Insee Analyses Bourgogne-Franche-Comté · Février 2025 · n° 125

Émissions de CO₂ des véhicules particuliers : 1,2 tonne par adulte

En France métropolitaine, en 2021, les transports génèrent 32 % des émissions globales de gaz à effet de serre (GES). Les véhicules particuliers en sont responsables pour de près de la moitié (source : Ouvrir dans un nouvel ongletCitepa). Plusieurs leviers peuvent permettre de limiter les émissions de GES liées aux déplacements des véhicules des particuliers. Certains relèvent de l’usage des véhicules, visant une modification des comportements avec le développement de la mobilité douce (marche, vélo…), de l’utilisation des transports en commun, ou du covoiturage. La possibilité de prise en charge partielle des frais de transport par l’employeur et l'instauration du forfait de mobilité durable vont dans ce sens. D’autres recherchent une transformation du parc, avec une hausse du nombre de véhicules électriques. Enfin, certains relèvent davantage de l’aménagement du territoire, tels que le développement des infrastructures de transports en commun et l’optimisation de l’implantation des équipements et services (encadré 1).

Au-delà de ces politiques publiques, la baisse démographique que connaît la Bourgogne-Franche-Comté, avec une diminution du nombre d’actifs et un vieillissement de la population, est structurellement favorable à cette diminution des GES.

Au 1^er janvier 2021, en Bourgogne-Franche-Comté, les particuliers détiennent 1 651 000 véhicules en circulation avec lesquels ils parcourent 17,8 milliards de kilomètres sur l’année. Un quart des déplacements correspond à des trajets domicile-travail. Les autres permettent de réaliser des achats, des visites, des soins ou des loisirs. En considérant les émissiomns du réservoir à la roue, les véhicules des particuliers produisent 2,8 millions de tonnes équivalent CO₂ (t CO₂ éq). Cela représente 1,2 t CO₂ éq par adulte. À titre de comparaison, France entière, l’empreinte carbone globale s’élève à 11,7 t CO₂ éq par adulte.

Pour respecter l’Accord de Paris pour le climat qui vise à limiter le réchauffement climatique à +1,5 °C en 2050, chaque individu ne devrait émettre que 2 t CO₂ éq, toutes émissions confondues (soit 2,5 t CO₂ éq par adulte). La réduction des émissions est donc au cœur des politiques publiques menées pour limiter le réchauffement climatique.

Les véhicules de Bourgogne-Franche-Comté ont parcouru en moyenne 10 750 km. Le plan gouvernemental de planification écologique a pour objectif de réduire de 600 kilomètres la distance annuelle parcourue par véhicule. C’est l’équivalent de trois semaines de déplacements domicile-travail en moins pour chaque actif de la région.

Ceux qui parcourent le plus de kilomètres en moyenne sont localisés le long de la frontière suisse, avec jusqu’à 14 500 km dans la communauté de communes (CC) des Lacs et Montagnes du Haut-Doubs (figure 1). Dans les intercommunalités du rural périurbain, autour des principales agglomérations (par exemple Dijon, Vesoul, Auxerre), la distance parcourue par les véhicules est aussi plus élevée qu’ailleurs, en raison des trajets pendulaires.

Les distances parcourues sont plus faibles dans les intercommunalités urbaines, qui bénéficient de réseaux de transport en commun. En effet, combiné à la mobilité douce, ces réseaux permettent de limiter l’usage de la voiture.

Enfin, dans le reste de la région, essentiellement dans l’ouest, les véhicules parcourent moins de kilomètres que la moyenne. D’une part, dans ces intercommunalités rurales non périurbaines la proportion de retraités, moins mobiles du fait de l’absence de déplacements professionnels, est plus élevée. D’autre part les déplacements domicile-travail restent limités, car les actifs qui y résident exercent le plus souvent près de leur lieu de domicile. C’est le cas dans les CC du Haut Nivernais Val d’Yonne et Brionnais Sud Bourgogne, où les véhicules parcourent en moyenne 10 150 km par an.

Dans la région, chaque adulte dépense en moyenne 766 € en carburant par an. Ce coût dépend directement de la distance parcourue et varie de 520 € dans l’intercommunalité de Dijon Métropole à 1 375 € dans la CC de Lacs et Montagne du Haut-Doubs (figure 2).

Ce coût est ressenti de façon différentiée dans les territoires de la région, en fonction des caractéristiques des ménages et de leur niveau de vie. En France métropolitaine, la dépense des ménages en carburant représente 4 % de leur budget en 2021. Les personnes âgées et les étudiants sont les moins consommateurs de carburant, par opposition aux couples avec enfants dont les besoins de mobilité sont plus importants.

Le coût est plus élevé pour les ménages aisés, qui se déplacent plus. Mais cette dépense pèse moins dans leur budget, leurs revenus étant plus élevés. Ces profils se retrouvent dans les intercommunalités localisées le long de la frontière suisse et dans une moindre mesure en périphérie des principaux pôles d’emplois. À l’inverse, dans d’autres territoires, le coût, même s’il est plus mesuré, peut être pénalisant au regard du niveau de vie plus faible des populations. C’est notamment le cas de certaines intercommunalités de Haute-Saône ou de la Nièvre.

En Bourgogne-Franche-Comté, les émissions de GES et le coût en carburant par adulte permettent de constituer une typologie des établissements publics de coopération intercommunale (pour comprendre) (EPCI) en cinq classes (figure 3 et figure 4).

Huit intercommunalités constituent la classe « EPCI frontaliers avec la Suisse ». Les émissions par adulte sont les plus élevées (1,9 t CO₂ éq) du fait de distances parcourues importantes, aussi bien lors des déplacements domicile-travail que pour le reste des déplacements. Les trajets des travailleurs frontaliers sont fortement contributeurs. Par exemple, dans l’une de ces intercommunalités, 30 % des actifs travaillent en Suisse et réalisent 60 % des émissions des actifs utilisant leur voiture pour aller travailler. De plus, la population avec davantage de familles avec enfants possède plus de voitures (89 véhicules pour 100 adultes en moyenne contre 74 dans la région). Les émissions sont toutefois atténuées grâce à un parc de véhicules plus récent. Le coût en carburant par adulte est important mais son poids budgétaire est modéré pour une population ayant un niveau de vie moyen aisé.

Dans une moindre mesure, avec 81 véhicules pour 100 adultes, la voiture est également très présente dans les 48 « EPCI majoritairement ruraux périurbains ». Seuls 2,2 % des actifs qui y résident utilisent les transports en commun lors des déplacements domicile-travail. Dans ces territoires, un nombre de kilomètres parcourus soutenu génère des émissions élevées par adulte (1,5 t CO₂ éq). Le coût en carburant par adulte est également important, mais le niveau de vie de la population est relativement haut et la pauvreté est moins marquée qu’ailleurs.

Près du quart de la population vit dans une des 43 intercommunalités de la classe « EPCI majoritairement ruraux non périurbains ». Elles sont majoritairement localisées dans l’ouest de la région. Les émissions cumulées de GES de ces territoires représentent le quart des émissions régionales. Hors intercommunalités urbaines, les adultes de ces territoires parcourent en moyenne une distance plus faible, conséquence d’une population plus âgée et moins aisée. Ainsi, les émissions par adulte sont modérées (1,3 t CO₂ éq) malgré un parc de véhicules roulants plus ancien et donc potentiellement plus émetteur. La population fait face à un coût en carburant dans la moyenne régionale alors que son niveau de vie est globalement plus faible qu’ailleurs. Dans ce contexte, l’utilisation de véhicules électriques pourrait trouver tout son sens, afin de réduire le coût d’utilisation et les émissions de GES. Bien que l’habitat individuel offre davantage de possibilité de rechargement à domicile, le manque actuel de bornes et le prix élevé des véhicules électriques pourraient freiner cette évolution. L’autonomie actuelle de ces véhicules peut également constituer un obstacle dans ces territoires ruraux éloignés des centres urbains.

Les deux intercommunalités les plus peuplées de la région, Dijon Métropole et Grand Besançon Métropole, constituent la classe « grands centres urbains ». Elle représente 16,2 % de la population et 12,1 % des GES émis par les véhicules particuliers. Elle a la plus faible émission moyenne avec moins d’une tonne par adulte. Cela s’explique d’abord par un nombre de kilomètres parcourus plus faible. C’est particulièrement le cas pour les déplacements domicile-travail, qui sont aussi plus souvent réalisés grâce aux réseaux de transport en commun. Par ailleurs, le nombre de véhicules par adulte est plus faible. Au final, le coût en carburant pour les ménages est plus réduit que dans les autres intercommunalités. Cependant, il peut occuper une part importante dans leur budget, notamment pour les ménages les plus modestes qui sont nombreux dans ces territoires.

La classe « EPCI majoritairement urbains » regroupe 12 intercommunalités à l’image de celles de Mâcon, d’Auxerre ou de Montbéliard. Les émissions par adulte sont plus importantes que dans les grands centres urbains, conséquence de distances parcourues supérieures. Dans ces territoires un peu moins densément peuplés, l’usage des transports en commun est plus faible en raison d’une infrastructure moins développée. Le coût en carburant est plus élevé, pour une population avec un niveau de vie moyen plus faible que ceux résidant dans les deux grands centres urbains.

Deux étapes ont permis de définir les cinq classes de la typologie des établissements publics de coopération intercommunale.

Une analyse en composantes principales (ACP) sur 13 caractéristiques des intercommunalités à savoir les émissions de GES/adulte, la distance annuelle parcourue par adulte, le nombre de voitures pour 100 adultes, la part de véhicules de 10 ans ou plus, la proportion de personnes âgées de 65 ans ou plus, la population, la part des déplacements domicile-travail réalisés en transport en commun, les émissions de GES lors des déplacements domicile-travail en voiture de moins de 100 km, la distance moyenne parcourue lors de ces déplacements, le coût en carburant par adulte, le niveau de vie médian, le taux de pauvreté et la nature de l’intercommunalité (rural périurbain, rural non périurbain, urbain).

Ensuite les coordonnées des intercommunalités sur les cinq premiers axes de l’ACP ont permis de réaliser une classification ascendante hiérarchique (CAH).