Insee Analyses Pays de la Loire · Septembre 2024 · n° 134

28 700 salariés dans le complexe industrialo-portuaire de Nantes Saint‑Nazaire Économies ligériennes et transitions

Le port de Nantes Saint‑Nazaire est l’un des sept grands ports maritimes (GPM) de métropole. Nantes Saint-Nazaire Port, établissement public de l’État, gère l’infrastructure portuaire, maritime et terrestre en tant qu’autorité portuaire. Il fait partie d’un complexe industrialo-portuaire (CIP), composé d’entreprises offrant les services nécessaires au chargement et déchargement des navires, au passage des marchandises et aux établissements industriels implantés sur le domaine portuaire.

Avec un trafic maritime de 28,4 millions de tonnes (MT) en 2023, le port de Nantes Saint‑Nazaire est le 4^e grand port maritime de métropole, derrière Marseille, Le Havre et Dunkerque et 1^er port de la façade Atlantique. En 2023, les trafics les plus élevés en tonnage concernent le gaz naturel liquéfié (8,1 MT), le pétrole brut (6,8 MT) et le pétrole raffiné (4,6 MT). D’autres flux s’ajoutent tels que, par exemple, l’importation de produits pour l’alimentation animale (2,2 MT), l’exportation de blé (0,7 MT), ou encore le transport de marchandises diverses par conteneurs (1,5 MT) ou le transport roulier. Les importations représentent, en volume, 74 % du trafic.

Nantes Saint-Nazaire Port est engagé dans la transition énergétique et écologique, et pour ce faire active plusieurs leviers : conduite de projets immobiliers logistiques et tertiaires, création de services pour développer la filière émergente de l’éolien offshore flottant, actions pour favoriser la croissance des trafics de vracs et de marchandises diverses, etc.

En 2021, le CIP de Nantes Saint‑Nazaire regroupe 613 établissements et emploie 28 700 salariés. Il représente 2 % de l’emploi régional et 5 % des salariés de la Loire-Atlantique. Il est marqué par la présence de grands établissements et concentre 11 % des établissements de plus de 500 salariés de la région. Ainsi, 44 % des effectifs du CIP travaillent dans des établissements de plus de 500 salariés contre 14 % dans la région. Parmi eux, quatre unités de plus de 1 000 salariés réalisent des activités tournées vers la construction navale et l’aéronautique. Elles jouent, au sein du complexe portuaire, un rôle structurant tant au niveau économique que géographique.

L’activité économique du CIP contribue à 3,5 % de la richesse dégagée dans les Pays de la Loire. Les activités non maritimes génèrent la part la plus importante (63 %), dont la moitié est liée à l’industrie. La richesse dégagée par les activités maritimes (37 %) est, pour l’essentiel, portée par la construction navale (22 %) qui a livré plusieurs bateaux (dont le Wonder of the Seas en 2021, plus gros paquebot au monde à l’époque).

Dans la zone d’emploi de Saint‑Nazaire, l’activité du CIP représente 32 % de la richesse dégagée et 17 % de l’emploi salarié. Dans la zone d’emploi de Nantes, elle contribue à 4 % de la richesse dégagée de la zone et 3 % de l’emploi. Au-delà de l’impact régional du CIP, les contrats conclus par Airbus dans l’aéronautique, les livraisons de paquebots construits par les Chantiers de l’Atlantique ou les livraisons de sous-marins de Naval Group influent sur les agrégats de la comptabilité nationale, notamment les exportations françaises [Insee Comptes nationaux trimestriels, 2023 ; pour en savoir plus (3)].

Les établissements du CIP sont implantés le long de l’estuaire de la Loire, sur une soixantaine de kilomètres, remontant de Saint‑Nazaire jusqu’à l’agglomération nantaise. Ce sont, en tout, 54 communes qui sont concernées (figure 1). Parmi elles, quatre communes concentrent les deux tiers des emplois du CIP : Saint‑Nazaire (26 %), Montoir‑de‑Bretagne (22 %), Bouguenais (11 %) et Nantes (8 %). Celles-ci regroupent aussi le plus grand nombre d’établissements (64 % des établissements du CIP) dont cinq établissements de plus de 500 salariés. L’impact est prépondérant à Indre, où la part des emplois du port représente 81 % de l’emploi de la commune, et à Montoir‑de‑Bretagne (67 %). Elle atteint plus de 40 % à Donges et Cordemais, 20 % à Bouguenais, Saint‑Nazaire et Saint‑Aignan‑Grandlieu. En revanche, elle est de 1 % à Nantes, ville de plus grande taille dont les activités sont plus diversifiées.

En 2021, 36 % des salariés du CIP travaillent dans des activités maritimes, soit 10 500 personnes (figure 2). La construction et réparation navale concentre 55 % des effectifs maritimes. Née de la nécessité de trouver des bateaux pour assurer les premières liaisons transatlantiques régulières à partir de Saint‑Nazaire, au 19^e siècle, la construction et réparation navale est apparue comme une activité connexe du transport maritime. Aujourd’hui, avec plusieurs milliers de salariés, les Chantiers de l’Atlantique et Naval Group dominent la soixantaine d’établissements du CIP présents dans la construction et réparation navale. Cette activité comprend aussi d’autres établissements sous-traitants, notamment dans la chaudronnerie industrielle.

L’autre moitié des emplois maritimes (45 %) gravitent autour de l’organisation des transports, la gestion du port et le transport par voie d’eau. L’affrètement (15 %), le fret et la messagerie (10 %), la manutention portuaire (4 %) emploient 29 % des salariés maritimes. Les grands établissements de gestion du port, les douanes, le pilotage, le remorquage, le lamanage et autres services du port représentent 12 % des effectifs martitimes. Petites équipes de courtiers, petits établissements de manutention portuaire côtoient de grands établissements de fret ou de gestion du port. Enfin, armateurs et gestionnaires de navire œuvrent dans le transport par voie d’eau qui représente 3 % de l’emploi maritime.

En 2021, les activités non maritimes du CIP emploient 18 200 personnes, soit 64 % de ses effectifs. Parmi ces salariés, 72 % travaillent dans l’industrie, 21 % dans les services aux industries et 7 % dans le transport terrestre. La construction aéronautique représente la part la plus importante des emplois non maritimes du CIP (40 %) et un quart de ses effectifs globaux. Elle s’est implantée à l’embouchure de l’estuaire au début du 20^e siècle, à l’initiative de chantiers de construction navale avant de s’étendre à Bouguenais. Elle rassemble aujourd’hui des employeurs comme Airbus, qui regroupent plusieurs milliers de salariés, mais aussi des établissements d’une centaine de salariés qui fabriquent des pièces qui leur sont destinées.

Nécessaire au développement de la construction navale et de l’aéronautique, l’industrie mécanique et la métallurgie représentent 15 % des salariés des activités non maritimes. Son savoir-faire est mis au service de l’aéronautique, des chantiers navals mais aussi de l’automobile et désormais de l’éolien, avec des établissements de plus de 100 salariés qui travaillent à la production de moteurs (Man Energy Solutions France), de nacelles pour éoliennes (General Electric éoliennes) ou d’équipements dédiés à la construction de véhicules (Lydall Thermique Acoustique). Cette industrie implique aussi de plus petits établissements de chaudronnerie, tuyauterie, découpage de métal, de réparation de containers ou d’ingénierie associée. La production d’acier est également présente sur le CIP avec la présence d’Arcelormittal.

Avec la deuxième raffinerie de France et le terminal méthanier de Montoir, le raffinage et la production d’énergie sont des clients majeurs du CIP. En 2021, ils représentent 11 % des effectifs industriels non maritimes du port. Les autres industries non maritimes comprennent de grandes implantations liées aux activités navales ou aéronautiques (comme la fabrication de pièces en matériaux composites), mais aussi des établissements liés à l’agroalimentaire.

Les services aux industries et transports terrestres sont aussi présents autour du port. La logistique emploie la part la plus élevée avec 10 % des effectifs non maritimes, suivi du commerce de gros (3 %) et de l’ingénierie (2 %). Silos de stockage de vrac, entrepôts, la logistique concerne aussi bien les denrées alimentaires que la gestion des flux de pièces industrielles ou le stockage d’éléments massifs comme les pièces dédiées à l’éolien.

Les autres services aux entreprises se concentrent autour des activités de récupération, gestion de déchets comme le recyclage de ferraille dont le trafic par bateau alimente les aciéries d’Espagne et de Turquie et aussi la collecte de déchets dangereux, démantèlement d’épaves et dépollution.

En 2021, la majorité des postes du CIP sont des postes d’ouvriers (42 % contre 30 % dans la région). Parmi eux, 57 % occupent des postes d’ouvriers qualifiés de type industriel (contre 33 % dans la région). Ils sont, par exemple, ajusteurs, soudeurs, tuyauteurs, charpentiers métalliques nécessitant qualification et savoir-faire. L’utilisation de grues portuaires ou de chariots élévateurs soulevant de gros tonnages, nécessite aussi des postes d’ouvriers qualifiés de la manutention, du magasinage et du transport (22 % contre 7 % dans la région).

Les postes de professions intermédiaires représentent 27 % des emplois du CIP (contre 23 % dans la région), dont 61 % sont des postes de techniciens. Les cadres et professions intellectuelles supérieures constituent 25 % des effectifs (contre 15 % dans la région), parmi lesquels 79 % sont des ingénieurs et cadres techniques. En revanche, les postes d’employés, souvent occupés par des femmes, sont peu nombreux (6 % sur le CIP contre 31 % dans la région).

Les hommes sont les plus nombreux sur le CIP (79 % des salariés), que cela soit pour travailler dans une activité maritime (76 %) ou non (81 % pour les activités non maritimes). Quant aux femmes, elles sont peu présentes dans la construction navale (18 %) et l’aéronautique (14 %), secteurs les plus employeurs. En revanche, elles sont presque à parts égales avec leurs homologues masculins dans l’affrètement et l’organisation des transports (44 %), les douanes (42 %) et les autres services aux entreprises (46 %).

L’âge moyen des salariés du CIP est de 41,7 ans contre 40,9 ans dans la région. Comme dans la région, la part des salariés âgés de 40 à 49 ans est la plus élevée et, de plus, elle y est supérieure (32 % dans le CIP, contre 26 % dans les Pays de la Loire). Les salariés âgés de 30 à 39 ans représentent 26 % des emplois, soit un peu plus qu’au niveau régional (23 %). La part des jeunes adultes de 20 à 29 ans est plus faible (14 % dans le CIP, contre 19 % dans la région). Les salariés âgés de 55 ans ou plus sont aussi moins nombreux dans le CIP que dans la région.

Si les communes de Saint‑Nazaire, Montoir-de-Bretagne, Bouguenais et Nantes regroupent plus de la moitié des emplois du CIP, seulement un quart des employés y résident. Plus dispersés, les lieux de résidence des salariés du CIP sont toutefois dans des communes proches puisque la moitié d’entre eux habitent dans les unités urbaines de Saint‑Nazaire et Nantes (55 %). Ils sont 31 % à vivre dans les 17 communes qui composent l’unité urbaine nazairienne. Parmi eux, 41 % vivent à Saint‑Nazaire, 8 % à Donges, 7 % à Saint‑Brévin‑les‑Pins et 6 % à Trignac (figure 3). Les 22 communes de l’unité urbaine nantaise concentrent 24 % des salariés dont un sur trois à Nantes. Les trois suivantes sont Saint‑Herblain (8 %), Rezé (7 %) et Couëron (7 %).

Pour beaucoup de communes, les salariés du CIP constituent une part importante des actifs résidents. Ils représentent ainsi un actif sur cinq dans les communes rurales de Crossac, Besné, ainsi que dans les communes de Donges, Montoir‑de‑Bretagne, et dans la Brière, à Saint‑Joachim et Saint‑Malo‑de‑Guersac. La majorité des salariés du CIP vivent en Loire‑Atlantique mais certains habitent dans les départements frontaliers, notamment en Vendée (3 %) et dans le Morbihan (2 %). En outre, de grands groupes avec des implantations multinationales, installés sur le CIP, transfèrent certains de leurs salariés entre leurs différents sites et des entreprises étrangères y envoient des salariés. Ainsi, des travailleurs détachés dont le lieu de résidence se situe hors de France sont présents sur le CIP. En 2021, les Pays de la Loire ont le taux de recours aux travailleurs détachés dans l’industrie le plus élevé, en particulier la Loire-Atlantique (3 %).