Insee
Insee Première · Juillet 2024 · n° 2006
Insee PremièreLes descendants d’immigrés s’élèvent plus souvent dans l’échelle sociale que les personnes sans ascendance migratoire

Philippe Roussel (Insee)

Alors que leurs parents occupaient des positions sociales moins qualifiées, les descendants d’immigrés âgés de 35 à 59 ans appartiennent à des groupes socioprofessionnels assez proches de ceux des personnes sans ascendance migratoire directe. Les descendants d’immigrés sont ainsi plus souvent en ascension sociale par rapport à leurs parents. En 2019-2020, les trois quarts des descendants d’immigrés devenus cadres avaient un père ouvrier ou employé, contre la moitié des personnes sans ascendance migratoire.

À caractéristiques sociodémographiques comparables, pour chaque groupe socioprofessionnel d’origine, les descendants d’immigrés ont autant de chances de progresser dans l’échelle sociale que les personnes sans ascendance migratoire. En particulier, les chances de devenir cadre lorsque les parents ne l’étaient pas sont similaires quel que soit le lien à l’immigration. Pour tous, l’obtention d’un diplôme du supérieur est déterminante pour une mobilité ascendante.

Descendants d’immigrés : une plus forte mobilité sociale

En 2019-2020, 1,8 million de , âgés de 35 à 59 ans, en emploi ou ayant déjà travaillé, vivent en France hors Mayotte. 47 % d’entre eux ont un seul parent immigré, et 53 % deux parents immigrés. Ils ont majoritairement des origines européennes (Europe du Sud pour 44 % d’entre eux) ou maghrébines (35 %).

La majorité des descendants d’immigrés occupent une position sociale différente de leurs parents, une situation un peu plus fréquente que parmi les personnes . Ainsi, 69 % des hommes descendants d’immigrés âgés de 35 à 59 ans en emploi ou ayant déjà travaillé relèvent d’un groupe socioprofessionnel différent de celui de leur père, contre 65 % parmi ceux sans ascendance migratoire (sources et méthodes). Pour les femmes par rapport à leur mère, ces proportions sont respectivement de 73 % et 70 %.

Les descendants d’immigrés occupent des positions socioprofessionnelles assez proches de celles des personnes sans ascendance migratoire, à la différence de leurs parents

La répartition des descendants d’immigrés selon le groupe socioprofessionnel est assez proche de celle des personnes sans ascendance migratoire, même si les premiers occupent plus souvent des positions moins qualifiées. 16 % des descendants d’immigrés âgés de 35 à 59 ans en emploi ou ayant déjà travaillé sont cadres, contre 20 % des personnes sans ascendance migratoire ; 52 % des descendants d’immigrés sont ouvriers ou employés, dont 19 % non qualifiés, contre respectivement 46 % et 16 % des personnes sans ascendance migratoire (figure 1).

Figure 1 – Répartition des personnes en emploi et de leurs parents par catégorie socioprofessionnelle, selon l'ascendance migratoire

en %
Figure 1 – Répartition des personnes en emploi et de leurs parents par catégorie socioprofessionnelle, selon l'ascendance migratoire (en %) - Lecture : En 2019-2020, parmi les hommes âgés de 35 à 59 ans à la date de l'enquête, en emploi ou ayant déjà travaillé et ayant deux parents immigrés, 14,8 % sont cadres.
Statut
migratoire
Non‑salariés Cadres Professions
intermédiaires
Ouvriers ou employés
qualifiés
Ouvriers ou employés
non qualifiés
N'a jamais
travaillé¹
Ensemble
Personnes sans ascendance migratoire directe 8,5 19,7 25,9 29,7 16,2 /// 100,0
Femmes 5,2 16,4 27,7 29,0 21,7 /// 100,0
Hommes 11,9 23,0 24,2 30,4 10,6 /// 100,0
Mères de ces personnes 9,6 4,6 12,0 21,1 19,0 33,6 100,0
Pères de ces personnes 18,8 14,5 15,3 31,3 10,6 9,6 100,0
Descendants d'immigrés 7,3 15,7 25,1 32,8 19,1 /// 100,0
Femmes 4,4 14,2 25,6 31,1 24,7 /// 100,0
Hommes 10,3 17,4 24,5 34,7 13,2 /// 100,0
Mères de ces descendants d'immigrés 4,4 2,4 6,0 14,5 25,3 47,5 100,0
Pères de ces descendants d'immigrés 14,3 7,0 9,3 36,4 22,8 10,3 100,0
Dont deux parents immigrés 6,5 14,0 25,2 34,3 20,0 /// 100,0
Femmes 3,6 13,2 26,0 31,1 26,2 /// 100,0
Hommes 9,6 14,8 24,5 37,6 13,5 /// 100,0
Mères de ces descendants d'immigrés 2,6 0,8 1,7 8,9 29,8 56,3 100,0
Pères de ces descendants d'immigrés 11,6 2,8 6,3 40,6 28,9 9,8 100,0
  • /// : absence de résultat due à la nature des choses.
  • 1. N'a jamais travaillé ou profession inconnue.
  • Lecture : En 2019-2020, parmi les hommes âgés de 35 à 59 ans à la date de l'enquête, en emploi ou ayant déjà travaillé et ayant deux parents immigrés, 14,8 % sont cadres.
  • Champ : France hors Mayotte, personnes en emploi ou ayant déjà travaillé, non immigrées, âgées de 35 à 59 ans à la date de l'enquête.
  • Source : Insee, enquêtes Emploi 2019 et 2020.

Au moment où ils terminaient leurs études, la situation de leurs parents sur le marché du travail différait beaucoup plus. Lorsqu’au moins un des parents est immigré, les pères non qualifiés étaient, en proportion, deux fois plus nombreux qu’au sein des couples de parents non immigrés, et les pères cadres y étaient deux fois moins nombreux. Quand les deux parents sont immigrés, les écarts s’accentuent encore : les pères étaient trois fois plus souvent non qualifiés et cinq fois moins souvent cadres que lorsque les deux parents ne sont pas immigrés. Au sein de ces couples de parents immigrés, l’exercice d’une profession intermédiaire était rare ; en revanche, parmi leurs enfants, près d’un quart exercent ces professions, autant que les personnes sans ascendance migratoire.

Les mères des descendants d’immigrés étaient plus souvent inactives que celles des personnes sans ascendance migratoire. Ainsi, 47 % des descendants d’immigrés ont une mère qui n’avait jamais travaillé, contre 34 % des personnes sans ascendance migratoire. Et lorsque les deux parents sont immigrés, cette proportion atteint 56 %. Toutefois, même lorsque la mère ne travaillait pas, la destinée des descendants d’immigrés sur le marché du travail est, en structure, assez proche de celle des personnes sans ascendance migratoire. Ainsi, 4 % sont inactifs ou au chômage sans avoir jamais travaillé, à peine plus que les personnes sans ascendance migratoire (3 %). Quand ils sont en emploi ou ont déjà travaillé et que leur mère était inactive, 57 % des descendants d’immigrés sont ouvriers ou employés, contre 53 % des personnes sans ascendance migratoire. Enfin, 12 % sont cadres, contre 16 % des personnes sans ascendance migratoire.

Les descendants d’immigrés s’élèvent plus souvent dans l’échelle sociale que les personnes sans ascendance migratoire

La des descendants d’immigrés, observée par rapport aux parents qui ont été en emploi, est supérieure à celle des personnes sans ascendance migratoire. La suite de l’analyse se concentre sur la mobilité , entre salariés, qui représente la majorité des mouvements (près de huit sur dix).

La mobilité sociale est nettement plus fréquente parmi les descendants d’immigrés. Ainsi, 37 % des hommes descendants d’immigrés relèvent d’un groupe social de salariés supérieur à celui de leur père — immigré ou non selon la situation migratoire du couple parental —, contre 27 % des hommes sans ascendance migratoire (figure 2). Pour les femmes, l’écart est également de 10 points : 49 % des descendantes d’immigrés appartiennent à un groupe social supérieur à celui de leur mère salariée, contre 39 % des femmes sans ascendance migratoire. Les situations de mobilité sont, à l’inverse, moins fréquentes parmi les descendants d’immigrés que pour les personnes sans ascendance migratoire, mais l’écart est de moindre ampleur : -1 point pour les femmes et -4 points pour les hommes.

Figure 2a – Mobilité sociale des femmes par rapport à la mère, selon l'ascendance migratoire

en %
Figure 2a – Mobilité sociale des femmes par rapport à la mère, selon l'ascendance migratoire (en %) - Lecture : En 2019-2020, 48,9 % des femmes descendantes d'immigrées ont une mobilité sociale ascendante par rapport à leur mère.
Mobilité sociale Sans ascendance migratoire directe Descendantes d'immigrés
Un parent
immigré
Deux parents
immigrés
Ensemble
Mobilité sociale 70,4 72,0 73,9 72,9
Mobilité non verticale 17,2 13,9 8,2 11,4
Mobilité de statut 16,9 13,8 8,2 11,3
Mobilité horizontale 0,3 0,1 0,0 0,1
Mobilité verticale 53,2 58,1 65,7 61,5
Mobilité ascendante 39,4 39,9 59,9 48,9
Mobilité descendante 13,8 18,2 5,8 12,6
Immobilité sociale 29,6 28,0 26,1 27,1
Effectifs
(en millions)
5,52 0,28 0,23 0,51
  • Note : Les mères étant plus souvent inactives que les pères, la mobilité par rapport aux mères salariées est observée sur un champ plus réduit par rapport aux pères.
  • Lecture : En 2019-2020, 48,9 % des femmes descendantes d'immigrées ont une mobilité sociale ascendante par rapport à leur mère.
  • Champ : France hors Mayotte, femmes en emploi ou ayant déjà travaillé, non immigrées, âgées de 35 à 59 ans à la date de l'enquête.
  • Source : Insee, enquêtes Emploi 2019 et 2020.

Figure 2a – Mobilité sociale des femmes par rapport à la mère, selon l'ascendance migratoire

  • Note : Les mères étant plus souvent inactives que les pères, la mobilité par rapport aux mères salariées est observée sur un champ plus réduit par rapport aux pères.
  • Lecture : En 2019-2020, 48,9 % des femmes descendantes d'immigrées ont une mobilité sociale ascendante par rapport à leur mère.
  • Champ : France hors Mayotte, femmes en emploi ou ayant déjà travaillé, non immigrées, âgées de 35 à 59 ans à la date de l'enquête.
  • Source : Insee, enquêtes Emploi 2019 et 2020.

La mobilité sociale ascendante est encore plus forte lorsque les deux parents sont immigrés. Ainsi, pour les hommes par rapport au père, elle atteint 43 %, soit 6 points de plus que parmi l’ensemble des descendants d’immigrés, et 16 points de plus que parmi les personnes sans ascendance migratoire. Pour les femmes par rapport à leur mère, la proportion est de 60 %, soit respectivement 11 points et 20 points de plus.

Davantage que les hommes par rapport à leur père, les femmes ont tendance à s’élever socialement par rapport à leur mère, qu’elles soient ou non descendantes d’immigrés. En 2019-2020, les femmes sans ascendance migratoire occupent trois fois plus souvent une position sociale supérieure à leur mère qu’une position inférieure. Cette mobilité ascendante s’amplifie parmi les descendantes d’immigrés. En particulier, lorsque les deux parents sont immigrés, le taux de mobilité ascendante des femmes par rapport à leur mère est dix fois plus élevé que le taux de mobilité descendante.

La mobilité ascendante des femmes descendantes d’immigrés par rapport au père l’emporte aussi : 34 % contre 20 % de mobilité descendante, et même 42 % contre 18 % quand les deux parents sont immigrés. Ce n’est pas le cas pour les femmes sans ascendance migratoire.

La mobilité ascendante des descendants d’immigrés est plus fréquente, car les positions sociales de leurs parents sont moins élevées

Les mouvements ascendants étant d’autant plus fréquents que le parent occupe une position basse dans l’échelle sociale, la mobilité sociale ascendante observée parmi les descendants d’immigrés s’en trouve mécaniquement augmentée. À l’inverse, la mobilité descendante des personnes sans ascendance migratoire est plus fréquente, leurs parents étant plus souvent cadres ou exerçant une profession intermédiaire.

Parmi les salariés, les mobilités ascendantes sont plus répandues à partir du bas de l’échelle sociale, aussi bien pour les descendants d’immigrés que pour les personnes sans ascendance migratoire. À groupe social des parents donné, leur fréquence est assez proche entre ces deux populations. La mobilité ascendante des descendants d’immigrés est toutefois un peu plus fréquente en bas de l’échelle sociale, et, au contraire, l’est moins quand le parent exerçait une profession intermédiaire.

Ainsi, quand la mère ou le père était employé ou ouvrier non qualifié, les descendants d’immigrés ont une mobilité ascendante nettement plus fréquente (73 % pour les femmes par rapport à leur mère, 78 % pour les hommes par rapport à leur père) que lorsque la mère ou le père était ouvrier ou employé qualifié (46 % pour les femmes par rapport à leur mère, 43 % pour les hommes par rapport à leur père). Leur mobilité ascendante est aussi légèrement supérieure à celle des personnes sans ascendance migratoire dont les parents sont employés ou ouvriers non qualifiés (70 % pour les femmes par rapport à leurs mères, 76 % pour les hommes par rapport à leur père). En revanche, quand le père était ouvrier ou employé qualifié, les descendants d’immigrés ont une mobilité ascendante identique à celle des hommes sans ascendance migratoire (43 %).

Parmi les personnes devenues cadres, les origines sociales ouvrières ou employées sont nettement plus fréquentes parmi les descendants d’immigrés

Quel que soit leur statut migratoire, près de 15 % des hommes dont le père était salarié sont devenus cadres alors que leur père ne l’était pas, et, pour les femmes, 16 % par rapport à leur mère. L’accès au statut de cadre est d’autant plus fréquent que le parent occupait une position sociale élevée, avec une gradation moins marquée pour les descendants d’immigrés. Ces derniers sont devenus cadres un peu plus souvent que les hommes sans ascendance migratoire quand le père était non qualifié (12 % contre 10 %), aussi souvent quand il était ouvrier ou employé qualifié, mais moins fréquemment quand il exerçait une profession intermédiaire (26 % contre 33 %).

Au total, comme les parents des descendants d’immigrés sont plus souvent ouvriers ou employés, la mobilité sociale des descendants d’immigrés devenus cadres est de plus grande ampleur. Les trois quarts des descendants d’immigrés devenus cadres avaient un père ouvrier ou employé, contre la moitié des personnes sans ascendance migratoire.

Davantage de parents non immigrés sont cadres et le phénomène de d’une génération à l’autre a pour effet qu’au-delà des personnes devenues cadres, 12 % des hommes sans ascendance migratoire sont cadres comme leur père, contre 5 % des descendants d’immigrés. Au total, les descendants d’immigrés salariés sont ainsi moins souvent cadres que les personnes sans ascendance migratoire : 19 % des hommes dont le père était salarié sont cadres, contre 27 % des hommes sans ascendance migratoire (17 % et 20 % pour les femmes dont la mère était salariée).

À caractéristiques comparables, les descendants d’immigrés et les personnes sans ascendance migratoire ont des chances d’ascension sociale identiques

Outre les positions sociales des parents, moins élevées pour les descendants d’immigrés, la prise en compte d’autres facteurs permet de nuancer le constat d’une ascension sociale plus fréquente. En effet, à caractéristiques sociodémographiques données telles que l’âge, le sexe, le niveau de diplôme, la taille de l'unité urbaine de résidence, le groupe socioprofessionnel de l’autre parent ou encore le secteur d’activité, les descendants d’immigrés, pour chaque groupe socioprofessionnel d’origine, ont autant de chances, mais pas davantage, de progresser dans l’échelle sociale que les personnes sans ascendance migratoire.

La mobilité sociale varie en premier lieu, et de loin, en fonction du niveau de diplôme. Ainsi, parmi les salariés dont le parent était non cadre, les titulaires d’un diplôme du supérieur long (bac+3 ou plus) ont, selon le groupe social du parent, 4 à 15 fois plus de chances que les diplômés d’un baccalauréat de bénéficier d’une mobilité ascendante plutôt que descendante ou d’un statu quo, à autres caractéristiques comparables (figure 3). L’effet du diplôme du supérieur long est d’autant plus fort que le groupe social du parent est élevé. Enfin, quand le parent était cadre, les diplômés du supérieur long ont 11 à 13 fois plus de chances d’être dans le même groupe social que leur parent plutôt que de subir une mobilité descendante. L’effet d’un diplôme du supérieur court (bac+2) est également positif mais de moindre ampleur.

Figure 3a – Influence du diplôme, du sexe et du statut par rapport à l'immigration sur la mobilité ascendante, selon le groupe social de la mère

rapport de chances (échelle logarithmique)
Figure 3a – Influence du diplôme, du sexe et du statut par rapport à l'immigration sur la mobilité ascendante, selon le groupe social de la mère (rapport de chances (échelle logarithmique)) - Lecture : À autres caractéristiques comparables, une personne salariée diplômée d'un bac+3 ou plus, et dont la mère est ouvrière ou employée qualifiée, a 10 fois plus de chances d'avoir une mobilité ascendante qu'une personne ayant les mêmes caractéristiques mais étant diplômée du baccalauréat.
Caractéristiques Cadre Profession intermédiaire Ouvrière ou employée qualifiée Ouvrière ou employée non qualifiée
Diplôme
Baccalauréat Réf. Réf. Réf. Réf.
CAP, BEP (ou équivalent) 0,4 *** 0,4 *** 0,4 *** 0,5 ***
Supérieur long
(bac+3 ou plus)
11,2 *** 14,0 *** 10,0 *** 5,5 ***
Sexe
Femmes Réf. Réf. Réf. Réf.
Hommes 1,7 *** 1,6 *** 1,9 *** 3,5 ***
Ascendance migratoire
Sans ascendance migratoire directe Réf. Réf. Réf. Réf.
Descendants d'immigrés ns¹ ns ns ns
  • Réf. : modalité de référence ; *** : significatif au seuil de 1 % ; ns : non significatif.
  • 1. Nombre d'observations insuffisant et résultat instable selon les millésimes de l'enquête Emploi.
  • Note : Par rapport à la mère non cadre, les régressions estiment les chances d'avoir une mobilité ascendante (versus une mobilité descendante ou une immobilité sociale), à autres caractéristiques comparables (niveau de diplôme, sexe, âge, groupe socioprofessionnel de l'autre parent, taille de l'unité urbaine du logement de résidence, nombre de salariés dans l'établissement employeur, secteur d'activité de l'établissement de l'emploi principal ou de l'emploi antérieur). Par rapport à la mère cadre, la régression estime les chances de rester cadre plutôt que d'avoir une mobilité descendante.
  • Lecture : À autres caractéristiques comparables, une personne salariée diplômée d'un bac+3 ou plus, et dont la mère est ouvrière ou employée qualifiée, a 10 fois plus de chances d'avoir une mobilité ascendante qu'une personne ayant les mêmes caractéristiques mais étant diplômée du baccalauréat.
  • Champ : France hors Mayotte, personnes salariées, non immigrées, âgées de 35 à 59 ans à la date de l'enquête.
  • Source : Insee, enquêtes Emploi 2019 et 2020.

Figure 3a – Influence du diplôme, du sexe et du statut par rapport à l'immigration sur la mobilité ascendante, selon le groupe social de la mère

  • Réf. : modalité de référence.
  • Note : Par rapport à la mère non cadre, les régressions estiment les chances d'avoir une mobilité ascendante (versus une mobilité descendante ou une immobilité sociale), à autres caractéristiques comparables (niveau de diplôme, sexe, âge, groupe socioprofessionnel de l'autre parent, taille de l'unité urbaine du logement de résidence, nombre de salariés dans l'établissement employeur, secteur d'activité de l'établissement de l'emploi principal ou de l'emploi antérieur). Par rapport à la mère cadre, la régression estime les chances de rester cadre plutôt que d'avoir une mobilité descendante. Les barres de la modalité « Descendants d'immigrés » (variable Ascendance migratoire) ne sont pas représentées car les rapports de chances ne sont pas significatifs. Seuls le sexe, certains niveaux de diplôme et l'ascendance migratoire sont présents sur la figure.
  • Lecture : À autres caractéristiques comparables, une personne salariée diplômée d'un bac+3 ou plus, et dont la mère est ouvrière ou employée qualifiée, a 10 fois plus de chances d'avoir une mobilité ascendante qu'une personne ayant les mêmes caractéristiques mais étant diplômée du baccalauréat.
  • Champ : France hors Mayotte, personnes salariées, non immigrées, âgées de 35 à 59 ans à la date de l'enquête.
  • Source : Insee, enquêtes Emploi 2019 et 2020.

Dans leur ensemble, les descendants d’immigrés âgés de 35 à 59 ans sont moins souvent diplômés du supérieur que les personnes sans ascendance migratoire (36 % contre 41 %). Toutefois, lorsque le père était ouvrier ou employé, qualifié ou non, les hommes descendants d’immigrés sont autant diplômés du supérieur que les hommes sans ascendance migratoire (23 % contre 24 %), et les femmes davantage que celles sans ascendance migratoire (34 % contre 29 %). Quand le père était non qualifié, les descendants et descendantes d’immigrés sont plus souvent diplômés du supérieur : en l’absence de prise en compte des caractéristiques sociodémographiques, leur mobilité ascendante est plus élevée que celle observée parmi les personnes sans ascendance migratoire. Et lorsque les deux parents étaient ouvriers ou employés, situation de loin la plus fréquente quand les deux travaillaient, les descendants d’immigrés sont également plus nombreux à être diplômés du supérieur, en particulier ceux ayant deux parents immigrés.

L’effet du diplôme sur les chances de mobilité ascendante, à autres caractéristiques données, peut varier selon le statut migratoire. De fait, c’est le cas pour les groupes sociaux d’origine les plus élevés. Ainsi, quand le père exerçait une profession intermédiaire, les descendants d’immigrés diplômés du supérieur long ont 26 fois plus de chances de devenir cadres par rapport à ceux qui sont diplômés au plus du baccalauréat ; ce rapport est plus faible pour les personnes sans ascendance migratoire (15 fois plus). De même, lorsque le père était cadre, les descendants d’immigrés diplômés du supérieur long ont 39 fois plus de chances de rester cadres, par rapport aux descendants d’immigrés diplômés au plus du baccalauréat ; à nouveau, ce rapport est moindre pour les personnes sans ascendance migratoire (13 fois plus).

L’accès au statut de cadre dépend du diplôme mais pas du statut migratoire

Comme pour la mobilité ascendante en général, les chances d’accès au statut de cadre ne dépendent pas du statut migratoire. Ainsi, à caractéristiques sociodémographiques comparables, parmi les personnes ayant un parent non cadre, un descendant d’immigrés a les mêmes chances de devenir cadre qu’une personne sans ascendance migratoire. Ce constat reste valable quelle que soit la configuration socioprofessionnelle du couple parental, que l’un des deux parents ait travaillé ou non, qu’il ait été cadre ou non, et y compris lorsque le champ est élargi aux parents non salariés.

Pour l’accès au statut de cadre, l’obtention d’un diplôme du supérieur, notamment du supérieur long, est déterminante et les hommes ont 2 fois plus de chances de devenir cadres que les femmes, par rapport à la mère comme au père.

Publication rédigée par :Philippe Roussel (Insee)

Sources et méthodes

Les enquêtes Emploi de 2019 et 2020 sont cumulées afin d’obtenir un nombre d’observations plus élevé. Le champ d'analyse est celui des personnes résidant en France hors Mayotte, âgées de 35 à 59 ans au moment de l’enquête, descendantes d’immigrés ou sans ascendance migratoire directe, donc hors personnes immigrées. Pour l’analyse de la mobilité sociale, le champ est en outre restreint aux personnes en emploi au moment de l’enquête ou qui ont déjà travaillé, et dont le groupe socioprofessionnel (GS) est de ce fait connu. Les rares cas où la personne a un emploi mais pas de GS renseigné sont exclus du champ.

Six GS sont distingués : agriculteurs exploitants ; artisans, commerçants et chefs d’entreprise de 10 salariés ou plus ; cadres et professions intellectuelles supérieures ; professions intermédiaires ; employés et ouvriers qualifiés ; employés et ouvriers non qualifiés.

Le groupe socioprofessionnel de la personne correspond à celui de son emploi principal au moment de l'enquête, ou bien, s’il est inactif ou chômeur, au dernier emploi occupé. Le GS du parent est déterminé en fonction de la profession qu’il exerce à la fin des études initiales de la personne, à ses 16 ans s'il n'a pas fait d'études, ou à défaut, de celle qu’il avait exercé le plus longtemps à cette date.

La mobilité sociale est mesurée en comparant le GS des personnes à celui des parents ayant été en emploi. Les personnes dont les parents n’ont pas de GS connu sont exclues de la mesure de la mobilité sociale. La proportion de mères n’ayant jamais travaillé est plus élevée que celle des pères.

Les probabilités de mobilité ascendante selon le GS du père (de la mère) ont été estimées sans tenir compte, puis en tenant compte, du GS de l’autre parent : le constat d’absence d’effet du statut migratoire est le même dans les deux cas.

Une comparaison historique a été menée avec l’enquête Formation et qualification professionnelle (FQP), une des principales sources d'information sur la mobilité sociale en France jusqu’en 2015. Les structures de mobilité sociale sont très proches, et poursuivent par ailleurs les tendances observées depuis les années 1980 : baisse continue de la mobilité de statut en raison de la massification du salariat, progression puis relative stagnation de la mobilité ascendante.

Publication rédigée par :Philippe Roussel (Insee)

Définitions

Un descendant d’immigrés est une personne née en France et ayant au moins un parent immigré, c’est-à-dire un parent né étranger à l’étranger.

Une personne sans ascendance migratoire directe n’est ni immigrée ni descendante d’immigrés.

La mobilité sociale désigne les situations où une personne relève d’un groupe socioprofessionnel différent de celui du parent auquel elle est comparée. Lorsqu’il s’agit de groupes de salariés, la mobilité est dite verticale : elle est ascendante si la position sociale de l’enfant est supérieure à celle du parent, descendante si elle est inférieure. La mobilité sociale est dite non verticale quand l’un est salarié et l’autre non salarié (mobilité de statut) ou quand enfant et parent sont non salariés (mobilité horizontale).

La reproduction ou immobilité sociale correspond aux cas où la personne a le même groupe socioprofessionnel que son parent.

Pour en savoir plus

Retrouvez plus de données en téléchargement.

Rouhban O., Tanneau P., « Une situation des descendants d’immigrés plus favorable que celle des immigrés », in Immigrés et descendants d’immigrés, coll. « Insee Références », édition 2023.

Collet M., Pénicaud É., « En 40 ans, la mobilité sociale des femmes a progressé, celle des hommes est restée quasi stable », Insee Première no 1739, février 2019.