants de 2023 par mois) | 976 | 981 | 983 | 1 007 | 1 043 | 1 020 | 1 029 | 1 041 |
Intensité de la pauvreté (en %) | 20,0 | 19,9 | 19,8 | 20,0 | 18,7 | 20,2 | 19,4 | 19,2 |
- Notes : Les données de 2020 présentent des fragilités liées aux difficultés de production en 2020. Les données de 1996 à 2020 sont rétropolées pour permettre une comparaison temporelle et peuvent donc différer des séries longues diffusées par ailleurs sur insee.fr avec des ruptures de série en 2010, 2012 et 2020.
- Lecture : En 2023, le taux de pauvreté, défini comme la part de la population dont le niveau de vie est inférieur à 60 % du niveau de vie médian, s'établit à 15,4 %.
- Champ : France métropolitaine, personnes vivant dans un logement ordinaire, dans un ménage dont le revenu déclaré est positif ou nul et dont la personne de référence n'est pas étudiante.
- Source : Insee-DGFiP-Cnaf-Cnav-CCMSA, enquêtes Revenus fiscaux et sociaux de 2016 à 2023.
L’évolution des revenus d’activité des personnes les plus modestes tire à la hausse le taux de pauvreté avant redistribution. Les revenus des indépendants les plus modestes se contractent en 2023 [Ouvrir dans un nouvel ongletUrssaf, 2025], et les temps partiels de quotité inférieure ou égale à un mi-temps ont augmenté (24 % en 2023, contre 22 % en 2022). Après redistribution, la non-reconduction des mesures exceptionnelles mises en place en 2022 pour protéger le pouvoir d’achat des ménages induit également une hausse du taux de pauvreté en 2023. L’impact de l’arrêt de l’indemnité inflation est estimé à 0,1 point (de pourcentage) et celui de la prime exceptionnelle de rentrée à 0,2 point [Abdouni et al., 2024]. En outre, le nombre d’allocataires des aides au logement continue de diminuer et ces prestations ont été revalorisées en deçà de l’inflation.
Léger recul de l’intensité de la pauvreté
En 2023, la moitié des personnes en situation de pauvreté ont un niveau de vie inférieur à 1 041 euros par mois, inférieur de 19,2 % au seuil de pauvreté. Cet écart, nommé intensité de la pauvreté, est en léger recul par rapport à 2022 (-0,2 point) et affiche un niveau inférieur à la moyenne observée entre 1996 et 2022 (19,8 %).
La hausse de la pauvreté est moins marquée chez les retraités
En 2023, le niveau de vie médian des retraités augmente plus vite que celui de l’ensemble de la population (+1,2 % contre +0,9 %), en dépit d’une revalorisation des retraites du régime de base inférieure à l’inflation (+0,8 % en janvier 2023 en euros courants après la revalorisation anticipée de +4,0 % en juillet 2022) (figure 4). Leur niveau de vie est en effet soutenu en 2023 par l’augmentation des retraites du régime Agirc-Arcco (+4,9 % en novembre 2023 après +5,1 % en novembre 2022, en euros courants) et surtout la progression des revenus du patrimoine. La hausse de leur taux de pauvreté est plus limitée que celle de l’ensemble de la population (+0,3 point, contre +0,9 point pour l’ensemble de la population). Certains des retraités les plus modestes bénéficient en particulier en septembre 2023 des effets de la revalorisation du minimum contributif prévue dans le cadre de la réforme des retraites. À 11,1 %, le taux de pauvreté des retraités est très inférieur à celui de la moyenne de la population (15,4 %).
tableauFigure 4 – Niveau de vie et taux de pauvreté selon le statut d'activité, en 2022 et 2023
Statut d’activité | 2022 | 2023 | ||||||
---|---|---|---|---|---|---|---|---|
Répartition de la population (en %) | Niveau de vie médian (en euros constants de 2023) | Personnes pauvres (en milliers) | Taux de pauvreté (en %) |
Répartition de la population (en %) | Niveau de vie médian (en euros constants de 2023) | Personnes pauvres (en milliers) | Taux de pauvreté (en %) |
|
Actifs de 18 ans ou plus | 45,8 | 28 060 | 2 798 | 9,7 | 46,4 | 28 100 | 3 060 | 10,4 |
Actifs occupés | 42,6 | 28 660 | 2 084 | 7,7 | 43,0 | 28 740 | 2 264 | 8,3 |
Salariés | 36,9 | 28 700 | 1 430 | 6,1 | 37,3 | 28 800 | 1 574 | 6,6 |
Indépendants | 5,7 | 28 050 | 655 | 18,3 | 5,7 | 28 200 | 690 | 19,2 |
Chômeurs | 3,2 | 18 600 | 714 | 35,3 | 3,5 | 18 670 | 796 | 36,1 |
Inactifs de 18 ans ou plus | 33,3 | 23 680 | 3 633 | 17,2 | 32,8 | 23 820 | 3 825 | 18,3 |
Retraités | 23,8 | 25 110 | 1 631 | 10,8 | 23,7 | 25 420 | 1 683 | 11,1 |
Autres inactifs (dont étudiants)1 | 9,5 | 18 990 | 2 002 | 33,4 | 9,0 | 18 460 | 2 142 | 37,3 |
Personnes de moins de 18 ans | 21,0 | 23 090 | 2 714 | 20,4 | 20,8 | 23 220 | 2 907 | 21,9 |
Ensemble | 100,0 | 25 520 | 9 145 | 14,4 | 100,0 | 25 760 | 9 792 | 15,4 |
- 1. Les chiffres relatifs aux « autres individus inactifs (dont étudiants) » ne sont pas comparables entre 2022 et 2023. En 2023, une exploitation complémentaire des questionnaires incomplets de l’enquête Emploi a été mise en place. Auparavant, les individus associés à ces questionnaires étaient classés par défaut comme inactifs par manque d’information. La reprise de ces questionnaires a permis de compléter les statuts d’activité auparavant inconnus et ainsi de resserrer le contour de la population des autres inactifs en 2023 (sources).
- Lecture : En 2023, le taux de pauvreté des salariés s'élève à 6,6 %. Il était de 6,1 % en 2022.
- Champ : France métropolitaine, personnes vivant dans un logement ordinaire, dans un ménage dont le revenu déclaré est positif ou nul et dont la personne de référence n'est pas étudiante.
- Source : Insee-DGFiP-Cnaf-Cnav-CCMSA, enquêtes Revenus fiscaux et sociaux 2022 et 2023.
Le niveau de vie médian des salariés augmente légèrement (+0,3 %) et leur taux de pauvreté s’établit à 6,6 % en 2023, en hausse de 0,5 point. La situation sur le marché du travail reste favorable. Toutefois, dans un contexte d’inflation encore vive, les salaires moyens dans les secteurs public et privé ont en 2023 augmenté moins vite que les prix [Insee, 2024].
Le taux de pauvreté des indépendants s’élève à 19,2 %, en hausse de 0,9 point. Le revenu des indépendants les plus modestes se contracte en 2023. Plus généralement, pour la seconde année consécutive, les revenus d’activité moyens des indépendants augmentent moins vite que l’inflation. Cette baisse concerne la quasi-totalité des secteurs, mais certaines activités sont plus particulièrement touchées, notamment dans les secteurs du commerce ou de la construction.
Le taux de pauvreté des chômeurs augmente de 0,8 point et atteint 36,1 %. La réforme de l’assurance chômage, entrée en vigueur le 1er février 2023, réduit la durée d’indemnisation de 25 % pour les nouveaux entrants dans l’assurance chômage. Par ailleurs, en 2023, la part des personnes seules parmi les chômeurs a augmenté et cette catégorie de personnes est particulièrement exposée à la pauvreté.
Le niveau de vie des autres inactifs recule sous l’effet des non-reconductions des mesures exceptionnelles de 2022 et de la revalorisation des allocations logement inférieure à l’inflation, à laquelle ils sont particulièrement sensibles. Par ailleurs, la hausse de leur taux de pauvreté est renforcée par une rupture de série statistique liée à l’enquête spécifique à cette catégorie de ménages (sources).
Forte hausse de la pauvreté pour les familles monoparentales
En 2023, lorsque la personne de référence a moins de 65 ans, plus d’une famille monoparentale sur trois vit sous le seuil de pauvreté (34,3 %) : après un recul en 2022, le taux de pauvreté de ces familles est en forte hausse (+2,9 points) (figure 5). La revalorisation de l’allocation de soutien familial de 50 % fin 2022, dont l’effet sur le taux de pauvreté est évalué à -1,5 point [Ouvrir dans un nouvel ongletDubois et al., 2025], n’a pas compensé l’effet de l’arrêt des aides exceptionnelles versées à une part élevée de familles monoparentales en 2022. La revalorisation en deçà de l’inflation des allocations logement, qui sont perçues par près de la moitié de ces ménages, a également pesé sur leur niveau de vie. Certaines familles monoparentales ont par ailleurs connu des périodes d’emploi plus courtes dans l’année et des temps partiels de quotité plus faible.
La dégradation de la situation des familles monoparentales entraîne une hausse de la pauvreté chez les enfants : en 2023, le taux de pauvreté des moins de 18 ans croît de 1,5 point et atteint 21,9 %.
tableauFigure 5 – Niveau de vie et taux de pauvreté selon la composition du ménage, en 2022 et 2023
Composition du ménage | 2022 | 2023 | ||||||
---|---|---|---|---|---|---|---|---|
Répartition de la population (en %) | Niveau de vie médian (en euros constants de 2023) | Personnes pauvres (en milliers) | Taux de pauvreté (en %) |
Répartition de la population (en %) | Niveau de vie médian (en euros constants de 2023) | Personnes pauvres (en milliers) | Taux de pauvreté (en %) |
|
Personne de référence de moins de 65 ans | 78,1 | 25 710 | 7 605 | 15,4 | 77,8 | 25 850 | 8 171 | 16,5 |
Personnes seules | 10,0 | 23 750 | 1 236 | 19,5 | 10,4 | 24 100 | 1 343 | 20,3 |
Familles monoparentales | 8,8 | 18 720 | 1 748 | 31,4 | 9,3 | 18 610 | 2 036 | 34,3 |
Couples sans enfant | 12,3 | 32 210 | 516 | 6,6 | 12,2 | 32 600 | 529 | 6,8 |
Couples avec un ou deux enfants | 30,6 | 28 390 | 1 641 | 8,5 | 29,9 | 28 290 | 1 678 | 8,8 |
Couples avec trois enfants ou plus | 11,9 | 21 170 | 1 860 | 24,6 | 11,6 | 21 340 | 1 909 | 25,8 |
Autres types de ménages | 4,3 | 22 940 | 604 | 21,9 | 4,3 | 23 620 | 677 | 24,4 |
Personne de référence de 65 ans ou plus | 21,9 | 25 030 | 1 540 | 11,1 | 22,2 | 25 410 | 1 620 | 11,4 |
Personnes seules | 7,8 | 21 890 | 930 | 18,8 | 7,9 | 22 450 | 939 | 18,8 |
Couples | 13,3 | 26 870 | 543 | 6,4 | 13,5 | 27 300 | 595 | 6,9 |
Autres types de ménages | 0,8 | 23 510 | 68 | 13,0 | 0,9 | 22 960 | 86 | 15,5 |
Ensemble | 100,0 | 25 520 | 9 145 | 14,4 | 100,0 | 25 760 | 9 792 | 15,4 |
- Lecture : En 2023, le taux de pauvreté des familles monoparentales s'élève à 34,3 %. Il était de 31,4 % en 2022.
- Champ : France métropolitaine, personnes vivant dans un logement ordinaire, dans un ménage dont le revenu déclaré est positif ou nul et dont la personne de référence n'est pas étudiante.
- Source : Insee-DGFiP-Cnaf-Cnav-CCMSA, enquêtes Revenus fiscaux et sociaux 2022 et 2023.
Encadré – Le nombre de personnes pauvres sur l’ensemble du territoire
L’enquête annuelle Revenus fiscaux et sociaux (ERFS) ne couvre que les personnes vivant dans un logement ordinaire en France métropolitaine. Cette étude n’inclut ni les habitants des départements d’outre-mer (DOM) ni les personnes sans-abri, les personnes vivant en habitation mobile et les personnes vivant en institution. Les ménages dont la personne de référence est étudiante sont aussi exclus de l’analyse, leurs revenus étant sous-évalués dans l’ERFS en raison d’une faible couverture des aides reçues des parents.
À titre illustratif, un travail mené grâce à des sources complémentaires sur l’année 2021 permet d’estimer qu’au total, en 2021, environ 11,2 millions de personnes sont en situation de pauvreté selon l’approche monétaire en France contre 9,1 millions sur le seul champ de l’ERFS [Martin, 2024].
Sources
Les statistiques présentées ici sont issues des enquêtes Revenus fiscaux (ERF) rétropolées de 1996 à 2004 et des enquêtes Revenus fiscaux et sociaux (ERFS) de 2005 à 2023. Le champ retenu est celui des personnes vivant en France métropolitaine dans un logement ordinaire, dans un ménage dont la personne de référence n’est pas étudiante et dont le revenu déclaré est positif ou nul. Il recouvre une population de 63,7 millions de personnes fin 2023 et ne prend notamment pas en compte les personnes résidant en institution ni les personnes sans abri.
Dans cette étude, afin de pouvoir apprécier les évolutions sur longue période, les indicateurs ont été rétropolés jusqu’en 1996 en chaînant leurs évolutions à méthodologie constante (soit en taux d’évolution, soit en variation de points).
En 2023, une exploitation complémentaire des questionnaires incomplets de l’enquête Emploi a permis de compléter les statuts d’activité auparavant classés comme inactifs par défaut dans l’ERFS et ainsi de resserrer le contour de la population des inactifs. Cette exploitation complémentaire génère une rupture de série sur les indicateurs de cette sous-catégorie, évaluée à +0,9 point de pourcentage sur le taux de pauvreté des autres inactifs.
Définitions
Le niveau de vie est égal au revenu disponible du ménage divisé par le nombre d’unités de consommation (UC). Le niveau de vie est donc le même pour tous les individus d’un même ménage. Pour comparer les niveaux de vie de ménages de tailles ou de compositions différentes, on divise le revenu par le nombre d’UC. Celles-ci sont généralement calculées selon l’échelle d’équivalence dite de l’OCDE modifiée qui attribue 1 UC pour le premier adulte du ménage, 0,5 UC aux autres personnes de 14 ans ou plus et 0,3 UC aux enfants de moins de 14 ans.
Si on ordonne une distribution, les déciles sont les valeurs qui partagent cette distribution en dix parties d’effectifs égaux. La médiane, qui correspond également au cinquième décile, est la valeur qui partage cette distribution en deux parties d’effectifs égaux. Ainsi, la moitié de la population a un niveau de vie inférieur au niveau de vie médian, l’autre moitié a un niveau de vie supérieur.
Le revenu disponible est le revenu à la disposition du ménage pour consommer et épargner. Il comprend les revenus d’activité nets des cotisations sociales, les indemnités de chômage, les retraites et pensions, les revenus du patrimoine (fonciers et financiers) et les autres prestations sociales non contributives perçues, nets des impôts directs.
Le revenu avant redistribution d’un ménage est l’ensemble de ses revenus avant paiement des impôts directs (mais nets de cotisations sociales) et perception des prestations non contributives. Il comprend ici les revenus d’activité, les indemnités de chômage, les pensions et retraites et les revenus du patrimoine. Les composantes des revenus d’activité exonérées d’impôt et de cotisations sociales (heures supplémentaires, prime de partage de la valeur) sont incluses dans le revenu avant redistribution.
L’indice de Gini est un indicateur synthétique permettant de rendre compte du niveau d’inégalité pour une variable et sur une population donnée. Il varie entre 0 (égalité parfaite) et 1 (inégalité extrême). Entre 0 et 1, l’inégalité est d’autant plus forte que l’indice de Gini est élevé.
Le rapport interdécile D9/D1 est le rapport entre le niveau de vie au-dessus duquel se situent les 10 % des ménages les plus aisés et celui en dessous duquel se situent les 10 % les plus modestes.
Pour en savoir plus
Retrouvez plus de données en téléchargement.
« Revenu, niveau de vie et pauvreté en 2023 », Insee Résultats, à paraître.
Insee, Chiffres-clés, sous-thèmes « Revenus – Niveaux de vie – Pouvoir d’achat » et « Pauvreté – Précarité », juillet 2025.
Dubois M., Dumont G., Ramuzat L., « Ouvrir dans un nouvel ongletLa revalorisation de 50 % de l’allocation de soutien familial fin 2022 a diminué la pauvreté des familles monoparentales », Analyses statistiques no 4, juin 2025.
Urssaf, « Ouvrir dans un nouvel ongletEn 2023, le revenu moyen déclaré par les travailleurs indépendants classiques est stable mais l’inflation continue de peser sur son évolution en euros constants », Stat'UR no 399, mai 2025.
Abdouni S., Buresi G., Delmas F., Dumont G., Ramuzat L., Tapin J., « Les mesures sociofiscales de 2023 : la non-reconduction des mesures exceptionnelles de 2022 diminue le revenu disponible des ménages modestes », in France, portrait social, coll. « Insee Références », édition 2024.
Sokhna N. P., Duquesne T., « Les salaires dans le secteur privé en 2023 – L'augmentation des salaires reste inférieure à l'inflation », Insee Première no 2020, octobre 2024.
Martin H., « Depuis le milieu des années 1990, les inégalités de niveau de vie augmentent nettement avant redistribution mais de manière plus limitée après redistribution », in Les revenus et le patrimoine des ménages, coll. « Insee Références », édition 2024.
« Emploi, chômage, revenus du travail », coll. « Insee Références », édition 2024.