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Insee Focus · Décembre 2021 · n° 255
Insee FocusEn 2020, l’emploi a baissé de façon inédite depuis 2009

Thomas Cohadon, Sylvie Henninger, Julie Le Gac, Catherine Thiel (Insee)

Entre fin 2019 et fin 2020, l’emploi en France a fortement baissé : – 261 000 après + 406 000 l’année précédente. Cette chute est due au repli de l’emploi salarié, principalement dans le tertiaire marchand et dans une moindre mesure dans l’industrie. L’emploi salarié a au contraire augmenté dans la construction et le tertiaire non marchand.

L’emploi non salarié a quant à lui progressé en 2020, porté par de nombreuses créations sous le régime du micro-entrepreneur, mais moins rapidement que l’année précédente.

Au total, l’emploi a diminué dans pratiquement toutes les régions, surtout en Île-de-France et en Auvergne-Rhône-Alpes.

Insee Focus
No 255
Paru le :Paru le03/12/2021

En France, l’emploi salarié a chuté en 2020

Fin 2020, 28,2 millions de personnes occupent un emploi en France hors Mayotte (sources). En cette année marquée par la crise sanitaire, l’emploi a diminué de 261 000 par rapport à fin 2019, soit – 0,9 % (figure 1). Il n’y avait pas eu de destruction nette d’emploi sur un an depuis la crise économique de 2008-2009 (– 146 000 emplois en 2008 et – 216 000 emplois en 2009).

Figure 1 – Évolution de l'emploi en France entre 2007 et 2020

 en nombre d'emplois
Figure 1 – Évolution de l'emploi en France entre 2007 et 2020 ( en nombre d'emplois) - Lecture : en 2020, l'emploi salarié a chuté de 303 000 personnes et l'emploi non salarié a progressé de 41 000. Au total, l'emploi a chuté de 261 000 personnes en France.
Emploi salarié Emploi non salarié Ensemble
2007 + 345 327 + 22 722 + 368 049
2008 – 161 354 + 15 827 – 145 527
2009 – 228 858 + 12 561 – 216 297
2010 + 51 604 + 119 838 + 171 442
2011 + 66 414 + 75 648 + 142 062
2012 – 70 110 + 101 530 + 31 420
2013 + 78 265 + 112 046 + 190 311
2014 + 11 656 – 6 061 + 5 595
2015 + 102 211 + 9 722 + 111 933
2016 + 193 950 + 8 859 + 202 809
2017 + 332 752 + 18 897 + 351 649
2018 + 147 265 + 65 971 + 213 236
2019p + 285 096 + 120 599 + 405 695
2020p – 302 618 + 41 234 – 261 384
  • p : données provisoires.
  • Lecture : en 2020, l'emploi salarié a chuté de 303 000 personnes et l'emploi non salarié a progressé de 41 000. Au total, l'emploi a chuté de 261 000 personnes en France.
  • Champ : emploi salarié et non salarié, en fin d’année ; France hors Mayotte.
  • Source : Insee, Estimations d'emploi.

Figure 1 – Évolution de l'emploi en France entre 2007 et 2020

  • p : données provisoires.
  • Lecture : en 2020, l'emploi salarié a chuté de 303 000 personnes et l'emploi non salarié a progressé de 41 000. Au total, l'emploi a chuté de 261 000 personnes en France.
  • Champ : emploi salarié et non salarié, en fin d’année ; France hors Mayotte.
  • Source : Insee, Estimations d'emploi.

Cette importante baisse de l’emploi s’explique par la chute de l’activité économique. Ainsi, en 2020, le produit intérieur brut (PIB) a chuté de 8 % alors que la croissance économique approchait 2 % en 2018 et 2019. Mais le dispositif d’activité partielle renforcé mis en place en mars 2020 a considérablement amorti l’effet de cette récession sur l’emploi [Renne, 2021]. Aussi, après une baisse bien plus importante en cours d’année, et notamment lors du premier confinement, l’emploi s’est redressé au second semestre [Informations rapides n° 231] et la baisse de l’emploi en fin d’année apparaît très modérée au regard de la récession économique de 2020, la plus importante depuis la Seconde Guerre mondiale.

L’emploi salarié, qui constitue près de 9 emplois sur 10, a nettement diminué (– 303 000 emplois entre fin 2019 et fin 2020, soit – 1,2 %). C’est la première baisse de l’emploi salarié depuis 2012 (– 70 000 emplois) et la plus importante sur une année depuis que l’Insee le mesure (1970).

En revanche, l’emploi non salarié a continué à progresser (+ 41 000 emplois, soit + 1,3 %), mais a nettement ralenti par rapport à l’année précédente (+ 121 000 en 2019, soit + 4,1 %). Il est exclusivement porté par la hausse du nombre de (+ 7,8 %) alors que le reste de l’emploi non salarié a diminué (– 1,4 %).

Une baisse de l’emploi de forte ampleur dans le tertiaire marchand

En 2020, la baisse de l’emploi s’est principalement concentrée dans le tertiaire marchand (− 299 000 emplois, − 2,1 %), et concerne uniquement l’emploi salarié (– 338 000, après + 200 000 en 2019). Ce  représente un emploi sur deux (figure 2) et regroupe les activités les plus touchées par la crise sanitaire. L’hébergement-restauration (– 128 000 emplois salariés) représente notamment à lui seul 38 % des emplois salariés perdus dans ce secteur. Près de 75 000 emplois salariés nets ont également été détruits dans les services aux entreprises (comprenant les intérimaires), et 68 000 dans les services aux ménages, secteur qui regroupe notamment les activités culturelles et récréatives. L’emploi non salarié du tertiaire marchand a progressé mais ralenti par rapport à l’année précédente : + 39 000, après + 87 000 en 2019.

Figure 2a – Niveaux d'emploi par secteur d'activité en France entre 2000 et 2020

en nombre d’emplois
Figure 2a – Niveaux d'emploi par secteur d'activité en France entre 2000 et 2020 (en nombre d’emplois) - Lecture : en 2020, 3 263 000 personnes occupent un emploi dans l’industrie.
Agriculture, sylviculture, pêche Industrie Construction Tertiaire marchand Tertiaire non marchand Total
2000 819 988 4 194 641 1 473 789 11 260 270 7 355 527 25 104 215
2001 805 516 4 187 067 1 507 391 11 484 224 7 392 475 25 376 673
2002 788 163 4 104 575 1 511 234 11 613 205 7 526 152 25 543 329
2003 774 963 4 004 674 1 522 671 11 643 637 7 556 823 25 502 768
2004 770 068 3 913 432 1 553 100 11 765 310 7 622 704 25 624 614
2005 747 280 3 827 677 1 615 326 11 919 751 7 705 296 25 815 330
2006 726 047 3 772 350 1 692 551 12 123 699 7 813 307 26 127 954
2007 696 513 3 725 298 1 764 719 12 405 431 7 891 507 26 483 468
2008 680 894 3 649 754 1 776 066 12 299 963 7 931 082 26 337 759
2009 667 811 3 482 387 1 737 263 12 237 165 8 002 126 26 126 752
2010 656 959 3 401 907 1 735 474 12 470 968 8 019 992 26 285 300
2011* 656 826 3 387 255 1 734 818 12 618 105 8 028 087 26 425 091
2011 677 912 3 427 353 1 770 354 12 862 728 8 258 669 26 997 016
2012 677 599 3 410 230 1 766 965 12 852 472 8 321 170 27 028 436
2013 681 664 3 378 203 1 753 347 12 952 365 8 453 168 27 218 747
2014 671 221 3 344 585 1 701 288 12 985 024 8 522 224 27 224 342
2015 666 348 3 308 257 1 659 826 13 134 682 8 567 162 27 336 275
2016 662 829 3 279 302 1 643 674 13 334 369 8 618 910 27 539 084
2017 660 694 3 283 550 1 660 097 13 660 334 8 626 058 27 890 733
2018 661 039 3 296 760 1 698 220 13 837 739 8 610 211 28 103 969
2019p 660 776 3 313 091 1 753 207 14 125 252 8 657 338 28 509 664
2020p 657 926 3 262 838 1 792 878 13 826 091 8 708 547 28 248 280
  • p : données provisoires.
  • * Avant 2011, les données d'emploi salarié et non salarié par secteur d'activité ne sont disponibles qu'au niveau France métropolitaine.
  • Lecture : en 2020, 3 263 000 personnes occupent un emploi dans l’industrie.
  • Champ : emploi salarié et non salarié, en fin d’année ; France métropolitaine jusqu'en 2011, France hors Mayotte à partir de 2011.
  • Source : Insee, Estimations d'emploi.

Figure 2a – Niveaux d'emploi par secteur d'activité en France entre 2000 et 2020

  • p : données provisoires.
  • Note : avant 2011, les données d'emploi salarié et non salarié par secteur d'activité ne sont disponibles qu'au niveau France métropolitaine.
  • Lecture : en 2020, 3 263 000 personnes occupent un emploi dans l’industrie.
  • Champ : emploi salarié et non salarié, en fin d’année ; France métropolitaine jusqu'en 2011, France hors Mayotte à partir de 2011.
  • Source : Insee, Estimations d'emploi.

L’industrie a perdu à nouveau des emplois en 2020 (− 50 000 emplois hors intérimaires, soit − 1,5 %), notamment dans la métallurgie. Dans le secteur manufacturier, seule l’industrie pharmaceutique n’a pas détruit d’emploi salarié. Cette baisse de l’emploi met fin à trois années consécutives de hausse modérée (+ 34 000 emplois entre 2017 et 2019), notamment dans l’industrie agroalimentaire. En 20 ans, l’industrie a perdu un quart de ses effectifs salariés (− 993 000 emplois).

En 2020, le secteur agricole a perdu 3 000 emplois (− 0,4 %) alors qu’il était stable en 2018 et 2019. L’emploi salarié y a légèrement progressé (+ 3 000 emplois) mais l’emploi non salarié a continué de reculer (− 6 000).

À l’inverse, l’emploi dans le tertiaire non marchand a augmenté en 2020 : + 51 000 emplois en 2020, la plus forte hausse depuis 2016, soit une hausse de 0,6 % causée uniquement par l’emploi salarié (− 5 000 emplois non salariés). La crise sanitaire explique pour beaucoup ce dynamisme : plus des trois quarts des créations nettes d’emploi salarié non marchand se trouvent dans le secteur de la santé (+ 43 000).

Enfin, dans le secteur de la construction, l’emploi salarié a rebondi au second semestre 2020 et l’emploi total a nettement progressé sur l’année 2020 (+ 40 000 emplois, soit + 2,3 %). Depuis 2017, la croissance de l’emploi y est très dynamique (en moyenne 37 000 créations nettes d’emploi par an).

Seules trois régions ont plus d’emploi fin 2020 que fin 2019

En 2020, l’emploi s’est replié dans presque toutes les régions (figure 3).

La baisse de l’emploi a été particulièrement marquée en Île-de-France (− 1,6 %), en Auvergne-Rhône-Alpes (− 1,5 %), en Bourgogne-Franche-Comté (– 1,2 %), en Martinique et dans le Grand Est (− 1,0 %). C’est aussi dans ces quatre premières régions que l’emploi du tertiaire marchand a le plus diminué (de − 2,6 % en Bourgogne-Franche-Comté à − 3,6 % en Auvergne-Rhône-Alpes). La région Auvergne-Rhône-Alpes est de loin la plus touchée par le recul de l’emploi salarié dans l’hébergement-restauration (− 23,3 %, contre − 11,7 % en moyenne nationale). Dans le Grand Est, le tertiaire marchand a moins diminué que la moyenne nationale (– 1,9 %, contre – 2,1 %) mais l’emploi du tertiaire non marchand a quasi stagné (+ 0,2 %). L’emploi dans l’industrie y a chuté (– 2,2 %) alors que la part des emplois industriels y est plus forte qu’ailleurs.

Figure 3a – Évolution de l'emploi par région en 2020

en %
Figure 3a – Évolution de l'emploi par région en 2020 (en %) - Lecture : en 2020, l’emploi a baissé de 0,4 % dans les Pays de la Loire.
Évolution
Guyane + 1,8
La Réunion + 1,3
Corse + 0,7
Bretagne – 0,1
Nouvelle-Aquitaine – 0,3
Pays de la Loire – 0,4
Hauts-de-France – 0,4
Provence-Alpes-Côte d'Azur – 0,6
Normandie – 0,7
Occitanie – 0,8
Guadeloupe – 0,8
Centre-Val de Loire – 0,9
Martinique – 1,0
Grand Est – 1,0
Bourgogne-Franche-Comté – 1,2
Auvergne-Rhône-Alpes – 1,5
Île-de-France – 1,6
Ensemble – 0,9
  • Note : données provisoires.
  • Lecture : en 2020, l’emploi a baissé de 0,4 % dans les Pays de la Loire.
  • Champ : emploi salarié et non salarié, en fin d’année ; France hors Mayotte.
  • Source : Insee, Estimations d'emploi.

Figure 3a – Évolution de l'emploi par région en 2020

  • Note : données provisoires.
  • Lecture : en 2020, l’emploi a baissé de 0,4 % dans les Pays de la Loire.
  • Champ : emploi salarié et non salarié, en fin d’année ; France hors Mayotte.
  • Source : Insee, Estimations d'emploi.

En Centre-Val-de-Loire, Guadeloupe, Occitanie, Normandie et Provence-Alpes-Côte d’Azur, l’emploi a reculé de 0,6 % à 0,9 %, avoisinant la moyenne nationale (− 0,9 %). L’emploi dans le tertiaire marchand y a décru d’au moins 1,4 % et celui du tertiaire non marchand a moins augmenté qu’au niveau national, à l’exception de Provence-Alpes-Côte d’Azur (+ 0,7 %). La Guadeloupe est la région ayant le plus bénéficié du dynamisme dans la construction (+ 4,9 %), modérant la chute de l’emploi total.

Dans les Hauts-de-France, les Pays de la Loire et en Nouvelle-Aquitaine, l’emploi s’est légèrement contracté (− 0,4 % à – 0,3 %) et il s’est quasi stabilisé en Bretagne (– 0,1 %). La baisse du tertiaire marchand y est moins marquée qu’en moyenne nationale. Dans le tertiaire non marchand, l’emploi y a été plus dynamique qu’en moyenne nationale, à l’exception des Hauts-de-France.

Au final, l’emploi n’a progressé en 2020 qu’en Corse (+ 0,7 %), à La Réunion (+ 1,3 %) et en Guyane (+ 1,8 %). Ces trois régions sont les seules où l’emploi a augmenté dans le tertiaire marchand, avec + 0,2 % en Corse, + 0,9 % à la Réunion et + 0,8 % en Guyane.

Publication rédigée par :Thomas Cohadon, Sylvie Henninger, Julie Le Gac, Catherine Thiel (Insee)

Sources

Les Estimations d’emploi constituent la source de référence pour le suivi conjoncturel de l’emploi. Elles comptabilisent, annuellement et trimestriellement, le nombre de personnes en emploi en France hors Mayotte.

Les Estimations annuelles mesurent l’emploi total (salarié et non salarié) sur la dernière semaine de l’année par secteur d’activité (jusqu’au niveau A88 de la NAF rév. 2) et par échelon géographique (jusqu’à la zone d’emploi).

Depuis le millésime 2007, les Estimations annuelles d’emploi sont issues du dispositif Estel (Estimations d’emploi localisées), qui se fonde sur l’utilisation de sources administratives. Pour les salariés, il s’agit principalement de la Déclaration sociale nominative (DSN) et des Déclarations annuelles de données sociales (DADS), des données du fichier de paye des agents de l’État et de déclarations spécifiques pour les salariés des particuliers employeurs. Pour les non-salariés agricoles, les sources mobilisées sont les fichiers de la Mutualité sociale agricole (MSA) et pour les non-salariés non agricoles, les fichiers de l’Agence centrale des organismes de sécurité sociale (Acoss). Estel mesure l’emploi répertorié dans l’ensemble de ces sources administratives sur la dernière semaine de l’année, avec prise en compte de la multi-activité.

Les Estimations annuelles provisoires, ici pour les années 2019 et 2020, reposent principalement sur les déclarations des entreprises auprès des organismes de recouvrement (source Epure), les données sur l’emploi intérimaire de la Dares et les données relatives aux particuliers employeurs.

Dans les Estimations annuelles d’emploi, les secteurs d’activité sont définis en fonction de l’activité principale des établissements en fin d’année.

Dans les Estimations d’emploi, les multi-actifs, c’est-à-dire les personnes qui occupent plusieurs emplois à une même date (soit parce qu’elles sont salariées et ont plusieurs employeurs, soit parce qu’elles sont à la fois non-salariées et salariées), ne sont comptés qu’une seule fois, au titre de leur emploi principal, qui correspond à celui qui leur procure la plus forte rémunération sur l’année.

Définitions

Un micro-entrepreneur bénéficie du régime de même nom (appelé auto-entrepreneur jusque 2014), qui offre des formalités de création d’entreprise allégées et un mode de calcul et de paiement simplifié des cotisations sociales et de l’impôt sur le revenu. Il s’applique aux entrepreneurs individuels qui en font la demande, sous certaines conditions.

Un secteur regroupe des entreprises de fabrication, de commerce ou de service qui ont la même activité principale (au regard de la nomenclature d'activité économique considérée).

Pour en savoir plus

Renne C., « Le dispositif d’activité partielle a amorti l’impact économique de la crise sanitaire », in Emploi, chômage, revenus du travail, coll. « Insee Références », édition 2021.

« Estimation d’emploi en 2020 (première estimation) », Insee Résultats, décembre 2021.

« Au deuxième trimestre 2021, l’emploi salarié augmente de 1,1 % et dépasse légèrement son niveau d’avant-crise », Informations rapides n° 231, Insee, septembre 2021.

Emploi, chômage, revenus du travail, coll. « Insee Références », édition 2021.

Bilans économiques des régions françaises, Insee, juillet 2021.