Insee
Insee Première · Octobre 2021 · n° 1874
Insee PremièreLe patrimoine économique national en 2020 Des évolutions contrastées entre le secteur public et les secteurs privés

Inès Karmous (Insee), Aurélien Ravary (Banque de France)

Fin 2020, le patrimoine économique national s’élève à 17 682 milliards d’euros, soit 9,6 fois le produit intérieur net. Il continue d’augmenter malgré la crise sanitaire (+ 6,9 %, après + 5,7 %), soutenu par les prix de l’immobilier. En particulier, le patrimoine des ménages progresse nettement (+ 6,4 % après + 7,0 %) pour atteindre 13 440 milliards d’euros. Celui des sociétés non financières (SNF) accélère (+ 11,2 % après + 4,3 % en 2019) et atteint 3 372 milliards d’euros. Celui des sociétés financières s’accroît également (+ 23,0 %) et s’élève à 682 milliards d’euros, porté par une hausse de leur patrimoine financier. En revanche, le patrimoine des administrations publiques décroît fortement (– 126 milliards d’euros) en raison de la dette accrue pour financer les mesures de soutien des revenus ; il s’élève à 189 milliards d’euros.

Le patrimoine national maintient une forte progression

Fin 2020, le économique national s’élève à 17 682 milliards d’euros en France, soit 9,6 fois le produit intérieur net de l’année (figure 1, encadré). Après avoir oscillé autour de 8,0 entre 2010 et 2019, ce ratio atteint son plus haut niveau historique en 2020 en progressant brutalement de 1,3 point. La hausse de ce ratio est due à l’augmentation du patrimoine économique national (+ 6,9 %) et à la forte baisse exceptionnelle au dénominateur du produit intérieur net (– 7,4 %) (figure 2). Le patrimoine non financier, qui progresse de 6,6 % (après 5,6 %), est le premier et principal facteur de croissance du patrimoine total. Les actifs non financiers constituent la quasi-totalité du patrimoine net de l’ensemble de l’économie nationale. Ils bénéficient du fort dynamisme du prix des terrains bâtis, en particulier pour l’immobilier résidentiel, et ce malgré la baisse de la construction neuve (– 7,7 %). En effet, après le ralentissement de l’activité immobilière au premier semestre, la hausse de la demande en logement et l’abondance de liquidités à la sortie du premier confinement engendrent une forte hausse des prix de l’immobilier résidentiel en fin d’année.

Figure 1 – Évolution des stocks patrimoniaux des grands secteurs institutionnels rapportés aux flux macroéconomiques

en nombre d'années
Figure 1 – Évolution des stocks patrimoniaux des grands secteurs institutionnels rapportés aux flux macroéconomiques (en nombre d'années) - Lecture : fin 2020, le patrimoine national net représente l'équivalent de 9,6 années de produit intérieur net.
Patrimoine national net / Produit intérieur net Patrimoine net des ménages / Revenu disponible net des ménages Fonds propres des sociétés non financières / Valeur ajoutée nette des SNF Fonds propres des sociétés financières / Produit intérieur net Patrimoine net des administrations publiques / Produit intérieur net
2001 5,1 5,6 5,6 1,3 0,3
2002 5,3 5,8 5,4 1,1 0,3
2003 5,9 6,4 6,0 1,2 0,4
2004 6,5 6,9 6,4 1,3 0,4
2005 7,2 7,6 7,2 1,5 0,5
2006 7,5 8,1 7,9 1,6 0,6
2007 7,7 8,2 8,1 1,6 0,7
2008 7,3 7,4 6,3 1,2 0,5
2009 7,6 7,5 7,2 1,5 0,5
2010 8,0 7,9 7,6 1,5 0,5
2011 8,1 8,0 7,2 1,4 0,4
2012 8,0 8,0 7,7 1,4 0,3
2013 7,9 8,2 8,1 1,5 0,3
2014 7,7 8,1 8,4 1,6 0,2
2015 7,7 8,2 8,8 1,7 0,1
2016 7,8 8,4 9,7 1,7 0,1
2017 8,0 8,6 10,3 1,7 0,1
2018 8,1 8,5 10,0 1,6 0,2
2019 8,3 8,8 10,9 1,7 0,2
2020 9,6 9,3 12,9 1,9 0,1
  • Lecture : fin 2020, le patrimoine national net représente l'équivalent de 9,6 années de produit intérieur net.
  • Sources : Insee, Banque de France, comptes nationaux base 2014.

Figure 1 – Évolution des stocks patrimoniaux des grands secteurs institutionnels rapportés aux flux macroéconomiques

  • Lecture : fin 2020, le patrimoine national net représente l'équivalent de 9,6 années de produit intérieur net.
  • Sources : Insee, Banque de France, comptes nationaux base 2014.

Figure 2 – Le patrimoine des secteurs institutionnels fin 2020

Figure 2 – Le patrimoine des secteurs institutionnels fin 2020
Ensemble de l'économie nationale Ménages1 Sociétés Administrations publiques Évolution du patrimoine de l'économie nationale
non financières financières 2018-2019 2019-2020
en milliards d'euros en %
Actifs non financiers (ANF) 17 536 9 095 5 701 373 2 367 5,6 6,6
Constructions et terrains 13 931 8 306 3 295 296 2 034 5,6 6,7
Logements 4 852 3 943 790 50 69 3,3 1,8
Autres bâtiments et génie civil 2 128 166 861 78 1 022 1,9 0,2
Terrains bâtis 6 951 4 196 1 644 168 943 8,9 12,7
Machines et équipements 685 42 591 21 32 3,8 1,1
Stocks 494 17 451 - 27 6,0 3,4
Autres actifs produits 657 151 353 20 134 3,0 2,2
Autres actifs non produits 1 768 579 1 011 37 141 8,0 10,8
Actifs financiers (AF) hors produits dérivés, dont : 36 231 6 200 10 916 17 536 1 579 9,1 8,7
Numéraire et dépôts 8 583 1 812 967 5 526 278 8,3 25,4
Titres de créances 4 316 39 59 4 174 44 4,4 8,8
Crédits 5 985 11 1 840 3 982 151 4,0 5,1
Actions et parts de fonds d'investissement 11 930 1 683 6 641 2 973 633 16,2 2,7
Actions et autres participations hors titres d'OPC 10 055 1 380 6 480 1 709 485 17,7 2,1
Titres d’OPC 1 875 302 161 1 264 148 8,7 6,2
Systèmes d'assurances et de garanties, dont : 2 442 2 236 46 154 6 8,6 3,3
Assurance-vie 2 132 2 132 - - - 8,5 2,8
Ensemble des actifs (A) = (ANF) + (AF) 53 766 15 295 16 616 17 909 3 946 8,0 8,0
Passifs financiers (PF) hors produits dérivés, dont : 36 041 1 855 13 245 17 188 3 754 9,0 8,6
Numéraire et dépôts 8 601 - - 8 431 170 7,1 22,4
Titres de créances 5 157 - 750 1 660 2 747 7,2 9,2
Crédits 6 228 1 567 3 150 1 163 347 5,0 6,2
Actions et parts de fonds d'investissement (Passif en actions) 11 105 11 8 314 2 731 48 15,9 2,6
Actions et autres participations hors titres d'OPC 9 375 11 8 314 1 002 48 17,7 2,0
Titres d’OPC 1 729 - - 1 729 - 6,8 6,1
Systèmes d'assurances et de garanties, dont : 2 468 - - 2 468 - 8,6 3,3
Assurance-vie 2 150 - - 2 150 - 8,5 2,8
Solde des produits dérivés (S) – 43 - - – 40 – 3 ns ns
Patrimoine financier net = (AF) – (PF) + (S) 146 4 345 – 2 329 308 – 2 178 27,8 79,6
Patrimoine (ou valeur nette) = (A) – (PF) + (S) 17 682 13 440 3 372 682 189 5,7 6,9
Fonds propres = (Patrimoine net) + (Passif en actions) /// /// 11 686 3 413 /// /// ///
  • 1. Y compris entrepreneurs individuels (EI) et institutions sans but lucratif au service des ménages (ISBLSM).
  • Note : « ns » correspond à « non significatif », « - » correspond à un actif ou un passif non détenu, « /// » correspond à une absence de résultats due à la nature des choses.
  • Sources : Insee, Banque de France, comptes nationaux en base 2014.

En 2020, le (solde des actifs et des passifs financiers) est stable, les et les évoluant à des rythmes proches (respectivement + 8,7 % et + 8,6 %, après + 9,1 % et + 9,0 %). Cette hausse simultanée des actifs et des passifs financiers masque des évolutions contrastées entre les différents agents : le patrimoine financier net des administrations publiques se dégrade nettement, celui des sociétés non financières est quasi stable, tandis que ceux des sociétés financières et des ménages s’accroissent. En effet, la crise liée à la pandémie de Covid-19 et la baisse d’activité qui en résulte ont pesé dans les variations des patrimoines financiers en 2020 : les mesures gouvernementales de soutien à l’économie ont été financées par une hausse de la dette publique qui s’est traduite par une dégradation de leur patrimoine financier net. Ces mesures de soutien ont augmenté les placements financiers des ménages contraints sur leur consommation et soutenu la trésorerie des entreprises. Au total, la baisse du patrimoine financier des administrations publiques se reflète en grande partie dans la forte hausse de celui des ménages et la quasi-stabilité de celui des sociétés non financières.

Le patrimoine des ménages tiré par la revalorisation des prix de l’immobilier

Fin 2020, le patrimoine des s’établit à 13 440 milliards d’euros, soit 9,3 fois le revenu disponible net des ménages (figure 1), après 8,8 fois en 2019. Il progresse de 6,4 %, soit un peu moins qu’en 2019 (+ 7,0 %) (figure 3).

Figure 3 – Évolution du patrimoine des secteurs institutionnels

en %
Figure 3 – Évolution du patrimoine des secteurs institutionnels (en %)
Ménages1 Sociétés non financières Sociétés financières Administrations publiques
08-18 moy. / an 18-19 19-20 08-18 moy. / an 18-19 19-20 08-18 moy. / an 18-19 19-20 08-18 moy. / an 18-19 19-20
Actifs non financiers (ANF) 2,2 5,5 6,6 3,1 6,1 6,7 4,1 9,3 8,1 2,2 4,7 6,0
Constructions et terrains 2,3 5,3 6,4 2,6 6,6 7,7 3,6 9,9 9,0 2,2 4,7 6,0
Logements 2,6 3,1 1,7 3,1 3,9 2,3 3,2 5,2 2,5 2,7 2,9 2,0
Autres bâtiments et génie civil 0,2 0,1 – 1,3 2,0 2,0 0,1 3,4 6,5 1,7 1,7 1,7 0,3
Terrains bâtis 2,0 7,8 11,5 2,8 11,2 15,2 3,8 13,6 15,0 2,7 8,8 13,3
Machines et équipements – 1,6 0,5 – 1,7 1,9 4,0 1,3 3,6 11,6 3,6 0,5 1,2 0,3
Stocks – 1,3 5,0 12,7 3,1 6,3 3,1 - - - 4,3 1,1 2,4
Autres actifs produits 2,4 – 0,2 – 0,8 3,4 4,7 3,6 5,4 8,1 5,6 2,2 1,7 1,5
Autres actifs non produits 2,2 11,2 12,3 6,1 6,2 9,9 9,2 3,8 5,6 3,2 9,6 12,0
Actifs financiers (AF) hors produits dérivés, dont : 4,1 8,9 5,7 7,6 13,5 4,5 3,6 6,8 12,2 2,9 5,8 14,1
Numéraire et dépôts 3,6 5,7 9,8 9,4 8,4 37,7 3,8 9,2 27,9 6,8 8,0 61,2
Titres de créance – 5,9 – 7,0 – 4,8 – 3,0 8,4 – 12,5 2,9 4,5 9,7 – 4,4 1,5 – 17,9
Crédits – 10,6 – 2,3 3,9 5,9 3,4 0,9 3,7 4,5 6,1 0,2 0,6 44,1
Actions et parts de fonds d'investissement 4,3 13,7 3,1 10,0 19,4 2,5 4,1 11,9 3,6 3,3 11,6 – 0,6
Systèmes d'assurances et de garanties, dont : 4,5 8,2 3,1 – 1,3 3,4 7,9 5,8 15,6 5,9 – 0,5 3,5 7,9
Assurance-vie 4,7 8,5 2,8 - - - - - - - - -
Ensemble des actifs 2,9 6,8 6,2 5,8 10,9 5,3 3,6 6,8 12,1 2,5 5,1 9,1
Passifs financiers (PF) hors produits dérivés, dont : 3,1 5,7 5,2 6,4 12,6 3,8 3,4 7,6 11,8 5,6 4,8 13,7
Numéraire et dépôts - - - - - - 3,0 7,1 22,5 6,7 8,7 20,7
Titres de créance - - - 7,7 11,8 11,8 1,5 7,2 1,1 6,3 6,0 14,1
Crédits 3,9 6,1 4,5 4,2 4,0 5,9 8,7 7,8 7,0 2,4 0,0 13,9
Actions et parts de fonds d'investissement (Passif en actions) 4,9 3,8 3,7 7,8 18,0 2,8 3,1 10,5 2,1 ns ns ns
Systèmes d'assurances et de garanties, dont : - - - - - - 4,4 8,6 3,3 - - -
Assurance-vie - - - - - - 4,8 8,5 2,8 - - -
Solde des produits dérivés (S) ns ns ns ns ns ns ns ns ns ns ns ns
Patrimoine financier net2 4,6 10,3 6,0 2,3 8,4 0,9 20,9 – 35,0 47,5 8,0 4,0 13,5
Patrimoine (ou valeur nette) 2,9 7,0 6,4 3,8 4,3 11,2 9,4 – 13,0 23,0 – 10,4 8,9 – 39,9
Fonds propres des sociétés /// /// /// 6,4 13,9 5,1 4,1 5,6 5,7 /// /// ///
  • 1. Y compris entrepreneurs individuels (EI) et institutions sans but lucratif au service des ménages (ISBLSM).
  • 2. Le patrimoine financier net des sociétés non fiancières et des administrations publiques est structurellement négatif. Aussi, une évolution « positive » traduit-elle une dégradation du patrimoine financier net, qui devient encore plus négatif. À l'inverse, une évolution « négative » traduit une amélioration.
  • Note : « ns » correspond à « non significatif », « - » correspond à un actif ou un passif non détenu, « /// » correspond à une absence de résultats due à la nature des choses.
  • Sources : Insee, Banque de France, comptes nationaux en base 2014.

Leur patrimoine non financier augmente de 6,6 % (après + 5,5 % en 2019) pour atteindre 9 095 milliards d’euros. Les  (constructions et terrains bâtis), constituant 91 % des actifs non financiers des ménages, bénéficient de l’accroissement marqué des prix de l’immobilier fin 2020 (+ 6,1 %, après + 4,5 %), même si la crise sanitaire perturbe la dynamique des ventes immobilières en provoquant une contraction de l’investissement (– 8,8 % après + 3,9 %).

Le patrimoine financier net des ménages augmente de 6,0 % en 2020, à 4 345 milliards d’euros, après une hausse de 10,3 % en 2019. Les placements des ménages sont en hausse de 5,7 %, soit 6 200 milliards d’euros à fin 2020. L'encours en numéraire et dépôts accélère (+ 9,8 %, soit + 162 milliards d’euros, après + 5,7 % en 2019, soit + 89 milliards) : la contraction de la consommation des ménages en raison des mesures de restriction sanitaire, couplée au maintien de leur revenu disponible grâce aux dispositifs d’aide publique (chômage partiel, fonds de solidarité, etc.), entraîne la constitution d’une épargne forcée qui se reflète par une forte augmentation des placements sur les dépôts à vue et les livrets d'épargne. Les placements sous forme d'actions et de parts de fonds d'investissement décélèrent en 2020 (+ 3,1 %, après + 13,7 %). L’année 2019 avait été marquée par la forte hausse des cours boursiers alors qu’ils baissent au cours de l’année 2020 (– 7 % après + 25 % pour le SBF 120). Les actifs des ménages en assurance-vie continuent de progresser, mais à un rythme moins élevé qu'en 2019 (+ 2,8 %, après + 8,5 %).

Au passif des ménages, les crédits continuent de croître, mais à un rythme moins soutenu (+ 4,5 %, après + 6,1 %), au cours d’une année marquée par un repli de l'encours de crédits lors du premier confinement. Cette hausse est alimentée pour l’essentiel par les crédits à l’habitat, tandis que l’incidence des restrictions sanitaires sur la consommation des ménages entraîne une stagnation des crédits à la consommation.

Les sociétés non financières bénéficient des prêts garantis par l’État

Fin 2020, la des (SNF) augmente fortement de 11,2 % (après + 4,3 % en 2019) et atteint 3 372 milliards d’euros.

Le patrimoine non financier des SNF progresse à un rythme proche de celui de l’année précédente (+ 6,7 % après + 6,1 % en 2019), malgré la contraction de l’investissement de 8,1 %. Les SNF bénéficient en effet de la hausse des prix de l’immobilier. Au total, les encours de biens immobiliers progressent de 7,7 % (après + 6,6 % en 2019) et contribuent pour 9,6 points à la croissance de la valeur nette des SNF.

Le patrimoine financier net des SNF s’établit à – 2 329 milliards d’euros en 2020, après – 2 309 milliards en 2019. Les actifs financiers et les passifs progressent parallèlement, entraînant une faible variation du patrimoine financier net. Le passif financier des SNF augmente à nouveau, mais moins rapidement qu’en 2019 (+ 3,8 %, après + 12,6 %). Les encours d'actions décélèrent (+ 2,8 %, après + 18,0 %), en raison de la baisse des cours boursiers. Leur encours de crédit augmente de 5,9 % (après + 4,0 %). Le financement bancaire connaît une progression très dynamique de mars à juillet, avec la souscription des prêts garantis par l’État (PGE), pour revenir ensuite sur des progressions d’avant-crise. Sur l’année, le flux de crédits auprès des institutions financières est de + 153 milliards, à mettre en regard du montant de 130 milliards de PGE (tous secteurs confondus mais principalement aux SNF). Par ailleurs, les encours de titres de créance poursuivent leur progression (+ 11,8 % en 2020, comme en 2019).

En 2020, les actifs financiers des SNF augmentent, mais nettement moins vite qu’en 2019 (+ 4,5 % après + 13,5 %). Les actions et parts de fonds d'investissement ralentissent nettement (+ 2,5 % après + 19,4 % en 2019) en raison d'effets de valorisation plus modérés. Elles représentent 6 641 milliards d'euros fin 2020, soit 61 % du total de leurs actifs financiers. Les placements en numéraire et dépôts s'accroissent fortement (+ 37,7 %, après + 8,4 %), les SNF recourant fortement au dispositif des prêts garantis par l'État afin d’anticiper ou de faire face à leurs échéances ainsi que pour sécuriser leur trésorerie. La hausse des dépôts est le miroir de l’accroissement de la dette bancaire. Cette hausse concomitante des dépôts et des crédits au niveau agrégé masque des évolutions par secteur d’activité et par taille plus contrastées.

Les actifs financiers des sociétés financières croissent fortement

Fin 2020, le patrimoine des s’accroît de 23,0 % (après – 13,0 % en 2019) et s’élève à 682 milliards d’euros, porté par une hausse de leur patrimoine financier.

Les actifs non financiers (2,1 % de l’actif total) progressent à un rythme moindre que l’année précédente (+ 8,1 %, après + 9,3 %) et atteignent 373 milliards d’euros. Ce ralentissement s’explique par une forte baisse de l’investissement (– 17,7 % après + 14,0 %), notamment pour la composante immobilière qui représente 80 % des actifs non financiers détenus par les sociétés financières.

Le patrimoine financier net des sociétés financières atteint + 308 milliards d’euros en 2020, après + 209 milliards d’euros en 2019. Leurs actifs financiers accélèrent en 2020 (+ 12,2 %, après + 6,8 %). L'encours de crédits octroyés progresse plus rapidement qu'en 2019 (+ 6,1 % en 2020, après + 4,5 %). Cette évolution est due au dynamisme des crédits aux SNF (+ 12,8 %, après + 3,7 %), ces dernières recourant fortement aux PGE. Cette accélération compense la décélération des crédits aux ménages (+ 4,5 %, après + 6,1 %). Les placements sous forme de titres de créance continuent de progresser en 2020 (+ 9,7 %, après + 4,5 %) : ce dynamisme est lié aux achats de titres de dette publique par la Banque de France dans le cadre des mesures exceptionnelles de politique monétaire (programme d’achats d’urgence face à la pandémie, PEPP). La détention d'actions et de parts de fonds d'investissement s'accroît à un rythme moins soutenu (+ 3,6 %, après + 11,9 %), en raison d'effets de valorisation quasi nuls. Par ailleurs, l'encours de numéraire et dépôts à l'actif progresse fortement (+ 27,9 %, après + 9,2 %), porté par les dépôts auprès de la Banque de France et des établissements de crédit résidents. Les opérations ciblées de refinancement à plus long terme (targeted longer-term refinancing operations, TLTRO), qui atteignent 397,5 milliards d’euros en France à fin 2020, contribuent à cette croissance.

Les passifs financiers des sociétés financières accélèrent également (+ 11,8 % après + 7,6 %). Le passif en numéraire et dépôts s'accroît fortement en 2020 (+ 22,5 %, après + 7,1 %). Outre le dynamisme des dépôts interbancaires, cette hausse est nourrie par l’accroissement des dépôts effectués par les ménages et les SNF (+ 18,2 %, après + 6,5 %) du fait de la hausse des crédits aux entreprises (« les crédits font les dépôts ») et des mesures gouvernementales de soutien à l’économie. L'encours de titres de créance émis progresse, mais à un rythme moins élevé (+ 1,1 %, après + 7,2 %). Par ailleurs, le passif en actions et parts de fonds d'investissement décélère (+ 2,1 %, après + 10,5 %), du fait d'effets de valorisation négatifs. Les encours d'assurance-vie s'accroissent, quoique plus lentement qu'en 2019 (+ 2,8 %, après + 8,5 %), du fait d'effets de valorisation et de flux nets de placement des ménages moins élevés.

Les administrations publiques financent les mesures de soutien en empruntant massivement

Fin 2020, du fait de la dégradation de son patrimoine financier, le patrimoine des administrations publiques décroît de 39,9 %, après une augmentation de 8,9 % en 2019. Il s’élève alors à 189 milliards d’euros.

Le patrimoine financier net des administrations publiques s’établit à – 2 178 milliards d’euros en 2020, après – 1 919 milliards d’euros en 2019. Le total des actifs financiers des administrations publiques progresse plus rapidement en 2020 qu'en 2019 (+ 14,1 %, après + 5,8 %). En particulier, les placements en numéraire et dépôts s'accroissent nettement (+ 61,2 %, après + 8,0 %). Cette augmentation de trésorerie correspond à un endettement supérieur au déficit. L’État, notamment, dans un contexte de politique monétaire accommodante, profite de conditions d’emprunt favorables du fait d’un taux d’intérêt négatif en moyenne sur l’année. Les détentions d'actions et de parts de fonds d'investissement (40 % du total des actifs financiers) sont en léger repli (– 0,6 %, après + 11,6 %), en raison de flux nets et d'effets de valorisation négatifs.

Le passif financier des administrations publiques accélère (+ 13,7 %, après + 4,8 %), en raison d'émissions nettes de titres de créance bien plus importantes en 2020 qu'en 2019 (+ 286 milliards d'euros, après + 72 milliards d'euros). Ces émissions sont particulièrement concentrées sur le deuxième trimestre, marqué par le premier confinement et le besoin de financement des dispositifs mis en œuvre pour faire face à la crise sanitaire, comme le chômage partiel. Au total, la dette publique en valeur de marché augmente de 14,4 %, contre + 11,4 % pour la , mesurée en valeur nominale.

Le patrimoine non financier des administrations publiques progresse de + 6,0 % (après + 4,7 %) pour s’établir à 2 367 milliards d’euros. Cet accroissement s’explique par une augmentation de l’encours en terrains et bâtiments (+ 6,0 % après + 4,7 %) qui représente 86 % des actifs non financiers détenus par les administrations publiques. De plus, l’investissement des administrations connaît un moindre recul que les autres secteurs institutionnels (– 1,4 % contre – 8,8 % pour les autres secteurs).

Encadré – À quels agrégats rapporter le patrimoine économique ?

Le produit intérieur brut (PIB), qui s'élève à 2 303 milliards d’euros en 2020, est égal à la somme des valeurs ajoutées nouvellement créées par les unités productrices résidentes au cours d’une période donnée, évaluées au prix du marché.

Le produit intérieur net (PIN), qui s'élève à 1 840 milliards d’euros en 2020, s’obtient en déduisant du PIB la consommation de capital fixe, qui correspond au coût d’usure du capital au cours de la même période. Il en est de même pour le revenu disponible net par rapport au revenu disponible brut.

Il est plus pertinent de comparer le stock de patrimoine avec des flux macroéconomiques nets plutôt qu’avec des flux bruts. En effet, le patrimoine est lui-même un stock net, qui tient compte de l’état d’usure et d’obsolescence du capital.

Publication rédigée par :Inès Karmous (Insee), Aurélien Ravary (Banque de France)

Sources

Les données sont issues des comptes nationaux en base 2014.

Définitions

Le patrimoine (ou « valeur nette ») est défini comme la différence entre la valeur des actifs (financiers et non financiers) et celle des passifs (par nature financiers). Le patrimoine financier net s’obtient comme la différence entre la valeur des actifs financiers et celle des passifs.

Les comptes de patrimoine recensent les actifs et passifs économiques, c’est-à-dire ceux sur lesquels des droits de propriété peuvent être exercés et qui peuvent procurer des avantages économiques à leurs propriétaires. Ils peuvent être financiers ou non financiers, ces derniers pouvant être le résultat de processus de production ou avoir une origine naturelle. Les actifs et passifs sont comptabilisés à leur valeur de marché en fin d’année, sans consolidation intra ni intersectorielle. Cette valeur inclut donc les plus ou moins-values latentes relatives à chaque catégorie d’actifs. Ainsi, la valeur d’un actif ou d’un passif peut varier d’une année à l’autre même en l’absence de flux nets de transactions, du fait de la fluctuation des prix de marché. Les actions non cotées sont estimées par référence à la valorisation des actions cotées.

La catégorie des ménages inclut les particuliers, les entrepreneurs individuels et les institutions sans but lucratif au service des ménages.

La valeur des biens immobiliers se décompose en celle des bâtiments et celle des terrains sur lesquels ils sont implantés. L’essentiel des plus-values immobilières est affecté aux terrains.

Les sociétés sont réparties entre sociétés financières et non financières (SNF). Les sociétés financières incluent la Banque centrale, les établissements de crédit et assimilés, les institutions financières diverses (entreprises d’investissement, organismes de titrisation notamment), les sociétés d’assurance, les fonds d’investissement monétaires et non monétaires, les auxiliaires financiers et les institutions financières captives.

Le montant de la dette publique (au sens de Maastricht) est différent de celui du passif des administrations publiques pour trois raisons :

  • le périmètre des opérations financières retenues pour la dette publique exclut les produits dérivés et les autres comptes à payer et à recevoir ;
  • la dette publique est consolidée : elle ne prend pas en compte les dettes entre administrations ;
  • elle est évaluée en valeur nominale, c’est-à-dire à la valeur de remboursement du principal.

Les fonds propres des sociétés financières et non financières sont mesurés en valeur de marché, par différence entre la valeur de leurs actifs et celle de leurs passifs autres qu’en actions.

Pour en savoir plus

Bureau B., Duquerroy A., Giorgi J., Lé M., Scott S., Vinas F., « L’impact de la crise sanitaire sur la situation financière des entreprises en 2020 : une analyse sur données individuelles », Document de travail Insee n° G2021-03, Document de travail Banque de France n° 824, juillet 2021.

Amoureux V., Héam J.-C., Laurent T., « Les comptes de la Nation en 2020 – Baisse historique du PIB, mais résilience du pouvoir d’achat des ménages », Insee Première n° 1860, mai 2021.

Bonnet O., Olivia T., Roudil-Valentin T., « En 2020, la chute de la consommation a alimenté l’épargne, faisant progresser notamment les hauts patrimoines financiers », Note de conjoncture, Insee, mars 2021.

Fize É., Landais C., Lavest C., « Ouvrir dans un nouvel ongletConsommation, épargne et fragilités financières pendant la crise Covid : quelques enseignements additionnels sur données bancaires », Focus du conseil d’analyse économique n° 054-2021, janvier 2021.

Karmous I., Desseaux L., « Le patrimoine économique national en 2019 – Une croissance soutenue par les cours boursiers », Insee Première n° 1832, Bulletin de la Banque de France n° 232/6, décembre 2020.

Banque de France, « Ouvrir dans un nouvel ongletL’impact de la crise du Covid-19 sur la situation financière des ménages et des entreprises : poursuite de la forte hausse de la dette et des dépôts des sociétés non financières », juin 2020.

Banque de France, « Ouvrir dans un nouvel ongletTaux d’endettement des agents non financiers – Comparaisons internationales », Stat Info, publication trimestrielle.