Insee Analyses Provence-Alpes-Côte d'Azur · Mai 2022 · n° 103

Filière aéronautique et spatiale : six emplois sur dix chez les grands constructeurs

La filière aéronautique et spatiale comprend les établissements dont l’activité participe in fine à la construction d’aéronefs ou d’engins spatiaux, qu’ils soient constructeurs finaux, sous-traitants ou fournisseurs. Au 31 décembre 2020, 17 200 salariés (hors intérim) travaillent au sein de cette filière en Provence-Alpes-Côte d’Azur (figure 1). Cela représente 6,6 % du total des emplois de la filière au niveau national (260 000 salariés environ). Provence-Alpes-Côte d’Azur se place au 5^e rang des régions de France métropolitaine en nombre d’emplois dans cette filière, à un niveau similaire à celui des Pays de la Loire, mais loin derrière l’Île-de-France, l’Occitanie et la Nouvelle-Aquitaine.

La filière aéronautique et spatiale représente 0,9 % du total de l’emploi salarié dans la région, un niveau très proche de celui constaté en France (1,0 %). Elle se compose de 283 établissements, qui appartiennent à 249 entreprises. Si on compte un peu moins d’établissements dans l’industrie que dans le tertiaire, les emplois relèvent largement d’activités industrielles (14 190 salariés, contre 3 010 dans le tertiaire).

La filière représente 9,2 % de l’ensemble des effectifs de l’industrie régionale, contre 6,5 % au niveau national. Cet écart s’explique par un moindre poids des autres filières industrielles dans la région, le tissu économique de Provence-Alpes-Côte d’Azur étant davantage tourné vers les services.

Les sociétés de construction et de maintenance d’aéronefs et d’astronefs représentent une part conséquente de l’emploi de la filière en Provence-Alpes-Côte d’Azur (figure 2). Ainsi, la construction aéronautique et spatiale compte 10 740 salariés fin 2020, soit 62 % des effectifs de la filière en Provence-Alpes-Côte d’Azur. Le second secteur, la réparation-installation de machines et équipements (maintenance), emploie 1 530 salariés, soit 9 % des effectifs de la filière.

La concentration des effectifs dans le secteur de la construction aéronautique et spatiale traduit la présence en Provence-Alpes-Côte d’Azur d’employeurs industriels majeurs, deux en particulier : Airbus Helicopters (plus de 8 000 salariés, soit un peu plus de la moitié de l’emploi aéronautique de la région) et Thales Alenia Space (environ 2 000 salariés, plus des trois quarts de l’emploi spatial de la région). À titre de comparaison, les autres plus gros employeurs industriels de la région sont STMicroelectronics Rousset (environ 3 000 salariés) et ArcelorMittal Méditerranée (environ 2 500 salariés), faisant d’Airbus Helicopters le premier employeur industriel, et de Thales Alenia Space le quatrième. En conséquence, l’activité de la filière dans la région est très liée à deux segments particuliers de la construction aéronautique et spatiale : les hélicoptères et les engins spatiaux.

Autour des grands employeurs, gravitent de plus petits établissements industriels, qui emploient environ 1 900 salariés exclusivement dédiés à la filière, dans la fabrication informatique, électronique et optique, la métallurgie, la fabrication de produits en caoutchouc et plastique, ou d’autres activités industrielles.

La filière draine également une activité importante dans le tertiaire. Toutefois, ces établissements sont moins dépendants de l’activité de la filière. Les activités d’ingénierie et de conseil (architecture et ingénierie, activités informatiques, activités juridiques et gestion) notamment ont en effet une clientèle plus diversifiée, du fait de la nature même de leurs activités (prestations de services et de soutien aux entreprises).

En Provence-Alpes-Côte d’Azur, la structuration des entreprises de la filière est donc très liée aux employeurs industriels majeurs. Le poids des grandes entreprises est élevé dans la région (figure 3) : celles-ci concentrent 77 % des effectifs et réalisent 89 % du chiffre d’affaires exclusivement dédié aux activités aérospatiales de la filière (contre respectivement 63 % et 81 % en moyenne nationale).

Les PME (hors microentreprises) sont fortement sous-représentées en Provence-Alpes-Côte d’Azur, puisqu’elles ne comptent que pour 36,5 % des établissements de la filière (16 points de moins que le niveau national) et 2,9 % des effectifs (9 points de moins).

Cette moindre présence des PME pourrait s’expliquer par un moindre recours des grands employeurs industriels à la sous-traitance. Globalement, ce taux de recours est relativement faible en Provence-Alpes-Côte d’Azur (12 % des entreprises de la filière présentes sur le territoire sous-traitent une partie de leur activité), bien inférieur à celui enregistré au niveau national (20 %). Il est en particulier inférieur à ceux des autres grandes régions employeuses : l’Île-de-France (31 %),la Nouvelle-Aquitaine (31 %), les Pays de la Loire (22 %), l’Occitanie (19 %) et Auvergne-Rhône-Alpes (14 %). Ce faible taux s’explique par la spécificité sectorielle de la production locale aéronautique et spatiale, qui nécessite une plus grande maîtrise interne de la chaîne de production.

Les emplois de la filière aéronautique et spatiale en Provence-Alpes-Côte d’Azur sont localisés principalement autour de deux pôles. Le premier s’organise autour de Marignane, à la fois sur la zone d’emploi de Marseille (où la filière représente 1,8 % de l’emploi salarié total) et sur les zones d’emploi alentour (où la filière pèse entre 0,6 % et 0,9 %). Le second se trouve dans la zone d’emploi de Cannes, où la filière représente 1,5 % de l’emploi total (figure 4). À elle seule, la zone d’emploi de Marseille concentre quasiment 60 % des salariés de la filière dans la région.

Les zones d’emploi de Marseille et ses alentours (Martigues-Salon, Aix-en-Provence), ainsi que celles de Brignoles et Toulon dans le Var, constituent un ensemble orienté vers l’aéronautique, dont l’employeur majeur est Airbus Helicopters, implanté à Marignane. Dans la zone d’emploi de Cannes, l’activité spatiale prédomine, en raison de la présence de Thales Alenia Space.

Dans les autres zones où la filière représente plus de 0,5 % de l’emploi total, un employeur important est présent : Dassault à Istres, la Direction centrale des services industriels aéronautiques (DCSIA) à Cuers, Babcock au Cannet-des-Maures. La zone d’Aix-en-Provence fait toutefois exception, avec un tissu d’établissements tertiaires, orientés vers le conseil et le soutien aux entreprises.

En Provence-Alpes-Côte d’Azur, le chiffre d’affaires aérospatial des entreprises de la filière implantées dans la région est en forte baisse entre 2019 et 2020 (- 28 %, figure 5). Leurs effectifs se replient bien plus faiblement que l’activité, principalement grâce aux mesures d’activité partielle (- 5 %). Ces baisses sont légèrement moins prononcées qu’au niveau national (- 32 % pour le chiffre d’affaires, - 8 % pour l’emploi). Le taux d’utilisation des capacités de production est également un peu supérieur pour les entreprises industrielles implantées dans la région que pour l’ensemble de la France (respectivement 69 % et 63 % en 2020).

Les difficultés d’approvisionnement ne semblent pas avoir pesé sur la production, avec un niveau de stock satisfaisant. La baisse d’activité des entreprises de la filière apparaît davantage liée, d’une part, à la diminution de la demande qui leur est adressée et, d’autre part, aux restrictions sanitaires, qui ont entraîné la fermeture de sites importants pendant plusieurs jours. Toutefois, la spécialisation de la filière régionale, en particulier dans la maintenance et le marché des hélicoptères, a pu limiter l’impact direct de la crise. Ce positionnement permet de maintenir une activité un peu supérieure à celle des régions où l’industrie dépend plus directement de l’aviation civile.

Le chiffre d’affaires aérospatial des entreprises industrielles implantées dans la région diminue d’environ 30 % en 2020, dans la construction aérospatiale comme dans la plupart des autres activités industrielles. Seule la maintenance, centrée dans la région sur les hélicoptères, a mieux résisté (- 9 %). Dans les activités tertiaires de la filière, le repli du chiffre d’affaires est également plus limité (- 24 %).

Par ailleurs, dans presque toutes les activités, les effectifs salariés reculent, mais de façon très atténuée par rapport au chiffre d’affaires. Ce différentiel s’observe dans tous les secteurs, et particulièrement dans la construction aéronautique, où la baisse des effectifs n’est que de 3 % en 2020. Cela s’explique par l’utilisation du dispositif d’activité partielle, dont la quasi-totalité des entreprises industrielles de la filière a pu bénéficier. Dans les secteurs tertiaires, les effectifs ont davantage subi le choc économique, en raison d’un moindre recours.

Les dispositifs de soutien aux entreprises ne se limitent pas à l’activité partielle, mais celle-ci est de loin l’aide la plus mobilisée par les entreprises dans la région : 78 % d’entre elles en ont bénéficié en 2020 (représentant 91 % des effectifs couverts). Les autres aides à disposition des employeurs sont moins utilisées en Provence-Alpes-Côte d’Azur que dans le reste de la France : 39 % des entreprises régionales ont recours aux prêts garantis par l’État (contre 46,5 % en France), 39 % ont obtenu un délai de paiement des cotisations (43 % en France), et 8 % ont fait appel à des aides régionales et locales (13 % en France).

Les baisses d’effectifs sont moins fortes pour les grandes entreprises (- 5 %) et les établissements de taille intermédiaire (- 3 %) que pour les PME (- 10 %). Toutefois, du point de vue du chiffre d’affaires, les PME apparaissent relativement épargnées (seulement - 2 % par rapport à 2019). Cela s’explique par deux entreprises présentant des hausses très importantes de leurs chiffres d’affaires et une bonne résistance des PME de la maintenance.

Malgré les difficultés liées à la crise sanitaire, une partie des entreprises a continué d’investir dans des projets innovants en 2020. Ainsi, 33 % des entreprises implantées en Provence-Alpes-Côte d’Azur ont intensifié leur diversification ou leur investissement dans de nouvelles activités (contre 24 % au niveau national) et 33 % ont investi dans la transformation numérique (25 % en France).