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Mars 2022 · n° 58Parité dans le public et le privé : les femmes rarement aux commandes
Fin 2019, les femmes ne représentent que 34,8 % des dirigeants du secteur privé dans le Grand Est. La féminisation du pouvoir est moindre dans les structures économiques les plus développées, comme les sociétés anonymes ou les sociétés par actions simplifiées. Dans le public, 44,3 % des directeurs sont des femmes, grâce à la forte proportion de femmes dirigeantes dans le versant hospitalier. Moins nombreuses, les femmes sont également moins bien rémunérées que leurs homologues masculins, avec des écarts sensiblement plus élevés dans le privé que dans le public. La parité est un peu mieux respectée parmi les jeunes générations.
Dans le Grand Est, 70 % des femmes sont actives et 61 % ont un emploi en 2018, des proportions en hausse depuis dix ans. Les femmes restent cependant éloignées des postes de pouvoir : à peine un dirigeant du secteur privé sur trois est une femme, et la situation est un peu plus favorable dans la fonction publique. Bien qu’inscrite dans la constitution depuis 1946 et réaffirmée depuis par un important corpus législatif, l’égalité femmes-hommes est loin d’être atteinte, tant dans leurs accès aux postes de direction que dans leurs rémunérations (sources).
Seul un tiers des entreprises du Grand Est sont dirigées par des femmes
Fin 2019, les femmes occupent 34,8 % des emplois de dirigeants d’entreprises dans le Grand Est (figure 1), hors micro-entreprises. La parité est presque atteinte dans les entreprises individuelles (46,8 %), qui représentent près de la moitié des entreprises de la région. Mais les femmes gèrent beaucoup plus rarement des entreprises ayant des formes économiques plus développées. Seules 25,7 % des gérants majoritaires de société sont des femmes, et leur part est encore plus faible parmi les dirigeants salariés (20,2 %). Les emplois de dirigeants de sociétés anonymes (SA) ou de sociétés par actions simplifiées (SAS) sont particulièrement peu féminisés dans la région (19,8 %), une proportion inférieure d’un point à la moyenne en France de province.
tableauFigure 1 – Part des femmes et écart de rémunération femmes-hommes des directeurs de la fonction publique et des dirigeants du secteur privé du Grand Est en 2019
Part des femmes | Écart de rémunération femmes-hommes | |
---|---|---|
Fonction Publique d’État | 36,0 | 7,5 |
Fonction Publique Territoriale | 37,7 | 17,0 |
Fonction Publique Hospitalière | 50,0 | 9,0 |
Dirigeants de SA ou de SAS | 19,8 | 27,0 |
Gérants minoritaires de SARL | 21,2 | 24,5 |
Autres dirigeants salariés | 22,8 | 28,0 |
Entrepreneurs individuels | 46,8 | 25,3 |
Gérants majoritaires de société | 25,7 | 25,1 |
- SA = société anonyme
- SAS = société par action simplifiée
- SARL = société à responsabilité limitée
- Lecture : 19,8 % des dirigeants de SA ou de SAS sont des femmes fin 2019. Dans ces emplois, les femmes ont perçu en 2019 une rémunération inférieure de 27,0 % à celle des hommes.
- Champ : ensemble des dirigeants salariés et non salariés au 31 décembre 2019 dans le secteur privé, hors micro-entrepreneurs, hors agriculture ; et ensemble des emplois de direction de la fonction publique en France au 31 décembre 2019.
- Source : Insee, base Non-salariés 2019, base Tous salariés 2019, Siasp 2019 ; traitements SDessi-DGAFP.
graphiqueFigure 1 – Part des femmes et écart de rémunération femmes-hommes des directeurs de la fonction publique et des dirigeants du secteur privé du Grand Est en 2019
Quand elles sont aux commandes, les femmes sont en moyenne mieux rémunérées dans le Grand Est qu’en France de province, mais gagnent près de 10 000 € de moins par an que leurs homologues masculins. À forme économique d’entreprise identique, les dirigeantes gagnent un quart de moins que les hommes dans la région. Les écarts de rémunération sont les plus importants pour les dirigeantes de SA ou de SAS (- 27 % pour - 29 % en province) et pour les autres dirigeantes salariées (- 28 % pour - 33 % en province). Quant aux gérants minoritaires de SARL, les différences de rémunération varient fortement d’un département à l’autre : les femmes perçoivent sensiblement moins en Moselle et en Meurthe-et-Moselle, tandis qu’elles gagnent davantage que les hommes dans les Ardennes et la Meuse.
La représentation des femmes parmi les cadres dirigeants (catégorie propre aux entreprises privées de 250 salariés ou plus) s’avère également faible (figure 2). Seuls 24 % des postes sont occupés par des femmes, une proportion constante dans la région, alors qu’elle augmente avec la taille de l’entreprise au plan national. La féminisation de l’encadrement supérieur dans les entreprises de taille intermédiaire et les grandes entreprises reste donc limitée malgré des obligations légales spécifiques, et des effectifs plus étoffés qui facilitent notamment les remplacements de congé maternité ou parental. Cela s’accompagne de fortes inégalités salariales, avec des écarts femmes-hommes plus sensibles dans les entreprises de 250 à 499 salariés (- 33 %) que dans les entreprises de plus de 1 000 salariés (- 26 %).
tableauFigure 2 – Part des femmes parmi les cadres dirigeants salariés du secteur privé par taille d’entreprise fin 2019
Nombre de salariés dans l’entreprise (y compris dirigeants) | France de province | Grand Est |
---|---|---|
De 250 à 499 salariés | 20,7 | 24,1 |
De 500 à 999 salariés | 21,7 | 24,1 |
1 000 salariés ou plus | 23,2 | 23,9 |
- Lecture : dans le Grand Est, fin 2019, 24,1 % des cadres dirigeants d’entreprise de 250 à 499 salariés sont des femmes.
- Champ : ensemble des dirigeants salariés et non salariés au 31 décembre 2019 dans le secteur privé, hors micro-entrepreneurs, hors agriculture.
- Source : Insee, base Tous salariés 2019.
graphiqueFigure 2 – Part des femmes parmi les cadres dirigeants salariés du secteur privé par taille d’entreprise fin 2019
« Madame la directrice », une expression plus courante dans la fonction publique hospitalière
Dans le secteur public, les hautes fonctions sont davantage féminisées : 44,3 % des 700 postes de direction sont occupés par des femmes dans le Grand Est, un point de plus qu’en moyenne en France de province. Cependant, la proportion varie beaucoup d’un versant à l’autre. La parité est atteinte dans les emplois de direction de la fonction publique hospitalière : 54,9 % des établissements sanitaires, sociaux et médico-sociaux sont administrés par des femmes et 48,1 % des hôpitaux ont une directrice à leur tête. La féminisation est au contraire en retrait dans la fonction publique d’État et la fonction publique territoriale (36,0 % et 37,7 %) ; la part de directrices est cependant plus importante dans le Grand Est que dans l’ensemble des régions de province (respectivement + 5 points et + 7 points).
Moins nombreuses, les directrices sont également moins bien rémunérées que les directeurs. Comme dans le privé, elles gagnent en moyenne 10 000 € de moins par an, ce qui représente toutefois un écart de salaire nettement plus resserré que dans le secteur privé (- 12,5 % contre - 25 %). Dans la fonction publique, la différence s’explique pour partie par la structure d’âge : plus jeunes que leurs homologues masculins, les femmes ont une ancienneté plus faible et par suite, une rémunération moins élevée. D’autre part, elles sont surreprésentées dans le versant hospitalier, où les rémunérations moyennes sont plus faibles. Elles sont au contraire peu nombreuses dans les emplois de direction de l’État, les mieux rémunérés.
Les jeunes générations accèdent plus facilement aux postes de pouvoir
Dans le public comme dans le privé, les jeunes générations de femmes occupent plus fréquemment les postes de pouvoir que les générations précédentes (figure 3). Parmi les cadres dirigeants du privé, le taux de féminisation est de 30 % chez les moins de 50 ans, contre 18 % chez les 50 ans ou plus. Ces proportions sont un peu plus importantes dans la région qu’en moyenne en France de province, tant pour les plus jeunes que pour les plus âgées (+ 2 et + 1 point). Dans le public, les différences sont encore plus sensibles. Les femmes sont majoritaires parmi les directeurs de moins de 50 ans (54 %) alors qu’elles représentent un tiers des emplois de direction occupés par les plus âgés, dans le Grand Est comme en France de Province.
Ces chiffres peuvent refléter une réduction des écarts au fil des générations, mais aussi des inégalités d'accès à l'encadrement supérieur, qui se creusent au cours des carrières. Parallèlement, les différences de salaire moyen sont élevées, dépassant 20 % dans le privé, pour toutes les générations : le Grand Est se distingue de la plupart des régions, où les écarts de rémunérations augmentent avec l’âge. Dans le public, les hommes gagnent en moyenne 7 à 8 % de plus que les femmes, sauf pour les plus jeunes, où la différence d’ancienneté joue peu sur le salaire.
tableauFigure 3 – Part des femmes et écarts de rémunération femmes-hommes par tranches d’âge dans la fonction publique et le privé du Grand Est en 2019
Directeurs de la fonction publique | Cadres dirigeants du secteur privé | |||||
---|---|---|---|---|---|---|
Effectif | Part des femmes (en %) | Écart femmes/hommes (en %) | Effectif | Part des femmes (en %) | Écart femmes/hommes (en %) | |
Moins de 30 ans | 34 | 73,5 | 0,7 | 40 | 52,5 | 23,0 |
De 30 à 49 ans | 266 | 51,9 | 7,2 | 1 300 | 29,2 | 27,5 |
50 ans ou plus | 405 | 36,8 | 7,9 | 1 400 | 18,4 | 20,8 |
- Lecture : fin 2019, 73,5 % des directeurs de moins de 30 ans sont des femmes dans la fonction publique. Dans ces emplois, les salaires nets annualisés moyens des femmes sont inférieurs de 0,7 % à celui des hommes en 2019.
- Champ : ensemble des dirigeants salariés et non salariés au 31 décembre 2019 dans le secteur privé, hors micro-entrepreneurs, hors agriculture ; et ensemble des emplois de direction de la fonction publique en France au 31 décembre 2019.
- Source : Insee, base Non-salariés 2019, base Tous salariés 2019, Siasp 2019 ; traitements SDessi-DGAFP.
Sources
Bases salariés
Les bases Tous salariés sont des fichiers statistiques annuels de données individuelles sur l'ensemble des salariés, produites à partir des déclarations administratives de leurs employeurs. Le champ de diffusion inclut les salariés du secteur privé et des entreprises publiques, ceux des trois fonctions publiques, ainsi que ceux des particuliers employeurs. Plusieurs sources sont mobilisées pour constituer chacun de ces trois champs :
- Sur le champ privé, les salaires annuels et les effectifs sont principalement issus des déclarations sociales nominatives (DSN) ;
- Sur le champ de la fonction publique, les informations proviennent du Système d'information sur les agents du service public (Siasp) ;
- Sur le champ des particuliers employeurs, sont exploitées les déclarations de salaires dans le cadre des dispositifs suivants : chèque emploi service universel (Cesu), prestation d'accueil du jeune enfant (Paje) et déclaration nominative simplifiée (DNS).
Base non-salariés
La base Non-salariés permet d’étudier annuellement l’emploi et les revenus d’activité (définitions) des personnes non salariées (y compris les micro-entrepreneurs) et de mesurer les effectifs de non-salariés et des niveaux de revenus par secteur d’activité détaillé selon la Nomenclature d’activité française (NAF rév. 2).
Système d’information sur les agents des services publics (Siasp)
La base Siasp apporte une connaissance des effectifs, des caractéristiques d’emploi, des volumes de travail et des rémunérations des agents des trois versants de la fonction publique.
Définitions
Dirigeants salariés : personnes ayant reçu mandat des propriétaires pour assurer la direction de la société en leur nom, tout en ayant un statut assimilé à celui de salarié. Il s’agit de dirigeants de sociétés anonymes (SA) ou de sociétés par actions simplifiées (SAS), de gérants minoritaires de sociétés à responsabilité limitée (SARL) et de gérants non associés d’autres types de sociétés.
Cadres dirigeants : cadres d’état-major administratifs, financiers, commerciaux et directeurs techniques des entreprises de 250 salariés ou plus.
Non-salariés : personnes affiliées à un régime de protection sociale des travailleurs non salariés (auto-entrepreneurs, entrepreneurs individuels « classiques » et gérants majoritaires de SARL ou de sociétés d’exercice libéral à responsabilités limitées – SELARL).
Revenu d’activité : pour les non-salariés, revenu ou bénéfice issu de l’activité salariée, cotisations sociales et charges professionnelles associées déduites, CSG et CRDS non déduites ; pour un dirigeant salarié, salaire net de toutes cotisations et contributions sociales. Les revenus sont annualisés, c’est-à-dire ramenés à une durée d’un an de travail mais pas à un équivalent temps plein.
Pour en savoir plus
« Femmes et hommes, l’égalité en question », Insee Références , édition 2022.
Auger E., Lu A-V., « Les femmes créent moins d’entreprises : un phénomène en partie structurel », Insee Analyses Grand Est n° 83, novembre 2018.