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Insee Première · Août 2024 · n° 2010
Insee PremièreEn 2023, 3,5 millions d’immigrés nés en Afrique vivent en France

Odile Rouhban (Insee)

En 2023, 3,5 millions d’immigrés nés en Afrique vivent en France, soit 48 % de l’ensemble des immigrés : l’Afrique est ainsi le premier continent d’origine des immigrés en France. Six immigrés nés en Afrique sur dix sont originaires du Maghreb (Algérie, Maroc, Tunisie), contre neuf sur dix en 1968. Le nombre d'immigrés originaires d'Afrique sahélienne, guinéenne ou centrale a doublé depuis 2006.

46 % des immigrés de 18 à 59 ans nés en Afrique et arrivés à 16 ans ou plus évoquent un motif familial comme raison d’émigration en France. Les études et le travail sont également des motifs d’immigration fréquents, chacun cité par près d’un immigré africain sur quatre. 27 % des immigrés d’Afrique guinéenne ou centrale sont venus en France pour fuir l’insécurité ou les troubles politiques.

Parmi les immigrés nés en Afrique qui avaient déjà travaillé avant la migration et qui ont travaillé depuis leur arrivée en France, 26 % occupent (ou ont occupé dans leur dernier emploi en France s’ils sont sans emploi) un poste moins qualifié que le dernier qu’ils occupaient avant de migrer. Avoir un diplôme du supérieur ne prémunit pas contre un risque de mobilité professionnelle descendante, notamment lorsque celui-ci n’est pas reconnu en France.

Insee - En 2023, 3,5 millions d’immigrés nés en Afrique vivent en France
Publication rédigée par :Odile Rouhban (Insee)

3,5 millions d’immigrés nés en Afrique vivent en France

En 2023, 3,5 millions d’ nés en Afrique vivent en France (figure 1), soit 48 % des immigrés du pays ; l’Afrique est ainsi le premier continent d’origine des immigrés en France. Sur 100 immigrés africains (immigrés nés dans un pays d'Afrique), 60 sont nés au Maghreb : 26 en Algérie, 25 au Maroc, et les autres en Tunisie. 16 sont nés en Afrique guinéenne ou centrale (principalement en Côte d'Ivoire, au Cameroun et au Congo), et 11 dans la région du Sahel, en particulier au Sénégal, au Mali et en Guinée. Parmi les 13 immigrés restants, 7 viennent des Comores ou de Madagascar, et 6 du reste de l’Afrique.

Figure 1 – Immigrés d'Afrique par région et pays de naissance en 2023

Figure 1 – Immigrés d'Afrique par région et pays de naissance en 2023 - Lecture : En 2023, 26 % des immigrés nés en Afrique vivant en France sont nés en Algérie.
Région ou pays de naissance Effectifs 2023
(en milliers)
Part des immigrés nés en Afrique
(en %)
Algérie 892 26
Maroc, Tunisie 1 200 35
Maroc 853 25
Tunisie 347 10
Afrique sahélienne1, dont : 375 11
Sénégal 138 4
Mali 99 3
Guinée 75 2
Afrique guinéenne ou centrale2, dont : 557 16
Côte d'Ivoire 144 4
Cameroun 102 3
Congo 92 3
Comores, Madagascar 238 7
Comores 155 4
Madagascar 83 2
Autres pays d'Afrique3, dont : 213 6
Maurice 35 1
Égypte 35 1
Cap-Vert 32 1
Afrique 3 474 100
  • 1. Burkina Faso, Gambie, Guinée-Bissau, Mauritanie, Niger, Tchad.
  • 2. Bénin, Gabon, Ghana, Guinée équatoriale, Nigéria, République centrafricaine, République démocratique du Congo, Togo.
  • 3. Afrique du Sud, Angola, Botswana, Burundi, Djibouti, Érythrée, Éthiopie, Kenya, Lesotho, Libéria, Libye, Malawi, Mozambique, Namibie, Ouganda, République-Unie de Tanzanie, Rwanda, Sahara occidental, Sao Tomé-et-Principe, Seychelles, Sierra Leone, Somalie, Soudan, Soudan du Sud, Swaziland, Zambie, Zimbabwe.
  • Lecture : En 2023, 26 % des immigrés nés en Afrique vivant en France sont nés en Algérie.
  • Champ : France, immigrés nés en Afrique.
  • Source : Insee, estimations de population 2023 (données provisoires).

Figure 1 – Immigrés d'Afrique par région et pays de naissance en 2023

  • 1. Burkina Faso, Gambie, Guinée-Bissau, Mauritanie, Niger, Tchad.
  • 2. Bénin, Gabon, Ghana, Guinée équatoriale, Nigéria, République centrafricaine, République démocratique du Congo, Togo.
  • 3. Afrique du Sud, Angola, Botswana, Burundi, Djibouti, Érythrée, Éthiopie, Kenya, Lesotho, Libéria, Libye, Malawi, Mozambique, Namibie, Ouganda, République-Unie de Tanzanie, Rwanda, Sahara occidental, Sao Tomé-et-Principe, Seychelles, Sierra Leone, Somalie, Soudan, Soudan du Sud, Swaziland, Zambie, Zimbabwe.
  • Lecture : En 2023, 26 % des immigrés nés en Afrique vivant en France sont nés en Algérie.
  • Champ : France, immigrés nés en Afrique.
  • Source : Insee, estimations de population 2023 (données provisoires).

L’immigration africaine en France croît de façon continue depuis la Seconde guerre mondiale. À l’image de l’immigration depuis les autres continents, elle connaît une augmentation depuis le milieu des années 2000 (figure 2).

Figure 2 – Nombre d'immigrés africains par région de naissance depuis 1968

en milliers
Figure 2 – Nombre d'immigrés africains par région de naissance depuis 1968 (en milliers) - Lecture : En 1968, 378 000 immigrés nés en Algérie résidaient en France métropolitaine.
Année Algérie Maroc, Tunisie Comores, Madagascar Autres pays d'Afrique, dont : Ensemble
Ensemble Afrique sahélienne Afrique guinéenne ou centrale
1968 378 219 3 41 nd nd 642
1975 555 438 6 88 nd nd 1 087
1982 598 570 13 159 nd nd 1 340
1990 556 665 27 253 nd nd 1 501
1999 575 725 47 355 nd nd 1 701
2006 692 861 69 545 169 264 2 167
2007 703 877 72 572 178 277 2 224
2008 713 889 75 595 183 289 2 271
2009 722 901 77 618 191 301 2 317
2010 730 913 80 639 197 313 2 362
2011 737 926 84 664 203 326 2 411
2012 748 944 87 691 211 340 2 470
2013 760 968 90 721 221 355 2 540
2014 774 989 153 756 231 372 2 671
2015 791 1 011 160 793 243 390 2 754
2016 808 1 031 166 830 256 407 2 834
2017 824 1 055 193 874 273 425 2 945
2018 839 1 076 201 918 289 446 3 034
2019 849 1 108 209 967 314 461 3 132
2020 873 1 132 221 1 029 337 497 3 254
2021 882 1 144 225 1 040 341 503 3 292
2022 878 1 165 233 1 101 357 534 3 376
2023 892 1 200 238 1 144 375 557 3 474
  • nd : non disponible.
  • Notes : Données provisoires pour 2021, 2022 et 2023. Jusqu'en 1999, les pays d'Afrique sahélienne et d'Afrique guinéenne ou centrale sont classés avec les autres pays d'Afrique. À partir du recensement de 2006, ils font l'objet de catégories à part dans une nouvelle nomenclature.
  • Lecture : En 1968, 378 000 immigrés nés en Algérie résidaient en France métropolitaine.
  • Champ : France métropolitaine de 1968 à 1990, France hors Mayotte de 1999 à 2013, France depuis 2014, immigrés nés en Afrique.
  • Source : Insee, bases Saphir 1968, 1975, 1982, 1990 et 1999, recensements de la population 2006 à 2020 et estimations de population 2021 à 2023.

Figure 2 – Nombre d'immigrés africains par région de naissance depuis 1968

  • Notes : Données provisoires pour 2021, 2022 et 2023. Jusqu'en 1999, les pays d'Afrique sahélienne et d'Afrique guinéenne ou centrale sont classés avec les autres pays d'Afrique. À partir du recensement de 2006, ils font l'objet de catégories à part dans une nouvelle nomenclature.
  • Lecture : En 1968, 378 000 immigrés nés en Algérie résidaient en France métropolitaine.
  • Champ : France métropolitaine de 1968 à 1990, France hors Mayotte de 1999 à 2013, France depuis 2014, immigrés nés en Afrique.
  • Source : Insee, bases Saphir 1968, 1975, 1982, 1990 et 1999, recensements de la population 2006 à 2020 et estimations de population 2021 à 2023.

L’immigration maghrébine représente six immigrés africains sur dix, contre neuf sur dix en 1968

L’immigration maghrébine est la plus ancienne en France parmi l’immigration africaine, en lien avec l’histoire de ces anciennes colonies françaises : en 1968, neuf immigrés africains sur dix étaient nés au Maghreb. L’Algérie était un département français jusqu’à son indépendance en 1962 ; les flux de travailleurs – principalement des hommes, venant des régions plus pauvres du pays, comme la Kabylie – étaient fréquents entre le territoire algérien et la métropole, en particulier après la Seconde guerre mondiale pour répondre aux besoins de main-d’œuvre dans l’Hexagone. Beaucoup d’immigrés algériens venaient en France pour quelques mois, seuls, dans l’objectif de travailler et d’envoyer de l’argent à leur famille, et rentraient ensuite en Algérie [Ouvrir dans un nouvel ongletMeynier, Meynier, 2011]. L’indépendance en 1962 ne ralentit pas les flux migratoires entre Algérie et France : un accord régulant les conditions de circulation, d’emploi et de séjour des ressortissants algériens et de leur famille en France est signé fin 1968. Cette même année, 378 000 immigrés algériens sont recensés en France, représentant alors 59 % de l’immigration africaine. Lorsque la France restreint l’immigration de travail à partir de 1974, les travailleurs algériens qui choisissent de rester, ne pouvant plus faire d’allers-retours, s’installent durablement et sont progressivement rejoints par leur famille. L’immigration algérienne augmente à nouveau depuis les années 2000 : la moitié des immigrés algériens vivant en France en 2023 sont arrivés en 2001 ou après (figure 3).

Figure 3 – Année d'arrivée en France des immigrés africains résidant en France en 2023 selon la région de naissance

Figure 3 – Année d'arrivée en France des immigrés africains résidant en France en 2023 selon la région de naissance - Lecture : Parmi les immigrés d'Afrique sahélienne résidant en France en 2023, un quart sont arrivés avant 2000, la moitié avant 2011 et trois quarts avant 2017.
Région de naissance 1er quartile Médiane 3e quartile
Algérie 1981 2001 2013
Maroc, Tunisie 1982 2002 2014
Comores, Madagascar 1995 2005 2015
Afrique guinéenne ou centrale 2000 2009 2017
Autres pays d'Afrique 1995 2009 2017
Afrique sahélienne 2000 2011 2017
Ensemble 1989 2005 2015
  • Lecture : Parmi les immigrés d'Afrique sahélienne résidant en France en 2023, un quart sont arrivés avant 2000, la moitié avant 2011 et trois quarts avant 2017.
  • Champ : France hors Mayotte, immigrés nés en Afrique répondant à la question sur l'année d'arrivée en France.
  • Source : Insee, enquête annuelle de recensement 2023 (données provisoires).

Figure 3 – Année d'arrivée en France des immigrés africains résidant en France en 2023 selon la région de naissance

  • Lecture : Parmi les immigrés d'Afrique sahélienne résidant en France en 2023, un quart sont arrivés avant 2000, la moitié avant 2011 et trois quarts avant 2017.
  • Champ : France hors Mayotte, immigrés nés en Afrique répondant à la question sur l'année d'arrivée en France.
  • Source : Insee, enquête annuelle de recensement 2023 (données provisoires).

Les immigrations en provenance du Maroc et de la Tunisie connaissent une évolution similaire, ces deux pays ayant été des protectorats français jusqu’à leur indépendance en 1956. Jusqu’au milieu des années 1970, l’immigration était principalement une immigration de travail, masculine, agricole ou ouvrière. Des conventions signées en 1963 viennent encadrer le recrutement et l’installation de travailleurs marocains et tunisiens en France : le nombre d’immigrés venant de ces deux pays double ainsi entre 1968 et 1975, passant de 219 000 à 438 000. À partir de 1974, l’immigration devient progressivement plus familiale et se féminise. Depuis le début des années 2000, de plus en plus de personnes jeunes originaires du Maroc et de Tunisie viennent s’installer en France pour étudier ou travailler : en 2021, la nationalité marocaine est la première nationalité parmi les étudiants étrangers dans l’enseignement supérieur en France [Ouvrir dans un nouvel ongletBodelin et al., 2022].

Le nombre d'immigrés originaires d'Afrique sahélienne, guinéenne ou centrale a doublé depuis 2006

Les pays d’Afrique hors Maghreb ne représentaient qu’une part faible de l’immigration africaine en 1968 (44 000 personnes, soit 7 % de l’immigration africaine). Avant les années 1970, les immigrés d’Afrique subsaharienne étaient pour beaucoup des hommes d’origine rurale [Ouvrir dans un nouvel ongletTimera, Garnier, 2010], originaires d’Afrique sahélienne, notamment des anciennes colonies francophones autour de la vallée du fleuve Sénégal (Sénégal, Mali, Mauritanie). Ces immigrés venaient temporairement en France pour travailler, la plupart du temps dans l’industrie, et retournaient ensuite dans leur pays. Comme pour les immigrés maghrébins, à la suite de la restriction de l’immigration de travail en 1974, les allers-retours entre le pays d’origine et la France deviennent plus difficiles ; ces hommes s’installent durablement et sont progressivement rejoints par leur famille.

Les migrations de personnes originaires de la région du golfe de Guinée (Afrique guinéenne et centrale) se sont quant à elles développées avec les conflits et l’instabilité politique : deux guerres éclatent entre 1996 et 2003 en République démocratique du Congo (ex-Zaïre), le Congo connaît une guerre civile en 1997, et les tensions politiques opposant le nord et le sud de la Côte d’Ivoire se multiplient à la fin des années 1990. L’immigration d’Afrique guinéenne et centrale se distingue de celle du Sahel par un plus fort taux de féminisation et un niveau de scolarisation plus élevé [Ouvrir dans un nouvel ongletBarou, 2002].

Depuis le début des années 2000, l’immigration d’Afrique sahélienne et d’Afrique guinéenne ou centrale augmente fortement (le nombre d’immigrés originaires de ces deux régions a doublé depuis 2006 pour atteindre 932 000 en 2023), notamment l’immigration étudiante venant du Sénégal, de Côte d’Ivoire ou du Cameroun. La population immigrée originaire de ces régions est particulièrement jeune : en 2023, un immigré d’Afrique sahélienne sur deux a moins de 39 ans.

Moins nombreuses, les migrations des Comores et de Madagascar s’inscrivent également dans un contexte de décolonisation (en 1960 pour Madagascar, et en 1975 pour les Comores). Les difficultés économiques suivant l’indépendance et les tensions politiques aux Comores ont encouragé les migrations vers la France, notamment vers l’île voisine de Mayotte qui était intégrée aux Comores jusqu’à l’indépendance. L’augmentation de cette immigration est notable lorsque Mayotte est devenue un département d’outre-mer en 2011 (incluse dans les estimations de population de la France à partir de 2014). L’immigration malgache en France croît régulièrement depuis l’indépendance du pays. 238 000 immigrés comoriens et malgaches vivent en France en 2023.

Le nombre d’immigrés venant du reste de l’Afrique, soit de pays non francophones et n’ayant pas de liens historiques aussi forts avec la France, a presque doublé entre 2006 (113 000 personnes) et 2023 (213 000). Les pays d’origine se diversifient également : l’île Maurice, l’Égypte et le Cap-Vert représentaient 64 % des immigrés de ces autres pays d’Afrique en 2006, ils n’en représentent aujourd’hui plus que 48 %.

Un immigré africain sur quatre arrivé à 16 ans ou plus vient en France pour étudier

La raison de venue en France la plus souvent mentionnée par les immigrés africains est la famille. Parmi ceux âgés de 18 à 59 ans présents en France en 2019-2020 et arrivés à l'âge de 16 ans ou plus (soit 77 % des immigrés africains), 46 % déclarent être venus en France pour accompagner ou rejoindre un membre de leur famille (figure 4). Cette raison est notamment souvent mentionnée par les immigrés du Maghreb (53 %).

Figure 4 – Motif de la migration en France des immigrés africains selon la région de naissance

en %
Figure 4 – Motif de la migration en France des immigrés africains selon la région de naissance (en %) - Lecture : 53 % des immigrés nés en Algérie vivant en France métropolitaine en 2019-2020 ont immigré en France pour accompagner ou rejoindre un membre de leur famille.
Région de naissance Faire des études ou suivre une formation Trouver un travail, améliorer sa situation professionnelle Échapper à l'insécurité ou à des troubles politiques Accompagner ou rejoindre un membre de sa famille Autres motifs¹
Algérie 21 21 11 53 18
Maroc, Tunisie 21 25 1 53 16
Afrique sahélienne 33 21 14 35 18
Afrique guinéenne ou centrale 29 18 27 33 20
Autres pays d'Afrique 21 29 14 36 19
Ensemble 24 23 11 46 18
  • 1. Pour fuir la pauvreté, pour l'avenir de ses enfants, ou pour d'autres raisons.
  • Note : Plusieurs réponses étaient possibles.
  • Lecture : 53 % des immigrés nés en Algérie vivant en France métropolitaine en 2019-2020 ont immigré en France pour accompagner ou rejoindre un membre de leur famille.
  • Champ : France métropolitaine, immigrés nés en Afrique âgés de 18 à 59 ans arrivés en France à l'âge de 16 ans ou plus et vivant en logement ordinaire.
  • Sources : Ined-Insee, enquête Trajectoires et Origines 2 (2019-2020).

Figure 4 – Motif de la migration en France des immigrés africains selon la région de naissance

  • 1. Pour fuir la pauvreté, pour l'avenir de ses enfants, ou pour d'autres raisons.
  • Note : Plusieurs réponses étaient possibles.
  • Lecture : 53 % des immigrés nés en Algérie vivant en France métropolitaine en 2019-2020 ont immigré en France pour accompagner ou rejoindre un membre de leur famille.
  • Champ : France métropolitaine, immigrés nés en Afrique âgés de 18 à 59 ans arrivés en France à l'âge de 16 ans ou plus et vivant en logement ordinaire.
  • Sources : Ined-Insee, enquête Trajectoires et Origines 2 (2019-2020).

La deuxième raison d’émigration la plus souvent mentionnée par les immigrés africains est la formation ou les études : 24 % d’entre eux sont venus en France pour y étudier ou y suivre une formation. Ce motif concerne en particulier les immigrés sahéliens (33 %) et d’Afrique guinéenne ou centrale (29 %) ; ces proportions sont plus modérées pour ceux du Maghreb (bien que ce motif progresse parmi les arrivées plus récentes) et des autres pays d’Afrique (21 %).

23 % des immigrés africains vivant en France en 2019-2020 et arrivés à 16 ans ou plus sont venus pour travailler : c’est le troisième motif le plus souvent invoqué, et le deuxième le plus souvent cité par les immigrés des « autres pays d’Afrique » (29 % le mentionnent).

Alors qu’un immigré asiatique sur quatre déclare que son émigration en France a été motivée par l’insécurité politique dans son pays, seul un immigré africain sur dix avance cette raison. Il existe cependant de grands écarts d’un pays à l’autre : ce motif n’est évoqué que par 1 % des immigrés du Maroc et de Tunisie, mais par 27 % de ceux d’Afrique guinéenne ou centrale en lien avec les conflits qu’ont connus les pays de cette région. Les immigrés algériens ne sont que 11 % à avancer ce motif, mais cette proportion varie selon la période d’installation en France : ils sont 25 % parmi ceux arrivés pendant la « décennie noire » (période de guerre civile en Algérie de 1992 à 2002).

26 % des immigrés d’Afrique occupent un emploi moins qualifié qu’avant la migration

La migration constitue une rupture professionnelle [Giorgi, Le Thi, 2023]. L’insertion professionnelle des immigrés s’améliore avec le nombre d’années de séjour en France [Ouvrir dans un nouvel ongletEttouati, 2024], mais 29 % des immigrés salariés de 18 à 59 ans estiment, en 2019-2020, que leur emploi actuel (ou leur dernier emploi en France s’ils sont sans emploi) est en-deçà de leurs compétences, contre 24 % des personnes non immigrées. Ce constat est particulièrement vrai pour les immigrés nés en Afrique : 32 % d’entre eux estiment connaître une telle situation de , contre 26 % de ceux nés en Europe, en Asie, en Amérique ou en Océanie. Ce sentiment plus répandu de déclassement parmi les immigrés africains ne s’explique pas uniquement par une durée moyenne de présence en France plus courte : en se restreignant aux immigrés présents depuis plus de 15 ans, 30 % de ceux originaires d’Afrique déclarent encore qu’ils se sentent déclassés, contre 24 % de ceux d’Europe et 22 % de ceux d’Asie.

Parmi les immigrés nés en Afrique ayant travaillé avant et après leur migration, et arrivés en France à 12 ans ou plus (soit 38 % des immigrés africains de 18 à 59 ans), 26 % occupent actuellement en France (ou ont occupé dans leur dernier emploi en France s’ils sont sans emploi) un travail moins qualifié que le dernier emploi qu’ils occupaient avant de quitter leur région d’origine (), contre 23 % pour ceux nés en Asie, et 20 % pour ceux nés en Europe. 13 % des immigrés africains connaissent à l’inverse une (i.e. occupent en 2019-2020 un emploi plus qualifié qu’avant la migration). En particulier, parmi les immigrés africains qui occupaient un emploi d’ouvrier ou d’employé qualifié avant la migration (qui représentent 30 % des immigrés africains), 38 % travaillent (ou ont travaillé dans leur dernier emploi en France s’ils sont sans emploi) comme ouvrier ou employé non qualifié et donc connaissent une mobilité descendante (figure 5). Symétriquement, 32 % des immigrés, ouvriers et employés non qualifiés avant leur migration, sont en France des ouvriers et employés qualifiés : ils ont réalisé une mobilité sociale ascendante.

Figure 5 – Catégories socioprofessionnelles des immigrés africains avant la migration et en 2019-2020

en %
Figure 5 – Catégories socioprofessionnelles des immigrés africains avant la migration et en 2019-2020 (en %) - Lecture : 11 % des immigrés nés en Afrique ont occupé comme dernier emploi avant la migration un poste de cadre ou de profession libérale. En 2019-2020, 9 % des immigrés occupent un poste de cadre ou de profession libérale, ou ont occupé un tel poste dans leur dernier emploi en France métropolitaine.
Catégorie
socioprofessionnelle
Avant la migration
(dernier emploi occupé)
En 2019-2020
(emploi actuel ou dernier emploi)
Cadre, profession libérale 11 9
Profession intermédiaire 18 12
Ouvrier, employé qualifié 30 33
Ouvrier, employé non qualifié 23 41
Agriculteur, artisan, commerçant 18 5
  • Lecture : 11 % des immigrés nés en Afrique ont occupé comme dernier emploi avant la migration un poste de cadre ou de profession libérale. En 2019-2020, 9 % des immigrés occupent un poste de cadre ou de profession libérale, ou ont occupé un tel poste dans leur dernier emploi en France métropolitaine.
  • Champ : France métropolitaine, immigrés nés en Afrique âgés de 18 à 59 ans arrivés en France à l'âge de 12 ans ou plus et vivant en logement ordinaire, qui ont déjà travaillé avant la migration et en France métropolitaine.
  • Sources : Ined-Insee, enquête Trajectoires et Origines 2 (2019-2020).

Figure 5 – Catégories socioprofessionnelles des immigrés africains avant la migration et en 2019-2020

  • Notes : La taille de l'échantillon n'est pas suffisante pour la diffusion des données par trajectoire. Les flux jaunes représentent une mobilité ascendante (la catégorie socioprofessionnelle (CSP) de la personne est jugée supérieure à celle avant la migration) et les flux rouges une mobilité descendante (la CSP de la personne est jugée inférieure à celle avant la migration). Les flux gris représentent une absence de mobilité (position équivalente à celle avant la migration) ou une mobilité horizontale (mobilité entre deux catégories socioprofessionnelles difficilement hiérarchisables, par exemple entre agriculteurs, artisans, commerçants et les autres catégories).
  • Lecture : 11 % des immigrés nés en Afrique ont occupé comme dernier emploi avant la migration un poste de cadre ou de profession libérale. En 2019-2020, 9 % des immigrés occupent un poste de cadre ou de profession libérale, ou ont occupé un tel poste dans leur dernier emploi en France métropolitaine.
  • Champ : France métropolitaine, immigrés nés en Afrique âgés de 18 à 59 ans arrivés en France à l'âge de 12 ans ou plus et vivant en logement ordinaire, qui ont déjà travaillé avant la migration et en France métropolitaine.
  • Sources : Ined-Insee, enquête Trajectoires et Origines 2 (2019-2020).

La majorité des immigrés d’Afrique qui ont occupé un emploi après leur arrivée en France, ont retrouvé un emploi du même niveau de qualification : 43 % des immigrés africains occupent un emploi de la même catégorie socioprofessionnelle (CSP) qu’avant la migration. 19 % ont effectué une , c’est-à-dire une mobilité entre deux CSP difficilement hiérarchisables (par exemple depuis des métiers d’agriculteurs, d’artisans ou commerçants vers d’autres CSP).

Les immigrés d’Afrique guinéenne ou centrale sont les plus nombreux à connaître une mobilité ascendante ou descendante : 28 % d’entre eux occupent dans leur emploi actuel ou dans leur dernier emploi un poste moins qualifié qu’avant la migration, tandis que 14 % occupent un emploi plus qualifié. À l’inverse, les immigrés des « autres pays d’Afrique » sont ceux qui connaissent le moins de mobilité, ascendante ou descendante : 57 % d’entre eux appartiennent à une catégorie socioprofessionnelle du même niveau de qualification qu’avant la migration.

Le fait d’avoir un diplôme ne prémunit pas contre le risque de connaître une mobilité descendante : 36 % des immigrés africains connaissant une mobilité descendante sont diplômés du supérieur (contre 31 % pour l’ensemble des immigrés africains arrivés à 12 ans ou plus ayant travaillé avant la migration et après leur arrivée en France). La non-reconnaissance de certains diplômes obtenus à l’étranger peut contraindre des personnes qui occupaient des postes qualifiés dans leur pays d’origine à accepter des postes moins qualifiés en France : 56 % des immigrés d’Afrique ayant un diplôme et connaissant une mobilité descendante ont un diplôme qui n’est pas reconnu en France, contre 47 % pour l’ensemble des immigrés africains diplômés arrivés à 12 ans ou plus et ayant travaillé avant la migration et après leur arrivée en France.

Publication rédigée par :Odile Rouhban (Insee)
Publication rédigée par :Odile Rouhban (Insee)

Sources

Le recensement de la population permet de connaître le nombre de personnes résidant en France et leur profil. Il comptabilise toutes les personnes résidant en France indépendamment de leur situation administrative, y compris les personnes en situation irrégulière, sans les identifier en tant que telles. Seules les personnes installées en France depuis douze mois ou plus ou qui comptent s’y installer pour douze mois ou plus sont prises en compte. Chaque recensement est issu du cumul de cinq enquêtes annuelles de recensement (EAR).

Les données du recensement sont diffusées chaque année. Le recensement de la population sert de base aux estimations annuelles de population.

L’enquête Trajectoires et Origines 2 (TeO2) est une enquête sur la diversité des populations vivant en France, réalisée conjointement par l’Ined et l’Insee [Ouvrir dans un nouvel ongletBeauchemin et al., 2023]. Elle a vocation à répondre aux besoins publics de connaissance sur les processus d’intégration et sur les discriminations dans l’ensemble de la population. Il s’agit de la seconde édition de l’enquête, la première (TeO1) ayant eu lieu en 2008-2009. La collecte de l’enquête TeO2 s’est déroulée en 2019 et 2020 auprès d’environ 27 000 personnes âgées de 18 à 59 ans et vivant dans un logement ordinaire en France métropolitaine.

Définitions

Un immigré est une personne née étrangère à l’étranger et résidant en France. L’origine d’un immigré est déterminée par son pays de naissance. Certains immigrés ont pu devenir Français, les autres restant étrangers. Un individu continue à être immigré même s’il acquiert la nationalité française.

Le déclassement est mesuré par la réponse à la question « À propos de votre emploi actuel/votre dernier emploi, diriez-vous qu’il est/était en dessous de votre niveau de compétences ? ».

La mobilité dans les catégories socioprofessionnelles est dite ascendante si la catégorie socioprofessionnelle de la personne est jugée supérieure à celle avant la migration, descendante si elle est jugée inférieure. Lorsqu’elle a lieu entre des catégories socioprofessionnelles différentes mais difficilement hiérarchisables (entre agriculteurs, artisans, commerçants et les autres catégories), la mobilité est dite horizontale.

Pour en savoir plus

Retrouvez plus de données en téléchargement.

Ettouati S., « Ouvrir dans un nouvel ongletL’insertion sur le marché du travail des primo-arrivants », in Les premières années en France des immigrés, DSED, janvier 2024.

Beauchemin C., Ichou M., Simon P., « Ouvrir dans un nouvel ongletTrajectoires et Origines 2019-2020 (TeO2) : présentation d’une enquête sur la diversité des populations en France », Population vol. 78, pp. 11-28, 2023.

Giorgi J., Le Thi C., « L’insertion professionnelle des immigrés primo-arrivants en France », in Immigrés et descendants d’immigrés en France, coll. « Insee Références », édition 2023.

Bodelin L., Vinet L., Ndao G., « Ouvrir dans un nouvel ongletLes effectifs d’étudiants étrangers en mobilité internationale pendant la pandémie et un an après », Note d’information du SIES no 11, décembre 2022.

Meynier P., Meynier G., « Ouvrir dans un nouvel ongletL'immigration algérienne en France : histoire et actualité », in Confluences Méditerranée vol. 77, no 2, 2011.

Timera M., Garnier J., « Ouvrir dans un nouvel ongletLes Africains en France. Vieillissement et transformation d'une migration », in Hommes & migrations, no 1286-1287, 2010.

Barou J., « Ouvrir dans un nouvel ongletLes immigrations africaines en France au tournant du siècle », in Hommes & migrations, no 1239, 2002.