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Insee Première · Août 2024 · n° 2009
Insee PremièreEn 2023, un million d'immigrés nés en Asie vivent en France

Odile Rouhban (Insee)

En 2023, 14 % des immigrés vivant en France sont nés en Asie. Avec un million de ressortissants, l’Asie est le troisième continent d’origine, derrière l’Afrique et l’Europe. 39 % des immigrés nés en Asie sont originaires de Turquie ou d'Asie du Sud-Est, contre 75 % en 1968 ; le nombre d’immigrés du reste de l’Asie, en particulier de Chine et d’Asie du Sud, augmente en effet depuis les années 1980.

Si le premier motif de venue en France évoqué par les immigrés d’Asie est d’ordre familial, un immigré sur quatre mentionne l’insécurité dans son pays d’origine parmi les raisons l’ayant amené à émigrer en France : ce motif est en particulier avancé par un immigré sur deux né au Moyen-Orient. De plus en plus d’immigrés originaires d'Asie viennent en France pour étudier, notamment près d’un immigré né en Chine sur deux.

Parmi l’ensemble des immigrés, ceux venus d'Asie maîtrisent le moins bien la langue française à leur arrivée en France : six sur dix n’avaient même aucune maîtrise du français. Leur niveau s’améliore avec l’ancienneté en France, ou avec le fait d’y avoir fait des études, ou d’avoir un conjoint né en France. Toutefois, en 2019-2020, 26 % des immigrés nés en Asie dont la langue maternelle ou de référence n’est pas le français déclarent encore rencontrer des difficultés à demander un renseignement ou un service en français.

Insee - En 2023, un million d'immigrés nés en Asie vivent en France
Publication rédigée par :Odile Rouhban (Insee)

Un million d’immigrés nés en Asie vivent en France

En 2023, un million d’ nés en Asie vivent en France, soit 14 % des immigrés du pays ; l’Asie est ainsi le troisième continent d’origine des immigrés en France, derrière l’Afrique et l’Europe. 24 % d’entre eux viennent de Turquie, 18 % des pays d’Asie du Sud (principalement du Sri Lanka, d’Inde et du Pakistan), 16 % du Moyen-Orient (dont près des deux tiers du Liban et de Syrie), et 15 % d’Asie du Sud‑Est (Vietnam, Cambodge, Laos) (figure 1). Les immigrés nés en Chine représentent 12 % des immigrés asiatiques (nés dans un pays d'Asie) en France. Parmi les 16 % d’immigrés asiatiques venus du reste de l’Asie, près d’un tiers sont originaires d’Afghanistan.

Figure 1 – Immigrés d'Asie par région et pays de naissance en 2023

Figure 1 – Immigrés d'Asie par région et pays de naissance en 2023 - Lecture : En 2023, 24 % des immigrés nés en Asie vivant en France sont nés en Turquie.
Région ou pays de naissance Effectifs 2023
(en milliers)
Part des immigrés nés en Asie
(en %)
Turquie 239 24
Moyen-Orient1, dont : 156 16
Liban 56 6
Syrie 44 4
Iran 26 3
Asie du Sud-Est 153 15
Vietnam 77 8
Cambodge 48 5
Laos 29 3
Chine 116 12
Asie du Sud2, dont : 175 18
Sri Lanka 55 6
Inde 53 5
Pakistan 33 3
Autres pays d'Asie3, dont : 161 16
Afghanistan 52 5
Philippines 24 2
Thaïlande 21 2
Asie 1 000 100
  • 1. Arabie Saoudite, Bahreïn, Émirats arabes unis, Irak, Israël, Jordanie, Koweït, Oman, Palestine, Qatar, Yémen.
  • 2. Bangladesh, Bhoutan, Maldives, Népal.
  • 3. Brunei, Corée du Nord, Corée du Sud, Indonésie, Japon, Kazakhstan, Kirghizistan, Malaisie, Mongolie, Myanmar, Ouzbékistan, Singapour, Tadjikistan, Taïwan, Timor oriental, Turkménistan.
  • Lecture : En 2023, 24 % des immigrés nés en Asie vivant en France sont nés en Turquie.
  • Champ : France, immigrés nés en Asie.
  • Source : Insee, estimations de population 2023 (données provisoires).

Figure 1 – Immigrés d'Asie par région et pays de naissance en 2023

  • 1. Arabie Saoudite, Bahreïn, Émirats arabes unis, Irak, Israël, Jordanie, Koweït, Oman, Palestine, Qatar, Yémen.
  • 2. Bangladesh, Bhoutan, Maldives, Népal.
  • 3. Brunei, Corée du Nord, Corée du Sud, Indonésie, Japon, Kazakhstan, Kirghizistan, Malaisie, Mongolie, Myanmar, Ouzbékistan, Singapour, Tadjikistan, Taïwan, Timor oriental, Turkménistan.
  • Lecture : En 2023, 24 % des immigrés nés en Asie vivant en France sont nés en Turquie.
  • Champ : France, immigrés nés en Asie.
  • Source : Insee, estimations de population 2023 (données provisoires).

L’immigration depuis la Turquie et l’Asie du Sud-Est représente 39 % de l’immigration asiatique, contre 75 % en 1968

Les mouvements migratoires asiatiques les plus anciens proviennent de Turquie et d’Asie du Sud‑Est. En 1968, 75 % des immigrés asiatiques vivant en France étaient nés dans une de ces deux régions du monde, contre 39 % en 2023 (figure 2). Leur histoire et leur profil sont cependant très différents. L’immigration de travail turque s’est développée à partir des années 1960. En 1965, la signature d’un accord bilatéral entre la France et la Turquie vise à favoriser l’émigration de jeunes travailleurs turcs en France, en particulier dans l’industrie, la métallurgie ou le bâtiment [Ouvrir dans un nouvel ongletDébarre, Petek, 2019] : en 1968, plus d’un immigré asiatique sur deux présent en France est d’origine turque. L’immigration de travail ralentit à partir des années 1970, mais l’immigration venant de Turquie continue d’augmenter, notamment via le regroupement familial.

Figure 2 – Nombre d'immigrés asiatiques par région de naissance depuis 1968

en milliers
Figure 2 – Nombre d'immigrés asiatiques par région de naissance depuis 1968 (en milliers) - Lecture : En 1968, 43 000 immigrés nés en Turquie résidaient en France métropolitaine.
Année Turquie Asie du Sud-Est Chine Autres pays d'Asie, dont : Ensemble
Ensemble Asie du Sud Moyen-Orient
1968 43 18 3 18 nd nd 81
1975 76 26 4 35 nd nd 140
1982 121 123 6 72 nd nd 322
1990 168 156 18 136 nd nd 478
1999 174 161 35 177 nd nd 547
2006 229 160 71 233 82 79 692
2007 235 162 76 241 84 81 714
2008 239 163 80 251 89 83 732
2009 242 162 85 257 92 83 746
2010 246 162 90 263 97 83 761
2011 247 162 93 271 101 84 773
2012 248 162 97 281 107 85 787
2013 249 161 100 291 114 86 801
2014 250 160 102 309 119 93 820
2015 249 160 105 324 124 98 838
2016 247 159 105 341 130 105 852
2017 246 158 107 361 137 113 874
2018 245 158 108 382 142 122 892
2019 252 160 114 408 151 132 933
2020 246 160 108 416 150 134 930
2021 249 162 110 419 151 135 940
2022 233 157 107 451 159 145 948
2023 239 153 116 492 175 156 1 000
  • nd : non disponible.
  • Notes : Données provisoires pour 2021, 2022 et 2023. Jusqu'en 1999, les pays d'Asie du Sud et du Moyen‑Orient sont classés avec les autres pays d'Asie. À partir du recensement de 2006, ils font l'objet de catégories à part dans une nouvelle nomenclature.
  • Lecture : En 1968, 43 000 immigrés nés en Turquie résidaient en France métropolitaine.
  • Champ : France métropolitaine de 1968 à 1990, France hors Mayotte de 1999 à 2013, France depuis 2014, immigrés nés en Asie.
  • Source : Insee, bases Saphir 1968, 1975, 1982, 1990 et 1999, recensements de la population 2006 à 2020 et estimations de population 2021 à 2023.

Figure 2 – Nombre d'immigrés asiatiques par région de naissance depuis 1968

  • Notes : Données provisoires pour 2021, 2022 et 2023. Jusqu'en 1999, les pays d'Asie du Sud et du Moyen‑Orient sont classés avec les autres pays d'Asie. À partir du recensement de 2006, ils font l'objet de catégories à part dans une nouvelle nomenclature.
  • Lecture : En 1968, 43 000 immigrés nés en Turquie résidaient en France métropolitaine.
  • Champ : France métropolitaine de 1968 à 1990, France hors Mayotte de 1999 à 2013, France depuis 2014, immigrés nés en Asie.
  • Source : Insee, bases Saphir 1968, 1975, 1982, 1990 et 1999, recensements de la population 2006 à 2020 et estimations de population 2021 à 2023.

L’immigration du Sud-Est asiatique est liée à la décolonisation de l’Indochine (1949‑1954), puis à la guerre du Vietnam (1955‑1975) et aux guerres civiles cambodgienne (1967‑1975) et laotienne (1962‑1975). De nombreux ressortissants de ces pays, contraints à l’exil, demandent l’asile en France : entre 1968 et 1990, le nombre d’immigrés du Sud-Est asiatique est multiplié par neuf. Cette immigration s’est ensuite stabilisée : en 2023, seuls 25 % des immigrés du Vietnam, du Cambodge et du Laos vivant en France sont arrivés depuis l’année 2000, contre 58 % de l’ensemble des immigrés asiatiques (figure 3). Par conséquent, les immigrés d’Asie du Sud‑Est vivant en France sont relativement âgés : la moitié d’entre eux a plus de 56 ans, alors que l’âge médian de l’ensemble des immigrés asiatiques est de 44 ans.

Figure 3 – Année d'arrivée en France des immigrés asiatiques résidant en France en 2023 selon la région de naissance

Figure 3 – Année d'arrivée en France des immigrés asiatiques résidant en France en 2023 selon la région de naissance - Lecture : Parmi les immigrés d'Asie du Sud-Est résidant en France en 2023, un quart sont arrivés avant 1977, la moitié avant 1982 et trois quarts avant 2000.
Région de naissance 1er quartile Médiane 3e quartile
Asie du Sud-Est 1977 1982 2000
Turquie 1983 1996 2007
Chine 1999 2006 2016
Asie du Sud 1997 2009 2017
Autres pays d'Asie 2001 2014 2019
Moyen-Orient 1991 2014 2018
Ensemble 1987 2003 2016
  • Lecture : Parmi les immigrés d'Asie du Sud-Est résidant en France en 2023, un quart sont arrivés avant 1977, la moitié avant 1982 et trois quarts avant 2000.
  • Champ : France hors Mayotte, immigrés nés en Asie répondant à la question sur l'année d'arrivée en France.
  • Source : Insee, enquête annuelle de recensement 2023 (données provisoires).

Figure 3 – Année d'arrivée en France des immigrés asiatiques résidant en France en 2023 selon la région de naissance

  • Lecture : Parmi les immigrés d'Asie du Sud-Est résidant en France en 2023, un quart sont arrivés avant 1977, la moitié avant 1982 et trois quarts avant 2000.
  • Champ : France hors Mayotte, immigrés nés en Asie répondant à la question sur l'année d'arrivée en France.
  • Source : Insee, enquête annuelle de recensement 2023 (données provisoires).

L’immigration en provenance de Chine et d’Asie du Sud augmente depuis les années 1980

À partir des années 1980, l’immigration asiatique se diversifie, avec en particulier l’arrivée d’immigrés d’Asie du Sud. En 2023, l’Asie du Sud est la deuxième région d’origine des immigrés asiatiques en France, derrière la Turquie. Lorsque le Royaume-Uni, destination privilégiée jusqu’alors des émigrants venus d’Asie du Sud, commence à restreindre l’immigration dans les années 1970, les citoyens des pays du Commonwealth d’Asie du Sud (Bangladesh, Inde, Pakistan, Sri Lanka) se tournent progressivement vers la France [Ouvrir dans un nouvel ongletMoliner, 2009]. À partir de 1983, la guerre civile au Sri Lanka incite un certain nombre de Tamouls à quitter le pays et à demander l’asile politique en France. Les Sri Lankais représentent le plus grand groupe d’immigrés sud-asiatiques en France aujourd’hui, avec 55 000 ressortissants (soit 31 % des immigrés de cette région), juste devant l’Inde (53 000 ressortissants, 30 %). L’immigration sud-asiatique est majoritairement masculine : 58 % de ces immigrés résidant aujourd’hui en France sont des hommes, contre 49 % pour l’ensemble des immigrés asiatiques.

L’immigration chinoise s’est développée à partir de la fin des années 1980, à la suite de l’assouplissement des politiques d’émigration du pays. Ce mouvement s’est accéléré au début des années 2000 : entre 1999 et 2010, le nombre d’immigrés chinois en France a presque triplé, avec l’arrivée de nombreux étudiants restant plus de douze mois, et de jeunes professionnels. En 2023, les immigrés chinois en France sont relativement jeunes (la moitié d’entre eux ont moins de 41 ans) et majoritairement des femmes (61 % d’entre eux).

Les immigrés nés au Moyen-Orient constituent un ensemble hétérogène. Une partie d’entre eux sont arrivés en France dans les années 1970 en provenance du Liban, d’Iran et, dans une moindre mesure, d’Israël. Ils étaient confrontés à l’insécurité et aux conflits dans la région, avec le début de la guerre civile au Liban en 1975 et la révolution iranienne en 1979. Une autre partie des immigrés originaires du Moyen‑Orient s’installe en France depuis le début du XXIe siècle, à la suite des conflits qui touchent l’Irak à partir de 2003 et la Syrie à partir de 2011. Cette immigration récente (la moitié sont arrivés après 2014) a rajeuni la population moyen-orientale présente en France : la moitié des immigrés du Moyen‑Orient vivant en France en 2023 ont moins de 41 ans.

L’immigration asiatique se diversifie encore davantage depuis le début des années 2000, l’immigration des « autres pays d’Asie » ayant plus que doublé entre 2006 et 2023. En particulier, les immigrés afghans, arrivés récemment afin de fuir l’instabilité politique de leur pays, représentent 32 % des immigrés des « autres pays d’Asie ». Les trois quarts des immigrés afghans sont arrivés en France après 2016, et seuls 23 % sont des femmes.

25 % des immigrés asiatiques arrivés après l’âge de 16 ans ont fui l’insécurité ou les troubles politiques

Un immigré âgé de 18 à 59 ans originaire d'Asie et arrivé à l'âge de 16 ans ou plus sur quatre dit avoir immigré en France afin d’échapper à l’insécurité ou à des troubles politiques (figure 4). Ce motif est le plus cité par les immigrés nés au Moyen‑Orient (par 52 % d’entre eux), en lien avec les conflits dans cette région du monde. Cette raison concerne également 46 % des immigrés d’Asie du Sud (en particulier ceux venus du Sri Lanka). Il est évoqué par 28 % des immigrés originaires d'Asie du Sud-Est : la question sur le motif de la venue en France n’a pas été posée aux immigrés arrivés avant l’âge de 16 ans, or 57 % des immigrés provenant d’Asie du Sud‑Est sont dans ce cas (sources).

Figure 4 – Motif de la migration en France des immigrés asiatiques selon la région de naissance

en %
Figure 4 – Motif de la migration en France des immigrés asiatiques selon la région de naissance (en %) - Lecture : 73 % des immigrés nés en Turquie vivant en France métropolitaine en 2019-2020 ont immigré en France pour accompagner ou rejoindre un membre de leur famille.
Région de naissance Faire des études ou suivre une formation Trouver un travail, améliorer sa situation professionnelle Échapper à l'insécurité ou à des troubles politiques Accompagner ou rejoindre un membre de sa famille Autres motifs1
Turquie 3 14 13 73 12
Moyen-Orient 35 11 52 12 11
Asie du Sud-Est 25 9 28 45 10
Chine 48 25 3 24 16
Asie du Sud 5 8 46 45 13
Autres pays d'Asie 30 12 19 41 13
Ensemble 23 14 25 43 13
  • 1. Pour fuir la pauvreté, pour l'avenir de ses enfants, ou pour d'autres raisons.
  • Note : Plusieurs réponses étaient possibles.
  • Lecture : 73 % des immigrés nés en Turquie vivant en France métropolitaine en 2019-2020 ont immigré en France pour accompagner ou rejoindre un membre de leur famille.
  • Champ : France métropolitaine, immigrés nés en Asie âgés de 18 à 59 ans arrivés en France à l'âge de 16 ans ou plus et vivant en logement ordinaire.
  • Sources : Ined-Insee, enquête Trajectoires et Origines 2 (2019-2020).

Figure 4 – Motif de la migration en France des immigrés asiatiques selon la région de naissance

  • 1. Pour fuir la pauvreté, pour l'avenir de ses enfants, ou pour d'autres raisons.
  • Note : Plusieurs réponses étaient possibles.
  • Lecture : 73 % des immigrés nés en Turquie vivant en France métropolitaine en 2019-2020 ont immigré en France pour accompagner ou rejoindre un membre de leur famille.
  • Champ : France métropolitaine, immigrés nés en Asie âgés de 18 à 59 ans arrivés en France à l'âge de 16 ans ou plus et vivant en logement ordinaire.
  • Sources : Ined-Insee, enquête Trajectoires et Origines 2 (2019-2020).

Toutes origines confondues, le motif familial est cependant le motif le plus souvent évoqué pour expliquer la migration (43 %). Il est tout particulièrement cité par les immigrés venant de Turquie : 73 % d’entre eux, âgés aujourd’hui de 18 à 59 ans et arrivés à 16 ans ou plus en France, déclarent être venus pour accompagner ou rejoindre un membre de leur famille.

Les études constituent la troisième raison de venue en France (23 %), motif qui est même évoqué par un immigré chinois sur deux. Ce motif est encore plus souvent cité par les générations arrivées plus récemment, notamment par 41 % des immigrés d’Asie du Sud‑Est venus en France après 2000. Enfin, seuls 14 % des immigrés asiatiques ont déclaré que le travail était une des raisons de leur venue en France, avec néanmoins de fortes variations selon l’origine : 8 % des immigrés sud-asiatiques, contre 25 % des immigrés chinois.

Six immigrés asiatiques sur dix n’avaient aucune maîtrise de la langue française en arrivant en France

Les immigrés asiatiques maîtrisent moins bien la langue française que les autres immigrés [Insee, 2023] : parmi ceux arrivés après 3 ans et dont la langue maternelle ou la n'était pas le français, 25 % déclarent avoir en 2019-2020 une très bonne maîtrise de la langue française à l'écrit, à l'oral, en compréhension et en lecture, contre 44 % de ceux originaires d'Europe, 51 % de ceux venus d'Amérique et d'Océanie et 60 % de ceux venus d'Afrique. Cette moindre maîtrise du français peut freiner leur insertion sociale et professionnelle, notamment leur participation au marché du travail, leur accès à des emplois en adéquation avec leurs compétences, et à des niveaux de salaires plus élevés [Bechichi et al., 2016].

Lors de leur arrivée en France, 60 % des immigrés asiatiques arrivés après 3 ans déclarent qu’ils n’avaient aucune maîtrise de la langue française, que ce soit à l’écrit, à l’oral, en compréhension ou en lecture. Lorsqu’ils auto‑évaluent leur niveau dans ces quatre compétences à leur arrivée en France, avec un score allant de 0 (aucune connaissance) à 3 (très bonne connaissance), seuls les immigrés du Moyen-Orient ont en moyenne un score dépassant légèrement 1. En particulier, les immigrés nés en Turquie obtiennent un score entre 0,1 et 0,3, signifiant une maîtrise quasi inexistante du français (figure 5).

Figure 5a – Niveau en français des immigrés asiatiques à l’arrivée en France

Figure 5a – Niveau en français des immigrés asiatiques à l’arrivée en France - Lecture : À leur arrivée en France, les immigrés d'Asie du Sud estiment avoir un niveau de 0,5 sur 3 en compréhension de la langue française.
Région de naissance Comprendre Parler Écrire Lire
Turquie 0,3 0,2 0,1 0,2
Moyen-Orient 1,2 1,2 1,2 1,3
Asie du Sud-Est 0,6 0,6 0,6 0,6
Chine 0,7 0,7 0,6 0,7
Asie du Sud 0,5 0,4 0,3 0,3
Autres pays d'Asie 0,5 0,4 0,4 0,4
Ensemble 0,6 0,5 0,5 0,5
  • Note : Les compétences en langue française sont évaluées sur une échelle allant de 0 à 3, avec 0 = « Pas du tout », 1 = « Un peu », 2 = « Bien » et 3 = « Très bien ».
  • Lecture : À leur arrivée en France, les immigrés d'Asie du Sud estiment avoir un niveau de 0,5 sur 3 en compréhension de la langue française.
  • Champ : France métropolitaine, immigrés nés en Asie âgés de 18 à 59 ans et vivant en logement ordinaire, arrivés en France après 3 ans et dont la langue maternelle ou de référence n'est pas le français pour le niveau en 2019-2020.
  • Sources : Ined-Insee, enquête Trajectoires et Origines 2 (2019-2020).

Figure 5a – Niveau en français des immigrés asiatiques à l’arrivée en France

  • Note : Les compétences en langue française sont évaluées sur une échelle allant de 0 à 3, avec 0 = « Pas du tout », 1 = « Un peu », 2 = « Bien » et 3 = « Très bien ».
  • Lecture : À leur arrivée en France, les immigrés d'Asie du Sud estiment avoir un niveau de 0,5 sur 3 en compréhension de la langue française.
  • Champ : France métropolitaine, immigrés nés en Asie âgés de 18 à 59 ans et vivant en logement ordinaire, arrivés en France après 3 ans et dont la langue maternelle ou de référence n'est pas le français pour le niveau en 2019-2020.
  • Sources : Ined-Insee, enquête Trajectoires et Origines 2 (2019-2020).

Cette faible maîtrise s’explique par la moindre présence francophone en Asie du fait de l’histoire coloniale, et par une moindre proximité entre la langue française et les langues parlées en Asie. Ainsi, les Asiatiques sont, parmi les immigrés, les moins familiers avec la langue française avant d’immigrer : 14 % d’entre eux ont au moins un parent qui leur parlait français dans leur enfance, contre 19 % des immigrés européens, 24 % des Américains ou Océaniens, et 46 % des Africains. Les immigrés asiatiques les plus susceptibles d’avoir été élevés par des parents leur parlant français viennent de régions ayant connu une présence francophone : en Asie du Sud‑Est, dont les trois pays appartenaient à l’empire colonial français, 23 % des immigrés ont grandi dans un cadre au moins partiellement francophone ; au Moyen‑Orient, dont certains pays ont été sous mandat français (le Liban et la Syrie), 21 % des immigrés ont appris le français dans leur enfance. À l’inverse, les immigrés de Chine, où la présence francophone est historiquement très faible (hormis dans les quelques concessions françaises), ne sont que 3 % à avoir appris le français dans le cadre familial.

Au moment de l’enquête (qui a lieu entre 2 et 54 ans après l’arrivée en France), le niveau en français des immigrés d’Asie arrivés après 3 ans, et dont la langue maternelle ou la langue familiale de référence n’était pas le français s’est amélioré : dans les quatre compétences évaluées, et pour toutes les régions d’Asie, les scores sont au moins égaux à 1,3. Les immigrés d’Asie du Sud-Est, présents en moyenne en France depuis 30 ans (contre 20 ans pour l’ensemble des immigrés d’Asie), et les immigrés venant du Moyen-Orient, ont un score supérieur à 2 (correspondant à un bon niveau de maîtrise) dans les quatre compétences. Les immigrés de Turquie (présents en moyenne en France depuis 23 ans) déclarent au moment de l’enquête une nette amélioration de leur niveau en compréhension (score moyen de 1,9) et à l’oral (1,8). Malgré les progrès en langue française depuis leur arrivée en France, la maîtrise du français reste fragile pour certains immigrés dont le français n’est ni la langue maternelle, ni la langue de référence : 26 % d’entre eux déclarent rencontrer des difficultés à demander un renseignement ou un service en français. Cette proportion atteint 33 % pour les immigrés présents en France depuis moins de dix ans, contre 20 % pour ceux arrivés depuis plus de 20 ans.

Outre le niveau en langue française à l’arrivée en France et l’ancienneté de la présence en France, le fait d’être plus jeune, d’avoir fait une partie ou l’intégralité de sa scolarité ou de ses études en France, ou d’avoir un conjoint né en France est lié à une meilleure maîtrise de la langue française. À caractéristiques (âge, sexe, langue française parlée dans le cadre familial dans l’enfance ou non, ancienneté en France, scolarité réalisée au moins en partie en France ou non, présence d’un conjoint né en France ou non) comparables, presque tous les écarts entre régions disparaissent : seuls les immigrés du Moyen‑Orient conservent un avantage dans la maîtrise de la langue française.

Publication rédigée par :Odile Rouhban (Insee)
Publication rédigée par :Odile Rouhban (Insee)

Sources

Le recensement de la population permet de connaître le nombre de personnes résidant en France et leur profil. Il comptabilise toutes les personnes résidant en France indépendamment de leur situation administrative, y compris les personnes en situation irrégulière, sans les identifier en tant que telles. Seules les personnes installées en France depuis douze mois ou plus ou qui comptent s’y installer pour douze mois ou plus sont prises en compte. Chaque recensement est issu du cumul de cinq enquêtes annuelles de recensement (EAR).

Les données du recensement sont diffusées chaque année. Le recensement de la population sert de base aux estimations annuelles de population.

L’enquête Trajectoires et Origines 2 (TeO2) est une enquête sur la diversité des populations vivant en France, réalisée conjointement par l’Ined et l’Insee [Ouvrir dans un nouvel ongletBeauchemin et al., 2023]. Elle a vocation à répondre aux besoins publics de connaissance sur les processus d’intégration et sur les discriminations dans l’ensemble de la population. Il s’agit de la seconde édition de l’enquête, la première (TeO1) ayant eu lieu en 2008-2009. La collecte de l’enquête TeO2 s'est déroulée en 2019 et 2020 auprès d’environ 27 000 personnes âgées de 18 à 59 ans et vivant dans un logement ordinaire en France métropolitaine.

Définitions

Un immigré est une personne née étrangère à l’étranger et résidant en France. L’origine d’un immigré est déterminée par son pays de naissance. Certains immigrés ont pu devenir Français, les autres restant étrangers. Un individu continue à être immigré même s'il acquiert la nationalité française.

Parmi les langues utilisées dans l’enfance, la langue familiale de référence a été définie comme étant, pour les monolingues, l’unique langue déclarée, et pour les plurilingues, la langue la plus utilisée pendant l’enfance en dehors du français.

Pour en savoir plus

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Insee, Fiche « Maîtrise des langues par les immigrés », in Immigrés et descendants d’immigrés, coll. « Insee Références », édition 2023.

Beauchemin C., Ichou M., Simon P., « Ouvrir dans un nouvel ongletTrajectoires et Origines 2019-2020 (TeO2) : présentation d’une enquête sur la diversité des populations en France », Population vol.78, pp. 11-28, 2023.

Débarre S., Petek G., « Ouvrir dans un nouvel ongletHistoire des Turcs en France », Paris, Éditions du Détour, coll. « Venus d'ailleurs », 2019.

Bechichi N., Bouvier G., Brinbaum Y., Lê J., « Maîtrise de la langue et emploi des immigrés : quels liens ? », in Emploi, chômage, revenus du travail, coll. « Insee Références », édition 2016.

Moliner C., « Ouvrir dans un nouvel ongletInvisible et modèle ? Première approche de l’immigration sud-asiatique en France », Rapport d’étude pour la Direction de l’Accueil, de l’Intégration et de la Citoyenneté, 2009.