Insee Flash Grand EstLe chômage de 2003 à 2019 dans le Grand Est Les zones d’emploi de l’est moins touchées que celles de l’ouest

Isabelle Manné, Brigitte Martin (Insee)

Fin 2019, avant les fortes secousses de l'année 2020, le taux de chômage de la région est de 7,8 %, identique à son niveau de fin 2003. La région retrouve un paysage assez comparable à celui d’avant la crise économique et financière de 2008-2009. Seul le département de l’Aube fait exception. Son taux de chômage augmente sur la période 2009-2019 et notamment dans la zone d’emploi de Troyes.

Selon les territoires, les situations restent contrastées. Globalement, dans l’est et le centre de la région, les actifs sont moins touchés par le chômage qu’à l’ouest.

Insee Flash Grand Est
No 45
Paru le :Paru le12/01/2021
Isabelle Manné, Brigitte Martin (Insee)
Insee Flash Grand Est No 45- Janvier 2021

Au quatrième trimestre 2019, le nombre de chômeurs représente 7,8 % de la population active dans le Grand Est comme en France métropolitaine. Il s’agit du taux le plus faible depuis fin 2009, un an après le déclenchement de la crise financière en 2008. Fin 2019, le chômage retrouve son niveau de fin 2003 dans la région, alors qu’il baisse de 0,6 point en France.

Le Grand Est occupe une position intermédiaire parmi les régions de métropole. Le taux de chômage est le plus faible en Bretagne et le plus élevé dans les Hauts-de-France (respectivement 6,7 % et 10,0 %).

Un chômage élevé dans l’Aube et les Ardennes

Fin 2019, l’Aube a le le plus élevé. Il est de 10,1 %, ce qui est supérieur d’un point à son niveau de fin 2003. Les Ardennes sont le deuxième département le plus touché par le chômage, avec un taux de 9,6 %, malgré une baisse de deux points par rapport à fin 2003. La crise économique avait particulièrement affecté la Meuse, le Haut-Rhin et la Moselle, dont les taux de chômage avaient augmenté de deux points. Ces départements retrouvent fin 2019 des taux proches de la moyenne régionale.

Les Vosges, la Marne et la Meurthe-et-Moselle présentent des taux de chômage équivalents, voire légèrement inférieurs à ce qu’ils étaient fin 2003, respectivement 8,6 %, 7,5 % et 7,7 %. C’est en Haute-Marne et dans le Bas-Rhin que le taux de chômage est le plus bas : 6,8 %. Ces deux départements ont toutefois évolué de manière différente. Dans la Haute-Marne, le taux de chômage recule de 1,4 point entre 2003 et 2019, essentiellement en raison d’une baisse de la population active, tandis que le Bas-Rhin retrouve son niveau d’avant la crise.

Un taux de chômage plus marqué dans les zones d’emploi de l’ouest de la région

Le nouveau découpage des de 2020 distingue vingt-sept zones dans la région.

Fin 2019, la carte régionale des taux de chômage fait apparaître des disparités marquées entre zones d’emploi : le taux de chômage varie de 5 % (Épernay) à 12,5 % (Forbach). La crise de 2008-2009 a fortement touché la région et notamment les zones riches en emplois autour des grandes agglomérations de Metz, Nancy et Strasbourg. Dix ans plus tard, à l’exception des zones d’emploi de Sedan, Troyes, Saint-Avold et Sarreguemines, le paysage régional retrouve sa situation de fin 2003 (figure 1).

Face au chômage, la partie ouest de la région s’avère à nouveau dans une position relativement plus défavorable. Parmi les onze zones affichant un taux de chômage supérieur à 8 %, sept se situent à l’ouest du territoire. Dans les zones d’emploi de Troyes et de Charleville-Mézières, où la population active a augmenté et le nombre d’emplois a baissé, les taux de chômage sont supérieurs à 10 %.

Depuis 2008 et jusqu’à fin 2016, la zone d’emploi de Troyes a perdu 3 600 emplois salariés, soit une baisse de 4 %, essentiellement dans l’industrie et la construction. Le taux de chômage n’a cessé de croître jusqu’à atteindre 12,4 % en 2016. Sa baisse récente n’a pas permis de retrouver le niveau d’avant-crise.

En revanche, dans les zones d’emploi d’Épernay, Châlons-en-Champagne et Bar-le-Duc, le taux de chômage est inférieur à la moyenne régionale. Épernay se caractérise par une part de l’emploi dans l’agriculture dix fois supérieure à celle de la région dans son ensemble. Dans les deux autres zones, les emplois du tertiaire non marchand, moins exposés aux variations conjoncturelles, représentent près de la moitié des emplois.

Taux de chômage localisés par zones d’emploi

Figure 1Fin 2019, des taux de chômage proches de ceux de fin 2003 sauf dans l’AubeTaux de chômage localisés par zones d’emploi* au 4ᵉ trimestre 2003 (en %)

Fin 2019, des taux de chômage proches de ceux de fin 2003 sauf dans l’Aube
code regroupement T4 2003
BE32 Wallonie 10,9
BE33 Wallonie 10,9
BE34 Wallonie 10,9
BE35 Wallonie 10,9
CH Suisse du Nord-Ouest 4,2
DE12 Bade-Wurtemberg 6,2
DE13 Bade-Wurtemberg 6,2
DEB1 Rhénanie-Palatinat 7,6
DEB2 Rhénanie-Palatinat 7,6
DEB3 Rhénanie-Palatinat 7,6
DEC0 Sarre 9,1
LU00 Luxembourg 3,5
0056 Cosne-Cours-sur-Loire 7,3
1102 Coulommiers 6,3
1107 Meaux 6,5
1110 Provins 8,2
2702 Auxerre 7,5
2703 Avallon 7,2
2705 Belfort 8,4
2706 Besançon 7,2
2709 Châtillon-Montbard 6,4
2711 Dijon 7,3
2714 Montbéliard 10,5
2717 Sens 8,4
2718 Vesoul 6,4
3208 Cambrai 9,4
3209 Château-Thierry 8,7
3214 Laon 8,8
3217 Maubeuge 13,4
3220 Saint-Quentin 10,9
3221 Soissons 8,6
3222 Valenciennes 12,6
4401 Bar-le-Duc 7,0
4402 Châlons-en-Champagne 6,3
4403 Charleville-Mezières 12,8
4404 Chaumont 7,4
4405 Colmar 5,8
4406 Epernay 5,2
4407 Epinal 8,5
4408 Forbach 12,8
4409 Haguenau 6,0
4410 Metz 7,4
4411 Mulhouse 8,0
4412 Nancy 7,5
4413 Reims 8,8
4414 Remiremont 7,9
4415 Romilly-sur-Seine 8,7
4416 Saint-Avold 8,2
4417 Saint-Dié-des-Vosges 10,0
4418 Saint-Louis 5,4
4419 Sarrebourg 6,4
4420 Sarreguemines 8,0
4421 Sedan 10,7
4422 Sélestat 5,8
4423 Strasbourg 7,4
4424 Thionville 7,7
4425 Troyes 9,1
4426 Verdun 8,0
4427 Vitry-le-François Saint-Dizier 9,6
  • * Zone d’emploi (FR), Région (BE), Land (DE), Pays (LU), Suisse du Nord-Ouest (CH).
  • Source : Insee, taux de chômage localisés.

Figure 1Fin 2019, des taux de chômage proches de ceux de fin 2003 sauf dans l’AubeTaux de chômage localisés par zones d’emploi au 4ᵉ trimestre 2003 (en %)

  • Source : Insee, taux de chômage localisés.

Un taux de chômage plus faible et plus homogène à l’est et au centre

À l’est et au centre de la région, les taux de chômage s’avèrent plus homogènes et en général inférieurs à la moyenne régionale. Dans les zones d’emploi de Haguenau et de Sélestat, les taux de chômage sont faibles (respectivement 5,3 % et 5,9 %) et l’emploi progresse entre 2009 et 2017 (respectivement + 1,9 % et + 3,1 %), notamment dans le secteur tertiaire. Parmi les zones d’emploi situées le long du Rhin, Mulhouse est la seule à avoir un taux de chômage élevé (9,1 %). Il est proche de celui des zones frontalières voisines de Belfort et Montbéliard, mais supérieur de trois points aux zones limitrophes alsaciennes de Colmar et de Saint-Louis. La perte de 6 000 emplois salariés dans l’industrie entre 2009 et 2017, en grande partie dans l’automobile, n’a pas été compensée par des créations d’emplois dans d’autres secteurs ou par des emplois frontaliers en nombre suffisant.

Dans la zone frontalière de Forbach, l’emploi baisse de 7 %. Le nombre d’emplois diminue simultanément dans l’industrie, la construction et le tertiaire, d’où un taux de chômage qui s’établit à 12,5 %, le plus élevé de la région.

Dans les trois zones couvrant les Vosges, le chômage touche entre 7,9 % (Remiremont) et 10,7 % (Saint Dié-des Vosges) de la population active.

Les zones d’emploi correspondant aux grandes agglomérations de Strasbourg, Metz et Nancy présentent un taux de chômage proche de la moyenne régionale et retrouvent fin 2019 leur niveau d’avant-crise. Dans la zone de Strasbourg, 14 500 emplois ont été créés entre 2009 et 2017, soit une hausse de 4,6 %.

Encadré 1- Une hausse des demandeurs d’emploi en 2020 surtout à l’est de la région

En 2020, le marché du travail a été lourdement affecté par le confinement puis le déconfinement. Depuis la fin 2017, le nombre de demandeurs d’emploi tenus de rechercher un emploi (catégories A, B, C) est en baisse continue. Au 2e trimestre 2020, ce nombre croît fortement (+ 6,2 %) pour s’infléchir à nouveau au 3e trimestre (- 0,3 %), signant le début du rebond de l’activité.

Sur une année, la hausse s’élève à 4 %. L’est de la région a subi les plus fortes évolutions : + 6,8 % dans le Haut-Rhin, + 5,2 % dans le Bas-Rhin, alors que les hausses sont moindres dans les Vosges, la Haute-Marne et l’Aube (+ 1,4 %, + 1,5 % et + 2,2 %),

Les variations se révèlent plus marquées pour la catégorie A (demandeurs d’emploi n’exerçant aucune activité). La hausse est de 8,6 % par rapport au troisième trimestre 2019 dans le Grand Est, et même supérieure à + 10 % dans le Haut-Rhin, le Bas-Rhin et la Marne.

Figure 2Nombre de demandeurs d’emploi inscrits à Pôle Emploi au 3ᵉ trimestre 2020

Nombre de demandeurs d’emploi inscrits à Pôle Emploi au 3ᵉ trimestre 2020
catégories A, B, C dont catégorie A
Effectifs au 3ᵉ trimestre 2020 Evolution sur 1 an (%) Effectifs au 3ᵉ trimestre 2020 Evolution sur 1 an (%)
Région Grand Est 468 830 + 4,0 301 810 + 8,6
Ardennes 25 320 + 2,5 16 590 + 7,6
Aube 30 560 +2,2 19 950 +5,2
Marne 49 000 + 3,5 30 010 + 10,3
Haute-Marne 13 410 + 1,5 8 070 + 8,8
Meurthe-et-Moselle 58 190 + 4,0 38 030 + 6,7
Meuse 14 210 + 2,8 8 990 + 6,1
Moselle 87 660 + 3,9 57 360 + 7,6
Bas-Rhin 93 250 + 5,2 59 010 + 10,0
Haut-Rhin 65 740 + 6,8 44 090 + 13,2
Vosges 31 480 + 1,4 19 710 + 4,7
France métropolitaine 5 783 800 + 4,7 3 673 400 + 9,5
  • Source : STMT - DARES, Pôle emploi.

Encadré 2 - Partenariat

L’étude a été réalisée dans le cadre d’un partenariat entre la Direction régionale de l’Insee Grand Est et la Direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi du Grand Est.

Définitions

La méthode d'estimation des taux de chômage localisés repose sur l’estimation d'une part du chômage (numérateur) et, d’autre part, de l'emploi (une partie du dénominateur), par zone d'emploi et par département.
Le numérateur est obtenu, chaque trimestre, à partir du nombre de chômeurs national issu de l’enquête Emploi, ventilé aux différents niveaux géographiques à partir de la structure des demandeurs d’emploi en fin de mois inscrits à Pôle emploi (DEFM).
Quant à l'emploi, il s'appuie principalement sur les Estimations d’emploi localisées, issues des déclarations sociales des entreprises.
Le taux de chômage localisé est finalement calculé en rapportant le nombre de chômeurs à la population active (somme du nombre de chômeurs et de l'emploi) ainsi estimés.

Une zone d’emploi est un espace géographique à l’intérieur duquel la plupart des actifs résident et travaillent. Le découpage a été actualisé en 2020 et se fonde sur les déplacements domicile-travail des actifs observés lors du recensement de 2016.

Les demandeurs d'emploi en fin de mois (DEFM) sont les personnes inscrites à Pôle Emploi et ayant une demande en cours au dernier jour du mois. Ceux tenus de rechercher un emploi sont classés en catégorie A (sans activité réduite), B (activité réduite courte, ayant travaillé moins de 78 heures sur un mois) ou C (activité réduite longue, ayant travaillé plus de 78 heures sur un mois).

Pour en savoir plus

Clément L. et al., « La région n’a pas retrouvé son niveau d’avant-crise », Insee Conjoncture Grand Est n° 24, octobre 2020.

Manné I., Vuillier-Devillers F., « Une orientation industrielle encore marquée dans les zones d’emploi du Grand Est », Insee Analyses Grand Est n° 120, septembre 2020.