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Octobre 2024 · n° 2018Une hausse du taux de marge de l’industrie agroalimentaire de 2019 à 2022 concentrée
dans les groupes
Le taux de marge des entreprises actives de l’industrie agroalimentaire augmente de 2,7 points de 2019 à 2022, et s’élève à 31,2 % en 2022. Malgré la crise sanitaire, le taux de marge se maintient en 2020. Ensuite, il augmente en 2021, année marquée par la reprise économique post-crise sanitaire, par la baisse des impôts de production et par la hausse des subventions. En 2022, comme en 2020, les marges se maintiennent à nouveau, dans un contexte de renchérissement des matières premières.
Ces résultats agrégés couvrent de fortes disparités sectorielles, le taux de marge est presque deux fois plus faible dans l’industrie alimentaire (26,5 % en 2022) que dans la fabrication de boissons (49,3 %). Au sein du secteur de l’industrie alimentaire, le taux de marge varie de 19,4 % en 2022 pour la fabrication de produits de boulangerie-pâtisserie et de pâtes alimentaires à 43,9 % pour la fabrication d'huiles et graisses végétales et animales. Les évolutions entre 2019 et 2022 sont également contrastées : une hausse de 3,8 points pour la fabrication de boissons, et de 2,2 points pour l’industrie alimentaire.
Le taux de marge des entreprises organisées en groupe augmente entre 2019 et 2022 (+3,6 points), tandis que celui des entreprises indépendantes baisse (-1,3 point). Les entreprises organisées en groupes ont en général un pouvoir de marché plus fort que les entreprises indépendantes, ce qui leur permet de dégager un taux de marge plus élevé (en 2022, 33,3 % contre 21,3 %). L’écart entre les entreprises indépendantes et les groupes s’accentue fortement au cours de la période (12,0 points en 2022, contre 7,1 points en 2019).
- Le taux de marge de l’industrie agroalimentaire augmente de 2,7 points entre 2019 et 2022
- Les évolutions du taux de marge de l’industrie agroalimentaire ne sont pas régulières sur la période
- Le taux de marge des fabricants de boissons est largement plus élevé
- Les marges des fabricants de boissons s’accroissent davantage que celles des industries alimentaires
- Le taux de marge des groupes en hausse, celui des entreprises indépendantes en baisse
- Les filiales commerciales contribuent à la hausse du taux de marge des groupes de l’industrie alimentaire
- Encadré – Les marges de l’industrie agroalimentaire : quelle mesure pour quelles unités ?
Le taux de marge de l’industrie agroalimentaire augmente de 2,7 points entre 2019 et 2022
Avec les données de comptabilité d’entreprise et en prenant en compte la possible organisation en groupe (encadré), le taux de marge des entreprises du secteur de l’industrie agroalimentaire actives de 2019 à 2022 est de 31,2 % en 2022 (figure 1).
tableauFigure 1 – Taux de marge des industries agroalimentaires
Agrégat | 2019 | 2020 | 2021 | 2022 |
---|---|---|---|---|
Valeur ajoutée (en milliards d’euros) | 42,83 | 42,58 | 45,83 | 48,00 |
Excédent brut d’exploitation (en milliards d’euros) | 12,19 | 12,07 | 14,35 | 14,99 |
Taux de marge (en %) | 28,5 | 28,3 | 31,3 | 31,2 |
- Lecture : En 2022, le taux de marge des entreprises de l’industrie agroalimentaire est de 31,2 %.
- Champ : France hors Mayotte, entreprises du secteur de l’industrie agroalimentaire présentes de 2019 à 2022.
- Source : Insee, Ésane.
graphiqueFigure 1 – Taux de marge des industries agroalimentaires
Sur cette période, les chocs exogènes qui ont marqué l’économie ont partiellement atteint l’industrie agroalimentaire. Activité de premier rang, moins concernée par les différents confinements, les entreprises ont maintenu leur activité. Elles ont ensuite bénéficié de la reprise du secteur de la restauration à la sortie de crise sanitaire de Covid-19. Enfin, les entreprises de l’agroalimentaire ont été touchées par la hausse des prix de matières premières, consécutive à la reprise économique et à la guerre en Ukraine.
En dépit de ces événements conjoncturels, l’excédent brut d’exploitation (EBE) progresse plus vite que la valeur ajoutée. Le taux de marge augmente ainsi de 2,7 points entre 2019 et 2022. Cette hausse est toutefois moins forte que pour l’ensemble des entreprises de l’industrie manufacturière présentes sur la période (+4,2 points), pour lesquelles le taux de marge est de 29,4 % en 2022, légèrement plus faible que celui de l’industrie agroalimentaire (31,2 %).
Les évolutions du taux de marge de l’industrie agroalimentaire ne sont pas régulières sur la période
En 2020, pour les entreprises de l’industrie agroalimentaire, une forte activité s’est maintenue durant les restrictions liées à la crise sanitaire. Le taux de marge du secteur reste quasi stable entre 2019 (28,5 %) et 2020 (28,3 %) puis augmente de trois points en 2021. En revanche, la crise sanitaire a entraîné une chute brutale du taux de marge dans l’industrie manufacturière, de 25,2 % à 20,4 %, avant une remontée en 2021 (27,1 %).
La hausse du taux de marge dans le secteur agroalimentaire, comme dans l’ensemble de l’industrie manufacturière, entre 2020 et 2021 s’explique pour moitié par l’effet des politiques publiques : baisse des impôts de production et surtout hausse des subventions d’exploitation, dans un contexte de reprise économique soutenue par les dispositifs d’aides aux entreprises. L’EBE augmente ainsi de 18,9 % entre 2020 et 2021, contre 7,6 % pour la valeur ajoutée. La hausse du taux de marge, sur la période 2019-2022, est donc acquise dès 2021. En 2022, les entreprises parviennent à maintenir leurs marges, malgré un contexte de forte inflation des intrants.
Le taux de marge des fabricants de boissons est largement plus élevé
Le taux de marge d’une entreprise dépend de nombreux facteurs, notamment de son activité, des prix des matières premières utilisées pour la production, de l’intensité capitalistique ou encore du pouvoir de marché de ses marques.
En 2022, le taux de marge des entreprises du secteur de la fabrication de boissons est de 49,3 % (figure 2). Il est structurellement plus élevé que celui des entreprises des industries alimentaires (26,5 %). Cela peut tenir à la forte intensité capitalistique de la fabrication de boissons, plus de deux fois supérieure à celle de l’industrie alimentaire. La fabrication de boissons se caractérise aussi par des débouchés plus diversifiés : ménages, entreprises de la restauration et ouverture à l’international. Le taux d’exportation dans la fabrication de boissons (35,4 %) est plus élevé que dans les industries alimentaires (22,7 %).
tableauFigure 2 – Taux de marge selon les secteurs détaillés de l’industrie agroalimentaire
Secteur d'activité | 2019 | 2020 | 2021 | 2022 | Évolution 2022/2019 (en points) |
---|---|---|---|---|---|
Industrie alimentaire | 24,3 | 25,2 | 27,1 | 26,5 | 2,2 |
Transformation et conservation de la viande et préparation de produits à base de viande | 15,3 | 19,2 | 19,9 | 19,5 | 4,2 |
Transformation et conservation de poisson, de crustacés et de mollusques | 29,3 | 30,9 | 35,0 | 25,6 | -3,7 |
Transformation et conservation de fruits et légumes | 32,0 | 30,1 | 33,0 | 29,8 | -2,2 |
Fabrication d'huiles et graisses végétales et animales | 19,0 | 23,6 | 38,6 | 43,9 | 24,9 |
Fabrication de produits laitiers | 23,7 | 25,1 | 24,8 | 27,4 | 3,7 |
Travail des grains ; fabrication de produits amylacés | 27,4 | 29,1 | 28,4 | 32,3 | 4,9 |
Fabrication de produits de boulangerie-pâtisserie et de pâtes alimentaires | 22,5 | 20,9 | 24,1 | 19,4 | -3,1 |
Fabrication d'autres produits alimentaires | 30,7 | 31,6 | 34,4 | 34,1 | 3,4 |
Fabrication d'aliments pour animaux | 34,6 | 35,8 | 35,6 | 35,9 | 1,3 |
Fabrication de boissons | 45,5 | 42,4 | 48,4 | 49,3 | 3,8 |
Production de boissons alcooliques distillées | 47,3 | 49,1 | 53,1 | 58,1 | 10,8 |
Production de vin (de raisin) | 58,7 | 53,4 | 60,9 | 61,1 | 2,4 |
Fabrication de bière | 25,7 | 21,0 | 27,4 | 25,7 | 0,0 |
Industrie des eaux minérales et autres eaux embouteillées et des boissons rafraîchissantes | 34,5 | 33,5 | 34,7 | 33,1 | -1,4 |
Autres | 34,7 | 48,6 | 46,6 | 42,4 | 7,7 |
Fabrication de produits à base de tabac | nd | nd | nd | nd | nd |
Ensemble de l’industrie agroalimentaire | 28,5 | 28,3 | 31,3 | 31,2 | 2,7 |
- nd : non disponible.
- Lecture : En 2022, le taux de marge des entreprises de l’industrie agroalimentaire est de 31,2 %, soit une augmentation de 2,7 points par rapport à 2019.
- Champ : France hors Mayotte, entreprises du secteur de l’industrie agroalimentaire présentes de 2019 à 2022.
- Source : Insee, Ésane.
La dispersion du taux de marge est plus grande au sein des principaux secteurs de la fabrication de boissons. Les taux de marge des secteurs à forte valeur ajoutée, comme la production de vin (de raisin) et la production de boissons alcooliques distillées, sont très élevés (respectivement 61,1 % et 58,1 % en 2022). Ils sont plus faibles et proches de ceux de l’industrie alimentaire dans l’industrie des eaux minérales et autres eaux embouteillées et des boissons rafraîchissantes (33,1 %), et la fabrication de bière (25,7 %).
Parmi les principaux secteurs de l’industrie alimentaire, le taux de marge des fabricants d’autres produits alimentaires (sucre, chocolat, etc.) est un des plus élevés (34,1 % en 2022). Celui des fabricants de produits laitiers est également plus élevé (27,4 %) que la moyenne. À l’opposé, le taux de marge est le plus faible pour les entreprises de la conservation de la viande et préparation de produits à base de viande (19,5 %) et les fabricants de produits de boulangerie-pâtisserie et de pâtes alimentaires (19,4 %).
Les marges des fabricants de boissons s’accroissent davantage que celles des industries alimentaires
Entre 2019 et 2022, le taux de marge des entreprises de la fabrication de boissons augmente de 3,8 points alors que celui des entreprises des industries alimentaires augmente de 2,2 points.
Parmi les entreprises des industries alimentaires, l’augmentation la plus forte concerne la fabrication d’huiles et graisses végétales et animales, de 19,0 % à 43,9 %. C’est un secteur concentré sur un faible nombre d’entreprises, où le taux d’exportation augmente lui aussi très fortement entre 2019 (31,5 %) et 2022 (48,8 %). Cette hausse a lieu dans un contexte de baisse de production de matières premières agricoles suite aux aléas climatiques et de crise géopolitique, qui sont à l’origine du doublement des prix de production d’huiles et graisses végétales et animales entre 2019 et 2022.
Dans une moindre mesure, pour les entreprises du travail des grains et fabrication de produits amylacés, le taux de marge augmente aussi, de 27,4 % à 32,3 %. Il croît de 4,2 points dans le secteur de la transformation et conservation de la viande et préparation de produits à base de viande. Il diminue en revanche de 3,1 points pour les fabricants de produits de boulangerie-pâtisserie et de pâtes alimentaires, dont l’activité est davantage consommatrice en énergie. Enfin, il diminue aussi pour d’autres secteurs : celui de la transformation et conservation de poisson, de crustacés et de mollusques, et celui de la transformation et conservation de fruits et légumes (respectivement -3,7 points et -2,2 points).
Les fabricants de boissons ont été plus affectés par la crise sanitaire, avec la réduction de nombreux débouchés : international, restauration ou encore festivités. La diminution du taux de marge de 3,1 points en 2020 dans ce secteur a été totalement compensée par la forte hausse en 2021 (+6,0 points). La plus forte évolution du taux de marge entre 2019 et 2022 provient des entreprises de la production de boissons alcooliques distillées avec 10,8 points de hausse. Le taux de marge des entreprises de la production de vin baisse, quant à lui, de 58,7 % à 53,4 % en 2020, mais se rétablit dès 2021, à 60,9 %. En revanche, pour les entreprises de l’industrie des eaux minérales et autres eaux embouteillées et des boissons rafraîchissantes, le taux de marge diminue entre 2019 et 2022, de 34,5 % à 33,1 %.
Le taux de marge des groupes en hausse, celui des entreprises indépendantes en baisse
Dans le secteur de l’industrie agroalimentaire, 82,7 % de la valeur ajoutée en 2019 est réalisé par des entreprises organisées en groupes. Le taux de marge atteint 33,3 % pour les groupes en 2022, contre seulement 21,3 % pour les entreprises indépendantes, ou mono-unités légales (figure 3). Le taux de marge des groupes augmente de 3,6 points entre 2019 et 2022. Les plus grands groupes atteignent 34,4 % en 2022, soit 1,1 point de plus que l’ensemble des groupes. Dans le même temps, le taux de marge diminue légèrement, de 1,3 point pour les entreprises indépendantes. Celui des plus petites d’entre elles, qui était déjà plus faible en 2019 (21,5 %), diminue plus fortement (-2,9 points). Sur la période, 65 % des entreprises indépendantes ont un taux de marge en baisse, contre seulement 52 % des groupes.
tableauFigure 3 – Taux de marge de l’industrie agroalimentaire, par type d’entreprises
Type d’entreprise | 2019 | 2020 | 2021 | 2022 | Part de la VA en 2019 |
---|---|---|---|---|---|
Mono-unité légale | 22,6 | 23,0 | 24,7 | 21,3 | 17,3 |
Groupe | 29,7 | 29,5 | 32,8 | 33,3 | 82,7 |
Ensemble, dont : | 28,5 | 28,3 | 31,3 | 31,2 | 100,0 |
GE et ETI¹ | 30,5 | 30,0 | 33,4 | 34,4 | 72,8 |
MIC² | 21,5 | 23,1 | 23,4 | 18,6 | 8,7 |
- 1. GE : Grandes entreprises ; ETI : Entreprises de taille intermédiaire.
- 2. MIC : Microentreprises.
- Lecture : En 2022, le taux de marge des groupes de l’industrie agroalimentaire est de 33,3 %.
- Champ : France hors Mayotte, entreprises du secteur de l’industrie agroalimentaire présentes de 2019 à 2022.
- Source : Insee, Ésane.
graphiqueFigure 3 – Taux de marge de l’industrie agroalimentaire, par type d’entreprises
L’écart entre les groupes et les indépendantes se creuse entre 2019 et 2022, de 7,1 à 12,0 points. En effet, les marges des indépendantes se compriment en 2022 (-3,4 points). Ces entreprises sont plus souvent dépendantes des prix de marché, et ont pu avoir des difficultés à répercuter l’accélération des prix des intrants sur leurs prix de vente. À l’inverse, les groupes, par leur pouvoir de marché et des capacités d’arbitrage accrues sur le choix des intrants, ont réussi plus souvent à maintenir leurs marges.
Dans le secteur de l’industrie alimentaire, les groupes ont un poids économique prédominant : 80,0 % de la valeur ajoutée en 2019. Le taux de marge de ces groupes est de 28,3 % en 2022, soit 9,1 points de plus que les indépendantes. Sur la période, le taux de marge des groupes augmente de 3,2 points, alors qu’il baisse de 1,8 point pour les entreprises indépendantes.
La concentration des résultats dans les groupes est encore plus marquée dans la fabrication de boissons, avec 93,5 % de la valeur ajoutée du secteur en 2019. Leur taux de marge est plus élevé, avec 49,8 % en 2022, soit 7,1 points de plus que les entreprises indépendantes. Entre 2019 et 2022, les évolutions sont également plus contrastées : le taux de marge des groupes augmente sensiblement (4,1 points), tandis que celui des entreprises indépendantes diminue légèrement (-0,6 point).
Les filiales commerciales contribuent à la hausse du taux de marge des groupes de l’industrie alimentaire
Au sein des groupes, les marges peuvent être inégalement réparties entre leurs filiales. Dans les grands groupes notamment, des filiales industrielles coexistent avec des filiales non industrielles. Dans l’industrie alimentaire, les filiales de holding et sièges sociaux, qui portent les coûts de fonctionnement de leur groupe, ont un taux de marge négatif (-5,2 % en 2019), faisant diminuer le taux de marge du groupe (-1,7 point en moyenne entre 2019 et 2022) (figure 4). Le taux de marge des filiales de cœur de métier est proche de celui de leur groupe (26,1 % contre 25,1 % en 2019) et contribuent positivement à la marge de leur groupe. Les filiales commerciales contribuent également positivement au taux de marge de leur groupe. En particulier en 2022, tandis que les filiales de cœur de métier absorbent le renchérissement des matières premières agricoles, leurs filiales commerciales portent les marges (+0,7 point, contre +0,4 point pour le cœur de métier).
tableauFigure 4 – Contribution par année des filiales constitutives des groupes au taux de marge
Secteur d'activité | 2019 | 2020 | 2021 | 2022 |
---|---|---|---|---|
Industrie alimentaire | ||||
Industrie alimentaire | 0,8 | 0,8 | 0,7 | 0,4 |
Fabrication de boissons | -0,1 | -0,1 | -0,1 | -0,1 |
Commerce | 0,4 | 0,6 | 0,5 | 0,7 |
Holding et siège social | -1,7 | -1,7 | -1,7 | -1,7 |
Autres | 0,6 | 0,4 | 0,6 | 0,7 |
Fabrication de boissons | ||||
Industrie alimentaire | -0,2 | -0,2 | -0,1 | -0,2 |
Fabrication de boissons | 3,9 | 4,8 | 4,3 | 4,4 |
Commerce | -1,0 | -1,9 | -1,7 | -1,4 |
Holding et siège social | -2,0 | -1,8 | -1,9 | -2,1 |
Autres | -0,7 | -0,9 | -0,6 | -0,7 |
- Note : Un groupe de l’industrie alimentaire peut être constitué d’une filiale de l’industrie alimentaire et d’une filiale de la fabrication de boissons.
- Lecture : Toutes choses égales par ailleurs, en 2022, les filiales du commerce des groupes de l’industrie alimentaire contribuent à augmenter le taux de marge des groupes de ce secteur de 0,7 point. Ces filiales possèdent donc un taux de marge supérieur à celui des groupes, contrairement à d’autres filiales, notamment les holdings, qui contribuent négativement au taux de marge des groupes. La somme des contributions de toutes les filiales est alors nulle.
- Champ : France hors Mayotte, entreprises du secteur de l’industrie agroalimentaire présentes de 2019 à 2022.
- Source : Insee, Ésane.
Concernant les groupes de la fabrication de boissons, la structure de marge au sein des groupes est plus stable au cours de la période. Leurs filiales commerciales, de holdings et sièges sociaux contribuent négativement au taux de marge, alors que les filiales du cœur de métier contribuent largement de manière positive au taux de marge (+4,4 points en 2022). La contribution à la baisse des filiales commerciales se creuse nettement avec la fermeture de la restauration en 2020, et reste significativement à la baisse les années suivantes.
Encadré – Les marges de l’industrie agroalimentaire : quelle mesure pour quelles unités ?
L’étude de l’appareil productif suppose des choix de concepts, de méthodes et d’unités d’observation. Une mesure, telle que le taux de marge, peut être fortement touchée par les choix retenus. La comptabilité nationale est l’approche macroéconomique privilégiée pour étudier les évolutions. L’approche proposée ici exploite directement les données microéconomiques, sans l’inscrire dans le cadre global de la comptabilité nationale, pour documenter les disparités de situation entre entreprises, ce que les comptes nationaux ne permettent pas. Les unités sont observées en fonction de leur secteur d’activité alors que la comptabilité nationale vise une approche par branche d’activité homogène. Les deux approches se différencient sur de nombreux autres points : règles de valorisation, choix des unités d’observation, biais de sélection avec le travail en panel.
Règles de valorisation en comptabilité d’entreprise et comptabilité nationale
Les résultats sont obtenus par l’exploitation des comptes des entreprises. En comptabilité d’entreprise, les stocks sont valorisés à leur valeur de marché. La sortie de crise sanitaire étant marquée par une inflation des prix alimentaires, cela renchérit mécaniquement la valeur des stocks. En comptabilité nationale, le principe de droit constaté suppose de valoriser les stocks au prix en vigueur au moment de leur vente ou de leur acquisition. Sont ainsi estimées des corrections sur l’appréciation des stocks. À titre illustratif, l’appréciation sur stock producteur fin 2021 dans les comptes des entreprises est estimée à près d’un milliard d’euros, soit 1,9 % de la valeur ajoutée des industries agroalimentaires.
Choix des unités d’observation
L’étude porte sur les entreprises des industries agroalimentaires. La comptabilité nationale raisonne sur les unités légales. Les unités légales du secteur de l’industrie agroalimentaire peuvent être indépendantes ou filiales d’un groupe du secteur de l’industrie alimentaire, voire d’un groupe d’un autre secteur. Or, en 2019, la valeur ajoutée du secteur de l’industrie agroalimentaire est réalisée à 83 % par des groupes. Ces groupes sont composés de filiales industrielles, mais aussi de filiales de services qui assument des fonctions supports au bénéfice des filiales industrielles du groupe, et de filiales commerciales ou de location qui assurent la circulation des produits. Les transactions entre les entreprises d’un même groupe ne s’effectuent pas systématiquement au prix de marché, les entreprises disposant d’une certaine liberté.
Enfin, en considérant un panel en unités légales, le taux de marge de l’ensemble des unités légales de l’industrie agroalimentaire présentes sur l’ensemble de la période 2019-2022 est de 29,1 % en début de période (contre 28,5 % pour le panel en entreprises) et de 31,3 % (contre 31,2 %) en fin de période, soit une augmentation de 2,2 points (contre 2,7 points pour le panel en entreprises).
Travail en panel, biais de sélection, effet d’attrition
La construction d’un panel permet de suivre les entreprises actives de 2019 à 2022 (sources et méthodes). Par rapport à une étude en coupe, les effets de démographie des entreprises sont neutralisés. Sont exclues les entreprises entrées durant la période. Ainsi, en 2022, sur l’ensemble des entreprises, le taux de marge du secteur de l’industrie agroalimentaire est de 30,6 %, soit 0,6 point de moins que pour les entreprises présentes de 2019 à 2022 qui sont le champ de cette étude. Cet écart s’explique par la non-prise en compte des entreprises entrantes, dont le taux de marge est en général inférieur à la moyenne.
En 2019, sur l’ensemble des entreprises, le taux de marge est de 27,3 %, contre 28,5 % pour les entreprises du panel, soit 1,2 point de moins, cela s’explique par la non-prise en compte des entreprises sortantes.
Les entreprises qui sont sorties du panel 2019-2022 ont un taux de marge de 15,2 % en 2019, nettement inférieur à celui des entreprises présentes durant toute la période. Entre 2019 et 2022, elles peuvent avoir cessé leur activité, changé d’activité, ou être devenues inactives.
L’effet de composition lié à ces entreprises sortantes est prédominant. Sans neutraliser cet effet de composition, la hausse du taux de marge paraît supérieure. Le taux de marge 2022 est 3,3 points supérieur à celui de 2019, contre une hausse de 2,7 points dans le panel.
Sources et méthodes
Les données proviennent des données individuelles du dispositif Ésane, dont le champ est celui des entreprises des secteurs marchands, non agricoles et non financiers (mais y compris les holdings, les auxiliaires financiers et d’assurances, et les exploitations forestières), présentes sur le territoire français. Dans cette étude, les entreprises de l’industrie agroalimentaire comprennent l’industrie alimentaire (division 10 de la nomenclature d’activités française, NAF rév. 2), la fabrication de boissons (division 11), et la fabrication de produits à base de tabac (division 12).
Dans le cadre de cette étude, un panel d’entreprise a été spécifiquement conçu à l’aide des derniers fichiers millésimés issus du dispositif Ésane. Le panel constitué contient les entreprises dont le code APE appartient au secteur des industries agroalimentaires et qui sont présentes sur la période 2019 à 2022. Il comprend 72,8 % des entreprises présentes en 2019 (72,2 % pour les entreprises indépendantes, 83,9 % pour les groupes), ce qui représente 91,2 % de la valeur ajoutée de 2019 sur le secteur des industries agroalimentaires.
L’indicateur utilisé dans cette étude est le taux de marge. Il mesure schématiquement le partage de la valeur ajoutée entre les deux principaux facteurs de production que sont le travail et le capital. Il n’est pas un indicateur de rentabilité financière de l’entreprise, qui devrait intégrer en outre les effets du coût du financement et de l’impôt sur les sociétés. Le taux de rentabilité financière, qui rapporte le résultat net comptable aux capitaux propres de l’entreprise, est un des indicateurs de ce type.
Définitions
L’entreprise est la plus petite combinaison d’unités légales qui constitue une unité organisationnelle de production de biens et de services jouissant d’une certaine autonomie de décision, notamment pour l’affectation de ses ressources courantes.
Un groupe est un ensemble de sociétés liées entre elles par des participations au capital et parmi lesquelles l’une exerce sur les autres un pouvoir de décision.
Le taux de marge est le rapport de l’excédent brut d’exploitation (EBE) à la valeur ajoutée (VA).
L’excédent brut d’exploitation est égal à la valeur ajoutée brute des unités productives, diminuée de la rémunération des salariés et des autres impôts sur la production, et augmentée des autres subventions sur la production.
La valeur ajoutée est égale à la valeur de la production diminuée de la consommation intermédiaire.
Une entreprise mono-unité légale est une entreprise composée d’une seule unité légale. Dans la plupart des cas, elle est indépendante. Toutefois, quelques-unes appartiennent à un groupe lorsqu’une seule unité légale du groupe appartient au champ étudié ou bien lorsqu’une seule unité légale du groupe est localisée en France. Pour faciliter la lecture de la publication, la formulation « entreprise indépendante » a été privilégiée à celle de « entreprise mono-unité légale ».
Le cœur de métier d’une entreprise correspond à son activité principale exercée.
Pour en savoir plus
Retrouvez plus de données en téléchargement.
Fiche « Taux de marge », in Les entreprises en France, coll. « Insee Référence », édition 2023.
Bureau B., Py L., « Ouvrir dans un nouvel ongletAprès deux années de crise sanitaire, des entreprises françaises toujours résilientes à fin 2021 », bulletin de la Banque de France no 243/7, décembre 2022.
Gilet F., Labaye B., Landru K., « Le taux de marge dans l’industrie : des filiales aux groupes, une réduction de 2 points », Insee Première no 1791, février 2020.