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Insee Focus · Juillet 2024 · n° 331
Insee FocusLes salariés des services à la personne : trois profils de salariés bien distincts

Grégoire Borey, Virginie Gamblin (Insee)

En 2019, les salariés qui travaillent dans les services à la personne sont plutôt âgés et faiblement rémunérés. Souvent multi-actifs, ils travaillent majoritairement à temps partiel. Ceux-ci peuvent être répartis selon trois profils distincts. Un premier groupe rassemble 43 % des salariés, dont la majorité exerce depuis plusieurs années dans ce domaine. Ils réalisent ainsi une part élevée des heures rémunérées du secteur. Un deuxième groupe rassemble 9 % des salariés, pour lesquels cette activité constitue souvent un travail d’appoint venant compléter des revenus perçus dans le cadre d’une activité professionnelle exercée dans un autre secteur. Enfin, 48 % des salariés exercent une activité fluctuante, à la hausse ou à la baisse, dans les services à la personne au cours de la période allant de 2016 à 2019.

Insee Focus
No 331
Paru le :Paru le18/07/2024

Des métiers en tension, des emplois peu attractifs

Le secteur des services à la personne (SAP), qui emploie un million de salariés [Borey et al., 2024], est au cœur de plusieurs politiques publiques. Les mutations économiques et sociodémographiques en cours (recompositions familiales, vieillissement de la population, etc.) devraient engendrer des besoins accrus de ces services dans les prochaines années. Ces besoins viendraient se confronter à une offre insuffisante, source de tensions grandissantes en matière de recrutement. D’une part, les salariés des SAP sont plutôt âgés, pour certains proches de la fin de carrière. D’autre part, les emplois dans les SAP sont peu attractifs financièrement : les emplois, bien que majoritairement en CDI, sont souvent à temps partiel et les rémunérations horaires nettes sont modestes (10 euros de l’heure fin 2019, contre 15,4 euros pour l’ensemble des salariés) et augmentent faiblement (+7 % en trois ans pour les salariés des SAP présents en 2016 et 2019, contre +10 % pour l’ensemble des salariés).

Les salariés des SAP ont changé en moyenne plus de trois fois de situation sur le marché du travail (passage d’un emploi à un autre emploi, période de chômage ou d’inactivité, etc.) d’un trimestre à l’autre entre 2016 et 2019, contre deux fois pour l’ensemble des salariés, révélateur de la précarité de l’emploi dans ce secteur.

Les trajectoires professionnelles des salariés qui exercent au moins une activité dans les services à la personne en 2019 sont variées (figure 1) : activité principale ou secondaire, pérenne ou non. Par convention, le terme « salariés des services à la personne » désigne dans la suite de cette publication l’ensemble des salariés des SAP au sens strict (salariés des organismes de SAP et salariés de particuliers employeurs exerçant au domicile du particulier), ainsi que les assistants maternels, même si ces derniers ne relèvent pas habituellement du champ des SAP.

Figure 1 - Répartition des salariés des services à la personne (SAP) en 2019, selon leur situation d'activité en 2016

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Figure 1 - Répartition des salariés des services à la personne (SAP) en 2019, selon leur situation d'activité en 2016 (en %) - Lecture : 50 % des salariés travaillant principalement dans les SAP en 2019 y travaillaient déjà en 2016.
Situation d'activité Activité principale dans les SAP en 2019 Activité principale hors SAP en 2019 Ensemble des salariés des SAP en 2019
Activité principale dans les SAP 2016 50 10 37
Activité principale hors SAP 2016 29 72 43
Chômage rémunéré 2016 3 2 3
Hors emploi salarié 2016 18 16 17
Ensemble 100 100 100
  • Lecture : 50 % des salariés travaillant principalement dans les SAP en 2019 y travaillaient déjà en 2016.
  • Champ : France, salariés ayant exercé au moins un emploi dans les SAP en 2019.
  • Source : Insee, panel Tous salariés 2019.

Figure 1 - Répartition des salariés des services à la personne (SAP) en 2019, selon leur situation d'activité en 2016

  • Lecture : 50 % des salariés travaillant principalement dans les SAP en 2019 y travaillaient déjà en 2016.
  • Champ : France, salariés ayant exercé au moins un emploi dans les SAP en 2019.
  • Source : Insee, panel Tous salariés 2019.

Pour une majorité de salariés des SAP, cette activité n’est pas une activité stable dans le temps entre début 2016 et fin 2019. Trois profils distincts permettent de caractériser ces salariés fin 2019.

Les salariés dans les SAP depuis plusieurs années réalisent la majorité des heures du secteur

Le premier profil (43 % des salariés des SAP) regroupe majoritairement des salariés qui exercent leur activité principale dans les SAP depuis plusieurs années (figure 2).

Figure 2 – Répartition des salariés des services à la personne (SAP), selon leur profil en 2019

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Figure 2 – Répartition des salariés des services à la personne (SAP), selon leur profil en 2019 (en %) - Lecture : Parmi les salariés ayant exercé une activité SAP en 2019, 48 % font partie du profil "activité SAP qui évolue".
Profil Part
Spécialisés dans les SAP 43
Activité d'appoint dans les SAP 9
Activité SAP qui évolue 48
  • Lecture : Parmi les salariés ayant exercé une activité SAP en 2019, 48 % font partie du profil "activité SAP qui évolue".
  • Champ : France, salariés ayant exercé au moins un emploi dans les SAP en 2019.
  • Source : Insee, panel Tous salariés 2019.

Figure 2 – Répartition des salariés des services à la personne (SAP), selon leur profil en 2019

  • Lecture : Parmi les salariés ayant exercé une activité SAP en 2019, 48 % font partie du profil « activité SAP qui évolue ».
  • Champ : France, salariés ayant exercé au moins un emploi dans les SAP en 2019.
  • Source : Insee, panel Tous salariés 2019.

Ces actifs sont très majoritairement des femmes (9 sur 10), sont plutôt âgés (52 ans en moyenne en 2019) et sont en majorité (8 sur 10) employés en CDI (figure 3). Ces salariés réalisent 65 % des heures rémunérées du secteur en 2019.

Lorsqu’ils s’occupent de populations fragiles (personnes âgées et/ou en situation de handicap par exemple), ils ont souvent un emploi unique à temps partiel (via un organisme de service à la personne) peu rémunéré. Lorsqu’ils s’occupent de l’entretien de domiciles, ils ont alors souvent plusieurs employeurs, via des particuliers employeurs [Borey et al., 2024]. Ils effectuent leurs activités SAP à temps partiel et ont de meilleures rémunérations horaires que les autres salariés des SAP. Ces salariés sont surreprésentés dans les territoires (figure 4).

Figure 3 - Caractéristiques des salariés des services à la personne (SAP), selon leur profil en 2019

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Figure 3 - Caractéristiques des salariés des services à la personne (SAP), selon leur profil en 2019 (en %) - Lecture : En 2019, 83 % des salariés du profil « spécialisés dans les SAP » travaillent à temps partiel.
Profil en 2019 Âge moyen
(en années)
Hommes En CDI
(activité principale)
Temps partiel Multi-activité
Spécialisés dans les SAP 52 10 84 83 54
Activité d'appoint dans les SAP 51 16 75 67 87
Activité SAP qui évolue 41 18 54 60 32
Ensemble 46 15 69 71 46
  • Lecture : En 2019, 83 % des salariés du profil « spécialisés dans les SAP » travaillent à temps partiel.
  • Champ : France, salariés ayant exercé au moins un emploi dans les SAP en 2019.
  • Source : Insee, panel Tous salariés 2019.

Figure 4 - Répartition des salariés des services à la personne (SAP) par type de commune d'emploi, en 2019

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Figure 4 - Répartition des salariés des services à la personne (SAP) par type de commune d'emploi, en 2019 (en %) - Lecture : En 2019, 45 % des salariés du profil « activité SAP qui évolue » travaillent dans les communes denses.
Profil en 2019 Communes rurales Communes de densité intermédiaire Communes denses
(cities)
Ensemble
Spécialisés dans les SAP 28 28 41 100
Activité d'appoint dans les SAP 30 31 39 100
Activité SAP qui évolue 24 31 45 100
Ensemble 26 31 43 100
  • Lecture : En 2019, 45 % des salariés du profil « activité SAP qui évolue » travaillent dans les communes denses.
  • Champ : France, salariés ayant exercé au moins un emploi dans les SAP en 2019.
  • Source : Insee, panel Tous salariés 2019.

Les SAP, une activité d’appoint pour une partie des salariés

Un deuxième profil réunit près d’un salarié des SAP sur dix (9 %). La plupart de ces salariés exercent depuis plusieurs années leur activité principale en dehors du secteur mais maintiennent une activité d’appoint stable dans les SAP. Une large majorité de ces salariés (87 %) sont en effet des salariés multi-actifs, les autres étant sans emploi ou mono-actifs fin 2019. Ils occupent fréquemment des emplois de nettoyeurs, d’ouvriers qualifiés des travaux publics, ou encore de concierges à côté de leur activité dans les SAP. De fait, ces salariés n’effectuent que 5 % des heures rémunérées du secteur des SAP. Ils sont également plutôt âgés (51 ans en moyenne en 2019). La situation de ces salariés sur le marché du travail est stable, ils ont changé en moyenne une fois de situation entre 2016 et 2019 (changement d’emploi, chômage, inactivité, etc.). Ils sont surreprésentés dans le centre-ouest de la France (11 % des salariés de Normandie, Pays de la Loire et Centre-Val de Loire).

Pour de nombreux salariés, la part des SAP dans leur activité évolue sur la période

Le dernier profil rassemble 48 % des salariés des SAP en 2019 : ce sont les salariés dont l’activité SAP évolue fortement au cours de la période 2016-2019, à la hausse ou à la baisse. Pour un salarié de ce groupe sur deux, l’activité SAP, minoritaire début 2016 est devenue l’activité principale fin 2019. Dans les autres cas, il s’agit de salariés pour lesquels l’activité SAP a disparu sur la période ou est apparue et a pu s’intensifier tout en restant une activité annexe.

Dans ce profil, on retrouve ainsi des salariés qui spécialisent leur activité dans les SAP, mais également d’autres pour lesquels les SAP peuvent représenter une opportunité de se réinsérer sur le marché de l’emploi salarié, ou encore un tremplin vers une autre activité professionnelle. Parmi eux se trouvent également de jeunes actifs qui mènent une activité dans les SAP en même temps que leurs études. Ce travail constitue souvent une première expérience professionnelle (« job étudiant », etc.). Les salariés de ce profil réalisent ainsi 30 % des heures salariées rémunérées du secteur en 2019, alors qu’ils ne contribuaient qu’à hauteur de 5 % en 2016.

Leur parcours sur le marché du travail se caractérise par une forte mobilité professionnelle (arrêt et reprise d’activité, changement d’emploi, etc.). Parmi eux, seulement 54 % occupent un en CDI en 2019 contre 69 % pour l’ensemble des salariés des SAP. Ils sont nombreux (87 %) à avoir vécu au moins une période sans activité salariée (de chômage, d’inactivité ou d’activité non salariée) au cours d’un des seize trimestres entre 2016 et 2019.

Fin 2019, un tiers de ces salariés occupe plusieurs emplois. Quand leur activité principale est une activité des SAP, il s’agit principalement d’emplois d’aide à domicile. Quand l’activité des SAP n’est pas leur activité principale, elle vient souvent en complément d’emplois de nettoyeurs, d’agents hospitaliers ou encore d’ouvriers qualifiés des travaux publics.

Ces salariés sont plus jeunes (41 ans en moyenne en 2019, contre 46 ans pour l’ensemble des salariés des SAP) et un peu plus souvent des hommes (18 %, contre 15 % pour l’ensemble des salariés des SAP). Ils sont davantage présents dans les communes denses qui concentrent les opportunités d’emploi. C’est notamment le cas en Île-de-France et dans le sud-est de la France.

Encadré – Des salariés plus âgés dans les SAP que dans l’hébergement-restauration

Les emplois dans les SAP peuvent être comparés à ceux d’autres activités de services tels que les emplois de commerce ou dans l’hébergement-restauration. En effet, ces secteurs sont des secteurs privilégiés d’entrée ou de retour dans la vie active. Ils correspondent à des activités nécessitant en général peu de qualifications et pouvant s’exercer à temps partiel ou de manière discontinue dans une carrière professionnelle. Malgré ces caractéristiques communes de l’emploi, les salariés des SAP sont nettement plus âgés en moyenne que ceux de l’hébergement-restauration.

Parmi les salariés des SAP en 2019, 75 % y travaillaient déjà en 2016 que ce soit en y exerçant leur activité principale, une activité complémentaire ou encore une activité d'appoint. Leurs homologues de l’hébergement-restauration n’étaient que 30 % à travailler dans le même secteur trois ans auparavant et 20 % à travailler dans un autre secteur, la moitié étant hors de l’emploi salarié. Les actifs qui arrivent dans l’emploi salarié via les SAP sont souvent dans un retour à l'emploi. À l’inverse, ceux qui y entrent via l’hébergement-restauration sont plus souvent de jeunes salariés en premier emploi.

Publication rédigée par :Grégoire Borey, Virginie Gamblin (Insee)
Publication rédigée par :Grégoire Borey, Virginie Gamblin (Insee)

Sources

Cette étude s’intéresse aux salariés du panel Tous salariés ayant exercé une activité de service à la personne (SAP) en 2019, c’est-à-dire ceux relevant de l’une des trois professions et catégories sociales (PCS) 563 A, B et C et travaillant soit pour une entreprise ou un établissement appartenant au secteur des SAP, soit pour un particulier-employeur. La PCS 563 A regroupe des emplois SAP et des emplois n’appartenant pas aux SAP au sens strict, à l’instar des assistants maternels. Ces derniers ont été conservés dans le panel, dans la mesure ou la distinction n’était pas possible à mettre en œuvre sans information externe. Ces salariés sont suivis pendant seize trimestres, du premier trimestre (T1) 2016 au dernier trimestre (T4) 2019.
Les résultats relatifs aux rémunérations concernent uniquement les salariés présents à la fois au T4 2016 et au T4 2019.
L’étude utilise le millésime 2019 du panel, dernier avant la crise sanitaire liée au Covid-19.

La mise en œuvre de méthodes d’analyses statistiques , classification ascendante hiérarchique (CAH) a permis de déterminer trois catégories de salariés des SAP, selon leur situation vis-à-vis de l’emploi salarié pendant les seize trimestres d’observation. Dans cette étude, quatre types de situations sont distingués :
• actifs principalement dans les SAP (dont le est effectué dans les activités SAP) ;
• autres actifs (dont le poste principal au cours du trimestre est effectué hors des activités SAP) ;
• au chômage : la personne n’a occupé aucun poste salarié et a perçu des allocations chômage au cours du trimestre ;
• hors emploi salarié : la personne est absente du panel Tous salariés pour le trimestre considéré (actifs non salariés, demandeurs d’emploi non indemnisés, personnes hors marché du travail, etc.).
Du fait de l’utilisation de données en panel, seules les données en structure sont analysées, aucune donnée en volume n’apparaît dans cette étude.

Définitions

Le poste principal est défini comme étant celui pour lequel le salaire est significativement plus élevé que celui des autres postes (supérieur de 10 % au minimum) ou à défaut celui qui représente le plus grand nombre d’heures salariées.

Une commune rurale est une commune peu dense au sens de la grille communale de densité à trois niveaux. Les communes denses ou de densité intermédiaire sont dites urbaines.

Pour en savoir plus

Borey G., Warmoes J., Beltzung M., Lefebvre M., « En moyenne, 4 % de l’emploi salarié total dans les services à la personne et jusqu’à 6 % dans le Sud-Ouest », Insee Première no 1981, janvier 2024.