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Insee Flash Bourgogne-Franche-Comté · Juillet 2021 · n° 137
Insee Flash Bourgogne-Franche-ComtéLes amortisseurs sociaux fortement sollicités pendant la crise de la Covid-19 Bourgogne-Franche-Comté

David Brion, Jean-François Louis (Insee)

La crise économique engendrée par la Covid-19 a eu des répercussions sociales importantes. Les dispositifs servant d’amortisseurs sociaux ont très vite été davantage sollicités et ont permis de limiter ses effets. Les nombres de demandeurs d’emploi indemnisés, des bénéficiaires de l’allocation pour ceux arrivant en fin de droits et des allocataires percevant le RSA ont fortement augmenté. Les jeunes ont été plus particulièrement touchés par la crise. Les suppressions d’emploi notamment dans l’intérim et la restauration ont fait reculer le niveau de vie de certains d’entre eux.

Insee Flash Bourgogne-Franche-Comté
No 137
Paru le :Paru le15/07/2021

La fermeture de commerces et les restrictions de déplacements mises en place en France depuis mars 2020 pour juguler l’épidémie de la Covid-19 ont eu de graves conséquences financières pour une partie de la population. Les amortisseurs sociaux ont permis de limiter l’impact sur les niveaux de vie. Leur suivi permet de dresser un premier bilan social de la crise sanitaire.

Davantage de demandeurs d’emploi et de chômeurs en fin de droits

Dès mars 2020, l’activité partielle a permis de maintenir tout ou partie des revenus de nombreux salariés ne pouvant exercer intégralement leur activité. Début avril 2020, elle a concerné jusqu’à 30 % des salariés de Bourgogne-Franche-Comté. Le nombre de demandeurs d’emploi a augmenté fortement, surtout à cause de l’interruption de missions d’intérim et du gel des recrutements. En outre, les conditions d’éligibilité à l’allocation chômage ont été temporairement assouplies en début de crise. Ainsi, les droits des demandeurs d’emploi ont été prolongés, le contrôle de la recherche d’emploi a été suspendu et la durée d’affiliation minimale a été réduite à 4 mois.

Le nombre de bénéficiaires de l’ (ASS) s’est contracté, en mai 2020, sous l’effet de la prolongation des droits des chômeurs. Il a ensuite fortement augmenté, permettant à certaines personnes d’entrer dans le dispositif et de limiter leurs pertes de revenus. Il a atteint son niveau le plus haut avec 13 460 bénéficiaires fin septembre 2020, soit 10,1 % de plus que fin février 2020 (figure 1).

Figure 1Évolution mensuelle du nombre de bénéficiaires du RSA et de l’ASS en Bourgogne-Franche-Comté

(base 100 : fin février 2020)
Évolution mensuelle du nombre de bénéficiaires du RSA et de l’ASS en Bourgogne-Franche-Comté ((base 100 : fin février 2020))
Année Mois RSA ASS
Bourgogne-Franche-Comté Bourgogne-Franche-Comté
2019 janvier 98 109
février 98 108
mars 98 108
avril 98 108
mai 98 106
juin 98 105
juillet 98 105
août 97 106
septembre 98 101
octobre 98 101
novembre 99 100
décembre 99 99
2020 janvier 99 100
février 100 100
mars 101 99
avril 102 99
mai 104 97
juin 106 105
juillet 107 108
août 107 110
septembre 108 110
octobre 108 109
novembre 109 105
décembre 108 102
2021 janvier 107 98
février 106 96
mars 105
  • RSA : Revenu de Solidarité Active / ASS : Allocation Spécifique de Solidarité
  • Note : les données des derniers mois sont estimées et susceptibles d’être révisées.
  • Sources : Cnaf, Allstat FR6 et FR2, traitements DREES ; MSA ; Pôle emploi, FNA

Figure 1Évolution mensuelle du nombre de bénéficiaires du RSA et de l’ASS en Bourgogne-Franche-Comté

  • RSA : Revenu de Solidarité Active / ASS : Allocation Spécifique de Solidarité
  • Note : les données des derniers mois sont estimées et susceptibles d’être révisées.
  • Sources : Cnaf, Allstat FR6 et FR2, traitements DREES ; MSA ; Pôle emploi, FNA

Davantage de personnes bénéficiant du RSA

Les conséquences sociales de la crise se traduisent par une augmentation importante du nombre de bénéficiaires du (RSA). Il a crû de 8,5 % entre février et novembre 2020, pour culminer à 64 830 allocataires. Il a permis de compléter les ressources des foyers fragilisés financièrement par la détérioration du marché de l’emploi. En 2020, peu de personnes sont sorties de ce dispositif, car la crise n’a pas permis à leurs ressources de s’améliorer. En revanche, les nouveaux bénéficiaires du RSA ont été plus nombreux, en partie des personnes revenues dans le dispositif après en être sorties.

Ponctuellement, d’autres aides sociales liées aux ressources des ménages ont été davantage sollicitées. En 2020, un peu plus de personnes ont bénéficié de la pendant les confinements : + 1,1 % en mai et + 1,7 % en décembre par rapport au mois de février. Les entreprises ont massivement recouru au chômage partiel. Les ressources de certains salariés ont ainsi diminué, les rendant éligibles à cette prime.

Le nombre de bénéficiaires de l’ a surtout augmenté au second semestre 2020. Il a atteint son plus haut niveau en novembre avec 247 250 bénéficiaires, soit 6,3 % de plus qu’en février, en raison des pertes ponctuelles de revenus observées parmi certains ménages. Le nombre de bénéficiaires de l’aide au logement est toutefois en baisse de 2,5 % en un an (figure 2).

Figure 2Évolution mensuelle du nombre de bénéficiaires d’autres aides sociales en Bourgogne-Franche-Comté

(base 100 : fin février 2020)
Évolution mensuelle du nombre de bénéficiaires d’autres aides sociales en Bourgogne-Franche-Comté ((base 100 : fin février 2020))
Année Mois Prime d’activité Aides au logement Garantie jeunes
2019 janvier 87 101 97
février 93 102 97
mars 95 102 98
avril 95 102 100
mai 96 102 101
juin 97 101 104
juillet 96 99 104
août 97 99 104
septembre 98 101 103
octobre 99 104 105
novembre 100 105 103
décembre 101 105 99
2020 janvier 100 100 100
février 100 100 100
mars 100 100 95
avril 100 102 91
mai 101 102 84
juin 102 101 81
juillet 99 100 84
août 98 100 85
septembre 98 102 85
octobre 99 105 86
novembre 101 106 85
décembre 102 106 90
2021 janvier 100 98 92
février 100 97 95
mars 100 97
  • Note : les données des derniers mois sont estimées et susceptibles d’être révisées.
  • Sources : Cnaf, Allstat FR6 et FR2, traitements DREES ; MSA ; Pôle emploi, FNA ; I-Milo, traitement Dares.

Figure 2Évolution mensuelle du nombre de bénéficiaires d’autres aides sociales en Bourgogne-Franche-Comté

  • Note : les données des derniers mois sont estimées et susceptibles d’être révisées.
  • Sources : Cnaf, Allstat FR6 et FR2, traitements DREES ; MSA ; Pôle emploi, FNA ; I-Milo, traitement Dares.

L’impact social apparaît, dans la région, proche de la moyenne nationale

Après plus d’un an de crise, le RSA est encore très sollicité. Par rapport à février 2020, davantage de personnes de Bourgogne-Franche-Comté en bénéficient (+ 4,6 %) (figure 3).

La région subit à ce titre une dégradation de sa situation sociale proche de la moyenne nationale. Elle est la plus forte en Corse, en Île-de-France et en Provence-Alpes-Côte d’Azur, où le nombre de bénéficiaires du RSA progresse de plus de 6 %.

Certaines sont des régions très touristiques, très touchées par la crise dans ce secteur. La dégradation est la moins forte dans les DOM et les Hauts-de-France, régions où le recours au RSA est en temps habituel déjà important.

Figure 3Évolution du nombre de bénéficiaires de certaines aides sociales entre février 2020 et mars 2021

Évolution du nombre de bénéficiaires de certaines aides sociales entre février 2020 et mars 2021
Bourgogne-Franche-Comté France
Nombre de bénéficiaires en février ou mars 2021 (voir note) Évolution depuis février 2020 (%) Évolution depuis février 2020 (%)
Minima sociaux
ASS 11 700 - 4,3 - 3,8
RSA* 62 470 + 4,6 + 3,7
Ensemble 74 170 + 3,1 + 2,5
Autres aides sociales
Prime d’activité* 180 630 - 0,2 + 0,0
Aides au logement** 226 700 - 2,5 - 1,9
Garantie jeunes 2 840 - 4,9 + 3,3
  • RSA : Revenu de Solidarité Active / ASS : Allocation Spécifique de Solidarité
  • * tous régimes (Cnaf et MSA)
  • ** régime général (Cnaf), soit 97 % des allocataires
  • Note : le nombre de bénéficiaires est estimé pour mars 2021, sauf pour l’ASS et la Garantie jeunes (pour février 2021). L’évolution est calculée depuis février 2020.
  • Sources : Cnaf, Allstat FR6 et FR2, traitements DREES ; MSA ; Pôle emploi, FNA ; I-Milo, traitement Dares.

Le Jura, le Doubs et le Territoire de Belfort sont les départements les plus touchés dans la région

En un an, le nombre de personnes fragilisées financièrement et pouvant prétendre au RSA a augmenté le plus fortement dans le Jura, + 9 %, le Doubs, + 6 %, et le Territoire de Belfort, + 6 %.

La dégradation a été moins forte en Côte-d’Or et dans la Nièvre,+ 4 à 5 %. C’est en Haute-Saône, Saône-et-Loire et surtout dans l’Yonne qu’elle est la plus contenue, + 2 à 4 %.

Encadré - Les jeunes ont été particulièrement touchés par les conséquences de la crise sanitaire

Les étudiants subissent de plein fouet les conséquences économiques et sociales de la pandémie. Leurs conditions d’études ont été mises à mal. Les 84 700 étudiants de la région ont dû suivre une bonne partie des enseignements et même passer leurs examens à distance. Si habituellement, 25 % d’entre eux travaillent pendant leurs études, la crise a fragilisé leurs ressources en affectant les secteurs qui les emploient : commerce, restauration, animation culturelle et sportive. Certains jeunes ont eu beaucoup de difficultés à trouver des stages. Toutefois, certains ont pu bénéficier d’une aide financière, 4 étudiants sur 10 ont perçu une bourse sur critères sociaux. Par ailleurs, près de 40 % des étudiants vivent chez leurs parents, limitant ainsi leurs frais. Lorsqu’ils sont indépendants, 61 % bénéficient d’une aide au logement de la Caf. En outre, des mesures temporaires ont été prises afin de les soutenir. Depuis la rentrée 2020, les Crous ont mis en place des repas complets à 1 € dans les restaurants universitaires, d’abord réservés aux boursiers puis étendus à l’ensemble des étudiants. En Bourgogne-Franche-Comté, 420 000 repas ont été distribués à ce tarif entre septembre 2020 et mars 2021. Enfin, une aide spécifique ponctuelle (ASAP) a concerné quelques étudiants en formation initiale pour un montant total de 800 000 euros au premier trimestre 2021. Elle s’adresse à des étudiants, boursiers ou non, qui rencontrent d’importantes difficultés financières.

La crise a aussi grandement affecté les activités des missions locales en 2020 qui ont dû fermer lors du confinement du printemps 2020. Les entrées en , réservées aux jeunes en situation de grande précarité, ont alors été suspendues. Ensuite, avec la mise en place de protocoles sanitaires adéquats, leur nombre est reparti à la hausse, sans pour autant retrouver le niveau du nombre de bénéficiaires d’avant la crise.

Publication rédigée par :David Brion, Jean-François Louis (Insee)

Définitions

L’allocation de solidarité spécifique (ASS) est une allocation pour les demandeurs d’emploi ayant épuisé leurs droits à l’assurance chômage et qui justifient d’au moins cinq années d’activité salariée au cours des dix dernières années précédant la rupture de leur contrat de travail.

Le revenu de solidarité active (RSA) est une allocation qui s’adresse aux personnes d’au moins 25 ans ou assumant la charge d’au moins un enfant né ou à naître. Il complète les ressources du foyer pour qu’elles atteignent le seuil d’un revenu garanti, ou montant forfaitaire, dont le barème varie selon la composition familiale. Une majoration (RSA majoré) peut être accordée, sous condition et temporairement à un parent isolé assumant la charge d’enfant(s) ou à une femme enceinte isolée.

La prime d’activité est un complément de revenus d’activité s’adressant, sous conditions de ressources, aux travailleurs majeurs non étudiants percevant des revenus modestes, issus d’une activité professionnelle salariée ou non-salariée. Elle peut être temporairement majorée, sous les mêmes conditions que le RSA.

Les aides au logement sont l’aide personnalisée au logement (APL), l’allocation de logement familiale (ALF) et l’allocation de logement sociale (ALS). Elles ne sont pas cumulables et versées sous condition de ressources, en soutien des locataires, des résidents en foyer et des accédants à la propriété, dans leur effort financier pour se loger.

La Garantie jeunes s’adresse aux jeunes de 16 à 25 ans qui ne sont ni en emploi, ni en études, ni en formation et qui se trouvent en situation de précarité. Elle leur offre un accompagnement intensif assuré par une mission locale et souvent une allocation, pendant douze mois, et peut être prolongée pour une durée maximum de six mois.

Pour en savoir plus

Brion D., Simon ML., « Confinement du printemps 2020 : les plus modestes plus fragilisés », Insee Flash Bourgogne-Franche-Comté n° 124, mai 2021.