Insee Analyses Auvergne-Rhône-Alpes · Décembre 2023 · n° 174

Le Beaujolais : un territoire bien pourvu en emplois et en équipements, ouvert sur l’extérieur

Le Beaujolais est ici appréhendé par l’arrondissement de Villefranche-sur-Saône qui se situe dans la moitié nord du département du Rhône (figure 1). Bordé à l’ouest par les monts du Beaujolais et à l’est par la Saône, 60 % de son territoire est agricole, 31 % est recouvert de forêts et 7 % est artificialisé. Il comprend 132 communes regroupées au sein de cinq établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) : celui de l'Ouest Rhodanien qui est une zone montagneuse, et quatre EPCI situés le long de la vallée de la Saône. Il s’agit de la communauté de communes (CC) de Saône-Beaujolais au nord, de celle du Pays de l’Arbresle au sud, de celle de Beaujolais Pierres Dorées, territoire emblématique pour son vin et sa pierre très largement exploitée dans la construction. Le dernier EPCI, la communauté d’agglomération (CA) de Villefranche Beaujolais Saône (sans la commune de Jassans-Riottier, située dans l’Ain, sur l’autre rive de la Saône), a pour commune principale Villefranche-sur-Saône, également sous-préfecture du département.

En 2019, l’arrondissement de Villefranche-sur-Saône compte 253 600 habitants et offre 90 000 emplois pour 108 200 actifs occupés, soit 83 emplois pour 100 actifs occupés. Six habitants en emploi sur dix y résident et y travaillent (figure 2). Ce territoire attire également des actifs résidant à l’extérieur (25 900). Ainsi, 29 % des emplois sont pourvus par des actifs n’habitant pas la zone. Située en bordure de l’arrondissement, la commune de Villefranche-sur-Saône, qui concentre 22 % des emplois du territoire, attire de nombreux actifs venant de l’extérieur, notamment de l’autre rive de la Saône.

Si près de sept emplois sur dix dépendent du secteur tertiaire, ce taux est toutefois plus bas que celui de la région. La spécificité de l’arrondissement est plutôt agricole et industrielle. En effet, l’agriculture représente 4,5 % des emplois, soit deux fois plus que dans la région. Plus de six exploitations agricoles sur dix ont une orientation viticole. Ce taux atteint 86 % dans l’EPCI de Villefranche Beaujolais Saône, 80 % dans celui de Saône-Beaujolais et 74 % dans celui de Beaujolais Pierres Dorées. Le poids de l’industrie dans l’arrondissement est de 17 %, soit deux points de plus qu’au niveau régional. Dans les années 1960, le territoire, et principalement la commune de Villefranche-sur-Saône, a profité du phénomène de déconcentration des industries lyonnaises trop à l’étroit. Dans ce secteur, la métallurgie offre le plus grand nombre d’emplois (3 200) avec la présence d’entreprises comme Malerba ou Saint Jean Ind.. Mais la principale spécificité reste le secteur textile, historiquement très présent sur le territoire, qui, malgré un net recul, rassemble 1,3 % des emplois soit deux fois plus que dans la région. La fabrication de caoutchouc et de plastique est également plus présente dans l’arrondissement qu’au niveau régional avec la présence d’entreprises comme Gerflor ou Astra Plastique.

L’arrondissement de Villefranche-sur-Saône est plutôt bien doté en équipements, puisqu’en moyenne chacune de ses communes en possède 24, contre 19 pour l’ensemble des communes de la région. Il bénéficie, de plus, des autoroutes A6 et A89 et d'un réseau ferroviaire conséquent. Ses quatre lignes de TER, reliant entre autres Lyon à Mâcon, Roanne et Paray-le-Monial, desservent les 21 gares du territoire. S'y ajoute un réseau de transports en commun dense, avec notamment dix lignes de bus (les Cars du Rhône), le plus souvent au départ de Lyon ou de Villefranche-sur-Saône.

Le Beaujolais comprend 123 000 logements, ce qui correspond en moyenne à 72 logements au km², contre 64 dans la région. Près de neuf logements sur dix sont des résidences principales (contre huit seulement dans la région) et un peu moins d’un sur dix est vacant, comme dans l’ensemble de la région. Entre 2013 et 2019, le nombre de logements augmente plus vite que la population.

Entre 2013 et 2019, la population a progressé de 0,6 % par an en moyenne (figure 3) et l’emploi de 0,5 %. Ces hausses, équivalentes à celle d’Auvergne-Rhône-Alpes, sont supérieures à celles de la France métropolitaine (respectivement 0,4 % et 0,2 %).

Si la hausse de l’emploi est plus dynamique que sur la période précédente (2008-2013), celle de la population est en net recul. En effet, la croissance démographique du Beaujolais a longtemps été portée par le mouvement de périurbanisation autour de Lyon. Ainsi, entre 2008 et 2013, le nombre d’habitants a augmenté de près de 1,2 % par an en moyenne, porté par un solde migratoire à +0,6 %. Cet apport migratoire n’est plus que de 0,2 % entre 2013 et 2019, sans doute expliqué par une installation devenue plus difficile sur ce territoire où le prix de l’immobilier a nettement augmenté, suite à la forte demande des années précédentes. En 2018, 1 850 personnes sont arrivées de Lyon contre 3 350 en 2012.

Le solde naturel a également diminué. D’une part, le nombre moyen de naissances a baissé deux fois plus que dans la région : les familles ayant déjà des enfants représentent quatre ménages sur dix, qu’ils soient déjà installés dans l’arrondissement ou arrivants sur le territoire. D’autre part, le nombre de décès a augmenté de 10 % (contre 7 % dans la région), avec le vieillissement de la population. L’âge moyen est passé de 37,4 ans en 1999 à 40,6 ans en 2019.

Ces constats démographiques sont cependant très différents au sein de l’arrondissement, où les réalités sont très hétérogènes. Dans les intercommunalités de Villefranche Beaujolais Saône et de Saône‑Beaujolais, la hausse de la population a fortement ralenti, avec un solde migratoire qui, dans le premier EPCI, est devenu négatif et a été divisé par trois dans le second, alors qu’il était le plus haut sur la période 2008-2013. La population de la CA de l’Ouest Rhodanien stagne, avec des soldes naturel et migratoire proches de zéro. Sur la période précédente, l’évolution de la population était déjà la moins élevée de l’arrondissement tout en restant positive.

Enfin, dans les EPCI du Pays de l’Arbresle et de Beaujolais Pierres Dorées, les dynamiques démographiques ont peu varié entre les deux périodes, même si elles sont légèrement à la baisse. Les soldes migratoires sont nettement plus stables que dans le reste de la zone. La CC de Beaujolais Pierres Dorées est l’intercommunalité la plus dynamique de l’arrondissement entre 2013 et 2019, avec une évolution de +0,8 % par an.

Si ces trois territoires, à l’ouest, au nord-est et au sud de l’arrondissement, se distinguent par des dynamiques démographiques très hétérogènes, leur fonctionnement socio‑économique suit également des logiques bien différentes.

La zone nord-est de l’arrondissement réunit deux des cinq EPCI du territoire : la CA de Villefranche Beaujolais Saône, avec Villefranche-sur-Saône comme principale commune ; et la CC de Saône‑Beaujolais avec Belleville-en-Beaujolais comme ville majeure. Ces deux intercommunalités regroupent 44 % des habitants de l’arrondissement, soit 111 000 personnes, et 51 % des emplois, soit 45 600. Plus de quatre emplois sur dix sont situés sur la commune de Villefranche-sur-Saône et un sur sept sur celle de Belleville‑en-Beaujolais.

La CA de Villefranche Beaujolais Saône est bien pourvue en équipements : ses communes en possèdent 29 en moyenne, soit dix de plus que celles de l’EPCI de Saône-Beaujolais. Dans cette dernière intercommunalité, 89 % de la population réside à moins de 7 minutes d’un médecin généraliste et près de 99 % à moins de 15 minutes d’un collège. Elle bénéficie, de plus, d’un accès rapide à Villefranche-sur-Saône au sud et à Mâcon au nord, permettant de profiter des équipements de ces deux villes.

L’EPCI de Villefranche Beaujolais Saône joue un rôle de pôle d’emplois pour ses habitants et ceux des alentours, avec 118 emplois pour 100 actifs occupés, soit 30 700 emplois. Ainsi, 45 % d’entre eux sont occupés par des habitants de la CA. Parmi les 17 000 emplois restant, plus de 60 % sont occupés par des résidents du reste de l’arrondissement (41 %) ou des communes limitrophes de l’Ain comme Jassans-Riottier, Trévoux ou Montmerle-sur-Saône. La CC de Saône-Beaujolais est une zone plus résidentielle, périurbaine de Villefranche-sur-Saône, avec seulement 76 emplois pour 100 actifs occupés. Si près de la moitié de ses actifs en emploi reste travailler dans l’intercommunalité (figure 4), 16 % vont dans l’EPCI de Villefranche Beaujolais Saône.

Le solde migratoire est négatif dans la CA de Villefranche Beaujolais Saône entre 2013 et 2019. Elle a vu partir 1 750 habitants de plus qu’elle n’en a accueillis, soit un recul annuel moyen de 292 personnes. Ce déficit migratoire peut s’expliquer par la difficulté de trouver des logements adéquats. En effet, la vacance des logements (9 %), notamment dans la commune de Villefranche-sur-Saône (10 %) peut s’expliquer par leur ancienneté. Le quart des logements a été construit entre 1919 et 1970, avec un taux qui atteint 30 % à Villefranche-sur-Saône. La construction de logements neufs, importante dans les années 2000, accueillant les arrivées massives, a très nettement diminué ensuite. Ces constructions ainsi que les réhabilitations, en forte augmentation depuis 2018, permettront sans doute de pallier l’inadéquation entre l’offre et la demande. Ce déficit migratoire illustre un desserrement de Villefranche-sur-Saône. Les habitants se sont plutôt installés en périphérie, comme à Jassans-Riottier ou dans la CC de Saône-Beaujolais. Dans cette dernière, 12 % des arrivées proviennent de la CA de Villefranche Beaujolais Saône. Elle a d’ailleurs accueilli 350 habitants de plus qu’elle n’en a vu partir en 2018. Les partants sont majoritairement des étudiants ou de jeunes adultes ayant trouvé un premier emploi qui vont s’installer à Villefranche-sur-Saône ou à Lyon.

La CA de l’Ouest Rhodanien, qui couvre un tiers du Beaujolais, rassemble 20 % de la population de l’arrondissement, soit 50 600 habitants, et 21 % des emplois (18 600). Cet EPCI, dont toutes les communes sont en zone montagneuse, se compose en très grande majorité de forêts et de terres agricoles. Ses principales communes, Tarare et Thizy-les-Bourgs, concentrent, à elles deux, un tiers des habitants et 43 % des emplois. Bien dotées en équipements, les communes du territoire en possèdent 23 en moyenne. Ainsi, 87 % de ses habitants sont à moins de 7 minutes d’un médecin généraliste et 96 % à moins de 15 minutes d’un collège. Dans l’intercommunalité, la part des résidences secondaires (7 %), certes en diminution, est la plus élevée de l’arrondissement, comme celle des logements vacants (13 %), qui, elle, augmente.

Si, entre 2013 et 2019, la population est restée globalement stable, elle a légèrement augmenté en fin de période, avec 100 arrivées de plus que de départs en 2018. Ainsi, 2 100 personnes s’y sont installées, principalement des familles avec enfants, venant majoritairement de Lyon et de Villeurbanne. Parallèlement, 2 000 personnes ont quitté le territoire, essentiellement des étudiants et des jeunes adultes ayant trouvé un premier emploi, qui se sont installés à Lyon mais aussi à Villefranche-sur-Saône ou à Roanne.

Dans cet EPCI, parmi les 20 300 actifs en emploi qui y résident, près de six sur dix y travaillent également, soit le taux le plus important de l’arrondissement. Ainsi, 8 400 personnes quittent la CA pour aller travailler, soit en restant dans l’arrondissement, pour 3 100 d’entre eux, le plus souvent vers Villefranche-sur-Saône et l’Arbresle, soit en partant pour Lyon ou Roanne. Ce territoire offre 91 emplois pour 100 actifs occupés. Ces emplois sont plus fréquemment de type « productif » que dans l’arrondissement, un quart étant dans la fabrication. L’industrie textile y est particulièrement présente avec, par exemple, les entreprises Deveaux et Thion, tout comme l’industrie du caoutchouc avec les établissements Gerflor.

Enfin, la zone sud de l’arrondissement se compose de deux communautés de communes : celle du Pays de l’Arbresle, dont les principales villes sont Lentilly et l’Arbresle ; et celle de Beaujolais Pierres Dorées, où se situe la commune d’Anse. Cette zone sud regroupe 36 % de la population, soit 92 000 habitants et 28 % des emplois (25 600), sur environ un quart de la surface de l’arrondissement.

Cette zone est très dynamique démographiquement, et ce depuis les années 1970, avec l’ouverture, en octobre 1970, de l’autoroute A6 en dédoublement de la nationale N6, favorisant ainsi l’accès à Lyon et ses environs. La population de ces deux intercommunalités a d’ailleurs doublé entre 1975 et 2019. Le renouvellement de la population y est important avec des taux d’entrants et de sortants variant entre 5 % et 6 % par an entre 2013 et 2019 contre 4 % dans l’ensemble de l’arrondissement.

Entre 2013 et 2019, ces deux EPCI ont accueilli 3 200 habitants de plus qu’ils n’en ont vu partir, soit en moyenne 530 par an. Cet apport migratoire culmine à 600 personnes sur la dernière année. Les 4 700 partants, en 2018, ont souvent entre 15 et 24 ans et vivent seuls, profil correspondant aux étudiants et aux jeunes adultes ayant trouvé un premier emploi. Pour la plupart, ils déménagent à Lyon ou, dans une moindre mesure, à Villefranche-sur-Saône. Plus âgés, les 5 300 arrivants ont, en majorité, entre 25 et 39 ans. Ils occupent plus souvent des emplois de cadres et de professions intermédiaires. Ce sont essentiellement des familles de deux ou trois personnes, en location. Ils arrivent de Lyon, de Villeurbanne ou encore de Villefranche-sur-Saône et, pour la plupart (53 %), travaillent hors de l’arrondissement. Ces emménagements dans la zone sud du Beaujolais répondent plutôt à une recherche d’un cadre de vie plus agréable, dans un territoire bien doté en équipements. Avec 26 équipements en moyenne par commune dans la CC du Pays de l’Arbresle et 29 dans celle de Beaujolais Pierres Dorées, c'est la zone la mieux équipée de l’arrondissement. De plus, moins de 3 % de la population réside à plus de 7 minutes d’un médecin généraliste, moins de 1,5 % à plus de 15 minutes d’un collège et toute la population habite à moins de 30 minutes d’un pédiatre. De fait, la zone est bien pourvue en équipements pour accueillir les familles.

Ces deux EPCI, au profil plutôt résidentiel, offrent en toute logique moins d’emplois qu’il n’y a d’actifs occupés, avec respectivement 67 et 55 emplois pour 100 actifs occupés. De plus, six emplois sur dix sont de type « présentiel », donc à destination de la population présente, et sont principalement dans le secteur des services de proximité et de la santé. Renforcé par les nouveaux arrivants, le nombre de navetteurs de la zone augmente et, en 2019, 55 % des actifs en emploi résidant dans cette zone quittent l’arrondissement pour aller travailler. Ils parcourent en moyenne 33 km. Un tiers de ces navetteurs va à Lyon et dans une moindre mesure à Marcy-l’Étoile (6 %), à Dardilly et Limonest (5 %), également pôle d’emplois notamment dans l’industrie pharmaceutique et l’informatique.